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procès-verbal ne peut produire cet effet que lorsqu'il a été dressé par un officier de police judiciaire, ou par les préposés qui, dans les matières fiscales, sont investis spécialement par la loi du droit de dresser des procès-verbaux, à l'effet de constater les délits de fraude; et les procès verbaux des gendarmes et des sous-officiers de gendarmerie ne peuvent pas aujourd'hui interrompre la prescription, parce que ce ne sont point des actes d'instruction (1).

Il en est de même des procès-verbaux dressés par les préposés qui n'ont pas reçu de la loi le privilége d'en être crus, d'après ces actes, jusqu'à inscription de faux (art. 185, C. crim.) (2). Je n'ai pas besoin de dire que tous les mandats d'amener, de dépôt ou d'arrêt, décernés par les officiers de police judiciaire, interrompent la prescription, puisque ce sont véritablement des actes de poursuite.

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Les principes établis par le Code criminel, sur la prescription en matière de crimes, de délits et de contraventions, s'appliquent à l'action civile comme à l'action publique. Le code n'admet, à cet égard, aucune distinction, aucune exception; il suffit qu'un fait quelconque soit de nature à être porté devant les tribunaux criminels, correctionnels ou de police, pour que l'on ne puisse plus en faire l'objet d'une action quelconque, après les délais respectivement déterminés pour prescrire. La loi est absolue, exclusive; elle s'applique à tous les délits, à toutes les contraventions, aux personnes Quant aux réquisitions du ministère public majeures ou mineures qui auraient pu être létendant à provoquer des poursuites, et aux in-sées (5); et toute prétention contraire doit être formations que le juge instructeur peut faire proscrite comme une véritable subtilité, comme avant de décerner des mandats, ils interrom- une misérable chicane (6).

(1). la note plus bas.

(2) Il n'y a réellement d'actes d'instruction ou de poursuite capables d'interrompre la prescription, qu'autant que ces actes sont émanés de fonctionnaires qui tenaient de la loi le droit de les faire. Le Code d'instruction dispose, article ler, « que l'action pour l'application » des peines, n'appartient qu'aux fonctionnaires aux» quels elle est confiée par la loi; » et les six premiers chapitres du livre 1er de ce Code déterminent les attributions de chaque officier de police judiciaire et les limites de sa compétence; il faut en conclure que tout fonctionnaire public indifféremment n'est pas compétent pour faire des actes d'instruction dans toute espèce d'affaire et pour toute espèce de crime, de délit ou de contravention. « Pour que des actes puissent interrom>>pre la prescription, dit M. le président Barris, (note » 281e), il faut qu'ils soient faits par un magistrat ou "officier ayant caractère pour instruire ou poursui»vre sur le fait du délit ; car si ce caractère manque, » l'acte d'instruction ou de poursuite ne pourra pas in» terrompre la prescription. »>

Il résulte de ce principe, 1o que des dénonciations adressées à des tribunaux étrangers et les actes de poursuites émanés de ces tribunaux, ne peuvent interrompre, en France, le cours de la prescription de l'action publique. On a essayé de soutenir le contraire devant la Cour de cassation; mais elle a rejeté le pourvoi qui reposait sur un pareil moyen (Cass., 12 oct. 1820);

20 Qu'un procès-verbal dressé par un fonctionnaire qui n'a pas reçu de la loi mission de constater le délit relaté dans le procès-verbal, ne constitue pas un acte d'instruction qui interrompe la prescription. Tel est, par exemple, le procès-verbal par lequel un employé de l'administration des domaines a constaté une fausse mention d'enregistrement sur la minute d'un acte notarié; en effet, cet employé n'est pas officier de police judiciaire (Cass., 15 janv. 1814);

Mais il ne faut pas penser, avec Legraverend, qu'il n'y a que les procès-verbaux qui font foi en justice jusqu'à inscription de faux, qui soient de nature à interrompre la prescription. Peu importe la foi que la loi attache aux procès-verbaux; qu'ils fassent foi jusqu'à inscription de faux, qu'ils ne fassent foi que jusqu'à preuve contraire, qu'ils ne servent même que de renseignements, qu'il soit permis ou non de les contredire et de

les débattre, cela est indifférent; la question n'est pas là, elle est uniquement dans la compétence de l'officier public qui a instrumenté. Il serait étrange que les procès-verbaux des gardes-champêtres, des commissaires de police, de la gendarmerie, etc., n'interrompissent point la prescription, lorsqu'ils constatent des délits dont la recherche leur est confiée. (Mangin, no 344.)

