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CHAPITRE XII. ·

DE LA MANIÈRE DE PROCÉDER CONTRE LES SOURDS-MUETS PRÉVE‐ NUS DE DÉLITS OU DE CRIMES; ET DES MUETS VOLONTAIRES.

SECTION I.

DES SOURDS-MUETS.

S ler.

165. Le Code des délits et des peines, et toutes les lois intermédiaires qui ont précédé la mise à exécution du Code d'instruction, n'avaient point déterminé la manière de procéder contre les sourds-muets prévenus de délits ou de crimes. Ce silence avait souvent jeté dans le plus grand embarras les magistrats chargés de poursuivre les prévenus et d'assurer la punition des coupables. En effet, l'art. 594 du Code des délits et des peines déclarait positivement que toutes les formes de procéder, autres que celles que ce Code avait établies ou rappelées, devaient être considérées comme anéanties, et les juges se trouvaient ainsi placés dans la cruelle alternative de s'écarter de leurs devoirs et des principes de justice et d'hu- | manité en laissant croupir dans les prisons les sourds-muets prévenus de délits, et de soumettre ainsi à des rigueurs inutiles l'innocence injustement soupçonnée, et de préparer aux coupables les moyens de prescrire contre le délit et de s'assurer l'impunité, ou de voir casser, comme frappées de nullité, les procédures qu'ils auraient instruites contre les sourdsmuets, parce que le mode d'instruction qu'ils auraient adopté n'avait point la sanction de la nouvelle loi. Cependant, le premier de ces inconvénients étant sans contredit le plus grave, il fallait bien ou se conformer aux règles tracées par l'ordonnance criminelle de 1670, ou chercher dans la législation nouvelle quelque

(1) V. sur l'art. 2 du tit. XVIII, l'annotation de Jousse, son Traité de la Justice criminelle, t. II, 3e part.,

disposition dont on pût s'aider en pareils cas, du moins par analogie.

Suivant l'ordonnance de 1670 (titre XVIII), lorsque l'accusé était sourd-muet, le juge était tenu de lui nommer d'office un curateur qui sût lire et écrire ce curateur devait faire serment de bien et fidèlement défendre l'accusé ; le défaut de mention de cette formalité emportait la nullité. Le curateur, pour pouvoir remplir convenablement l'objet de sa mission, était autorisé à s'instruire secrètement avec l'accusé, soit par signes, soit autrement, et le juge devait en conséquence nommer, autant que cela était possible, pour curateur, un homme qui connût particulièrement l'accusé et qui eût vécu avec lui (1).

Le sourd-muet qui savait écrire, pouvait écrire, et signer ses réponses, ses dires et reproches contre les témoins; le tout devait également être signé du curateur.

Si le sourd-muet ne savait ou ne voulait pas écrire ou signer, le curateur devait répondre en sa présence, fournir des reproches contre les témoins, et faire tous les actes que l'accusé aurait pu faire; les formalités à remplir à l'égard du curateur étaient les mêmes qu'envers l'accusé, sauf que le curateur devait être debout et nu-tête en présence des juges, lors du dernier interrogatoire, quelque conclusion ou sentence qu'il y eût contre l'accusé; mais non sur la sellette, comme l'accusé devait alors y être placé lorsqu'il y avait des conclusions à peine afflictive (2).

Tous les actes de la procédure devaient faire mention de l'assistance du curateur, à peine de nullité et des dépens, dommages et intérêts des parties contre les juges; néanmoins le dispositif du jugement ne devait faire mention que de l'accusé.

Le Code des délits et des peines, comme nous

liv. 11, tit, XVII, p. 697 et suiv. . Rousseaud de la Combe, p. 554, et Muyart de Vouglans, p. 676. (2) V. ibid.

