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perdue. Dans l'état de l'opinion, leur conservation comme corps est impossible. C'est une nécessité qu'il faut subir, tout en protestant contre cette suppression, tout en défendant le vénérable institut. Mais, confondre cette société si digne de nos respects et de nos regrets, malgré les fautes commises, avec les autres congrégations religieuses, les rendre solidaires, lorsque le Gouvernement cherche à séparer leur cause, cela est d'une généreuse conduite, mais d'une mauvaise politique. Les congrégations religieuses sont nécessaires; elle ont le droit divin d'exister. Mais, parce que l'une d'elles succombe, faut-il que toutes les autres périssent ? Le Gouvernement offre d'autoriser celles qui ne le sont pas; jamais offre pareille n'avait été faite. Il mettra, il est vrai, à cette approbation certaines conditions qui peuvent paraître plus ou moins acceptables. Eh bien ! sur ce point on aurait pu négocier et s'entendre.

Au lieu d'entrer dans cette voie de conciliation, on réclame une liberté absolue sans s'inquiéter de paraitre nier des droits essentiels de l'Etat et de paraitre faire alliance avec les partis hostiles. Cette conduite, j'ose le dire, semble pleine d'imprudence et de dangers incalculables.

<< Pour conjurer ces périls que je prévoyais, j'ai fait, le 14 mars dernier, une tentative auprès de M. de Freycinet; je le priais d'ouvrir, avant toute détermination gouvernementale, des négociations avec le Saint-Siège, à l'effet d'obtenir le consentement du Saint-Père à la demande d'autorisation par les congrégations menacées.

« Si cette marche avait été suivie, la sagesse de Léon XIII eût aplani toutes les difficultés. M. de Freycinet n'a pas compris ou voulu comprendre cette conduite. Dans une question vraiment concordataire, il a voulu agir seul et en maître et il a amené le conflit redoutable où nous sommes. Mais de notre

côté, jusqu'ici, nous ne sommes pas plus sages. »

...

Ce que Mgr Maret écrivait, le Nonce, Mgr Czacki, le pensait également. Il était partisan convaincu de la conciliation. Ainsi il écrivait à Mgr Lavigerie, quelque temps avant l'apparition des décrets, à propos de Mgr Gillard, évêque nommé de Constantine: «< Il est un évêque comme je les aime... Cela prouve une fois de plus que l'Église ne doit pas vivre loin de l'État, tant que celui-ci ne rompt pas complètement avec elle. Il ne suffit pas de nous affirmer, il faut nous faire connaître. Grâce à Dieu, nous n'avons qu'à y gagner... J'espère que le Gouvernement se convaincra, au spectacle des choix qu'il m'a concédés, que les évêques vraiment romains sont ceux qui ne gênent jamais l'État jusqu'à ce que celui-ci veuille de parti pris combattre l'Église. »

Les libéraux l'appréciaient fort, mais les «< ardents » ou «< zelanti », comme on les appelait à Rome, ne lui ménageaient pas leurs coups.

Le nonce avait bien remis à M. de Freycinet, de la part du Saint-Père, une note dans laquelle il protestait, au «< nom de la justice et de la religion, contre des mesures si manifestement persécutrices et rendait le Gouvernement responsable des conséquences qu'elles pouvaient entraîner », mais le principe sauvegardé par cette note officielle, il connaissait trop «l'art de vivre » pour ne pas désirer un terrain d'entente.

Dans les régions du gouvernement, il semblait aussi qu'on commençait à comprendre les dangers de cette aventure. Le projet de demander aux Chambres de remettre au pouvoir administratif le droit d'approuver les congrégations d'hommes, comme celles de femmes, indiquait qu'on entrait dans une

1. Lettre inédite de Mgr Czacki à Mgr Lavigerie, le 3 mars

voie nouvelle. C'était à M. Flourens, directeur général des cultes, qu'on devait ce changement. Si ce projet aboutissait à une proposition de loi, le moment de réparer les fautes commises et d'agir auprès du Saint-Père serait alors propice. C'est pourquoi les prélats du parti modéré tournèrent leurs regards vers l'archevêque d'Alger, dont l'influence à Rome devenait considérable. Mgr Lavigerie était, en effet, en bonnes relations, d'un côté, avec les hommes du pouvoir, et en particulier avec MM. de Freycinet et Flourens; de l'autre, non seulement avec le nonce et l'épiscopat qui l'admiraient dans toutes ses œuvres, mais surtout avec le nouveau pape Léon XIII.