(3) Lorsque la partie lésée n'a formé son action en réparation civile que postérieurement à l'action publique, et même après qu'il a été statué définitivement sur celleci, la prescription de l'action de cette partie a-t-elle été interrompue par les poursuites du ministère public, et n'a-t-elle repris son cours qu'à dater soit du dernier acte de ces poursuites, soit du jugement définitif qu'elles ont provoqué?

Des réparations civiles supposent l'existence d'un fait punissable qui leur sert de base; comment concevoir alors que l'action pour les obtenir puisse se prescrire, pendant que le ministère public agit pour établir la preuve de l'existence de ce fait, en convaincre et en faire punir le coupable? Il semble que, bien loin de faire courir la prescription contre l'action civile, le législateur aurait dû ordonner qu'elle ne serait intentée qu'après le jugement à intervenir sur l'action publique. Cependant il a permis de la former avant ou pendant les poursuites du ministère public, mais sous la condition qu'il sera sursis au jugement jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur l'action publique. L'action publique tient donc en suspens l'action civile; si elle la tient en suspens, la loi avertit qu'on peut ne la former que quand l'autre est jugée. Un pareil avertissement me parait inconciliable avec la pensée que la prescription peut cependant l'anéantir avant qu'il ait été définitivement prononcé sur l'action publique. Je crois que les poursuites du ministère public suspendent la prescription de l'action civile; qu'elle ne commence qu'à partir du dernier de ses actes ou du jugement définitif qui en a été la suite.

(4) V. dans ce sens, Mangin, no 342.

(5). dans Jousse, et dans Muyart de Vouglans, l'opinion des anciens auteurs à cet égard sous l'empire de lord. de 1670.

(6) V., au reste, le dernier chapitre relatif à la prescription des peines et à ses effets.

Le principe ne doit pas cependant s'étendre d'une

Il n'y a point aujourd'hui de délits imprescriptibles, puisque le Code n'en excepte aucun des règles qu'il trace pour la prescription. Ainsi le crime de lèse-majesté et le parricide, les seuls qui fussent de nature à réclamer une exception, à raison de leur atrocité, se prescrivent dans les délais et suivant les formes ordinaires. Ainsi le crime de faux se prescrit, comme tout autre, par le laps de dix années; mais l'expiration de ce délai depuis la fabrication de la pièce fausse, qui mettrait l'auteur du faux à l'abri des poursuites à raison de cette fabrication, n'empêcherait pas qu'on ne recherchât celui qui, depuis cette époque, aurait fait sciemment usage du faux. En effet, l'usage d'une pièce fausse est un crime distinct et séparé du crime de faux ; c'est un fait principal, dont la prescription ne peut courir que du moment où il a eu lieu, et non de celui où le faux a été commis.

Remarquons, au reste, que la prescription du faux principal n'empêcherait point que l'on n'employât la voie du faux incident contre la pièce fausse (1), lors même que l'auteur en

| serait connu et encore vivant; comme aussi les poursuites que l'on a pu faire par la voie du faux incident, n'empêchent pas que l'on ne poursuive le faux par action principale, tant que la prescription n'est pas acquise (2).

Cependant les principes généraux de la prescription ne peuvent s'appliquer aux crimes successifs, c'est-à-dire, à ceux qui se perpétuent et se renouvellent à chaque instant (5).

Ainsi, par exemple, la prescription des crimes commis par un rassemblement armé contre la force légale ou contre des citoyens, ne peut dater que du jour où ce rassemblement a cessé d'exister, parce que les faits criminels dont se rendent coupables les rebelles réunis, sont la suite et l'effet continu du rassemblement qui, par lui-même, a le caractère d'un crime, et que tous les actes criminels auxquels se livrent les individus rassemblés, sont considérés comme une série non interrompue de faits punissables, qui se propage et se perpétue jusqu'au moment où le rassemblement est tout à fait dissipé (4).

