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dants; mais, de l'aveu de tous, Dieu se montre plus indulgent pour celui qui meurt n'ayant que le péché originel, que pour celui qui meurt avec un péché actuel, lorsque ce péché est mortel. Il n'en est donc pas du péché d'Adam, pour ce qui nous concerne, comme du péché actuel. En persévérant dans le bien, notre premier père nous eût transmis, avec les prérogatives qui s'y rattachaient, la justice qu'il avait reçue gratuitement de Dieu pour lui et pour nous. En la perdant, il nous a transmis sa disgrace : Dieu ne pouvait le bannir du paradis terrestre, sans nous en bannir par le fait; en l'excluant du royaume des cieux, il nous en excluait par-là même. Or, qu'y a-t-il en cela de contraire à la justice? Dieu ne pouvait-il pas refuser à la postérité d'un père coupable des priviléges ou des dons purement gratuits, qui n'étaient dus primitivement ni au père ni aux enfants, et qui n'étaient assurés aux enfants comme aux pères que sous la condition que le père demeurerait fidèle à la défense qui lui avait été faite ? Un sujet comblé des grâces et des faveurs de son prince se révolte contre lui; et le prince, en conséquence, lui retire, à lui et à sa postérité, des priviléges qui ne devaient être héréditaires que sous une condition juste qui n'a pas été remplie, et à laquelle même on a manqué formellement. Y a-t-il en cela la moindre injustice? Or, voilà précisément à quoi le dogme catholique réduit les suites du péché originel.

132. Non, le péché originel n'est point un péché comme les autres. Tous les hommes, il est vrai, ont péché dans Adam; in quo omnes peccaverunt; mais ils n'ont point péché comme Adam; ils n'ont point prévariqué par ce péché, de la même manière qu'Adam: non peccaverunt in similitudinem prævaricationis Adæ (1). Le péché d'Adam lui est commun avec tous ses descendants; non que ses descendants l'aient commis actuellement ou personnellement, mais parce que, une fois commis actuellement, personnellement par Adam, il se transmet à tous de père en fils par la génération, de sorte qu'il devient propre à chacun de nous : propagatione transfusum omnibus inest unicuique proprium (2). Le péché originel, quoique unique dans sa source, ne consiste point, comme on le voit, dans l'acte de désobéissance, qui est personnel à nos premiers parents, mais bien dans la mort de l'âme, peccatum quod est mors animæ (3), c'est-à-dire dans la perte ou

(1) Epitre aux Romains, c. v, v. 12. - (3) Ibidem, can. II.

(2) Concile de Trente, sess. v, can. III

la privation, par acte de la justice divine, de la grâce sanctifiante qui est la vie de notre âme; de la sainteté primitive, surnaturelle et gratuite, dont nous avons tous été déshérités dans un père rebelle: tels, dans un autre ordre de choses, les enfants qui sont déshérités par le crime qui enlève à leur père les biens qui leur étaient destinés. Ainsi tombent toutes les difficultés que les hérétiques font contre le dogme catholique, en affectant de confondre la notion du péché originel avec celle du péché actuel. Que l'on distingue dans le péché d'Adam ce qu'il y a d'actuel de ce qu'il y a d'originel; qu'on le considère tel qu'il est dans son auteur, et tel qu'il est dans ceux qui, sans l'avoir commis, l'ont contracté par voie de transmission; et on comprendra ou du moins on concevra que, quoiqu'il n'ait pas dépendu de nous d'éviter la tache du péché de notre premier père, quoique ce péché ne soit pas plus libre, par rapport à nous, que l'acte de notre conception, nous ne sommes point en droit d'accuser la justice divine. L'homme déchu n'aurait lieu de se plaindre de sa dégradation originelle qu'autant qu'il vaudrait mieux pour lui n'être pas né que d'être né tel qu'il est. Or, qui a jamais maudit le jour qui l'a vu naître, parce qu'il n'a pu entrer en ce monde sans être enveloppé dans la disgrâce d'Adam, surtout s'il s'est rappelé le mystère ineffable de notre rédemption?

ARTICLE III.

De la nature du péché originel.