l'avons fait remarquer, n'avait rien dit des ment de régulariser leurs opérations, et de les sourds-muets mais, avant ce Code, la loi ramener tous à la stricte exécution de la loi; et des 29 septembre-21 octobre 1791, en forme quoiqu'on ne cite aucun arrêt de cette cour d'instruction, sur la procédure criminelle, con- rendu en cette matière, il paraît cependant que tenait une observation importante. « L'assem- la question s'y est présentée une fois, et qu'elle » blée nationale, y était-il dit, convaincue de a été jugée en faveur du système adopté, sur le » ce principe, que la présomption est tout en- pourvoi d'un sourd-muet condamné pour »tière en faveur de l'innocence, a pensé que crime. Ce sourd-muet n'était point élève de » la société doit se charger de faire la preuve M. l'abbé Sicard, on lui avait donné pour in» contre l'individu qu'elle accuse en consé- terprète, dans le cours de l'instruction et des » quence, elle s'est bien gardée d'établir rien débats, un serrurier chez lequel il avait travaillé de semblable à la procédure contre le muet depuis sa première jeunesse, et avec lequel il a volontaire, qui avait lieu suivant les ancien- s'était formé un langage. Le condamné prétennes formes. Quant aux muets naturels, l'as- | dait se faire un moyen de cassation de l'admis>sistance de leurs amis et conseils lèvera tou-sion de cet interprète; mais le moyen fut re»tes les difficultés à leur égard. Cette assistance aura lieu pour eux dans toutes les parties de la procédure. La loi n'a pas de disposition » sur ce sujet, parce qu'elle laisse à la prudence » et à la conscience des juges l'emploi de tous » les moyens propres à mettre la vérité dans » son plus grand jour. »

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D'un autre côté, le Code des délits et des peines (art. 368) contenait la disposition suivante: «Dans le cas où l'accusé, les témoins » ou l'un d'eux ne parleraient pas la même langue ou le même idiome, le président du tribunal criminel nomme d'office un interprète, âgé de vingt-cinq ans au moins, et lui » fait promettre de traduire fidèlement, et sui» vant sa conscience, les discours à transmettre entre ceux qui parlent des langages dif⚫férents. »

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jeté.

C'est du moins ce que rapporte Merlin h: v: sur la foi d'un des magistrats de cette cour, qui se'souvenait de cette décision, mais qui ne l'avait pas notée.

L'usage adopté par les tribunaux a été consacré par la loi nouvelle et ce que l'on faisait autrefois en se fondant sur un article du Code des délits et des peines, qui ne pouvait être appliqué aux sourds-muets que par analogie, le Code d'instrution (art. 333) le prescrit comme une forme de procéder.

Cet interprète, aux termes de l'article 352, doit être âgé de vingt-un ans au moins; il doit prèter serment de traduire fidèlement les discours à transmettre: il ne peut pas être pris parmi les témoins, les juges et les jurés, quand même l'accusé et le procureur général y consentiraient. Ces conditions d'éligibilité de l'interprète et le serment qu'il doit prêter sout prescrits à peine de nullité.

Mais outre qu'elle est incontestable, à mon avis, qu'elle est fondée tout à la fois sur la loi et sur la raison, j'ajoute qu'il est difficile de se rendre compte de l'arrêt de la Cour de cassation lorsqu'on en a lu le dernier considérant qui paraît avoir surtout motivé la décision; en effet, ce considérant est ainsi conçu:

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Cette dernière manière de procéder s'accordait parfaitement avec l'instruction du 29 septembre 1791, qui, quoiqu'abrogée comme loi par le Code du 3 brumaire an IV, pouvait tou- Cette doctrine relativement à l'âge est conjours être consultée avec fruit comme une in-tredite par un arrêt de rejet du 23 déc. 1824 (1). struction utile et profondément méditée. Les Sourds-muets pouvaient d'ailleurs être considérés comme parlant un langage différent de celui des témoins et des juges; et l'on s'était en conséquence attaché généralement au mode prescrit par l'article 568, lorsqu'il s'agissait de juger des sourds-muets. Il est de fait que, dans le ressort des différentes cours de justice criminelle, au lieu de donner au sourd-muet préVenu de délit un curateur dans la forme déterminée par l'ordonnance de 1670, on se bornait à lui nommer un interprète, conformément à ce qui était réglé, pour des cas à peu près semblables, par l'article 368 du Code des délits et des peines; et cet interprète devait être choisi parmi des personnes qui avaient des relations habituelles avec le prévenu, et qui étaient familiarisées, soit avec la langue générale des signes, lorsque le prévenu était instruit, soit avec son langage ordinaire et particulier; et il n'est pas à notre connaissance que ce mode ait jamais été critiqué par le magistrat supérieur chargé de la surveillance de tous les tribunaux français, ou par la Cour de cassation, chargée spéciale

«Que le texte dudit article 335 prouve d'ailleurs jusqu'à l'évidence que son premier alinéa a dérogé, relativement à l'âge de l'interprète, à la disposition contenue au premier >> alinéa de l'art. 332 puisqu'il ajoute : le surplus des dispositions du précédent article " sera exécuté. »

