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Dans le Nord, Pierre entreprend, il y a un siècle, de policer ses peuples; et cette grande entreprise est couronnée du succès. Des lois sont substituées à des coutumes barbares elles sont, pour des hommes grossiers, un bienfait inappréciable; et, malgré leur incohérence, elles attestent le génie d'un grand homme.

:

Héritière de l'empire des czars, Catherine la Grande ne tarde pas à perfectionner cet ouvrage incomplet; elle veut que chaque

partie d'administration soit soumise à une législation régulière; le système des lois criminelles et pénales est surtout l'objet de sa sollicitude: elle rédige elle-même, ou du moins elle fait rédiger, sous ses yeux, des instructions pour diriger le travail et les opérations des commissaires qu'elle a choisis; et ces instructions sont fondées sur les maximes les plus saines et sur les principes les plus justes (1).

Catherine put jouir de son propre

les soins de M. E. Brosselard, avocat distingué, connu dans les lettres par une excellente traduction des Offices de Cicéron, embrasse toutes les branches de la constitution politique, civile, commerciale, et criminelle.

ce n'est pas au code prussien que pourront s'adresser les reproches de sévérité.

(1) Dans l'instruction de Catherine II, pour la commission chargée de dresser le projet d'un nouveau code de lois, on remarque une foule de dispositions qui méritent d'être citées; et quoique les écrits de Montes

Les droits et les devoirs des souverains y sont tracés.
Ce code, à cause de la conservation des coutumes,quieu, de Beccaria, etc., eussent déjà rendu familiers

est plutôt, il est vrai, une pierre d'attente pour la législation qu'un corps de lois obligatoires. On voit que le monarque transige avec des idées qu'il n'a pas cru pouvoir détruire subitement : cela se remarque surtout en ce qui concerne les paysans et les droits féodaux.

Ce code, précédé d'une introduction qui exprime des principes généraux, est divisé en deux parties: la première comprend vingt-trois titres; la seconde, vingt.

Toute la première partie est étrangère à l'objet de cet ouvrage; le dernier titre ou chapitre de la deuxième partie traite des délits et de la manière de les punir.

Des peines y sont décernées contre les juges qui manquent à leurs devoirs, contre ceux qui retiennent un prévenu en prison sans l'entendre dans les quarantehuit heures; et les peines sont augmentées lorsque le juge prolonge sa négligence, ou manifeste des intentions coupables (art. 366, 381, 383 et suiv. du❘ chap. 20).

Les atteintes à la liberté y sont réprimées, ainsi que la violation du domicile, et les citoyens sont même autorisés à s'y opposer (art. 525, 528 et suiv., 1073 et suiv. du titre XX).

La contrebande, la banqueroute, les taxations exagérées ou les perceptions infidèles, font l'objet de dispositions spéciales (art. 285 et suiv. jusqu'à 313; art. 415, 1254 et suiv. du tit. XX).

Ce chapitre porte aussi des peines contre les imputations imaginaires (art. 1431 et suiv.), contre les provocations à la mésintelligence entre les parents et les époux, contre les captations d'hérédité (art. 1308 et 1309), et des dispositions très-sages sur les moyens de prévenir les infanticides sans flétrir les filles-mères dans l'opinion (art. 887 el 991).

Ce code, remarquable par la précision des termes dans tout ce qui est de doctrine et de droit, est, en général, conçu et rédigé dans un esprit de tolérance, de sagesse, de modération et de philanthropie fort remarquable; on peut regretter sans doute d'y trouver la perne de la roue; on doit surtout regarder comme beaucoup trop rigoureuse et comme injuste la peine de la confiscation prononcée contre la femme d'un déserteur qui favorise la désertion de son mari: mais on ne peut être étonné qu'un monarque aussi belliqueux que Frédéric crût devoir punir sévèrement tout ce qui tendait à désorganiser ses armées; et si l'on compare à cette disposition du code prussien les lois et les décrets qui ont été en vigueur en France contre les couscrits réfractaires, contre leurs pères et leurs parents, et surtout les mesures employées par les agents d'exécution,

la plupart des principes que cette instruction rappelle, la gloire de la reine puissante qui en prescrivit l'application n'en est pas moins entière.

