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suspension du jury; seulement les cours criminelles, ainsi organisées, ne devaient point alors juger leur compétence par un arrêt préalable, et le recours en cassation était ouvert contre les arrêts définitifs, comme dans la procédure ordinaire par jurés.

Tel a été en France, depuis 1790 jusqu'à la mise en activité du Code d'instruction criminelle, le mode déterminé par les lois pour faire prononcer la mise en accusation et pour arriver au jugement de l'accusé ce Code a tracé de nouvelles règles qui doivent aujourd'hui guider la marche de tous les magistrats charges de concourir aux divers actes de procédure criminellé.

La loi impose à tous les officiers de police judiciaire, suivant leurs attributions respectives, l'obligation de rechercher les crimes et les délits, d'en rassembler les preuves et d'en livrer les auteurs aux tribunaux qui sont chargés de les punir (art. 8 et suiv., C. crim.) (1); mais ce soin appartient plus particulièrement au procureur du roi près le tribunal de première instance. Un magistrat qui fait partie de ce tribunal, est spécialement délégué pour instruire les procédures, et il reçoit, à cet effet, du prince, une commission dont le terme est de trois années (art. 55, C. crim.) (2).

Nous avons examiné ailleurs quels sont les devoirs du juge d'instruction (5); à la suite de l'exposé du système général de l'accusation, nous examinerons avec détail quelles sont, à cet égard, les attributions des cours royales.

Le droit d'accuser est susceptible de se prescrire dans un délai que la loi détermine, et qu'elle fait courir depuis l'instant où le crime, le délit ou la contravention ont été commis (4).

SECTION III.

DE L'ACCUSÉ.

152. L'accusé, suivant l'acception commune, est celui à qui l'on impute un crime ou un délit, et contre lequel on dirige en conséquence des poursuites judiciaires. Dans le langage de la loi, on n'appelle accusé que celui contre lequel une des chambres de la cour royale a rendu un arrêt de mise en accusation pour un crime susceptible d'être puni de peines afflictiyes ou infamantes, et qui est, en conséquence, traduit devant une cour d'assises sur un acte d'accusation dressé par le ministère public près la cour royale. Avant l'arrêt d'accusation, on

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désigne sous le nom de prévenu celui à qui l'on impute un crime; on donne également ce nom aux auteurs présumés des délits correctionnels et même des contraventions de police: cependant le Code d'instruction désigne quelquefois les derniers sous le nom d'inculpés (art. 126 et 129).

Si, pour prévenir la calomnie, on privait à Rome quelques personnes du droit d'accuser, on donnait à d'autres le privilége de n'être point accusées. Les magistrats, les généraux, les députés, tous ceux qui, pour l'intérêt de l'État, reipublicæ causa, étaient loin de la patrie, ne pouvaient être accusés des délits commis avant leur départ : la loi ne voulait pas donner à un ennemi le pouvoir de profiter de leur absence pour les calomnier; elle ne voulait pas que les magistrats jugeassent un homme qui ne pouvait pas se défendre lui-même, et que la condition de l'accusateur fût plus favorable que celle de l'accusé.

En France, la même prohibition n'existe pas: tous ceux qui ont commis des crimes peuvent être accusés, quoiqu'absents; mais la loi prescrit des règles particulières, soit pour l'instruction des procédures par contumace, soit pour la garantie dont doivent jouir les fonctionnaires publics (5).

Toute personne qui s'est rendue coupable d'un crime, peut être poursuivie et accusée.

Le mineur, le fils de famille, qui ont commis des délits, peuvent être traduits en jugement sans l'assistance de leur tuteur ou de leur curateur, ou de leur père. « L'autorisation du mari » n'est pas nécessaire lorsque la femme est pour» suivie en matière criminelle ou de police » (art. 216, C. crim.). »

La loi ne détermine pas d'une manière précise l'âge auquel un enfant peut être poursuivi criminellement et accusé à raison d'un crime dont il serait l'auteur; on pensait généralement autrefois que cet âge devait être fixé à l'époque voisine de la puberté (6). Cependant on cite quelques arrêts qui ont condamné à la peine de mort des enfants au-dessous de l'âge de douze ans (7).