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Quelque soin que j'aie mis à relire les articles352 et 333. je n'ai pu entrevoir cette évidence prétendue, énoncée dans le motif de l'arrèt. Pour que le raisonnement fut admissible, il faudrait que l'art. 353 eût dit: les dispositions des alinéa suivants seront au surplus exécutées. Et dans cette rédaction la formalité du serment

(1) S., 25, 162.

se serait trouvée omise comme la condition de l'âge, puisqu'elle fait partie du premier alinéa. Mais l'article 333 disant, au contraire: «le surplus des dispositions du précédent article sera exécuté,» il est évident que sauf le choix d'une personne habituée à converser avec le sourd-muet au lieu d'une personne qui connaisse la langue ou l'idiome de l'accusé ou du témoin, les conditions de l'âge, comme du serment, enfin le surplus des dispositions prescrites doit être exécuté.

Il faut donc tenir pour constant, malgré cet arrêt de rejet de la Cour de cassation que l'interprète donné aux sourds-muets illettrés doit, comme celui que l'on donne à ceux qui parlent une langue ou un idiome différent, être âgé de 21 ans, parce que cet âge légal est nécessaire pour inspirer de la confiance, pour bien se pénétrer de ses devoirs, pour connaître la foi due au serment et s'y conformer, et parce que la difficulté d'avoir pour interprète, en pareil cas, une personne de 21 ans, habituée à converser avec un sourd-muet n'est pas plus grande que celle de se procurer dans telle ou telle province du midi de la France, un individu du même age qui parle l'idiome de la basse Bretagne par exemple, et vice versa, et parce que d'ailleurs cette considération très-secondaire disparaît devant le besoin d'une justice régulière (1).

Espérons, au reste, qu'il en sera de cet arrêt isolé du 25 décembre 1824 comme de quelques arrêts de la Cour de cassation relatifs au serment des enfants au-dessous de 15 ans, ou à la qualité d'étrangers des jurés, etc., etc., que sa haute sagesse a réformé après plusieurs examens, quoique sa jurisprudence parût fixée par une longue série de décisions.

Mais ce mode trace par la loi pour la désignation d'un interprète ne concerne que les accusés sourds-muets qui sont illettrés (article 553, C. crim.).

Ainsi, lorsqu'il y a lieu de juger des sourdsmuets qui savent écrire, s'il est convenable de leur désigner toujours un interprète pour faciliter les rapports et les communications entre les juges, les jurés, les témoins et l'accusé (2), | cet interprète n'est point alors, comme au premier cas, partie nécessaire dans la procédure; ce n'est point avec lui, comme intermédiaire de l'accusé, mais avec l'accusé directement,

que se fait l'instruction; et cette distinctiou est une nouvelle preuve de la sollicitude du législateur, puisque le sourd-muet qui sait écrire a en lui-même un moyen plus facile et surtout bien plus sûr que celui de la traduction d'un interprète, pour comprendre l'objet de l'accusation et les interpellations qui lui sont faites et pouvoir, en y répondant et en se défendant, manifester ses pensées et ses observations: ainsi toute l'instruction, même celle qui a lieu aux débats devant les jurés et les juges, doit être faite par écrit en cette circonstance.

§ II.

Observations sur la nomination des interprètes dans les procédures relatives aux sourds-muets.

164. La loi ne parle que de l'accusé, du président de la cour d'assises (art. 566, C. crim.), et du procureur général; et, l'article 355 faisant partie de la 1re sect. du chap. IV du Code d'instruction, qui concerne l'examen, il est naturel de penser que ces dispositions ne s'appliquent exactement qu'aux sourds-muets contre lesquels l'accusation est déjà admise, et qui, sont traduits devant une cour d'assises. Cependant, comme, en matière criminelle, une longue instruction doit précéder ce moment, et, que, pour la faire avec soin, il faut bien rendre intelligibles au sourd-muet les soupçons, les indices, les charges qui s'élèvent contre lui, et recueillir ses réponses et ses moyens de défense, et que le sourd-muet ne peut ni être mis en accusation avec moins de précautions que tout autre individu, ni comparaitre devant une cour d'assises sans avoir subi les premières épreuves de la procédure criminelle, je pense qu'il faut considérer les termes des articles 532 et 555 comme l'expression générale de la volonté du législateur pour la manière de procéder à l'égard des accusés sourds-muets et de ceux qui ne parlent pas la même langue et le même idiome, et que les formalités qu'ils prescrivent doivent, en conséquence, être mises en usage, avec les distinctions résultant de la loi, par le juge instructeur ou par la chambre d'accusation de la cour royale, lorsqu'on s'occupe de l'instruction et de tous les actes antérieurs aux

