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ce procès-verbal, il doit en donner immédia-, vant la cour d'assises chargée de rendre l'arrêt tement communication au prévenu ou à l'ac- définitif. cusé, qui peut faire sur les réponses des témoins les observations qu'il juge convenables. On doit tenir note de ces observations comme de celles qui ont été faites au moment de la rédaction des séries de questions; le prévenu ou l'accusé doit être interpellé de les signer, et, en cas de refus ou d'incapacité de sa part, il doit être fait mention du défaut de signature et de la cause alléguée (art. 5 et 6, loi du 18 prairial an II). La loi veut aussi que, par suite et en conséquence de ces observations, le prévenu ou l'accusé puisse requérir le magistrat de faire interroger une seconde fois les témoins qui ont donné leurs déclarations: le magistrat peut aussi d'office ordonner une seconde audition des témoins. Dans l'un et l'autre cas, les règles prescrites pour la première audition doivent être également observées dans la seconde, avec cette différence toutefois qu'après cette dernière opération il ne peut plus y avoir lieu à la renouveler; car, si le prévenu ou l'accusé avait ainsi la faculté indéfinie de faire recommencer l'audition des témoins, les procédures seraient interminables (art. 7 et 8, ibid.).

Ce mode de procéder à l'égard des militaires a surtout pour objet d'empêcher qu'ils ne soient à tout instant éloignés du poste qui leur est assigné pour le service de Sa Majesté, d'éviter des frais de déplacement, et d'accélérer la décision des affaires dans lesquelles il y a lieu d'entendre des personnes attachées à l'armée; cependant, comme il entraîne nécessairement quelques délais, la loi autorise les cours et les tribunaux à proroger, lorsqu'il y a lieu, sur la demande des prévenus, des accusés ou du ministère public, les termes fixés, dans les cas ordinaires, pour l'instruction et le jugement des affaires (1).

Les déclarations données par écrit dans la forme que je viens de rappeler, doivent être considérées comme dépositions orales par les officiers de police, ce qui comprend les juges d'instruction et même tous les magistrats qui en remplissent les fonctions en certaines circonstances; par les tribunaux correctionnels, et à plus forte raison par les tribunaux de police; et par les chambres de mise en accusation, qui sont aujourd'hui substituées à l'ancien jury d'accusation. Ainsi, aucun de ces officiers et de ces tribunaux ou cours ne peut exiger que des témoins militaires comparaissent en personne, soit pour l'instruction et le jugement des affaires correctionnelles et de simble police, soit, en matière criminelle, pour l'instruction qui précède la comparution de

(1). art. 9 de la loi du 18 prairial an II. (2) Ou les juges, s'il n'y a pas de jurés.

En matière criminelle mème, ces dépositions peuvent être lues aux débats devant le jury de jugement, et peuvent tenir lieu de dépositions orales. Cependant, comme il est quelquefois difficile de retrouver, dans la déposition d'un témoin éloigné du juge et de l'accusé, cette exactitude, ces traits caractéristiques qui décèlent ordinairement la vérité; comme on ne peut pas confronter un témoin absent, soit avec l'accusé, soit avec tel autre témoin dont les dires paraissent ou sont en effet contraires, le législateur, par une sage précaution, a voulu qu'après le débat on demandat aux jurés s'ils sont en état de prononcer sans entendre oralement les témoins militaires attachés aux armées ou employés à leur suite, dont les déclarations leur auront été lues; que cette question letir fût soumise en tête de celles qui résultent de l'acte d'accusation et des debats; qu'elle fût d'abord examinée et décidée par eux après qu'ils se sont retirés dans leur chambre, et qu'ils ne s'occupassent de l'examen des questions relatives au fond de l'affaire que dans le cas où ils donneraient, sur cette première question, une décision affirmative.

Si la décision est négative, c'est-à-dire, si les jurés (2) déclarent qu'ils ne se croient pas suffisamment éclairés pour prononcer, sans entendre oralement les témoins militaires, cette déclaration est prononcée à l'audience par le chef du jury dans la forme ordinaire (3), et la cour ordonne alors qu'il sera sursis à statuer sur l'accusation jusqu'à ce que les témoins dont l'audition orale est jugée nécessaire, cessent d'être employés activement à l'armée, ou jusqu'à ce que le ministre de la guerre ait déclaré qu'ils peuvent comparaitre en personne sur la citation qui doit leur être donnée à cet effet (4).