Il ne faut défendre par les lois rien que ce qui peut être nuisible à chacun en particulier ou à la société en général (ch. 6, art. 41).

C'est à la législation à suivre l'esprit de la nation (art. 57 ibid.).

Il y a des moyens pour empêcher les crimes, ce sont les peines il y en a pour faire changer les coutumes, ce sont les exemples (art. 61 ibid.).

C'est le triomphe de la liberté civile, lorsque les lois criminelles tirent chaque peine de la nature particulière de chaque crime. Alors tout l'arbitraire cesse : la peine ne descend point du caprice du législateur, mais de la nature de la chose; et ce n'est point l'homme qui fait violence à l'homme, mais la propre action de l'homme (ch. 7, art. 67).

(Nota. Ce chapitre range les crimes en quatre classes, contre la religion, les mœurs, le repos et la tranquillité, la sûreté des citoyens, et indique la nature des peines applicables.)

La question est un usage qui répugne à la raison, et que l'humanité exige qu'on abolisse (art. 123 ibid.). Les juges et les tribunaux, n'étant que partie de la société, ne peuvent avec justice, pas même sous prétexte du bien public, infliger à un autre membre de la societé une peine qui n'est pas décernée par la loi (art. 148 ibid.).

Quand l'atrocité des peines ne serait pas réprouvée par les vertus compatissantes pour l'humanité, c'est assez qu'elle soit inutile pour pouvoir être regardée comme injuste et pour qu'on doive la rejeter (art. 150 ibid.).

Avec des lois pénales, entendues toujours à la lettre, chacun peut calculer et connaître exactement les inconvénients d'une mauvaise action, ce qui est utile pour l'en détourner; et les hommes jouissent de la sûreté de leurs personnes et de leurs biens, ce qui est juste, puisque c'est la fin sans laquelle la société se détruirait (art. 156 ibid.).

Les lois doivent être écrites en langue vulgaire; et le code qui les renferme toutes doit devenir un livre familier (art. 157 ibid.).

La punition doit être prompte, analogue au crime et publique (art. 220 ibid.).

Plus la peine sera prompte et voisine du délit, plus elle sera juste et utile (art. 221 ibid.).

Dans toute l'étendue d'un Etat, il ne doit y avoir aucun lieu indépendant des lois (art, 224 ibid.).

ouvrage; mais l'influence et les résultats de ses travaux sont incalculables sous le règne de ses successeurs.

Joseph II s'occupa spécialement de la législation; son règlement provisionnel publié en 1787 pour les Etats autrichiens, est un monument de sagesse et de philanthropie. Il abolit la peine de mort dans ses Etats. Les actions, les écrits et les paroles de ce monarque, le peignent tout entier. «< Si toute fonction publique demande une âme enflammée, passionnée pour le bien de l'État, un renoncement entier à soi-même, ces qualités, écrivait-il aux divers fonctionnaires et aux administrateurs de son empire, ces qualités doivent surtout distinguer les magistrats chargés de la poursuite et de la répression des délits; et parmi ces magistrats, elles doivent encore plus particulièrement être le partage de ceux auxquels est remis le précieux et auguste dépôt du ministère public (1); » instruction sublime et bien digne de celui qui disait quelques années auparavant : « Je ne veux de gloire que celle de l'administrateur, et ne connais de bonheur que celui de mes peuples (2). >>

Le code criminel et pénal qui fut donné à la Toscane le 30 novembre 1786, remplit

de la manière la plus glorieuse une des pages de l'histoire du grand-duc Léopold (3); le seul éloge vraiment digne d'un prince, le seul qui survive à tout, c'est le simple récit des bienfaits qu'il répandit sur ses peuples.