133. Ce n'est pas chose facile de déterminer en quoi précisément consiste la nature du péché originel. Saint Augustin disait que rien n'est plus certain que ce péché, mais que rien n'est plus mystérieux que sa nature: Hoc peccato nihil est notius, nihil secretius (1). En tombant, le premier homme a entraîné le genre humain dans sa chute; nous naissons tous entachés du péché dont il s'est rendu coupable en se révoltant contre Dieu; de sorte que ce péché est devenu propre à tous les hommes, unicuique proprium (2). Voilà ce que la foi nous apprend : après cela, que nous importe de connaître la nature du péché originel? Que nous importe de savoir en quoi consiste formellement la tache qu'il imprime à notre âme, vu surtout que nous ignorons même en quoi consiste la tache du péché actuel? Cependant on peut dire que la tache du péché

(1) De moribus Ecclesiæ, c. xxII. - (2) Concile de Trente, sess. v, can. III.

qui nous vient d'Adam consiste, non pas précisément dans le défaut ou l'absence de la justice originelle, car l'homme même innocent en eût été privé dans l'état de nature pure; mais bien dans la difformité que notre âme a contractée par la perte de cette même justice ou grâce sanctifiante qui en faisait l'ornement, et la rendait agréable à Dieu (1). En péchant, notre premier père a perdu, tant pour ses enfants que pour lui-même, la justice primitive qu'il avait reçue gratuitement du Créateur; et, en la perdant, il est tombé, avec sa postérité, dans une véritable dégradation, dans un état de nudité tout à la fois corporelle et spirituelle, qui ne lui permettait plus de se regarder lui-même sans rougir. Et parce que cette perte de la justice ou de la sainteté, cette dégradation ou cette nudité est la suite de sa désobéissance, elle est par là même, non-seulement pour lui, mais encore pour les siens, pour tous ceux qui descendent de lui, une tache qui les rend odieux au Seigneur, enfants de colère.

ARTICLE IV.

De la transmission du péché originel.

134. La manière dont s'opère la transmission du péché originel n'est pas moins mystérieuse que sa nature. Néanmoins on conçoit que la prévarication d'Adam devait nuire à toute sa postérité. Comme tous les hommes devaient descendre de lui, d'après l'ordre établi de Dieu, une fois déchu de son état primitif, il ne pouvait plus engendrer que d'autres lui-même, que des êtres semblables à lui, dégradés comme lui, dépouillés comme lui, quant au corps et quant à l'âme, des dons surnaturels dont il avait été gratifié dans son origine. L'enfant suit la condition du père: si le père est libre, l'enfant naît libre; s'il est esclave, l'enfant naît esclave. Si donc Adam fût demeuré libre, comme il l'était avant sa chute, nous serions tous nés libres dans le même sens. Pour la même raison, parce qu'il est devenu, par sa faute, esclave du péché, nous naissons tous également esclaves du péché; en se livrant au pouvoir du démon, il nous a rendus captifs. Nous n'existions pas encore, cependant nous étions déjà dans Adam, dit saint Augustin;

(1) Voyez saint Anselme, De conceptione Virginis et peccato originali, c. xxm el xxvII. Voyez aussi la Théologie du P. Perrone, Tract. de Deo creatore, part. m, c. v, etc.

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nous étions, en quelque sorte, Adam lui-même; Adam ille omnes nos eramus (1). On peut dire que, comme chef du genre humain, le premier homme renfermait dans sa personne le principe de la vie de notre corps et de notre âme; principe qui devait se communiquer, par la voie de la génération, à tous ses descendants, tel qu'il était en lui; intègre, s'il l'eût conservé dans son intégrité, en persévérant dans l'innocence; ou altéré, corrompu, s'il venait à le corrompre en corrompant sa propre nature par le péché. « Dieu pouvait, dit Bossuet, donner l'être à tous les hommes comme « à tous les anges, indépendamment les uns des autres; surtout l'âme raisonnable ne pouvant, comme incorporelle, dépendre « par elle-même d'aucune génération. Néanmoins il a plu à Dieu « que non-seulement le corps, mais encore l'âme, dépendît, selon « son être, de cette voie, et que les âmes se multipliassent autant « que les générations humaines; et il a voulu encore que toutes les << races humaines se réduisissent à la seule race d'Adam, en sorte que tous les hommes, et selon le corps et selon l'âme, dépendissent de la volonté et de la liberté de ce scul homme (2). »

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ARTICLE V.