Dans ce cas, le débat doit être entièrement recommencé à l'époque fixée pour la comparu

tion des témoins militaires.

Cette marche, prescrite par le législateur, doit rendre les magistrats très-circonspects sur la lecture qu'ils peuvent donner, aux débats, des dépositions écrites des témoins militaires, et les déterminer en général à s'en abstenir. En effet, si ces dépositions étaient importantes, il serait presque certain que les jurés demanderaient qu'elles fussent faites oralement; et pour prévenir cet inconvénient, il vaut beaucoup mieux, avant d'ouvrir les débats, s'assurer de l'époque où les militaires pourront comparaître en personne: si, au contraire, les dépositions écrites étaient de peu d'importance, et que cette considération eût porté le ministère public à

(3) Ou par le président de la cour de justice criminelle. (4) Art. 12—17 de la loi du 18 prair. an II,

ne pas provoquuer la comparution des témoins en personne, il serait inutile de lire des dépositions qui ne pourraient avoir aucune influence sur la décision de l'affaire, et de s'exposer, par cette lecture indiscrète, à faire recommencer un débat, à surcharger le trésor ou les parties de frais frustratoires, et à retarder ainsi l'action de la justice, au détriment de la société ou de l'accusé suivant qu'il doit être condamné ou absous.

Cette observation ne peut s'appliquer qu'aux affaires criminelles et à l'examen qui se fait devant la cour; mais, quoique je ne m'occupe, quant à présent, que de l'instruction préliminaire, elle trouvait naturellement sa place à la suite de l'examen que j'ai fait des dispositions de la loi du 18 prairial an II, relatives aux témoins militaires.

SECTION IV.

DU SERMENT DES TÉMOINS ET DES RÉPONSES QU'ILS DOIVENT PRÊTER AVANT de donner LEUR TÉMOIGnage.

SIer.

Du serment.

109. Les témoins doivent prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité (art. 75, C. crim.) (1).

Pendant l'empire de la législation qui a précédé le nouveau Code, et après la publication de la loi du 7 pluviose an IX, il s'était élevé quelques doutes sur la question de savoir si les témoins appelés devant le directeur du jury d'accusation devaient prêter le serment. Les motifs de douter résultaient du silence qu'avait

gardé à cet égard le Code des délits et des peines, qui ne parlait de la promesse à exiger des témoins, qu'aux articles 185 et 550, concernant les tribunaux correctionnels et criminels, et du défaut de dispositions précises sur ce point dans la loi du 7 pluviose an IX, qui avait introduit des changements remarquables dans l'instruction criminelle; mais les tribunaux n'avaient pas tardé à reconnaître que tous les témoins entendus en justice, soit devant le directeur du jury, soit devant les tribunaux, devaient faire la promesse prescrite par la loi, et que leur déposition, dégagée de cette formalité, n'aurait pas été suffisamment authentique.

Aujourd'hui, ce point est formellement décidé par le Code; les témoins entendus par le juge d'instruction doivent d'abord prêter le serment, et la loi a consacré la jurisprudence que les tribunaux avaient introduite, dans le silence du Code des délits et des peines.

La formule du serment doit être prononcée par le magistrat qui reçoit la déposition, et le témoin lève la main droite, en disant, Je le jure (2). Chaque mot de la formule du serment est sacramentel on ne doit rien ajouter à cette formule; on ne doit surtout y rien retrancher. Ainsi, suivant la formule générale du serment, le témoin doit jurer de parler sans haine et sans crainte (3), de dire toute la vérité, rien que la vérité (4); et s'il a seulement juré de dire la vérité, rien que la vérité, son serment n'est pas regardé comme complet, et la suppression ou l'omission du mot toute emporte la nullité de sa déposition et de tout ce qui est postérieur. La raison de cette nullité est que l'on peut dire la vérité, rien que la vérité, sans dire toute la vérité, et que la loi n'exige pas seulement qu'on ne dise et qu'on jure de ne dire que ce qui est vrai, mais encore qu'on dise et qu'on promette de dire tout ce qui est vrai. Tels sont, du moins, les motifs de divers arrêts

(1) Il a été jugé que le serment est obligatoire, en matière criminelle, pour les témoins à décharge comme pour les témoins à charge. Cela résulte de la généralité des dispositions de l'article 317, C. crim., et de la combinaison de cet article avec les articles 515 et 369 : il est d'ailleurs dans l'intérêt de la défense de l'accusé, que les témoins qu'il appelle en témoignage lui donnent, ainsi qu'à la justice, la même garantie de leur sincérité que celle qui est exigée des témoins produits par la partie publique. (Cass., 16 janv. 1812, 10 février 1814 et 9 oct. 1817; D., 25, 150; S., 18, 116.)

