Sayfadaki görseller
PDF
ePub

Saint Ambroise admet la création simultanée (1) de la même manière que saint Basile, c'est-à-dire en acceptant la distinction réelle des jours, contrairement à Origène. Au commencement Dieu crée la substance du monde, cardines rerum (2), comme il l'appelle. On peut entendre dans deux sens différents le premier verset de la Genèse. Selon les uns, il est comme le sommaire de tout le chapitre, «<< ut ibi I, 1, quasi summa operis breviter comprehensa sit, >> et les versets suivants sont le développement de ce sommaire, «< hic, I, 7 sq. operationis qualitas per ipsas concurrentium rerum digesta sit species » dit-il. L'évêque de Milan n'approuve pas cette opinion: «< Nec fallit quod aliqui ante nos ita acceperint (3). » D'après lui, il faut interpréter le premier verset dans ce sens que Dieu crée tout d'abord les éléments de l'univers, la matière première; elle est ensuite transformée, coordonnée et disposée pendant les six jours génésiaques.

Le docteur de l'Église latine dont les idées ont exercé l'influence la plus profonde, ce n'est pas saint Ambroise, mais celui qu'il avait ramené dans le giron de l'Église catholique, le grand saint Augustin (354-430). L'évêque d'Hippone est peut-être celui de tous les anciens écrivains ecclésiastiques qui s'est le plus occupé des premiers chapitres de la Genèse et de la création. Tandis que son illustre contemporain, saint Jérôme, si célèbre par sa vaste érudition et par ses travaux exégétiques, a touché à peine en

admirent, en particulier, son tableau de la mer. M. Nourrisson l'a traduit dans les Pères de l'Église latine, 1856, t. 1, p. 275-278. Hexaemeron, l. III, c. v, no 21 et suiv., Migne, Patr. lat., t. xiv, col. 164 et suiv.

(1) Il dit, parlant du ciel et de la terre : « Cum simul utrumque sit factum » 1. I, c. vi, no 24; col. 135. Au no 20, col. 132, il dit que Dieu fitla terre, « in qua esset generationis substantia, » et il ajoute, parlant du ciel et de la terre: «In his enim quatuor illa elementa creata sunt, ex quibus generantur omnia ista quæ mundi sunt. Elementa autem quatuor, aer, ignis, aqua et terra, quæ in omnibus sibi mixta sunt. »

(2) Hexaem., 1. 1, c. vII, no 25, col. 135.

(3) S. Ambros. Hexrem., 1. 11, c. III, n. 8, col. 148.

passant aux questions cosmogoniques, saint Augustin a écrit trois commentaires sur l'Hexaméron (1) et il y est revenu dans le livre XIe de la Cité de Dieu et dans les trois derniers livres (XI-XIII) de ses Confessions, sans parler de quelques autres écrits. Son œuvre la plus importante sur ce sujet, ce sont les douze livres De Genesi ad litteram qui forment le travail le plus complet que nous ait légué l'antiquité sur la création.

Saint Augustin avait un sentiment profond de la nécessité où est le théologien de se servir de la science pour expliquer l'œuvre divine, et il s'élevait avec force contre les chrétiens qui, sous prétexte d'orthodoxie, niaient les vérités scientifiques (2). Que n'aurait pas fait cet esprit si vaste

(1) De Genesi contra Manichæos; De Genesi ad litteram imperfectus liber; De Genesi ad litteram libri XII. Voir sur l'imperfectus liber le curieux passage des Rétractations, 1. 1, 18, qui s'y rapporte et qui montre combien la Genèse attirait fortement S. Augustin. S. Augustini Opera, édit. Gaume, t. III, col. 155.