(1) Après avoir rapporté en entier l'addition que Legraverend avait laissée manuscrite, je dois faire remarquer que ses raisonnements ne me paraissent pas sans réplique lorsqu'il combat les inductions que la Cour de cassation à tirées du texte de l'art. 333. En effet, si cet article disait seulement qu'on désignera pour interprète une personne ayant l'habitude de converser avec le sourd-muet; sans doute les dispositions de l'article 332 relatives à l'âge ne seraient pas absolument inapplicables, puisqu'il y aurait faculté de choisir, entre plusieurs individus, celui qui, ayant l'habitude de con

verser avec l'accusé, serait d'ailleurs âgé de vingt et un ans; mais l'article porte que c'est la personne qui a le plus d'habitude qui doit être choisie. Or, il peut se faire que cette personne expressément désignée n'ait pas vingt et un ans, il est donc vrai que la condition de l'age exigée par l'art. 552 n'est pas exigée absolument pour le cas prévu par l'art. 555,-Duvergier.

(2) Suivant l'ord. de 1670, on nommait un curateur au sourd-muet accusé qui savait écrire, comme à celui qui était illettré.

débats en matière criminelle; et que pour le jugement des délits correctionnels et des contraventions de police, et la procédure qui peut précéder le jugement, le même mode doit être également adopté comme conforme tout à la fois à la raison, à la justice, à la loi nouvelle et à l'ancien usage.

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avec le nouveau système des lois publiées sur la procédure criminelle, et nous avons vu, en effet, au paragraphe précédent, que la loi de 1791, en forme d'instruction, déclarait, en termes précis, que si le législateur n'avait rien prescrit en pareil cas, c'est qu'il appartient spécialement à la société, ou à celui qui la représente près des cours et des tribunaux, de faire la preuve contre l'accusé.

Cette opinion, à laquelle la nécessité ferait en quelque sorte un devoir de se ranger, est d'ailleurs conforme à la loi du 29 sept. 1791. Cette loi, il est vrai, ne parlait pas d'interprète pour les sourds-muets: mais elle portait, comme on l'a vu, que, quant aux muets naturels, l'assistance de leurs amis et conseils lèverait les difficultés à leur égard; que cette assistance aurait lieu pour eux dans toutes les parties de la procédure; et si la loi n'avait pas de disposition sur ce sujet, c'est, conime elle l'exprime formellement, parce qu'elle laissait à la prudence et à la conscience des juges l'emploi de tous les moyens propres à mettre la vérité dans son plus grand jour.

SECTION II.

DES MUETS VOLONTAIRES.

165. L'ordonnance de 1670 désignait sous le nom de muet volontaire l'accusé qui refusait de répondre, lorsqu'il pouvait le faire; elle défendait de lui donner un curateur; elle prescrivait au juge de faire à l'accusé trois interpellations de répondre, en lui déclarant, à chaque fois, que son procès lui serait fait comme à un muet volontaire, et qu'ensuite il ne serait plus reçu à répondre sur ce qui aurait été fait en sa présence pendant son refus de parler: toutefois elle laissait au juge la faculté de donner à l'accusé un délai pour répondre; mais ce délai ne devait pas excéder vingt-quatre heures. Si l'accusé persistait à garder le silence, le juge devait continuer l'instruction sans qu'il fût besoin de l'ordonner; et, dans chaque acte de procédure, il devait être fait mention du refus de l'accusé de parler. Si, dans la suite, l'accusé voulait répondre, ce qui avait été fait jusqu'à ses réponses devait subsister; il n'etait même plus admis à former des reproches contre les témoins, s'il ne justifiait, par pièces, des motifs de suspicion. Si l'accusé, après avoir commencé à répondre, cessait de le vouloir, la procédure devait être continuée. Cependant les faits sur lesquels l'accusé refusait de répondre, ne devaient pas être censés confessés par lui; mais ce silence pouvait former contre lui un indice.

Ces formes rigoureuses de procéder, toutes défavorables à l'accusé (1), devaient disparaître

(1) Malgré la sévérité de ces formes, elles ne peuvent étre comparées à celles que prescrivent, en pareil cas,

LEGRAVEREND.-TOME I.