Quoi qu'il en soit, le Code d'instruction et le nouveau Code pénal indiquent évidemment, comme le supposait le Code de 1791, que l'on peut être accusé et condamné avant l'âge de 16 ans.

Lorsque la faiblesse de l'âge du prévenu est telle, soit en elle-même, soit dans ses rapports avec la nature de l'acte qualifié crime ou délit,

(1) V. suprà, no 50.

(2) Ibid.

(3) V. suprà, nos 50 et 57.

(4) V. supra, no 17.

(5) V. infrà, no 173.

(6) V. Rousseaud de la Combe, pag. 18 et 19, qui cite

deux arrêts du parlement de Paris, des 9 juin 1625 et 19 mars 1629; et Muyart de Vouglans, pag. 26 et 27. (7) V. Dictionn. de Prost de Royer, au mot Accusation, et Jousse, tit. Jer, de l'Action qui nait des crimes, no 30.

qu'on ne puisse voir dans l'acte commis ni détermination de volonté, ni conscience du mal, de la part de celui qui en est l'auteur, il n'y a pas lieu de diriger des poursuites, et ce cas doit être assimilé à celui de la démence ou de la force majeure (art. 64, C. crim.).

Mais, lorsque les faits portent un caractère de méchanceté précoce, ils doivent être poursuivis malgré la faiblesse de l'âge, et réprimés par des mesures de correction.

Si l'accusé a moins de seize ans, le président doit poser une question sur le discernement (1); et de la solution de cette question dépend la décision qui doit être rendue.

d'un conseil, et de lui en désigner un, s'il n'en a pas choisi lui-même; et le Code, peu prodigue d'ailleurs de moyens de nullité, attache cette peine au défaut de désignation, lorsque l'accusé n'a pas fait de choix. Aussitôt après l'interrogatoire subi devant le président ou l'un des membres de la cour, l'accusé peut communiquer avec son conseil : celui-ci peut prendre connaissance de toutes les pièces au greffe, sans déplacement et sans que cela retarde l'instruction; il peut prendre ou faire prendre copie de celles qu'il croit utiles à la défense: une copie des procès-verbaux constatant le délit, et des déclarations écrites des témoins, est d'ailleurs délivrée gratuitement aux accusés (5).

Après que la mise en accusation a été ordonnée par la cour royale selon les formes vou- L'instant est arrivé où la cour, investie de lues par la loi, l'accusé doit être traduit devant la connaissance de l'accusation, va prononcer la cour d'assises: l'arrêt d'accusation déter-sur le sort de celui qui en est l'objet; l'accusamine le renvoi d'après la nature du crime qui teur et l'accusé sont en présence; les débats donne lieu aux poursuites. L'accusé est, en vont s'ouvrir. L'accusé comparaît libre et sans conséquence, envoyé dans la maison de justice fers: son défenseur est à ses côtés; il ne soufétablie près la cour, et toutes les pièces de la frira pas que les droits de son client soient procédure, ainsi que les pièces de conviction, méconnus; il portera dans l'instruction cette doivent être déposées au greffe. liberté d'esprit qui, quelquefois, abandonne l'innocence lorsqu'elle est devant son juge. Tout ce qui fut écrit dans le cours des informations, ne doit plus alors servir que de ren

L'instruction, jusqu'à ce moment, est tenue secrète, il ne s'agit que de constater l'existence d'un crime, d'en recueillir les preuves, d'examiner jusqu'à quel point sont fondées des im-seignements; c'est de l'instruction orale et putations dirigées contre un individu, et de décider si elles sont de nature à donner lieu à une procédure criminelle : le prévenu, livré à ses propres forces, ne doit pas être aidé du ministère d'un conseil ou d'un défenseur pour repousser et anéantir les éléments d'une accusation qui peut ne pas l'atteindre (2); mais aussitôt que l'accusé est renvoyé devant une cour pour y subir un jugement criminel, la loi veut qu'il soit environné de tous les moyens de préparer et de développer sa défense. Le premier devoir du magistrat devant lequel il comparait dans les vingt-quatre heures de son arrivée à la maison de justice pour y subir un nouvel interrogatoire, est de s'assurer s'il a fait choix

(1) V. art. 340, C. crim., art. 66 et suiv., C. pén., et infrà, no 268.