Ainsi le crime de détention arbitraire ne

manière si absolue, que dans aucun cas l'action civile ne puisse être exercée après l'expiration des délais fixés pour la prescription de l'action publique : ainsi la prescription de trois ans, établie contre l'action résultant d'un délit correctionnel, à partir du jour où le délit a été commis, ou du dernier acte de poursuite, s'il en a été fait, n'est pas applicable au cas où, sur l'action publique, il est intervenu un jugement de condamnation contre le délinquant. En ce cas, l'action civile n'est soumise qu'à la prescription ordinaire. (Caen, 8 janvier 1827; S. 28, 21.)

Mangin, no 355, fait contre la décision de cet arrêt les observations suivantes :

«L'article 3 du Code d'instruction permet à la partie léséé d'intenter son action séparément de l'action publique; elle peut la former avant, pendant ou après l'exercice de cette dernière; et la prescription établie par les articles 637 et 658, règle la prescription de cette action, sans aucune distinction du cas où elle a suivi, precédé ou accompagné les poursuites du ministère publie. Ainsi, l'arrêt que j'examine est fondé sur une distinction que la loi n'a pas établie. Que la condamnation du prévenu dispense le juge saisi de l'action civile de rechercher la preuve du fait qui a occasionné le dommage dont on lui demande la réparation; que la chose Jugée au criminel ait autorité sur la question qui reste a juger au civil, rien de plus certain; mais que conclure de là, quant au délai dans lequel l'action civile doit être formée? La Cour royale de Caen a confondu la condamnation du prévenu en des dommages-intérêts qui véritablement ne se prescrit que par trente ans, avec sa condamnation envers la vindicte publique; cette der. niere condamnation est un moyen péremptoire, elle est un titre pour obtenir des réparations civiles; mais elle se tient pas la place du jugement, du titre qui les accorde. »

Parmi les matériaux que Legraverend avait lui-même préparés pour la troisième édition, il existe une note ainsi conçue:

En jugement irrégulier dans la forme suffit pour empêcher la prescription établie par les lois criminelles, contre l'action civile en réparation des dommages cau

sés par un crime. » — Cette action n'est plus soumise ensuite qu'à la prescription civile ordinaire. (Cass., 6 avril 1826; S. 26, 383.)

Un arrêt de Paris du 25 mars 1825, a jugé que l'action du gouvernement contre un comptable, étant indépendante de l'action qui pourrait résulter du délit de ce comptable, n'est pas soumise à la prescription ordinaire des crimes et délits, qu'elle n'est prescriptible que par trente ans. (S., 27, 7.)

Enfin un arrêt de la Cour de cassation du 20 mars 1828 (S., 28, 1, 354), consacre cette règle que lorsque celui qui a une action, résultant d'un délit correctionnel, a opté pour la voie civile, on ne peut pas lui opposer la prescription de l'action publique.-Duvergier.

(1) Il est de principe que toute exception doit durer aussi longtemps que l'action principale contre laquelle elle est de nature à être proposée: quæ temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipiendum. Il résulte de là qu'il ne peut y avoir de temps limité pour s'inscrire incidemment en faux contre une pièce produite, encore bien que l'action publique et l'action civile se trouvent éteintes, par la prescription, contre l'auteur du faux. « Cette faculté, disent les auteurs du Réper• »toire de jurisprudence, n'a point d'autres bornes que » le temps réglé pour faire usage de la pièce prétendue >> fausse. Tant qu'il sera permis de produire cette pièce, » il le sera également de l'arguer de faux; autrement » il faudrait dire que le temps peut changer le faux en » vrai, ce qui serait absurde. »

La Cour de cassation a consacré cette doctrine par un arrêt du 25 mars 1829.

(2) V. Berriat St.-Prix, p. 59, note 5, et plus bas le ch. de la procéd. sur le faux.

(3). Sur la prescription des crimes successifs, Jousse, t. ler, 5e part., liv. 1er, tit. 1er, p. 585.

