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été insultés dans un jardin public, parce qu'ils portaient des collets et des cravates vertes, considérant que ce genre de costume n'est défendu par aucun · décret de la Convention nationale, par aucun arrêté des Comités de gouvernement, que la nécessité où la police s'est trouvée de faire arrêter quelques hommes ainsi vêtus tient aux individus et non pas au costume, invite les bons citoyens à étouffer ce nouveau germe de discorde que l'on voudrait semer entre eux, et à maintenir de tout leur pouvoir la tranquillité si nécessaire dans un moment où la Convention nationale s'occupe sans relâche de donner au peuple français une Constitution sage, qui doit faire cesser à jamais l'anarchie, fermer les plaies de la patrie, faire respecter les personnes et les propriétés, et assurer sur des bases durables le gouvernement républicain. »

Ces muscadins à collets verts, qu'on appela d'abord la jeunesse dorée de Fréron, on voit dans les rapports de police que c'étaient des jeunes gens réfractaires au service militaire, qui s'étaient soustraits à la première réquisition. D'abord, ils furent les agents de Fréron et des thermidoriens de droite contre les thermidoriens de gauche. Puis, s'étant royalisés, mais gardant le masque républicain, ils s'attaquèrent à tous les républicains suspects d'opinions démocratiques, et enfin même aux républicains modérés et bourgeois. A la fin de la période thermidorienne, sans se dire royalistes, ils opéraient si visiblement au profit des Bourbons que les patriotes

considéraient la victoire de Quiberon et la paix avec l'Espagne comme une défaite pour ces incroyables. Voici comment Louvet se moqua d'eux à ce sujet, dans la Sentinelle du 13 thermidor an III : « Ces beautés qui dansaient doivent avoir reçu maintenant la grande nouvelle (celle de l'affaire de Quiberon), et n'avoir pas plus envie de danser que n'avaient envie de rire, le soir du 9 thermidor, quelques détachements du Royal-Cravate, qui tristement groupés dans les foyers des différents spectacles, disaient entre eux : « Impossible, la nouvelle ! impossible, << inventée ! les thé-midoriens pour leu-fête! Incoyable, ce petit M. Tallien! inc-oyable! Un homme <«< de-ien! té-o-iste aussi ! de la faction! Faut pou-tant «<a-êter ça! Faud-a ben! La jeunesse aux a-mes! sans quoi la té-eur! pa-ole panachée; la té-eur. Ces << b-aves déba-qués se se-aient jamais rendus sans << la té-eur! C'est la té-eur que ça ! la té-eur que ça! « la té-eur!». Aujourd'hui ils disent: « L'Espagne ! « la paix ! enco-e une fable! Un Bou-bon! la paix, un << Bou-bon!impossible... ou bien ce se-ait donc enco-e « la té-eur! faut pou-tant voir! la jeunesse! Faut « a-êter ça! Car enfin nous ne voulons pas de la <<< té-eur ! »>

«

C'est au café des Canonniers, ci-devant café de Chartres, que cette jeunesse dorée, que ces muscadins s'assemblaient pour se concerter. Ils s'organisaient presque militairement. « Les bataillons de la jeunesse dorée, dit l'Ami du peuple du 29 plu-viôse an III, se divisent en trois armées : l'une

parcourt les sections; l'autre se tient dans les lieux publics, et la troisième se rend dans les tribunes de la Convention. » Les voilà qui s'arrogent et exercent un droit de police dans Paris. Le rapport du 28 ventôse montre bien comment ils opéraient : « Les jeunes gens du café de Chartres sont venus en nombre, par deux fois différentes, pour dissiper les rassemblements du Jardin national (Tuileries). A quatre heures après dîner, ils les ont traversés; quelques-uns d'entre eux ont harangué le public sur la nécessité de se résigner à la loi, attendu les circonstances; beaucoup ont applaudi; d'autres, continuant à se plaindre, ont été conduits par eux au Comité de sûreté générale. Les rapports des officiers de paix annoncent que cette démarche a été suivie de quelques coups de bâtons. Sur les sept heures, les mêmes jeunes gens sont revenus, ont parcouru de même les groupes, et, se tenant en file et par quatre de front, les ont traversés en chantant et faisant retirer les femmes; les groupes se sont dissipés, et les jeunes gens se sont retirés. Ils se sont rendus de suite au café de Chartres, où il a été lu un projet d'adresse à la Convention, qui doit être porté aujourd'hui.

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Le gouvernement se laisse intimider, parfois même protéger, par cette bande de jeunes réfractaires au devoir militaire. De temps en temps il les menace de les envoyer à l'armée, et puis il n'ose exécuter sa menace. En réalité, la jeunesse dorée est maîtresse de Paris, qu'elle terrorise. Elle brûle les

journaux jacobins, elle maltraite et parfois assomme les républicains démocrates, elle provoque par ses violences la fermeture du club des Jacobins, elle détruit les bustes de Marat, et elle obtient que les cendres de l'Ami du peuple soient honteusement expulsées du Panthéon. Elle pénètre dans les cafés d'opinion montagnarde, et en expulse les habitués. Elle force les Parisiens à chanter le Réveil du peuple, cette Marseillaise de la réaction, et elle proscrit les chants républicains, non seulement l'hymne de Rouget de Lisle, mais le Ça ira, le Chant du départ. Il n'est guère douteux qu'elle travaillât au profit du roi; mais, habilement, elle désavouait toute manifestation royaliste. Le 13 germinal an III, au café de Chartres, un royaliste ayant dit «< que la France est quatre fois trop grande pour être en république et que l'on ne pourrait se passer d'un roi », il dut sortir aussitôt et se cacher dans la foule pour éviter d'être arrêté. Il suffit aux projets des muscadins de s'immiscer dans les discordes des républicains pour ébranler la République, de déconsidérer un à un les hommes de l'an II, de ridiculiser ou de violenter les usages et les institutions pour exercer, au profit du trône et de l'autel, une véritable tyrannie, qui ne prend fin qu'au 13 vendémiaire.

VII

Toutes ces querelles entre muscadins et jacobins, les rapports et les journaux ne nous les montrent AULARD, Études. — V.

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pas seulement dans les cafés et dans la rue, mais aussi au théâtre, qui n'avait jamais cessé d'être, même sous la Terreur, non seulement le lieu de divertissement des Parisiens, mais une sorte de forum où ils exprimaient, par des applaudissements ou des sifflets, leurs opinions politiques, surtout quand ils n'étaient pas libres de les exprimer ailleurs.

Le genre aristophanesque, qui avait été si florissant de 1789 à 1792, et qui n'avait produit, pendant la dictature robespierriste, qu'un petit nombre d'œuvres gouvernementales, sans force et sans vie, reprend toute sa fécondité pendant la réaction thermidorienne. Il paraît sur la scène d'innombrables caricatures des jacobins, et il serait possible d'en dresser une liste complète à l'aide des annonces de spectacles publiées par les Petites Affiches et par le Journal de Paris. Chose curieuse, ces pièces politiques ne semblent pas passionner toujours le public. Ainsi c'est sans succès que, le 18 fructidor an II, le théâtre de la Cité-Variétés joue un drame en deux actes et en vers, intitulé la Chute du dernier tyran ou la Journée du 9 thermidor, et dont le premier acte était de Pigault-Lebrun, et le second de Dumaniant. L'Abréviateur universel fait observer que « ce drame, pour les spectateurs imbus de faits. si récents, est absolument dénué de toute péripétie ». Cependant, à l'Ambigu-Comique, un drame intitulé le Douze thermidor eut un assez grand nombre de représentations, et c'est aussi l'époque où on applau

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