(2) On s'est souvent élevé contre le secret de la procédure en général, et même contre le secret de la procédure préliminaire. M. de Pastoret, dans ses Lois pénales, remarque avec raison que, dès que la plainte est rendue, l'honneur du prévenu est attaqué, sa liberté, sa fortune, sa vie, sont menacées, et qu'il doit lui être permis de se justifier.

Chez les Grecs et chez les Romains, ajoute-t-il, >> l'information était publique comme le reste de la pro»cédure, et l'accusé avait le droit d'interroger les té» moins, toujours entendus en sa présence. Elle fut » aussi publique en France, jusque vers le milieu du » XVIe siècle. Ainsi, l'usage si souvent imploré, a été, » pendant onze ou douze cents ans, conforme au vœu » que nous exprimons, et nos pères en avaient reçu » l'exemple des premiers peuples de l'antiquité. »

Ces observatious si judicieuses mériteraient d'être pesées. Il est à croire, toutefois, que le législateur ne s'est

contradictoire que les jurés et les juges doivent tirer leur conviction; et la publicité des débats, ce bienfait sollicité si vivement et si longtemps par tous les amis de l'humanité, en assurant à l'accusé que ses moyens de défense seront écoutés avec attention et appréciés avec justice sous les yeux de spectateurs curieux à qui rien n'echappe, ne lui laisse plus à redouter les tristes effets de la légèreté, de la prévention, de la corruption même que l'ancien secret des procé dures et de l'examen était si propre à favoriser, mais qui ne pourraient point affronter la lumière.

Lorsque l'accusé, les témoins ou l'un d'eux, ne parlent pas la même langue ou le même idiome,

pas dissimulé que le secret de la procédure préliminaire est déjà une grande rigueur, et que, puisqu'il l'a maintenue dans la loi nouvelle, il a considéré que l'intérêt de la société, la nécessité d'atteindre les crimes, et de ne pas assurer l'impunité des complices dans les crimes commis par plusieurs, rendaient cette mesure nécessaire, et la communication de la procédure à l'accusé, anssitôt qu'il est renvoyé devant une cour de justice, l'assistance d'un conseil qui lui est assurée par la loi, la publicité des débats, le système du jury, lui ont paru des garanties suffisantes, et doivent peut-être paraitre telles pourvu que les officiers de justice et les magistrals exécutent avec soin toutes les dispositions du Code, qui sont favorables à la défense et n'aggravent pas, par une négligence coupable, et par des lenteurs inutiles, la situation des prévenus qui attendent dans les fers le jour où la justice prononcera sur leur sort.

(3) V. infrà, no 237.

le président doit nommer d'office un interprète (1).

Il en est de même, si l'accusé est sourd-muet et qu'il ne sache pas écrire (2).

Il n'y a aujourd'hui que deux manières de fixer le sort d'un accusé; le punir ou l'absou- | dre. Dès que le crime n'est pas prouvé, il n'existe point aux yeux de la justice, et les cours judiciaires ne peuvent plus, après l'ouverture des débats, ni ordonner un plus amplement informé indéfini ou à terme fixe (3), ni prononcer ce que l'on appelait le hors de Cour. Un accusé qui a été déclaré innocent du crime qui lui était imputé, ne peut plus être poursuivi à raison du même fait; mais il faut bien distinguer à cet égard l'état d'accusation de celui de simple prévention (4).

Nous avons dit précédemment (5) que l'ordonnance de mise en liberté qui est rendue par le tribunal de première instance sur le rapport du juge d'instruction, est susceptible d'être attaquée par la voie d'opposition, et que cette voie est ouverte au procureur du roi, comme à la partie civile, lorsqu'il y en a une; mais que l'opposition doit être formée, à peine de nullité, dans le délai de vingt-quatre heures, délai qui commence à courir à une époque déterminée : nous croyons avoir démontré que si, pour ne pas prolonger la détention d'un prévenu, la lui a pris soin de fixer les règles auxquelles on est tenu de se conformer pour s'opposer à l'exérution de l'ordonnance rendue en sa faveur, il ne faut pas conclure de ces dispositions qu'un prévenu, remis en liberté en vertu et par suite de cette ordonnance, ne puisse pas être ultérieurement poursuivi de nouveau pour le même fait, si quelque circonstance vient répandre de nouvelles lumières sur l'objet de la plainte ou de la dénonciation, et sur la culpabilité du prévenu.