(4) Cette doctrine me paraît vraie, dit Mangin, no 327; je la crois applicable non-seulement au cas d'un rassemblement armé, dont parle Legraverend, mais à toute autre association de malfaiteurs, crime prévu par les art. 265, 266 et 267 du Code pénal. Je crois que la prescription des crimes qui sont le résultat d'une association de malfaiteurs, ne commence qu'à partir du

peut également commencer à se prescrire que de l'instant où la détention a cessé.

fait se passait alors, il ne serait plus criminel aux yeux de la loi, et ne pourrait pas donner lieu à des poursuites, et qu'il semblerait trop rigoureux, et même contraire à la justice, de faire suspendre indéfiniment la prescription par des circonstances qui n'ont rien en ellesmêmes de répréhensible (4).

L'usage du faux, crime distinct de la fabrication du faux, et l'usage frauduleux que l'on peut faire de fausses obligations ou décharges résultant de l'abus du blanc-seing, ne sont aussi susceptibles de se prescrire qu'à dater du dernier acte d'usage (5), parce que chaque fois que l'on fait usage de la pièce fausse ou du blanc-seing, le crime d'usage du faux ou le délit d'abus de blanc-seing se produit (6).

Peut-on appliquer le bénéfice de la prescription à un prévenu défaillant, à un accusé contumax ?

Ainsi la désertion, tant que le déserteur n'est pas rentré à son corps, ou n'a pas été arrété, et l'évasion des forçats, tant que les individus évadés ne sont pas repris, ou tant qu'ils laissent ignorer le nom sous lequel ils étaient connus au bagne (1), sont aussi des crimes qui ne peuvent se prescrire, parce que les coupables restent, pour ainsi dire, dans un état permanent de flagrant délit; et parce que, quant à la désertion, la législation militaire n'autorise pas le jugement par contumace (2), et quant à l'évasion du bagne, la procédure par contumace ne peut avoir lieu, puisque la reconnaissance d'identité suppose nécessairement l'arrestation et la présence de l'évadé : mais, si la désertion et l'évasion ne se prescrivent point, tant qu'elles se perpétuent, il n'en est pas ainsi des crimes que peuvent commet- L'affirmative de cette question ne me paraît tre les déserteurs et les forçats évadés pendant pas douteuse en effet, la prescription court qu'ils sont en fuite, et la prescription doit au profit de tous ceux contre lesquels on peut être, à cet égard, réglée par le droit commun. agir; et comme le défaut de comparution d'un Le rapt peut, sans doute, aussi être rangé, prévenu, et l'état de contumace d'un accusé, jusqu'à un certain point, dans la classe des n'empêchent point de diriger des poursuites délits successifs, car il se perpétue tant que la contre eux, et que la loi, au contraire, a pris personne enlevée reste sous la puissauce du ra- soin d'en régler spécialement le mode en pavisseur (5) mais il faut remarquer que le Code reil cas, il est évident que, si le ministère pupénal ne punit que l'enlèvement ou le déplace-blic a négligé de faire poursuivre et condamment des mineurs, et lorsqu'il est opéré par fraude ou par violence, ou l'enlèvement, même avec consentement de la personne enlevée, lorsqu'il s'agit d'une fille au-dessous de l'âge de seize ans. Je pense donc que dans le premier cas, lorsque, depuis l'enlèvement, les mineurs sont parvenus à la majorité, et dans le second, lorsque la jeune fille a atteint sa seizième année, le rapt ne conserve plus le caractère de crime successif, et la prescription doit commencer à courir. La raison en est que, si le

ner, dans les délais que la loi détermine, les auteurs d'un délit ou d'un crime, et si les parties lésées sont également restées dans l'inaction, la prescription courra en faveur des prévenus ou des accusés, malgré leur absence.

La prescription court-elle en faveur des fonctionnaires et agents administratifs prévenus de délits dans l'exercice de leurs fonctions, tant que l'autorisation nécessaire pour les mettre en jugement n'a pas été accordée par le gouvernement?

jour où l'association a été dissoute, ou du jour où le coupable a cessé d'en faire partie.

(1) La prescription pour le crime d'évasion du bagne, et pour tous les crimes de la compétence des tribunaux maritimes, continue d'être réglée par la loi du 12 octobre 1791, et non par le Code crim.; il en est de même pour toutes les prescriptions fixées par des lois spéciales. (Cass., 27 janv. 1820. D., 22, 478; S., 20, 147.) V. aussi le ch. des trib. marit.

(2) Si la législation militaire était modifiée à cet égard, le crime ou délit de désertion se prescrirait comme tout autre.