Des suites du péché originel.

135. Par le péché originel, l'homme, quant au corps et quant à l'âme, est déchu de l'état d'intégrité, de justice et de sainteté dans lequel il avait été créé. Par suite de cette déchéance, il a perdu les différents dons qui éclairaient son intelligence de la lumière d'en haut, fortifiaient sa volonté contre le mal, lui assuraient l'empire sur ses sens, et le rendaient exempt des misères de cette vie. Ainsi, l'ignorance ou l'obscurcissement de notre entendement; l'affaiblissement de notre volonté ou de notre libre arbitre, qui ne peut plus rien, dans l'ordre du salut, sans le secours de la grâce; la convoitise ou la concupiscence qui se fait sentir par les révoltes de notre nature, les infirmités, la douleur et la mort du corps; telles sont, pour la vie présente, les suites du péché originel, qui est lui-même la mort de l'âme, mors animæ (3).

136. Pour ce qui regarde la vie future, la peine de ce même péché consiste dans l'exclusion du royaume des cieux, dans la privation de la vie éternelle, de la vision intuitive: personne ne

(1) Surle psaume LXXXIV. — (2) Élévations sur les mystères, vu semaine. (3) Concile de Trente, sess. v, can. II.

-peut entrer dans le royaume de Dieu, à moins qu'il n'ait été régénéré en Jésus-Christ par le baptême : Nisi quis renatus fuerit ex aqua et Spiritu sancto, non polest introire in regnum Dei (1). Voilà ce que la foi nous apprend; mais son enseignement ne s'étend pas plus loin. L'Église abandonne aux discussions de l'école les différentes opinions des théologiens, touchant le sort de ceux qui sont exclus du ciel par suite du péché originel; des enfants, par exemple, qui sont morts sans avoir reçu le sacrement de baptême.

137. Il est vrai que le concile de Florence et le second concile général de Lyon enseignent que les âmes de ceux qui meurent avec quelque péché mortel, ou avec le seul péché originel, descendent aussitôt en enfer pour y être punies par des peines toutefois différentes, pœnis tamen disparibus puniendos. Mais par cela même que les peines du péché originel et celles du péché actuel sont des peines, non-seulement inégales, mais différentes, et que ces conciles nous laissent ignorer en quoi consiste cette différence, on peut très-bien concilier leur décret avec le sentiment qui ne reconnaît pas d'autre peine du péché originel, après la mort, que l'exclusion du royaume de Dieu, que la simple privation de la vie éternelle. Il y a plusieurs demeures dans les enfers; il y en avait une pour les réprouvés avant la venue du Messie; il y en avait une pour les âmes des justes qui attendaient leur délivrance de Jésus-Christ: rien ne s'oppose à ce qu'on en admette une autre pour les âmes des enfants morts sans baptême. Nous le répétons, ni le concile de Florence, ni celui de Lyon, ne se sont prononcés sur la nature des peines réservées à ceux qui meurent avec le seul péché originel, si ce n'est pour nous faire connaître qu'ils sont exclus pour toujours du royaume des cieux. On peut donc, sans aller contre les décisions de l'Église, soutenir le sentiment qui exempte ces infortunés du supplice de l'enfer; on le peut, avec d'autant plus de raison que l'opinion contraire est presque généralement abandonnée, et qu'en l'abandonnant on se trouve d'accord avec le pape Innocent III. Distinguant la peine du péché originel de celle du péché actuel, ce pape fait consister celle-ci dans le supplice du feu éternel, tandis qu'il fait consister la première dans la simple privation de la vision intuitive: Pana originalis peccati est carentia visionis Dei, actualis vero pœna peccati est gehennæ perpetuæ cruciatus (2).

(1) Saint Jean, c. 11, v. 5. — (2) Caput Majores de Baptisme.

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