Celui à l'égard duquel la cour royale a dé

(1) P. sur la nomination des interprètes, l'art. 352, C. crim., et suprà, no 95.

(2). l'art. 353, C. crim., et infrà, no 163. (3) V. sur ce mode de procéder introduit antrefois par l'usage, l'opinion de M. Servan, dans ses Réflexions sur quelques points de nos lois, etc.

(4). au chap. X, ce que nous avons dit sur l'opposition à l'ordonnance rendue par la chambre du conseil du tribunal de première instance, et plus bas, no 155. (5) P. ch. X.

(6) V. art. 246, C. crim., et infrà, no 155.

(7) « Le prévenu à l'égard duquel le jury d'accusation ⚫ a déclaré qu'il n'y a pas lieu à accusation, ne peut plus être poursuivi à raison du même fait, à moins ⚫ que, sur de nouvelles charges, il ne soit présenté un ⚫ nouvel acte d'accusation.» (Art. 255.)

(8) . ch. X.

(9) Toute personne acquittée légalement ne pourra * plus être reprise ni accusée à raison du même fait. * (Art. 360, C. crim.).

» La cour prononcera l'absolution de l'accusé, si le fait dont il est déclaré coupable n'est pas défendu par ⚫ une loi pénale. » (Art. 364, C. crim.)

cidé qu'il n'y a pas lieu au renvoi devant la cour d'assises, ne peut plus y être traduit à raison du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges (6).

Cette dernière disposition se trouvait dans le Code des délits et des peines (7); mais la loi nouvelle, plus prévoyante que l'ancienne, a pris soin d'expliquer ce que l'on doit considérer comme charges nouvelles, et la jurisprudence des tribunaux ne sera plus incertaine et divergente sur un point si important et qui touche de si près aux plus chers intérêts des citoyens.

Ainsi, dans l'état de la législation et suivant la doctrine que nous avons établie (8), un prévenu rendu à la liberté par une ordonnance du tribunal de première instance contre laquelle il n'y a point eu d'opposition, peut être poursuivi de nouveau en tout état de cause, si l'on vient à recueillir contre lui quelque indice de culpabilité.

Un prévenu remis en liberté par arrêt de la chambre d'accusation de la cour royale, rendu après l'ordonnance de prise de corps décernée par le tribunal de première instance, ou sur opposition à une ordonnance de mise en liberté emanée du même tribunal, ou sur une instruction faite d'office d'après l'ordre de la cour royale, peut aussi être l'objet de nouvelles poursuites, avec cette différence que la loi exige, en ce cas, qu'il soit survenu de nouvelles charges et que l'espèce et la nature en soient définies.

Mais si l'accusé a été traduit devant une cour d'assises en vertu d'un arrêt de mise en accusation et de renvoi, et qu'il ait été déclaré non coupable, ou que le fait dont il est reconnu l'auteur ne soit pas rangé par la loi pénale dans la classe des crimes ou des délits, il est désormais à l'abri de toutes poursuites à raison du fait pour lequel il a été jugé (9).

Les jugements des tribunaux de police et ceux des tribunaux correctionnels dont il n'y a pas eu appel et qui ont acquis la force de chose jugée, produisent les mêmes effets à l'égard des individus qu'ils acquittent.

On trouve dans S., 13, 352 et D., 4, 233, un arrêt du 10 avril 1825, qui, sur le pourvoi du procureur général, casse un arrêt de la cour de Rouen, chambre des mises en accusation.-Cette cour avait refusé d'évoquer une instruction par ces motifs; que déjà une ordonnance de la chambre du conseil du Havre, qui n'était plus susceptible d'opposition, avait déclaré qu'il n'y avait lieu à suivre, qu'on ne pouvait évoquer qu'une instruction existante; et qu'enfin, il n'y avait pas de charges nouvelles.