(3) Jousse, t. Jer. 5e p., liv. 1er, tit. 1er.

La Cour de cassation a jugé, le 5 sept. 1812, et le 4 juillet 1816, que la bigamie n'est pas un de ces crimes successifs qui se renouvellent et se perpétuent chaque jour, et sont, par cela seul, imprescriptibles; mais qu'au contraire la bigamie est prescriptible à partir du jour du second mariage. (D., 5, 274 et 275; S., 15, 154.) Ce crime ne consiste pas, d'après la définition qu'en donne le Code pénal, art. 540, dans l'abandon de l'époux légitime, dans la cohabitation illégale; il consiste dans l'acte dont le coupable a voulu couvrir cet aban

don, cette cohabitation; il consiste dans le fait de la célébration du second mariage; il se forme, il se consomme à l'instant même du frauduleux engagement contracté devant l'officier de l'état civil. (Mangin no 322; Berriat St.-Prix, p. 59.)

(4) Bourguignon, sur l'art. 637, Cod. crim., professe la même doctrine.

(5) Carnot (art. 637, no 6) paraît vouloir combattre cette opinion; selon lui, l'usage fait sciemment d'une pièce fausse est une tentative de faux, et la prescription de la tentative de crime commence, dit-il, à partir de cette tentative. Mais Carnot confond par là des crimes distincts les uns des autres: l'usage d'une pièce fausse est un crime différent de celui de la fabrication de la pièce même ; cette distinction, bien marquée dans le Code pénal, a servi de base à plusieurs arrêts de la Cour de cassation. (D., 15, 467; S., 26, 1. 376.)

(6) Cass., 21 avril 1821. La Cour de cassation a jugé, le 24 juin 1815, que la déclaration de ne plus vouloir se servir d'une pièce fausse, peut faire commencer la prescription, à dater du moment où elle est faite.

Il faut distinguer les espèces pour résoudre cette question; l'on trouvera, au paragraphe des Prescriptions particulières, le développement de notre opinion à cet égard.

Au reste, la prescription est si favorable, malgré le sentiment de quelques criminalistes, que la démence ne l'empêche point de courir en faveur de celui qui, ayant été déclaré atteint de cette maladie, n'a point été poursuivi pour un crime commis par lui ou dont il était prévenu d'être complice. La démence peut bien empêcher la prescription de courir au préjudice de l'insensé, mais non en sa faveur.

Incivile est ea quæ in favorem quorumdam introducta sunt, contra eos retorqueri (1).

§ II.

De quelle manière se règle la prescription par suite du passage d'une législation à une autre.

23. Cette question importante mérite un exasérieux, parce que les cas auxquels elle s'applique doivent se présenter longtemps encore, à raison de l'époque de la mise en activité du Code d'instruction.

Divers arrêts de la Cour de cassation attestent que cette cour avait établi, comme point de jurisprudence, sous l'empire du Code du 5 brum. an IV, que la prescription qui avait commencé sous le Code pénal de 1791, et qui s'était continuée sous celui de l'an IV, devait se régler à la fois par l'une et l'autre de ces lois, pour le temps qui s'était écoulé sous l'empire de chacune d'elles, et d'après ces principes, appliqués alors aux départements qui avaient eté réunis à la France, on supputait aussi, pour fixer la prescription des crimes et des délits commis dans ces pays avant la réunion, le temps qui avait couru sous la législation qui les régissait alors, et celui qui avait couru depuis,

et l'on faisait une espèce de proportion dont le résultat servait à décider si la prescription était acquise ou non (2). Mais, independamment de la complication minutieuse de cette opération, je ne crains pas d'affirmer que cette manière de procéder était entièrement contraire aux règles et en opposition avec les grands principes de la législation et de la justice. C'eût été, sans doute, un système plus raisonnable que celui qui eût pris pour règle exclusive de la prescription la loi sous laquelle le crime avait été commis, sans s'inquiéter de la loi nouvelle, dont les effets seraient restés étrangers à ce crime antérieur à son empire. On est de suite frappé des motifs qui auraient pu déterminer à adopter cette marche un examen approfondi fait bientôt reconnaître, il est vrai, qu'elle serait vicieuse sous plusieurs rapports; mais il faut convenir pourtant qu'elle semble toute naturelle, et qu'elle n'offre pas du moins cettesingularité que l'on remarque dans l'ancienne jurisprudence de la Cour de cassation sur ce point.