Après avoir payé ce tribut d'éloges à quelques souverains étrangers, qui presque tous ont vécu dans le dernier siècle, et ont concouru, par la sagesse de leurs lois et de leur administration, à répandre dans l'Europe cette vive lumière qui semble garantir désormais aux peuples les fruits d'une civilisation plus parfaite, interrogeons nos propres annales.

Les capitulaires de Charlemagne, les établissements de saint Louis, les ordonnances de Louis XIV, sont des titres de gloire qu'on n'a point contestés ni diversement jugés dans la vie de ces grands princes. Leurs règnes forment ainsi, sous ce rapport, trois grandes époques dans la monarchie française, et la quatrième époque est marquée par cette révolution qui causa tant de déplacements, tant de désastres, mais qui a propagé dans l'Europe des idées nouvelles, a fait sentir partout le besoin d'institutions analogues et la nécessité d'un gouvernement représentatif, et qui, après vingt-cinq

(1) Lettre écrite par Joseph II, en 1784, à tous les conseils, dicastères, sénats, tribunaux, gouverneurs, commandants, ministres, présidents et chefs de l'administration civile et militaire de ses États.

[Depuis quelque temps, on commence à s'occuper chez nous des institutions judiciaires et du droit pénal ancien de la Belgique. Quoique ces efforts n'aient pas encore amené de grands résultats, nous ne saurions trop recommander ce genre d'études à nos concitoyens. Sous le rapport de la sagesse et de la libéralité des institutions, notre pays n'a rien à envier à aucun autre peuple.]

(2) La politique de Charles-Quint n'est point à l'abri de la critique; mais ce trop heureux rival du noble François ler régit encore une partie de l'Allemagne et de la Suisse, et y réprime les excès et les crimes par la force de cette loi qui porte son nom, de la Caroline, qui, trop sévère sans doute pour un siècle de lumières, offre du moins un code criminel complet, une classification des délits et des peines, et dut exciter la reconnaissance des peuples, au moment où elle fut publiée. Elle renferme plusieurs décrets faits par cet empereur dans la diète de Hambourg, en 1550, et dans celle de Ratisbonne,, en 1552, sur les instances et avec l'approbation des Etats de l'Empire, pour réformer plusienrs abus qui s'étaient glissés dans l'administration de la justice criminelle.

La Caroline a servi de type aux lois criminelles de la Suisse.

Cette loi est, en général, regardée avec raison comme étant d'une rigueur excessive.

Mais on y lit avec intérêt un article qui modifie la rigueur de la loi lorsque le coupable est âgé de moins de

quatorze ans (art. 164), et surtout un autre article qui avait pour objet de réprimer les arrestations arbitraires.

« C'est encore un abus lorsque la justice fait arrêter » trop légèrement des personnes d'une condition hon»> nête, sans être assurée auparavant de leur mauvais > renom et des indices suffisants, et que, sur ces arrêts, » elle procède précipitamment et sans réflexion; en » sorte que la personne arrêtée ne peut que souffrir du » côté de son honneur » (art. 218 et pénultième).

J'ai lu dans les journaux de mai 1822: Hanovre 24 avril. - La peine de la torture, prescrite en cas de preuve incomplète par le règlement de justice criminelle de l'empereur Charles-Quint, mais qui n'était plus en usage depuis nombre d'années, vient d'être abolie légalement par une ordonnance du roi, du 25 mars, ainsi que la question et l'appareil préparatoires (real and verbal territion). On substituera à l'aveu du prévenu, la preuve par témoins; mais pour condamner l'accusé, il faudra une majorité d'au moins les deux tiers des juges. Il n'y a que la peine de mort, celle des travaux publics à perpétuité, et la note d'infamie que l'on ne pourra prononcer, bien que l'accusé, malgré sa dénégation, ait été regardé comme convaincu par des indices suffisants. Ces peines sont remplacées par vingt ans de travaux forcés, par 10 à 12 ans de travaux publics, et la note d'infamie par une détention proportionnée.