Le procureur général n'a pas jugé convenable de traiter la question résolue par le premier motif de l'arrét, il s'est uniquement attaché à démontrer qu'il y avait des charges nouvelles, et la cassation a été prononcée par ce motif; mais l'arrêtiste saisit cette occasion de rappeler les principes que Legraverend vient de proclamer. Voici comment il s'exprime :

« N'est-il pas de règle générale que des poursuites

La solennité du jugement, et la maxime gé- | nérale non bis in idem, ne laissent plus aucun moyen de l'inquiéter de nouveau, quand même les preuves les plus évidentes de sa culpabilité viendraient à être produites; et la loi n'admet à cet égard aucune espèce d'exception. Elle exige seulement que l'arrêt d'absolution soit légalement rendu, parce qu'un jugement qui est contraire aux règles et qui a violé la loi, n'a pas, à proprement parler, le caractère d'un jugement; que la loi règle la manière d'en provoquer l'anéantissement, et que ce qui est nul ne peut produire aucun effet.

153. Mais comment doit être entendue la disposition du Code qui prohibe de nouvelles poursuites à raison du même fait, après un acquittement légal ?

Le seul sens raisonnable qu'on puisse donner à cet article, c'est qu'un individu accusé d'un crime ne peut plus être repris, à raison de la même accusation. Le Code d'instruction appelle fait l'accusation elle-même, le crime qualifié, et non l'acte matériel à raison duquel est intervenue l'accusation: cela semble résulter de la combinaison de divers articles de ce Code (art. 337, 558, 544, 345 et 351); et donner un sens différent au mot fait qu'il emploie en prohibant de nouvelles poursuites, ce serait faire porter l'autorité de la chose jugée sur une chose qui n'a pas même été mise en question (1).

Sous le régime de la loi du 5 brumaire an IV, la déclaration du jury d'accusation et du jury de jugement avait et devait avoir un effet différent de celui qui résulte de la déclaration du jury tel qu'il existe aujourd'hui. Sous la loi de brumaire, le jury d'accusation examinait la culpabilité du prévenu d'une manière absolue,

sans considérer si le fait qui lui était imputé était un crime, un délit ou une contravention, ni s'il devait être puni d'une peine afflictive ou infamante, correctionnelle ou de simple police. En jugeant qu'il n'y avait pas lieu à accusation, il décidait en même temps que le prévenu n'était coupable ni de crime ni de délit, ni de contravention. Aussi tenait-on pour constant, et la jurisprudence générale était-elle, que tout individu acquitté ne pouvait être repris d'aucune manière pour le fait matériel qui avait donné lieu à la prévention élevée contre lui.

Sous l'empire de la même loi, on devait diviser les questions à proposer au jury de jugement, de manière qu'il pût juger de la moralité du fait, sous quelque point de vue qu'on le considérât: et il résultait de là que lorsque le prévenu était acquitté, il devait se trouver à l'abri de toute nouvelle poursuite pour le même fait, puisque ce fait avait déjà été apprécié sous tous les rapports.

Mais cette manière de procéder a été changée par nos lois nouvelles. Elles autorisent à ne plus diviser la question sur laquelle le jury doit prononcer; et si elles ne défendent point absolument cette division, lorsque le président des assises la juge utile, ou même lorsque le jury croit devoir la faire pour rendre sa déclaration plus précise (2), elles indiquent du moins, par la formule qu'elles contiennent, que la question peut être posée d'une manière générale,et que le jury peut aussi faire sa déclaration en termes généraux: ainsi, dans le cas de meurtre, par exemple, on peut ne faire au jury que cette question: L'accusé est-il coupable d'ho micide commis volontairement? et le jury peut déclarer d'une manière générale, Oui, l'ac

nouvelles sont toujours prohibées après jugement ? qu'elles sont toujours permises après ordonnance de la chambre du conseil? qu'elles sont permises ou défendues après mise hors d'accusation, selon qu'il y a ou n'y a pas de nouvelles charges.-Duvergier.