Je dis que cette marche serait vicieuse, parce que, si le délai pour prescrire suivant la loi nouvelle était beaucoup moins long que celui qu'avait fixé la loi précédente, il pourrait arri ver que l'on mit en jugement un individu pour un fait commis sous l'ancienne loi, et bien antérieur à d'autres faits de même nature qui se trouveraient prescrits suivant la loi nouvelle, sous l'empire de laquelle ils auraient été commis; et cette contradiction, qui frapperait tout le monde, serait regardée à juste titre comme une inconséquence du législateur, et ne peut pas se supposer.

L'opinion absolument opposée, celle qui ferait régler la prescription, dans tous les cas, par la loi sous l'empire de laquelle on en réclame le bénéfice, pourrait être défendue avec plus d'avantage.

En effet, on ne peut nier, à ce qui me semble, que la prescription des délits ne tienne aux règles de la procédure, de l'instruction en ma

(1).cass., 22 avril 1815. Merlin, Rép., vo Prescription; S. 3, 57, no 5 bis. et dans ce sens, Chauveau, t. Jer, p. 220.-Le droit criminel n'admet pas toutes les causes qui, dans le droit civil, interrompent la prescription. La raison en est évidente: la prescription, dans le droit civil, repose sur des présomptions légales d'acquisition ou de libération; dans le droit criminel, elle repose sur la présomption légale que les preuves du crime et celles de l'innocence ont dù dépérir. La maxime contrà non valentem agere, non curit præscriptio, n'y est donc point admise, comme maxime générale.

Ainsi, les guerres, les troubles qui agitent l'Etat, » n'interrompent point la prescription des actions cri⚫ minelles; et quand il intervient, au retour de la paix. un édit, une déclaration qui compte pour rien, en fait de prescription, tout le temps qu'ont duré les » hostilités, on ne comprend pas les actions criminelles dans les dispositions de ces lois. »

LEGRAVEREND. — TOME I.

Ainsi, la démence de l'accusé, bien qu'elle soit un obstacle à ce qu'on procède à son jugement, n'interrompt point la pre-cription.

Ainsi, l'attestation d'un magistrat, portant que les pièces de la procédure sout égarées, n'a pas l'effet d'interrompre la presciption. (Cass., 25 nov. 1808.)

On conçoit, en effet, que dans les cas que je viens de citer, les obstacles qui se sont opposés à l'exercice de l'action n'ont pas empêché les preuves de dépérir, et qu'ainsi le motif qui a fait établir la prescription subsiste dans toute sa force.

Toutefois, il doit en être autrement quand l'obstacle qui s'oppose à l'exercice de l'action provient de la loi elleméme; lorsqu'il y a lien, par exemple, à sursis pour faire juger une question préjudicielle. Ne serait-il pas dérai sonnable que la loi suspendit l'exercice de l'action, et la frappât en même temps de prescription, parce qu'elle n'avait pas été exercée?

(2) Cass., 25 juin 1808; (D., 22, 484).

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tière criminelle; elle y tient comme la réhabi- [ de prescription, soutiennent que c'est donner à la loi un effet rétroactif dont elle n'est pas susceptible; et ils rappellent, à l'appui de leur opinion, l'article 2281 du C. civ., relatif aux prescriptions commencées avant le Code.

litation, par exemple; et si l'on reconnait cette vérité, il faudra convenir aussi que la prescription des délits commis sous l'empire d'une loi antérieure doit se régler entièrement d'après la loi nouvelle, sous l'empire de laquelle la question se présente. La raison de le décider ainsi, est que tout ce qui se rapporte à l'instruction, à la forme de procéder, à la compétence même, peut être réglé par la loi existante, saus que le principe de la non-rétroactivité des lois se trouve violé (1). Ainsi, en adoptant cette opinion, on n'aurait jamais à examiner, quant à la prescription, sous quelle loi le crime ou le délit a été commis, mais seulement quelle est, à cet égard, la loi en vigueur au moment où l'on élève la question de prescription.