(2) De Genesi ad litteram, l. 1, C. XIX, no 39, Opera, édit. Gaume, t. III, col. 219-220. Ce passage a été reproduit par M. de la Vallée Poussin, La certitude en géologie, Revue des questions scientifiques, janvier 1879, p. 8-9. S. Augustin voulait qu'on prît bien garde de ne pas donner comme le sentiment des Écritures ses opinions personnelles. Ce qu'il dit là-dessus au c. XIX, il l'avait dit non moins fortement au c. XVIII, no 37, col. 219: « In rebus obscuris atque a nostris oculis remotissimis, si qua inde scripta etiam divina legerimus, quæ possint salva fide qua imbuimur alias atque alias parere sententias; in nullam earum nos præcipiti affirmatione ita projiciamus, ut si forte diligentius discussa veritas eam recte labefactaverit, corruamus; non pro sententia divinarum Scripturarum, sed pro nostra ita dimicantes, ut eam velimus Scripturarum esse, quæ nostra est.» Voir ibid., 1. II, c. XVI, no 33, col. 241, comment il admet qu'on puisse soutenir qu'il y a des étoiles plus grandes que le soleil, malgré les passages en apparence contraires de la Bible. - S. Thomas s'est approprié la pensée de S. Augustin sur la réserve avec laquelle le théologien doit traiter les questions scientifiques, et il l'a exprimée dans les termes suivants qui méritent d'être rapportés : «Sicut Augustinus docet, in hujusmodi quæstionibus duo sunt observanda. Primo quidem ut veritas Scripturæ inconcusse teneatur. Secundo, cum Scriptura divina multipliciter exponi possit, quod nulli expositioni aliquis ita præcise inhæreat, ut si certa ratione constiterit hoc esse falsum quod aliquis sensum Scripturæ esse credebat, id nihilominus asserere præsumat; ne Scriptura ex hoc ab infidelibus derideatur et ne eis via credendi præcludatur. » Summa. th. 1,

[graphic]

et si ouvert, s'il avait pu mettre à profit les découvertes des savants contemporains! Malheureusement, les connaissances scientifiques de son époque étaient très défectueuses et, quelque pénétrant que fût son génie, il ne lui était pas donné d'en combler les lacunes et d'en rectifier les erreurs. La science doit ses progrès aux observations et aux travaux accumulés de générations de savants et un seul homme n'en peut sonder tous les secrets.

:

L'évêque d'Hippone a peint d'une manière saisissante dans ses Confessions l'intérêt passionné qu'éveillait en lui le mystère de la création. « Faites-moi écouter et comprendre comment Dieu a fait dans le principe le ciel et la terre. Voilà ce qu'a écrit Moïse; il a écrit cette parole et il est disparu il a passé de cette terre auprès de vous, ô mon Dieu, et il n'est plus maintenant en ma présence, car s'il y était, je le retiendrais, je l'interrogerais, je le conjurerais de m'expliquer ses paroles... Mais puisque je ne peux pas l'interroger, c'est vous, ô Vérité, qui l'inspiriez quand il disait vrai, c'est vous, mon Dieu, que j'implore: pardonnez à mes péchés, et comme vous avez donné à votre serviteur le don de dire ces choses, accordez-moi de les comprendre (1). »

Une partie des idées de saint Augustin sur la création est empruntée aux anciens Pères, et en particulier à Philon et à Origène; mais son génie s'est approprié les pensées qu'il a puisées ailleurs et il les a transformées en leur imprimant son cachet personnel. Il a pris aux Alexandrins leur théorie de la création simultanée et il l'a rendue sienne par la manière dont il l'a comprise et exposée. C'est là le point le plus important et le plus célèbre de son Hexameron.

q. 68. a. 1.

Sur le passage de S. Augustin lui-même, on peut voir le commentaire qu'en fait le cardinal Franzelin, Tractatus de divina traditione et scriptura, 2a edit. 1875, Symbole animadversionum, p. 731.

(1) Confess., 1. xi, c. III, no 5, t. I, col. 331-332. Trad. Nourrisson, Philosophie de S. Augustin, 1865, t. 1, p. 325, ou Nourrisson, Les Pères de l'Église latine, II, 10, t. 1, 1856, p. 359.

Dieu a créé le monde en un instant (1), mais pour s'accommoder à la faiblesse de notre esprit, il a trouvé bon de nous représenter la création comme accomplie dans le temps.

«La matière informe, dit-il, n'a point précédé dans les temps les choses formées; car tout a été créé simultanément, et la matière dont les choses ont été faites et les choses qui ont été faites. De même effectivement que la voix est la matière des mots et que les mots indiquent le son qui est formé, tandis néanmoins que celui qui parle ne commence point par émettre un son informe, pour ensuite le recueillir et en former des mots; de même, Dieu créateur n'a point fait dans un temps antérieur la matière informe, pour reprendre ensuite en quelque façon son ouvrage et le former en disposant les natures dans leur ordre. Il a créé la matière toute formée (2). » Il est impossible d'exprimer en termes plus clairs et plus précis la théorie alexandrine de la création simultanée.