Ainsi le progrès des lumières doit successivement faire disparaître de la législation des peuples les rigueurs injustes ou inutiles et les dispositions contraires à l'humanité.

(3) Ord. publiée à Pise par le grand-duc Léopold, sous le titre de Riforma della legislazione toscana.

ans d'orages et de troubles, a procuré à la France, pour la consoler de ses déchirements et en réparer les tristes effets, une constitution sage et protectrice, digne ouvrage d'un souverain éprouvé par de longs malheurs, et qui doit être, comme il la proclamé lui-même, son plus beau titre aux yeux de la postérité (1).

Les lois suivent et constatent les progrès des lumières. La législation est véritablement l'histoire morale des peuples. Avant d'arriver en un état de perfectionnement, il faut avoir traversé des siècles d'ignorance; quelquefois même un grand pas vers l'amélioration est précédé d'une marche rétrograde. Parcourons rapidement les vicissitudes de la législation française; el, pour mieux apprécier le bien dont nous jouissons, remontons par la pensée vers le point d'où nous sommes partis, en fixant particulièrement notre attention sur les changements les plus remarquables.

Il reste peu de notions sur le droit qui était en vigueur chez les anciens Gaulois avant l'occupation de la Gaule par les Romains. César et Tacite sont presque les seuls historiens qui nous aient transmis quelques détails sur leurs mœurs et leurs usages. On sait que la nation y était divisée en quatre classes les chevaliers, les druides, le peuple et les esclaves. Les druides étaient à la fois ministres de la religion et de la justice: ils étaient juges civils et criminels (2), et la cumulation de ces fonctions indique assez quelle était leur puissance dans des siècles de grossièreté, d'ignorance et de superstition. Le droit romain s'introduisit par la conquête dans une partie de la Gaule.

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et des Franes, ils rédigèrent différents codes de lois sous le titre commun de Code des lois antiques (Codex legum barbarorum), et ce code comprenait la loi ripuaire (3) la loi gothique (4), la loi gombette (5) et la loi salique.

La loi ripuaire et la loi salique sont les lois des Francs proprement dites.

Les lois antiques ou des barbares ne furent point affectées à un certain territoire. Le Franc était jugé par la loi des Francs, qui faisait une grande distinction entre eux et les Romains; le Bourguignon était jugé par la loi des Bourguignons, le Romain par la loi romaine (6).

La réunion de ces lois s'appelait aussi la loi du monde (lex mundana), par opposition au droit canonique (7).

Les commencements de la monarchie française, et même toute la période que forment les rois de la première race, ne peuvent être remarquables sous le point de vue de la législation. Cependant Clovis,que l'on regarde comme le fondateur de la monarchie, ce roi dont la conversion au christianisme est l'origine du titre de fils aîné de l'Église, que tous ses successeurs ont constamment porté, Clovis passe pour avoir fait quelques modifications à la loi salique (8).

Une constitution générale de Clotaire, publiée en 560, ordonne, entre autres choses, de ne pas condamner un accusé sans l'entendre (9), et charge les évêques de châtier, pendant son absence, le juge qui aurait condamné quelqu'un contre le vœu de la loi, contrà legem.

Une ordonnance de Childebert, publiée en 595, contenait des dispositions pénales contre divers crimes, et portait, entre autres choses, que les homicides seraient punis de mort, qu'on ne pourrait se soustraire à cette peine par aucune composition (10), et que si

1 Discours de Louis XVIII à la chambre des déprités, 16 mars 1815 (Monit. du 17).

C. de Bello Gallico. lib. VI.

3 Cette loi fut rédigée par écrit en 440, de l'ordre Théodoric, qui régnait alors à Châlons-sur-Marne. Fe fot corrigée par Childebert, et perfectionnée, de Fordre de Dagobert, par quatre personnages illustres 4 son temps qu'il désigna à cet effet.

