Sayfadaki görseller
PDF
ePub

Leurs opérations et les prodiges de leur art sont décrits en excellens vers techniques. Pierre s'entretient aussi avec des ministres de la religion. Il admire cette tolérance générale dont jouit la Hollande.

Pour de vains argumens le Batave autrefois
Egorgea des martyrs par le glaive des lois.
Il déteste aujourd'hui cette affreuse maxime;
L'erreur de la pensée a cessé d'être un crime.
Unitaires, Hébreux, Romains, Grecs, Anglicans,
Chacun à son autel fait fumer son encens.

Là, tous ces ennemis sont un peuple de frères;
L'Etat, qui les soumet à des lois nécessaires,
En les réprimant tous, sait tous les protéger:
Il abandonne au Ciel le soin de les juger.

Cependant la construction du vaisseau est terminée. Il est lancé à la mer. Le bruit et le bouillonnement des flots pénètrent dans les grottes où le vieil Océan repose. Il se léve; les flots s'appaisent à son aspect. Les vents retiennent leur haleine.

Tout se tait, l'air, les Cieux, les bords, l'humide plaine.
La Nature en silence a dans le Dieu des mers,
Connu l'antique roi de l'antique Univers..
De sa main immortelle il toucha le navire,
Et dit: « Je te reçois au sein de mon Empire,
Vaisseau sacré, bâti de la main d'un héros.
Que sous ton pavillon la mer courbe ses flots;
Sois respecté des vents et commande à l'orage: etc.

Il prédit la puissance navale que doit bientôt déployer la Russie, et qu'elle devra au génie de son souverain; et il rentre avec majesté sous la voûte des flots. Le héros flatté de cet augure, s'apprête à partir; mais il ne peut quitter ce rivage sans revoir son heureuse cabane, et saus s'attendrir à cette vue. Le chant finit par des vers touchans que le poëte adresse à ce monument sacré du séjour et des travaux d'un grand homme. G.

(La suite au numéro prochain. )

LITTÉRATURE. —THÉATRE.

JEANNE D'ARC ou la Pucelle d'Orléans, tragédie en cinq actes.- Auteur, FRÉDÉRIC SCHILLER, poëte allemand. - Traducteur, CH. FRED. CRAMER.-Editeur, L. S. MERCIER, de l'institut national. A Paris, chez Cramer, rue des Bons-Enfans, no 12; Henrichs, rue de la Loi, n° 1231; Moussard, rue Helvetius; Vente, boulevard Italien. An X. 1802.

On avait cru jusqu'ici que Sophocle et Euripide, chez les Grecs; chez les Français, Corneille, Racine, Voltaire avaient porté la tragédie à un certain degré de perfection. Toute l'Europe était d'accord de la supériorité de notre théâtre. Les étrangers, hommes de goût, l'accusaient bien d'un peu de timidité; ils lui reprochaient beaucoup de récits, de déclamations, peu de mouvement et encore moins d'action; et une partie de ces reproches pouvait être fondée; mais ils avouaient en même tems qu'aucune nation moderne ne peut citer rien de comparable à nos chefs-d'œuvre dramatiques.

Si jamais un étranger les égale, ce ne sera pas en prenant la route que suit Frédéric Schiller.

La tragédie de Jeanne d'Arc est en prose et en six actes. Car il y a un prologue qui peut passer pour un premier acte de la pièce. On y voit Thibaut d'Arc, laboureur, avec ses trois filles qui ont chacune leur amoureux. Le père veut faire les trois noces à la fois; deux des filles acceptent volontiers; Jeanne, la troisième, ne dit mot, et pourtant ne consent pas. Bertrand, jeune paysan, apporte un casque; une bohémienne le lui a laissé dans les mains à la foire, et a disparu tout d'un coup. Jeanne sort alors de sa rêverie, et s'écrie: A moi le casque!

BERTRAND.

Quoi! à vous cette armure? ce n'est point l'ornement des têtes virginales!

JEANNE (arrachant le casque.)

Il est à moi! A moi le casque est dû!

THIBAU T.

Quelle fantaisie il te prend, ma fille!

On voit comme cela est sublime, et noblement exprimé. Jeanne fait ensuite un petit bout de prophétie, et ra- \ conte comme quoi la Sainte Vierge lui est apparue, lui a commandé d'aller délivrer Orléans, et surtout d'être bien sage et de faire encore moins d'enfaus que sa protectrice. Elle part après cela, et quitte son viilage pour aller au camp du roi charles VII.

Ce qu'il y a de singulier, c'est que le noeud de la tragédie est précisément le même que celui du poëme dẹ Voltaire; tout tient à la sagesse de Jeanne.

C'est des Troyens le beau Palladium,

Le bouclier sacré du Latium.

Enfin pour être toujours victorieuse, il faut qu'elle reste exactement fille, et qu'elle ne devienne point amoureuse d'un homme.