« Vos œuvres, ô mon Dieu, s'écrie encore saint Augustin, ont été faites par vous de rien, mais non de vous, non de quelque matière qui ne viendrait pas de vous et qui existerait antérieurement, mais d'une matière créée en même temps par vous; oar, sans aucun intervalle de temps, vous avez donné à cette matière la forme avec l'être. Autre chose étant la matière du ciel et de la terre, autre chose leur forme, vous avez fait la matière de rien et la forme de la matière, et l'une et l'autre ensemble, de telle sorte que

(1) S. Augustin entend par le ciel et la terre mentionnés dans le 1er verset de la Genèse toutes les créatures: Cali et terræ nomine universa creatura significata est: Conf. 1. xI, c. XII, no 14, t. I, col. 337, Ibid. De Gen. cont. Manich. 1. II, c. vi, no 7, col. 1080 et passim.

(2) De Genesi ad litt., 1. 1, c. xv, n. 29, t. III, col. 214. Trad. Nourrisson. Philos. de S. Aug. t. 1, p. 367. « Formatam quippe creavit materiam; sed quia illud unde fit aliquid, etsi non tempore, tamen quadam origine prius est quam illud quod inde fit, potuit dividere Scriptura loquendi temporibus, quod Deus faciendi temporibus non divisit. Ibid., col. 215. Cf. Conf. 1. XII, c. XXIX, n° 40, col. 376, t. I.

la forme suivît la matière sans aucun intervalle de temps (1). >>

Cependant la création, entière dès l'origine, ne s'en développe pas moins dans le temps : « L'univers tout entier a été à l'origine en semence, non point avec la masse d'une grandeur corporelle, mais à l'état de force et de puissance causatrice... Comme dans un grain se trouve invisible tout ce qui, par le laps du temps, finit par devenir un arbre, ainsi faut-il s'imaginer que le monde, lorsqu'il a été créé de Dieu, renfermait en lui-même tout ce qui devait plus tard se manifester... Dieu, par conséquent, ne crée rien ultẻrieurement, mais, ayant créé toutes choses à la fois, il les gouverne, les meut par son action dirigeante, si bien qu'il opère sans cesse, se reposant et opérant à la fois (2). »

La création est comme le langage de Dieu, et le langage de Dieu peut se comprendre par analogie avec le langage humain. Or, lorsque nous entendons parler un homme, son langage résulte pour nous d'une succession de syllabes, et pourtant dans les paroles qu'il prononce, il n'y a pas deux syllabes qui puissent sonner en même temps. Combien moins pouvons-nous concevoir que toutes choses aient été produites simultanément dans l'acte même par lequel toutes choses ont été créées simultanément (3)!

Saint Augustin voit la preuve de la création simultanée dans ce passage de l'Ecclésiastique: Qui manet in æternum creavit omnia simul. Il entend simul de la création simultanée (4). Toutefois le motif sur lequel il revient le plus

Trad. ib.,

p. 366.

(1) Confess. XIII, c. xxxIII, no 48, t. 1, col. 408. (2) De Genesi ad litt. 1. v, c. xxIII, no 45-46, col. 321-322. Trad. ib., p. 374. (3) De Genesi ad litt. VI, c. III, no 4, col. 325. Ibid., p. 374.

(4) S. Aug. De Genesi imperf. liber, c. vII, no 28, t. III, col. 171-172; De Gen. ad. litt. 1. iv. c. xxxIII, n. 52, col. 296, et l. v, c. III, n. 6, col. 303. Le texte de l'Ecclésiastique est en grec, xvIII, 1: "Extiσe tà távta noivņ. Le texte hébreu est perdu. On explique le mot zowy, rendu par simul dans notre Vulgate, de plusieurs manières. Dans le sens de S. Augustin, mais sans nier la distinction des jours, c'est-à-dire en adoptant l'opinion de S. Ambroise, etc. Dans le sens de pareillement, sans exception, etc. Voir Cornelius à Lapide in locum, édit. Vivès, p. 499.

« ÖncekiDevam »