(1) La Cour de cassation de Bruxelles a jugé que la déclaration du jury que l'accusé n'est pas coupable, entraîne son acquittement irrévocable, de sorte qu'on ne peut plus, sans violer la chose souverainement jugée en fait par le jury, soumettre l'accusé à une nouvelle poursuite, à raison du même fait matériel et principal, mais présenté avec une modification quelconque d'où résulterait une autre qualification et l'application d'un autre article du Code pénal que celui qui avait été indiqué dans l'acte d'accusation primitif.

Ainsi lorsqu'un individu, accusé d'avoir porté volontairement plusieurs coups de couteau à telle personne déterminée, a été traduit devant une cour d'assises, à raison de ce fait, que le ministère public a qualifié d'assassinat, passible de la peine capitale, et que le jury, sur la question à lui soumise, a répondu, non, l'accusé n'est pas coupable, ce même individu ne peut plus être poursuivi de nouveau à raison du même fait, que le ministère public qualifie alors de blessures graves, pouvant donner lieu à l'application des peines portées par

l'art. 309 du Code pénal. (Br., Cass., 23 déc. 1831 Jur. de B., 1832, 1, 34; Jur. du 19e s., 1832, 3, 45.) V. dans ce sens, Carnot sur l'art. 360, et en sens contraire, Dalloz, 4, 202; Merlin, Rép. 21, 261; Mangin, Tr. de l'Action publique, no 409.

Cet auteur pense que dans l'état actuel de la législation et de la jurisprudence de la Cour de cassation de France, toutes les fois que la déclaration du jury, l'arrêt ou le jugement qui est intervenu excluent tous les délits qui pouvaient résulter des faits commis par l'accusé ou le prévenu; que toutes les fois même que ces décla ration du jury, arrêt et jugement peuvent être interprétés dans le sens de cette exclusion, le ministère public est non recevable à renouveler sa poursuite, en donnant aux mêmes faits une autre qualification. Mais que quand, au contraire, le jury ou les juges n'ont statué que sur l'un des délits ou des crimes que les fails commis par l'accusé pouvaient constituer; que quand il est certain que ce délit ou ce crime est le seul qui ait été réellement jugé; l'action publique, pour la poursuite des autres crimes ou délits que les faits ont pu engendrer, n'est point éteinte, et que la maxime non bis in idem ne peut pas lui être opposée.

(2) V. ce que j'ai dit sur la position des questions, au no 268.

cusé est coupable, ou, Non, l'accusé n'est pas coupable; ou bien il peut déclarer que l'homicide est constant, mais que l'accusé ne l'a pas commis volontairement.

Or, on sent que, par la déclaration que l'accusé n'est pas coupable ou par celle que l'homicide est constant, mais que l'accusé ne l'a pas commis volontairement, il ne décide point si l'accusé est coupable d'homicide involontaire et commis par imprudence, maladresse, etc.; cette question reste donc entière et peut être l'objet d'une poursuite correctionnelle, sans qu'on porte atteinte à l'art. 360 du Code d'instruction. Le système contraire aurait pour résultat, que l'auteur d'un homicide involontaire, renvoyé, d'après de faux indices, devant une cour d'assises, pour crime de meurtre, echapperait même à la peine correctionnelle qu'il mérite de subir (1).

C'est ainsi que j'ai vu un homme accusé de parricide recouvrer de suite la liberté, parce que, la déclaration du jury l'ayant déclaré non coupable de ce crime atroce, et la cour d'assises l'ayant acquitté par suite de cette déclaration, le ministère public ne crut pas pouvoir le poursuivre de nouveau comme coupable d'avoir porté des coups à son père, quoique ce fait fût résulté des débats et eût même été avoué par l'accusé.

Ce système qui se rattache à l'ancienne législation et à quelques arrêts de la Cour de cassation rendus sous son empire (2), est aujourd'hui proscrit par la jurisprudence même de cette cour (5), et ne saurait prévaloir contre une doctrine plus saine et plus conforme à la raison et à l'intérêt de la justice; et l'individu acquitté à la cour d'assises pour fait considéré comme crime peut être poursuivi de nouveau, à raison du même fait considéré comme délit correctionnel, bien que le ministère public n'ait fait aucune réserve à cet égard devant la cour d'assises, alors que le délit se trouvait signalé dans l'instruction criminelle (4).