4. La loi gothique fut rédigée, en 466, de l'ordre Evaric, roi des Goths, et portée par lui en Espagne, elle forme le droit national.

5) La loi gombette fut publiée à Lyon, en 501, de dre de Gondebaud, roi des Bourguignons, dont elle rte le nom.

6) Montesquieu, liv. XXVIII, ch. 1er. - Le code Teodosien, réformé par Anien, chancelier d'Alaric, |

fut publié de nouveau en 506; la loi des Bourguignons, comme nous l'avons vu, était appelée la loi gombette du nom de Gondebaud, roi de Bourgogne.

La loi salique, et la loi ripuaire, qui en est presque la répétition, ne recurent point les peines corporelles. (7) V. Henault Abr. chron., t. ler, p. 5.

(8) Henault, t. ler, p. 5.

(9) Si quis in aliquo crimine fuerit accusatus, non condemnetur penitùs inauditus. (Cap. Reg. Franc., vol. Jer, fol. 7 et 8, collection d'Et. Baluze, Paris, 1780.)

(10) Art. 5. De homicidiis verò ita jussimus observari, ut quicumque ausu temerario alium sine causa occiderit, vitæ periculo feriatur, et nullo pretio se redimat aut componat.... quia justum est ut qui injustè novit occidere, discat justè moriri. (Cap. Reg. Franc, fol. 18.)

un juge était convaincu d'avoir relâché un voleur, il perdrait la vie (1).

Clotaire II porta, vers la même année 595, un décret contenant aussi des dispositions pénales, et un édit relatif au clergé et aux religieuses.

Dagobert publia en 630 un capitulaire par lequel il renouvela, en y apportant des changements considérables, les lois d'abord publiées par Théodoric, et les donna écrites à chacun des peuples qu'elles concernent. On remarque que chacune de ces lois contenait un code pénal assez détaillé, dans lequel la plupart des crimes et des délits étaient prévus, et qui fixait la peine à laquelle le coupable devait être assujetti pour réparation de chaque crime, ou le nombre des témoins qui juraient avec lui qu'il n'était pas coupable (2). La loi des Bavarois, insérée dans ce capitulaire, était surtout remarquable par son étendue, et notamment par un titre sur le respect que l'on doit aux tombeaux (3).

Quoique Carloman, fils aîné de Charles Martel, n'ait jamais eu le titre de roi, il gouverna en souverain les États qui lui étaient échus par le partage qu'il avait fait avec Pépin son frère, et il en exerçait l'autorité; et l'on voit, par deux capitulaires publiés par lui en 742 et 743, que le clergé séculier et régulier avait déjà grand besoin de réforme et d'être rappelé aux devoirs de son état, puisque Carloman y défend aux clercs de porter les armes, d'aller à l'armée et de chasser; qu'il décerne des peines contre les moines et les religieuses qui commettraient des délits contraires aux mœurs (4); qu'il défend aux prêtres et aux diacres d'avoir des femmes dans leur maison (5), et qu'il proscrit les superstitions du paga

nisme.

Un autre capitulaire de Carloman, dont la date est fixée à l'année 744, quoique spécialement relatif au clergé, contient aussi des dispositions pénales contre la fausse monnaie (6), contre l'adultère, contre l'inceste et le parricide (7); défend de donner des aliments aux homicides qui se seraient réfugiés dans les églises, et indique ainsi l'abus que l'on faisait du droit d'asile; décerne des peines contre le vol et l'achat des objets volés, en les graduant suivant les récidives.

Pépin, qui fut le premier roi de la seconde race, n'occupait pas encore le trône lorsqu'il publia, en 744, un capitulaire sur le clergé, dans lequel il défend la bigamie.