Mais cette règle cesse d'être applicable, si les témoins à décharge ne doivent être entendus que par forme de déclaration, et s'ils n'ont pas été compris dans la liste mentionnée en l'article 315 du Code. (Cass., 5 juin 1812 et 23 avril 1825.) Il est bon de remarquer à ce sujet que, lorsqu'un témoin, en vertu du pouvoir discrétionnaire, a été appelé à donner des enseignements sans prestation de serment, et qu'ensuite il a déposé comme témoin à décharge, on ne peut soutenir, pour en tirer un moyen de nullité, que les deux parties de ses décla

rations ne forment qu'une seule déposition qui se trouve viciée par le défaut de prestation préalable de serment. (Cass., 6 mai 1819; D., 8, 4; S., 19, 404.)

(2) En Belgique on y ajoute la formule religieuse : « ainsi m'aide Dieu et tous les saints. » ( Arrêté du 4 novembre 1814.)

(3) Ce n'est qu'à l'article 517 du Code que cette partie de la formule est indiquée; l'article 75 n'en fait pas mention.

(4) L'arrêté belge du 4 nov. 1814 n'a pas dérogé à l'art. 317, il n'a eu pour objet que d'ajouter à la formule civile du serment, la formule religieuse indiquée plus haut. (Br., Cass., 3 mai 1816; J. de B. 1816, 1, 186.) Les greffiers doivent avoir soin de ne pas mentionner simplement dans leurs procès-verbaux, que le serment a été prêté aux termes de l'art. 517, car ils s'exposeraient à une nullité. Le procès-verbal ne doit pas cependant énoncer, à peine de nullité, les termes de la formule religieuse. (Br., Cass., 19 déc. 1821; J. de B. 1821, 2, 51.)

de la Cour de cassation qui ont jugé ce moyen de nullité admissible (1); et quoique cette doctrine puisse être contestée, attendu que, la vérité étant une, celui qui jure de la dire s'engage par ce serment même, à la dire tout entière, à la dire sans réserve, on ne peut nier que la décision de la cour ne soit fondée sur le texte des dispositions du Code.

La loi exigeant un serment, une simple promesse ne suffit pas; il faut que le témoin jure et affirme sous la religion du serment (2). Cependant la Cour de cassation a jugé, le 28 mars 1810, que, lorsque la religion du témoin lui défend de jurer, il peut être admis à affirmer dans les principes de sa religion.

Dans l'espèce de cet arrêt, qui est cité dans les Questions de droit, John Jones, quaker de religion, avait gagné un procès à la charge de prêter serment, et le procès-verbal de la réception de ce serment était conçu en ces termes : lequela affirmé dans les principes de sa religion, en son âme et conscience. Les parties adverses avaient appelé du jugement qui avait reçu cette prestation de serment, et elles soutinrent qu'affirmer un fait, sans prendre à témoin Dieu, où quelque chose de saint ou de divin, ce n'était pas faire un serment. Le 22 mars 1809, la cour d'appel de Bordeaux prononça la confirmation du jugement. Les appelants se pourvurent en cassation, et ce recours fut rejeté | sur les conclusions de ministère public. L'arrêt de rejet est ainsi motivé : « Attendu, 1° que la liberté des cultes est garantie par les lois de la France à tous ceux qui habitent son territoire (3);

» 2o Qu'il est universellement reconnu que la religion connue sous le nom de quakérisme interdit à ses sectateurs de jurer au nom de Dieu, et ne leur permet pas d'autre serment que d'affirmer en leur âme et conscience;

» 5° Qu'il est reconnu par l'arrêt attaqué, que le sieur John Jones est un sectateur de cette religion. »

Un arrêt de la Cour de cassation, en date du 12 juillet, 1810, rendu également sur les conclusions du ministère public, et cité dans les Questions de droit, se rattache aussi au mode de prestation de serment; je crois devoir en rappeler l'espèce,

Deux témoins de la religion juive étaient produits dans une enquête civile; il était question de savoir dans quelle forme ils prêteraient leur serment.