Cela va bien jusqu'à la fin du troisième acte; elle a fait lever le siége d'Orléans, et mis en fuite les ennemis; mais voici le mal. Elle se bat corps à corps (sur la scène ) avec Lionnel, chevalier anglais; elle lui arrache son épée et son casque; elle est près de le tuer en lui disant :

[ocr errors]

Résigne-toi à ce que tu es venu témérairement chercher. La vierge sacrée va t'immoler par ma main. »

En ce moment (je transcris littéralement la pantomime) elle le voit en face; à son aspect, elle est saisie d'amour; elle reste immobile et laisse lentement baisser son épée. Depuis cet instant, et par ce desir seul (car les choses ne vont pas plus loin entre elle et Lionnel) la pauvre Jeanne perd sa vertu miraculeuse; elle ne gagne plus de batailles; elle ne fait plus de prédictions; elle est battue à son tour; il vient un certain chevalier noir qui appåremment est le Diable, pour lui aumoncer une fin déplorable; elle s'y résigue; enfin elle est assassinée par la

reine Isabeau de Bavière; mais elle se repent, et l'on peut espérer son salut, à en juger par les dernières paroles qu'elle prononçe :

Que suis-je? où suis-je ? Des nuages légers me sou» lèvent; cette lourde cuirasse se métamorphose en ailes! » Sus! sus! la terre fuit sous mes pas! la douleur est passée; la joie éternelle m'attend. » Ainsi soit-il.

Cette pièce ne durerait guères que cinq à six heures à la représentation; il y a dix ou douze changemens de décoration, cinq ou six batailles, évolutions militaires, combats singuliers, marches, processions, couronnement du roi à Rheims, son des cloches, canon, grand décor, costumes, etc... . . enfin de quoi former une douzaine de ces belles pantomimes de nos théâtres des boulevards (1).

Mais si l'on desirait par hasard du bon sens, de l'intérêt, des caractères soutenus, des situations dramatiques, des scènes bien conduites, des sentimens vrais et bien exprimés, il faudrait chercher tout cela ailleurs. La burlesque audace de Bergerac était pure timidité auprès de toutes ces bizarres et ridicules inventions.

L'éditeur nous assure dans la préface que ce galimathias soi-disant tragique est un chef-d'œuvre. S'il n'a pas lu l'ouvrage avant de le louer ainsi, il a tort; s'il l'a lu, il nous semble qu'il a bien plus grand tort..

MÉLANGES.

DE LA CONSIDERATION.

LA considération est un témoignage de déférence, d'estime et de respect que l'on offre au mérite, au talent,

(1) On a joué, il y a quelques années, la Pucelle d'Orléans', pantomime à grand spectacle, sur le théatre de Nicolet; elle eut beaucoup de succès; je ne l'ai pas vue; mais il est probable qu'elle valait bien la pièce de Schiller; elle avait, à coup sûr, un grand défaut de moins; le dialogue n'en était pas ridicule; on n'y parfait pas.

la vertu. On entend aussi par ce mot la bonne réputation qu'un homme s'est acquise par ses qualités louables ou l'espèce d'éclat que répand sur lui la place qu'il occupe, le pouvoir dont il jouit, la fortune qu'il possède. C'est dans ce dernier sens qu'on dit de lui que c'est un homme de considération.

Si cette définition est exacte, comme je le crois, et si l'on admet les deux acceptions, que de personnes sont considérées qui ne sont pas dignes de l'être! La considé ration est une sorte d'impôt que le crédit et les richesses lèvent sur le besoin et sur la médiocrité; or qu'est-ce que la plupart des gens en crédit? qu'est-ce que la plupart des gens riches?

La considération est réellement due à l'homme de mérite ou de talent: que reçoit-il en échange? Des égards protecteurs de la part de ceux qui se croient au-dessus de lui; une déférence stupide de la part du vulgaire. Celui-ci l'entoure, le regarde, l'écoute et semble tout étonné de ce qu'il a le nez placé au-dessous du front; ceux-là croient avoir fait beaucoup pour lui lorsqu'ils lui ont adressé la parole dans un sallon, ou qu'ils l'ont admis à l'honneur de faire sa cour. Quant à l'homme vertueux, toute la considération qu'on lui accorde, c'est de n'en point. dire du mal, si toutefois on s'occupe de lui. Mais on se garde bien de le recevoir eu bonne compagnie; il y serait maussade, ennuyeux, importun, déplacé.

Ce que nous appelons la considération et ce qui l'est en effet dans nos moeurs actuelles, se gradue en proportion du plus ou du moins de fortune qu'un homme étale. Celui qui ne dépense que vingt-cinq mille francs par an est bien moins considéré que celui qui en dépense cent. C'est sous ce rapport que j'ai vu jouir de la plus haute considération un financier fameux, dont tout le mérite était dans la tête et dans les doigts de son caissier, mais qui avait le meilleur cuisinier de Paris et la table de France la mieux servie. C'est sous ce rapport que dans un cercle, dans un bal, dans un lieu public, la femme la

« ÖncekiDevam »