Mais, d'abord, les principes de la législation civile sont entièrement distincts de ceux sur lesquels repose la législation criminelle. La manière de procéder en matière civile est réglée par des codes particuliers, comme la procédure criminelle par les siens; et l'on ne peut pas appliquer à l'une les règles qui concernent l'autre. Toutes les lois sur l'instruction, la com. pétence et le mode de jugement en matière criminelle, deviennent exécutoires, ainsi que je l'ai déjà dit, du moment où elles sont publiées; et comme la prescription fait partie de l'instruction criminelle, la prescription des crimes et des délits doit nécessairement, d'après ce principe, être réglée par la loi lors actuelle. N'estil pas d'ailleurs exactement vrai de dire que le système précédemment adopté par la Cour de cassation donne aussi à la loi un véritable effet rétroactif, puisqu'il admet proportionnellecon-ment la loi nouvelle pour fixer la prescription d'un délit commis avant qu'elle existât? Et si le principe de la non-rétroactivité des lois était violé par l'application des lois nouvelles à la prescription des délits anciens, ne serait-il pas évident que la violation aurait lieu dans l'un comme dans l'autre cas? Et pour que la Cour de cassation ait jugé, comme elle l'a fait, sous l'empire du Code des délits et des peines, n'a

Mais cette opinion, qui ne me paraît pas devoir éprouver d'objections sérieuses, lorsque la nouvelle loi est plus avantageuse à la prescription que l'ancienne, peut être fortement combattue par la crainte d'aggraver le sort du prévenu, dans le cas où la loi nouvelle serait au contraire moins favorable que l'ancienne.

Il est de principe général que, dans le cours de deux lois qui peuvent être consultées, ou dans le doute sur l'application de plusieurs dispositions, on doit toujours prendre pour règle celle qui est la plus favorable au prévenu ou à l'accusé. Un décret transitoire (du 25 juillet 1810, art. 6) relatif à la mise en activité du nouveau Code pénal, a fait de ce principe une application fort remarquable, en décidant, à l'égard des crimes ou délits commis sous l'an-t-il pas fallu, de toute nécessité, qu'elle rendit cien code, qu'on appliquerait la disposition du nouveau code toutes les fois qu'elle serait moins sévère que celle du précédent.

Ce que le législateur a voulu pour l'application de la peine, il l'a nécessairement voulu, et à plus forte raison, pour la prescription, soit des délits, soit des peines, et puisqu'il résulte implicitement du décret du 25 juillet 1810, qu'on ne pourrait pas poursuivre aujourd'hui l'auteur du fait qui, considéré précédemment comme offrant les caractères d'un crime ou d'un délit, ne se trouverait pas classé comme tel dans la loi nouvelle, il faut en conclure, à fortiori, que l'on ne pourrait pas poursuivre un crime ou un délit prescrit d'après la loi nouvelle, mais à l'égard duquel la prescription | ne se trouverait pas acquise, suivant les dispositions de l'ancien code (2).

elle-même hommage au principe que nous invoquons relativement à l'application des lois concernant l'instruction et la procédure criminelle?

D'un autre côté, le Code civil même, tout en décidant que les prescriptions, commencées avant qu'il fût promulgué, seraient réglées conformément aux anciennes lois, fait de suite une exception à ce principe général, et restreint au terme de trente années, à dater de sa publication, toutes les prescriptions qui, suivant les anciennes règles, n'auraient été accomplies qu'après un laps de temps plus considérable, à compter de la mème époque.

En résumant donc tout ce que je viens de dire sur la prescription des crimes, des délits et des contraventions, je crois pouvoir établir, comme une règle certaine, que la prescription Les partisans du système adopté précédem-se règle en général par les lois de la matière qui ment par la Cour de cassation, qui veulent écarter notamment celui qui consiste à prendre la loi nouvelle pour règle unique en matière

sont en vigueur au moment où la question de prescription s'élève; mais que, par une exception favorable, tirée par analogie du décret du

(1) V. ce que je dis, section des Princip. généraux,|tions de l'art. 637 du C. crim. sont applicables aux délits S de la non-rétroact.

(2) La Cour de cassation a jugé, le 18 juin 1812, que, d'après l'article 6 du décret du 23 juill., les disposi

commis avant la publication de ce code, et qui ne se trouveraient pas prescrits d'après le Code du 3 brum., an IV. (D., 22, 485.)

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