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La cour d'appel de Colmar, faisant droit sur l'incident, ordonna qu'ils prêteraient serment, more judaïco, sur le Coscher-Sapher-Thora. Le juge-commissaire se transporta en conséquence à la synagogue, et il y fit prêter aux deux témoins juifs le serment sur le CoscherSapher-Thora,, entre les mains du rabbin consistorial.

L'affaire ayant été jugée au fond, il y eut recours en cassation, qui fut fondé principalement sur la manière dont le serment de ces deux témoins avait été reçu; mais la cour rejeta la requête par les motifs suivants:

« Attendu que l'article 202 du Code de procédure civile prescrit seulement l'obligation de faire prêter aux témoins le serment de dire la vérité, sans en déterminer le mode;

» Et que le serment étant un acte religieux, doit être prêté suivant le rit particulier au culte de chaque témoin. »>

Mais de ce qu'un témoin peut être dispensé de jurer, lorsque sa religion le lui défend, pourvu qu'il affirme suivant les principes de la religion; de ce qu'un juif peut être admis à prêter son serment more judaïco, ou du moins de ce que la Cour de cassation a jugé, dans deux affaires civiles, que chacune des deux circonstances ne donnait pas matière à cassation, s'ensuit-il qu'en matière criminelle, chaque témoin appelé, soit devant un juge d'instruction, soit devant les tribunaux et les cours chargés de la répression des délits, doive nécessairement prêter serment suivant sa religion particulière, s'ensuit-il surtout que les juges doivent toujours l'ordonner ainsi ?

C'est une question importante sans doute, qui me paraît devoir être résolue par la négative, malgré les inductions que l'on peut tirer des deux arrêts de la Cour de cassation, et surtout du dernier considérant du second de ces arrêts, et malgré les opinions respectables qui semblent se réunir en faveur de l'affirmative.

D'abord, à l'égard des témoins juifs, si, comme cela se pratique dans certains pays (4), il est nécessaire, pour que le serment soit prêté dans toute sa rigueur more judaïco, que le juif jure sur la Bible par-devant son rabbin, il faudrait donc aller dans la synagogue, ou forcer le rabbin à venir devant la cour, et l'on sent que ces deux moyens sont également inadmissibles; qu'ils ne sauraient se concilier avec les dispositions du Code d'instruction et avec

lois de l'État, la question devrait être décidée par les mêmes principes.

La Cour de cassation a jugé encore, le 4 et le 9 avril 1812, qu'il y a modification à la nécessité du serment à l'égard de ceux qui professent une religion qui prohibe le serment. (D., 25, 151; S., 17, 315; Rauter, no 685.) (4) Dans le ressort de la Cour de Colmar, par exemple, ainsi que le prouve l'arrêt ci-dessus cité.

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Quand le serment est déféré à un juif, dit » Denisart (au mot Juif), il le prête mettant la » main sur une Bible hébraïque, la tète cou» verte, avec la permission du juge; en cette » posture, il promet à Dieu de dire la vé» rité (1). »

Ces dernières formalités pourraient sans doute, à la rigueur, s'observer devant les tribunaux, dans l'instruction et mème dans les débats d'une procédure criminelle: mais, indépendamment de ce que la loi ne les a point prescrites, et de ce qu'elles ne pourraient pas être usitées partout pour la prestation du serment des juifs, puisque, dans quelques pays, elles seraient regardées comme insuffisantes et incapables de donner au serment le caractère qu'elles tendent à lui imprimer, il existe une raison de décider, puisée dans un motif bien plus général, et que sa moralité mème recommande; c'est que ce qui constitue le serment, ce ne sont point les cérémonies extérieures dont cet acte est accompagné, et qui peuvent varier selon la diversité des croyances, et même, dans une mème croyance, suivant la condition des personnes et le lieu de leur résidence ou de la situation du tribunal saisi.

Le serment réside essentiellement et tout entier dans la déclaration de celui qui le prononce, et par conséquent il existe dès que le témoin interpellé par le juge, sous la religion du serment, de déposer vérité, a répondu d'une manière affirmative à cette interpellation.