Mais il serait irrégulier de vouloir poursuivre par la voie criminelle, à raison d'un fait qui offrirait à la fois, dans ses circonstances indivisibles, les caractères d'un crime et ceux d'un simple délit, un individu qui aurait d'abord été traduit mal à propos devant un tribunal corretionnel, et qui aurait été acquitté; le prévenu ne doit pas, en pareil cas, être victime de l'erreur des magistrats, et subir un double jugement sur le même fait. Le règlement de la compétence est irrévocablement acquis au prévenu, si le ministère public n'a pas réclamé; et, par suite, le jugement rendu sur le crime mal à propos considéré comme un délit, a pour lui l'autorité de la chose jugée. C'était sous l'empire du Code de brumaire, la jurisprudence de la Cour de cassation (5). Le nouveau Code n'a pu y apporter de changement, et des arrêts nombreux en offrent la preuve (6).

Toutefois, si le fait se divise naturellement en plusieurs branches, en plusieurs parties distinctes, dont l'une offre tous les caractères d'un crime grave, et l'autre constitue un délit correctionnel tout à fait indépendant de ce crime, ou plutôt, si l'action principale se compose de plusieurs faits non connexes, divisibles, et dont l'un ou les uns puissent donner lieu à des peines afflictives et infamantes, l'autre ou les autres à des peines correctionnelles, alors l'accusé acquitté par une cour d'assises peut être régulièrement poursuivi devant le tribunal correctionnel, et ce n'est point violer la loi qui défend de le reprendre ou de l'accuser de nouveau à raison du même fait. Nous avons encore pour garants de cette distinction divers arrêts de la Cour de cassation (7).

Il existe, au reste, dans le Code d'instruction, des dispositions particulières concernant la marche que les Cours d'assises doivent tenir, en certain cas, à l'égard des accusés, lorsque le fait qui leur est imputé change de nature dans les débats (8).

La mise en accusation suspend l'exercice des

(1). Cass., 29 oct. 1812. (D., 1, 194; S., 13, 242.) (2) Vles arrêts des 21 therm. an VII, 14 pluv. an XII, 23 frim. an XIII et 26 déc. 1807..

(3) V. l'arrêt du 29 oct. 1812. (D., 1, 194 ; S., 13, 1, 242.)

(4) Cass., 22 nov. 1816. (D., 4, 213; S., 17, 83.) Un arrêt du 24 juill. 1822 (D., 4, 224; S., 23, 39) a décidé qu'un notaire acquitté sur une accusation de faux commis dans un acte ne peut être puni de peines de discipline par le motif que les énonciations qu'il aurait insérées dans l'acte seraient fausses.-Legraverend cite cet arrét, au no 226, et paraît approuver le système qu'il consacre; je crois au contraire que cet arrêt a fait une fausse application de la maxime non bis in idem. En effet, il est possible que les énonciations fausses n'aient pas été insérées avec une intention criminelle et qu'ainsi il n'y ait pas faux ; mais que cependant le notaire ait agi avec légèreté, négligence, ou même malveillance, de manière que des peines de discipline lui soient applicables.

Aussi, deux arrêts de la Cour de cassation du 50 décembre 1824 et du 13 janv. 1825, ont décidé que lorsqu'un notaire a été acquitté par le motif que le délit à lui imputé, était prescrit; ou parce que les altérations qu'il avait faites dans ses minutes n'ayant pour but que de soustraire les parties au payement des droits de mutation ne constituaient pas le crime de faux, dans ces cas il peut être pani de peines de discipline.

Deux arrêts de Colmar, des 5 et 8 mars 1825 (S., 25, 416), ont également jugé que l'arrêt de la chambre d'accusation qui a décidé qu'il n'y a lieu à suivre contre un nolaire prévenu de faux, ne fait pas obstacle aux poursuites disciplinaires à raison du même fait.

(5) Cass., 10 juill. 1806. (D., 4, 209; S., 6, 2, 757.) (6) V. infrà, no 307.

(7) V. notamment l'arrêt du 16 pluv. an XIII, et celui du 22 nov. 1816. (S., 17, 83; D., 4, 213.) (8) V. les art. 365 et 589, C. crim.

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