«Je suis persuadé, lui écrivait Mgr Maret1, que vous êtes le prélat avec lequel le Saint-Père peut s'entendre, Il faudrait faire bien comprendre à Sa Sainteté qu'il s'agit d'une question de vie ou de mort pour la religion en France; que la marche adoptée, sous l'influence des doctrines absolues et des partis hostiles, conduit à une ruine irrémédiable; lui représenter vivement que les congrégations les plus respectables jouissent déjà de l'approbation légale, que par conséquent cette approbation est licite en elle-même et qu'elle devient nécessaire dans les circonstances, puisque le Gouvernement l'offre comme moyen de salut. La voie ouverte, les difficultés s'aplaniraient avec une bonne volonté réciproque.

Voilà, cher Monseigneur, la mission qui, selon votre vieil ami, vous est réservée en ce moment; la mission que vous pouvez seul remplir, comme celle d'Afrique.

« Il est vrai que la question se ramène à celle de savoir si le Gouvernement obtiendra le droit qu'il

1. Cf. lettre du 19 avril, ul supra.

désire. On peut, ce semble, l'espérer. Mais, dans tous les cas, on peut faire entrevoir au Saint-Père un moyen de conciliation, obtenir l'ajournement de toute rupture et soustraire le meilleur des papes aux partis qui l'oppriment.

« Quelle tâche ! Elle est difficile et vous êtes entouré d'ennemis. Je crois, cependant, que vous êtes dans de bons termes avec le nouvel ambassadeur. Il vous servira. Courage, cher ami, jamais vous n'avez été plus nécessaire à l'Église. Vous sauvez aussi les congrégations que vous avez fondées... »

Mgr Lavigerie se laissa gagner par l'appel de son ami, d'autant plus facilement qu'il aimait passionnément son pays et qu'il demeurait l'observateur attentif et inquiet à tout ce qui le touchait.

Il s'en ouvrit d'abord au nonce de Paris et celui-ci l'encouragea cordialement.

« MONSEIGNEUR 1,

« J'ai reçu votre lettre et, comme vous me dites que vous me comprendrez à demi-mots, je me borne à vous dire que je trouve très justes vos idées sur l'affaire dont vous me parlez. D'ailleurs, vous me promettez votre arrivée à Paris, par conséquent nous pourrons nous entendre sous ce rapport comme sous tant d'autres où votre coopération aussi intelligente que zélée m'est toujours aussi utile qu'agréable. Je prie, en attendant, Votre Grandeur de ne pas m'oublier à l'autel, car le besoin d'une assistance spéciale du bon Dieu m'est de jour en jour plus nécessaire pour répondre à la confiance de notre grand et si sage Pontife et pour travailler au bien de votre chère patrie... >>

1. Lettre inédite de Mgr Czacki à Mgr Lavigerie. Paris, le 27 avril

Mgr Lavigerie, qui était à ce moment à Tunis, résolut donc de se rendre directement à Rome pour connaître la pensée du Saint-Père et amener Sa Sainteté à négocier avec le Gouvernement.

Son vieil ami, Mgr Maret, l'avait déjà précédé dans la Ville Eternelle, afin de terminer une affaire au sujet d'une nomination au chapitre de Saint-Denis. A peine arrivé à son hôtel, l'archevêque d'Alger recevait un mot de l'évêque de Sura. Ce prélat, après l'avoir renseigné sur son affaire, disait : « L'autre affaire n'est pas commencée. On vous attend, l'ambassadeur.

Cependant, l'évêque de Rodez a écrit au cardinal Nina. Celui-ci m'a reçu on ne peut mieux, je l'ai vu quatre fois... Je désirerais vous voir avant que vous alliez chez le cardinal. Je vous dirai tout, je suis à vos ordres. >>

Arrivé, le 24 mai, l'archevêque d'Alger obtenait son audience du Saint-Père pour le 27; dans l'intervalle il se renseigna sur les dispositions du Vatican. Il trouva une situation très grave. Une grande partie des cardinaux était mal disposée envers la France et des efforts désespérés étaient faits par eux et par quelques évêques, à la tête desquels était Mgr Freppel, pour pousser toutes choses à l'extrême 2.

Le 27, Mgr Lavigerie se dirigea assez inquiet vers le palais du Vatican. Léon XIII, bien que porté à la conciliation par goût et par politique, n'allait-il pas céder aux suggestions des intransigeants?

« Je descends de l'autel, lui écrivait le jour même Mgr Maret 3, et j'ai prié de tout mon cœur que l'Esprit-Saint mette dans votre bouche les paroles capa

1. Lettre inédite de Mgr Maret à Mgr L.avigerie. Paris, le 24 mai 1880. 2. D'après une lettre de Mgr Lavigerie à Mgr Gillard. Rome, 27 mai 1880.

3. Lettre inédite de Mgr Maret à Mgr Lavigerie. Rome, le 27 mai

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