Les serments se font en faveur de ceux qui les exigent (2): les termes dont le témoin se sert pour affirmer, sont indifférents en euxmêmes; c'est ce qui résulte de ce que la loi n'a point déterminé la formule du serment, et le droit canonique avait lui-même consacré cette doctrine.

«De quelque manière qu'on s'exprime en » jurant, Dieu, qui connait l'intention, prend » les paroles dans le mème sens que celui qui » reçoit le serment.»

Quacumque arte verborum quisque juret, Deus tamen, qui conscientiæ testis est, ita hoc accipit sicut ille cui juratur inteltigit (5).

Les formalités, qui ont un rapport nécessairement plus éloigné avec le serment que les paroles qu'on emploie pour le prêter, sont par conséquent encore moins essentielles. De quelque formule qu'on se serve pour prendre à témoin la Divinité, le serment doit toujours être réputé conforme à la religion de celui qui le préle (4); et le serment n'en serait pas moins réel, encore qu'un laïc n'eût pas levé la main; qu'un prêtre ne l'eût pas posée sur la poitrine; qu'un juif ne l'eût pas étendue sur la Bible.

Quiconque se croirait dégagé de la sainteté du serment pour avoir omis de pareilles formalités, s'abuserait aussi grossièrement que celui qui, dans la même vue, aurait recours aux restrictions mentales, aux directions d'intention, et autres subtilités qu'on attribue aux sectateurs d'Escobar et de Molinos.

Cependant on oppose à cette doctrine les deux arrêts de cassation ci-dessus rappelés; mais ces deux arrêts ne peuvent la détruire. D'abord ils se rapportent à des espèces civiles; et comme la procédure criminelle a ses règles et son Code particuliers, on ne peut pas argumenter avec certitude d'une matière à une autre: d'ailleurs, dans les deux cas énoncés aux arrêts, la Cour de cassation a évidemment bien jugé; seulement, à mon avis, elle a mal motivé ses décisions.

En effet, en se bornant à partir de ce seul principe, que la loi n'a pas déterminé le mode de prêter le serment, elle était autorisée à conclure que l'affirmation de John Jones (quaker ou non) remplissait le vœu de la loi, et que l'arrêt de la cour de Colmar relatif à un juif n'offrait pas matière à cassation.

Mais elle semble avoir eu tort d'énoncer, en termes généraux, que le serment doit être prêté suivant le rit particulier au culte de chaque témoin: car le mot doit n'admet ni modification, ni distinction, ni exception; et quoique les arrêts qu'on vient de citer ne soient intervenus qu'en matière civile, un principe ainsi exprimé s'applique nécessairement aux matières criminelles et correctionnelles.

Aussi est-ce la conséquence qu'a tirée de ces arrêts un magistrat de la Cour de cassation qui

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a publié un commentaire sur l'instruction cri- | sa déposition. Le serment qu'il a fait, s'appliminelle (1). que nécessairement à toutes les parties de sa déposition (4).

Il suivrait de là que la Cour de cassation devrait annuler toute procédure, soit civile, soit criminelle, dans laquelle un juif, par exemple, aurait prêté le serment à l'instar des autres témoins, et non pas more judaïco.

Il faudrait donc que les juges connussent quelle est la croyance de tous les témoins qu'ils entendent, et encore quelles formalités les diverses sectes peuvent observer dans la prestation du serment (2).

Enfin il peut arriver que ces formalités soient inconciliables avec les dispositions de la loi, comme si, par exemple, la cour devait se transporter à la synagogue pour recevoir le serment d'un juif. Les inconvénients et les embarras d'un pareil système sont assez sensibles pour n'avoir pas besoin d'être développés.

En conséquence, j'estime que les juges peuvent recevoir le serment d'un témoin avec les formalités qui appartiennent à sa religion, qu'ils peuvent même ordonner qu'il le prètera avec ces formalités, quand elles sont susceptibles d'être exécutées sans que les règles de la procédure soient violées; mais qu'ils ne sont, à cet égard, astreints à aucune obligation, et que ces formalités ne sont point nécessaires pour l'efficacité du serment; ou, en d'autres termes, que le serment existe, quel que soit le culte que professe le témoin, lorsqu'interpellé par le juge, sous la religion du serment, de déposer toute la vérité, rien que la vérité, il a répondu d'une manière affirmative à cette interpellation (3).

Lorsqu'un témoin a prêté, avant de déposer, le serment prescrit par la loi, il n'est pas tenu de renouveler ce serment si, à une audience suivante, il est requis de répéter ou d'expliquer

SII.