La nouvelle loi ne contient pas plus de dispositions sur cet objet que n'en contenaient la loi du 16 septembre 1791 et le Code des délits et des peines; et comme un caprice de l'accusé ne peut ni arrêter ni suspendre le cours de la justice, l'instruction doit être continuée aujourd'hui ainsi qu'elle l'était autrefois, et il doit même être procédé au jugement malgré le refus de répondre, sans qu'il soit alors nommé d'interprète, comme cela a lieu pour les sourdsmuets, puisque cette nomination n'aurait aucun objet: mais le silence de l'accusé, quoique très-suspect, et d'ailleurs injurieux à la dignité des magistrats, ne forme pas un indice contre lui. Le juge instructeur doit agir et les tribunaux doivent prononcer suivant leur conscience, comme dans toute autre affaire, d'après le résultat des charges et des preuves, indépendamment du refus de l'accusé de répondre; et si (pourvu que ce soit avant le jugement) l'accusé se décide à parler après avoir refusé de le faire, il peut discuter tout ce qui a été fait pendant son silence, sans qu'on puisse en aucune manière le lui opposer, il le peut surtout, à quelque époque du débat que ce soit, puisque devant la cour toute l'instruction doit ètre orale, et que les principes libéraux de notre législation criminelle ne permettent jamais de refuser à un accusé présent les moyens de se défendre et de se justifier.

On sent que l'accusé qui s'est obstiné à se taire, laisse naturellement subsister contre lui, dans toute l'intégrité de leur force, les impu tations, les dépositions qui sont à sa charge, et dont quelques explications de sa part auraient pu détruire ou affaiblir l'effet: mais il ne doit attribuer qu'à lui seul cet inconvénient; et le législateur a, sans doute, fait pour la justice et pour l'humanité tout ce qu'il était possible de faire, en ne rendant pas la situation du muet volontaire pire que celle de tout autre accusé, et en ne le privant pas de l'assistance du conseil qui, dans ce cas comme dans tout autre, doit être donné à l'accusé, et que son ministère oblige à discuter les charges et les motifs d'accusation et à présenter les moyens de défense et d'excuse.

Le mode prescrit par l'ordonnance de 1670 à l'égard des muets volontaires n'était pas ap

les lois anglaises. V. ce qui a été dit dans l'Introduction sur le jugement de penance.

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plicable à ceux qui refusaient de répondre, soit à raison de l'incompétence prétendue du tribunal ou du juge, soit parce qu'ils croyaient avoir des motifs valables de récusation, soit parce qu'ils alléguaient que l'affaire pour laquelle on les avait décrétés était trop légère pour leur faire subir un interrogatoire, ou qu'il n'y avait contre eux aucun indice, ou qu'ils n'étaient pas légitimement constitués en jugement: c'est ce que prouve le procès-verbal mème de l'ordonnance (1). Cette prétention formait alors un incident qui devait être d'abord jugé par le tribunal entier. Aujourd'hui toutes ces allégations, la récusation exceptée (2), ne sont plus de nature à donner lieu à une procédure particulière et à un jugement distinct; elles sont successivement appréciées par le tribunal de première instance, et par la chambre d'accusation de la cour royale avant la mise en jugement, et par la cour d'assises, ou par le tribunal correctionnel, suivant que le prévenu ou l'accusé y a été renvoyé.

Il n'est guère probable, au reste, que des accusés ou des prévenus s'obstinent aujourd'hui à se taire; l'incompétence prétendue du tribunal où ils sont traduits ne peut les empêcher de

répondre, puisque la compétence doit toujours être jugée, et qu'ils conservent d'ailleurs la faculté de l'appel ou du recours en cassation. suivant la nature du jugement. La légèreté de la prévention rentre maintenant dans la question de compétence, à raison des diverses classes de tribunaux de répression; et le mandat d'amener, de comparution, de dépôt ou d'arrêt, la mise en accusation ou en jugement, n'ont rien d'infamant dans notre législation criminelle: le défaut de charges suffisantes appartient aux moyens généraux de défense. Enfin la légitimité des poursuites et la régularité de la procédure doivent être examinées et jugées, ainsi que la gravité des charges, soit par les tribunaux qui statuent sur la mise en accusation ou en jugement, soit par ceux qui prononcent définitivement sur le sort des accusés ou des prévenus, soit en dernier lieu, par la Cour de cassation, juge souverain en matière de formes et de compétence, et il est difficile de supposer une circonstance où les accusés et les prévenus puissent croire qu'ils ont quelque intérêt à garder un silence obstiné dans le sanctuaire de la justice.

(1) V. sur l'art. 19, l'observation de Talon, et la ré-tier, suivant le Code de procédure civile, qui s'applique ponse de Pussort. aux juges criminels comme aux juges civils.

(2) La récusation doit être jugée par le tribunal en

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