Depuis l'an 752 jusqu'à l'an 764, ce monarque fit plusieurs dispositions législatives. La plupart de ses capitulaires sont relatifs au clergé; mais on remarque, relativement à l'administration de la justice, que Pépin qui, dans un capitulaire de 752, avait ordonné l'épreuve de la croix, lorsqu'une femme accusait son mari d'impuissance (8), ordonna, cinq ans après, que dans ce cas, lorsque l'objet de l'accusation serait dénié par le mari, on s'en rapporterait à la dénégation de celui-ci, parce qu'il est le chef de la femme (9); et quand on se rappelle que l'usage immoral du congrès, qui, plus tard, s'était introduit dans la législation ou la jurisprudence française, était encore suivi et consacré au XVIIe siècle, et que l'abolition n'en est due peut-être qu'à l'ironie amère du Juvénal français, on ne peut s'empêcher de gémir sur la difficulté et la lenteur avec lesquelles la raison parvient à dissiper l'erreur, à détruire les préjugés et les coutumes les plus

absurdes.

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dans la phrase qui précède, m'avait paru indiquer l'épreuve du congrès; mais ayant voulu me fixer d'une manière plus exacte sur le sens de ces mots, j'ai reconnu que l'épreuve de la croix (crucis judicium) était un des moyens employés pour rechercher la vérité, et connaître la volonté de Dieu à l'effet de statuer sur des accusations, et de décider des contestations; et j'ai vu que la disposition même du capitulaire de Pépin que je viens de rappeler dans cette note, était citée comme un exemple de l'emploi de ce genre d'épreuve. Au reste, les écrivains ne sont pas d'accord sur le sens des mots exire ad crucem, et sur les circonstances de l'épreuve de la croix qu'ils indiquent. Il parait même que ces circonstances variaient au choix des parties intéressées ou à la volonté des juges; mais il nous suffit de savoir que le mot crux n'est pas employé ici dans un sens figuré, comme nous l'avions cru d'abord. (V. du Cange.)

(9) Quia caput est mulieris (art. 17 du capit, de 757).

PREMIÈRE ÉPOQUE.

On aime aussi à lire, dans une loi de Pépin, la disposition qui défend aux évêques, aux abbés, aux laïques, de recevoir des présents pour rendre la justice (1). Charlemagne, au milieu des guerres qu'il entreprit et qu'il termina si glorieusement, se montra toujours pénétré de cette maxime, que les lois sont le premier besoin des peuples, et que le soin de la législation est le premier devoir des souverains.

Les nombreux capitulaires qu'il publia depuis 769 jusqu'en 814, attestent sa constante sollicitude et sa sagacité supérieure. Toutes les branches du gouvernement, tous les peuples qui composent son vaste empire, occupent sa pensée et deviennent successivement l'objet de règlements législatifs (2).

En montant sur le trône (3), il avait renouvelé les dispositions d'un capitulaire de Carloman son oncle, relatif à la conduite

des prêtres. Dix ans après (779), en décernant des peines contre l'inceste, le parjure et le vol, il défend d'excuser les homicides et les autres coupables qui se réfugient dans les églises, et auxquels Carloman avait déjà ordonné de refuser des aliments.

Il veille à la correction des livres et offices d'église; il règle les devoirs des juges, leur défend de céder à la flatterie, à la haine, à l'amitié, et leur prescrit la sobriété (4); indique des moyens pour prévenir le parjure et d'autres crimes; il publie des lois sur les mœurs publiques; il publie des lois somptuaires; il donne des conseils et des ordres à toutes les classes de la société; et, devançant de bien loin les progrès de l'esprit humain, il entrevoit le besoin de l'unité des poids et mesures dans les règlements qu'il fait sur cet objet (5).

Il fait écrire et rédiger dans une nouvelle forme la loi salique, cette loi des Francs, si célèbre par l'influence qu'elle a eue sur les destinées du royaume de France (6),

et

(1) . . . . . Ut nec episcopus, nec abbas, nec ullus laicus, pro justitia facienda sportulas contradictas accipiat ; quia ubi dona intercurrunt, justitia evacuatur.