Des personnes qui sont entendues sans prestation de serment.

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110. « Les enfants de l'un et de l'autre sexe, au-dessous de l'âge de quinze ans, pourront, » dit la loi, être entendus par forme de dé» claration et sans prestation de serment » (art. 79, C. crim.). »

Cette disposition, qui paraît claire, et qui ne peut offrir aucune incertitude dans la manière dont elle doit être exécutée devant les juges d'instruction, a donné lieu à des difficultés sérieuses et a partagé les jurisconsultes et les cours judiciaires de France, à raison de son analogie avec un autre article du Code qui exige que tous les témoins appelés devant la cour d'assises prêtent serment, à peine de nullité (art. 517, C. crim.), et de l'influence qu'elle peut avoir sur l'exécution de cet article.

Il parait que, jusqu'en 1812, soit que, dans les débats criminels qui avaient amené des condamnations, il n'eût pas été entendu d'enfants au-dessous de quinze ans, soit que les condamnés ne se fussent pas fait un moyen de cassation du défaut de prestation de serment de la part de ces enfants, soit même que la Cour de cassation n'eût pas accueilli ce moyen; il paraît, dis-je, qu'avant le 7 février 1812 la Cour de cassation n'avait pas fait de cette question l'objet d'un examen particulier elle rendit, à cette époque, sur les conclusions du procureur général, un arrêt par lequel elle annula une condamnation prononcée par une cour d'assises,

(1). Carnot, sur l'art. 43.

(2) On sait cependant que la loi, en exigeant le serment, garde le silence sur le mode, et qu'elle ne prescrit point au juge d'interroger le témoin sur sa religion. - « La vérité est que, quoique le serment, considéré » en lui-même, soit un acte religieux, dans le com⚫ merce de la vie, il ne doit être regardé que comme » un acte civil. C'est une sûreté que l'on exige, et dont ■ la forme dépend de l'impression que fait sur l'esprit ⚫ des hommes la crainte d'une Divinité. » (Puffendorff, liv. IV, ch. 2, note 2, sur le $ 4.)

Le serment, suivant la définition de Domat, est une sûreté que les lois exigent pour confirmer un témoignage sur la vérité d'un fait; et cette sûreté consiste en la confiance que l'on peut avoir, que celui qui jure ne violera pas un engagement où il prend Dieu pour témoin de sa fidélité en ce qu'il assure, et pour juge et vengeur de son infidélité, s'il fait un parjure. (Lois civiles, liv. III, tit. VI, sect. 6.)

(3) Cette opinion de Legraverend a été expressément consacrée par deux arrêts de la Cour de cassation du 19 mai 1826 et du 10 juillet 1828; ils décident qu'en matière criminelle spécialement, si les témoins qui professent une autre religion que celle de l'Etat, prétent serment en la forme ordinaire, sans élever de ré-|

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clamation, le vœu de la loi est suffisamment rempli. (S., 27, 57, et 28, 261.)

Bourguignon, sur l'art. 75, professe également cette doctrine, que le serment prété suivant la forme ordinaire, suffit, quelle que soit la forme particulière à la secte religieuse du témoin.

La Cour de cassation de Belgique a également décidé que l'invocation de la divinité jointe à la formule du serment, telle qu'elle est déterminée par la loi est suffisante, qu'aucune cérémonie, aucun rite particulier ne sont exigés à peine de nullité, et qu'il n'est pas permis de les imposer. (Br., Cass., 29 oct. 1855; Buil. 1836, p. 48.) La même Cour a décidé qu'aucune forme spéciale pour le serment judiciaire des juifs n'était autrefois obligatoire en Belgique, et ne peut leur être imposée aujourd'hui. (Br., Cass., 29 juillet 1856; B., 1837, p. 21.)

Les membres d'une association religieuse, appelés comme témoins en justice, ne sont pas dispensés de la prestation de serment. Ainsi le défaut de prestation de serment, par une religieuse maîtresse d'école, entendue comme témoin devant la cour d'assises, emporte nullité. (Cass., 30 déc. 1824; S., 25, 305.)

(4) Cass., 13 avril 1816. (S., 20, 504; D., 25, 150; Berriat, p. 79.)- Cass., 29 avril 1830. (S., 30, 346.)—Br.,

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