(2) Sous les deux premières races, lorsqu'il s'agissait de créer de nouvelles lois ou de pourvoir à ce qui pouvait contribuer au bonheur du royaume, l'usage constant était que les rois se fissent assister des conseils et des lumières des premiers seigneurs de la nation, des ducs, des comtes, des évêques et des abbés. La loi salique fut l'ouvrage des chefs de la noblesse et des premiers de la nation. Les capitulaires, pour avoir force de loi, après avoir été rédigés dans le conseil du souverain, devaient être revêtus de la signature des premiers de l'Etat, et être reçus d'un consentement général. Les ordonnances, les capitulaires, les chartes mêmes accordées par nos rois, font mention de cette déférence qu'ils avaient pour les personnes les plus distinguées du royaume. Tout ce qui concernait le bien public était discuté, rédigé, arrêté dans l'assemblée des évêques, des grands et des ministres du patais, quelquefois nommés distinctement, et plus souvent désignés sous le titre de fidèles du roi, de consensu fidelium nostrorum. Le peuple contribuait en quelque sorte alors à la formation de la loi. Les nouveaux règlements étaient soumis à son examen dans les assemblées publiques de la nation; et par la signature de ses représentants, il les ratifiait d'une mamere irrévocable.-. la fin du second capit. de Jan 803; le titre XXIV du capit. de Louis le Pieux, année 820; la préface des capit. de Charles le Chauve. année 844, et une infinité d'autres qu'il serait trop long de désigner.

il parait que le peuple pouvait avoir aussi l'initiative des lois. Les demandes ou projets qu'il présentait, étaient soumis à la délibération des assemblées nationales. Le second capitulaire de l'année 803 commence par une requête présentée à Charlemagne par ses sujets, et une promesse solennelle par laquelle cet empereur s'engage à exposer leur demande à la première assemblée générale, où plusieurs évêques et comtes doivent

F trouver.

Ainsi les principes fondamentaux de notre charte constitutionnelle ont été, en quelque sorte, recueillis par la sagesse du monarque dans les usages des premiers âges de la monarchie.

(3) Ce fut en 768 que Charlemagne monta sur le trône, et ce capitulaire ne fut renouvelé que l'année suivante 769.

(4) Rectum autem et honestum videtur ut judices jejuni causas audiant et discernant (capit. 1er de 789).

(5) Le bienfait de l'unité dans les poids et mesures n'a été définitivement réalisé en France que le 26 mars 1791, sous le règne de Louis XVI; dix mois auparavant, le 8 mai 1790, un décret de l'assemblée nationale avait prescrit à ce sujet des mesures préparatoires.

Colbert avait eu l'idée de réformer les inconvé» nients provenant de l'innombrable variété des poids » et mesures. Huygens et deux autres académiciens » s'en occupèrent: Louis XV allait effectuer ce projet » lorsque les préparatifs d'une guerre détournèrent ses » regards. L'importance de son exécution s'offrit à »Turgot, qui allait y attacher son nom quand il quitta » le ministère. » (V. Histoire de France, par Montgaillard, t. II, p. 225.)

-Les

Il n'est pas tout à fait exact de dire que la loi du 26-30 mars 1791 établit un système uniforme de poids et mesures. L'assemblée constituante se borna alors à décréter l'adoption du quart du méridien terrestre pour base du nouveau système de mesures.— lois qui ont véritablement introduit en France le nouveau système, sont celles du 1er août 1793, du 1er brumaire an II, du 30 nivòse même année, du 18 germinal an III, et enfin du 1er vendémiaire an IV (en Belgique, celle du 21 août 1816). Une foule d'arrêtés et de règlements ont développé leurs dispositions.

(6) D. Karolus, rex Francorum inclytus, hunc libellum tractati legis salicæ scribere jussit (intitulé de la loi salique).

C'est au titre LXII, de alode, que se trouve, art. 6. cette fameuse disposition: De terra veró salica nullá

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