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s'il agit en homme avant que de l'être, s'il prend en quelque sorte plaisir d'apparoître aux prophètes et aux patriarches avec une figure humaine. Pour quelle raison? Que Tertullien l'explique admirablement ! Ce sont, dit très-bien cet excellent homme, des préparatifs de l'incarnation. Celui qui doit s'abaisser jusqu'à prendre notre nature, fait, pour ainsi dire, son apprentissage en se conformant à nos sentimens. « Peu à peu il s'accoutume à être » homme, et il se plaît d'exercer dès l'origine du » monde ce qu'il sera dans la fin des temps » : Ediscens jam inde à primordio, jam inde hominem, quod erat futurus in fine (1).

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Ne croyez donc pas, chrétiens, qu'il ait attendu sa venue pour avoir un amour de fils pour la sainte Vierge. C'est assez qu'il ait résolu d'être homme, pour en prendre tous les sentimens. Et s'il prend les sentimens d'homme, peut-il oublier ceux de fils qui sont les plus naturels et les plus humains? Il a donc toujours aimé Marie comme mère, il l'a considérée comme telle dès le premier moment qu'elle fut conçue. Et s'il est ainsi, chrétiens, peut-il la regarder en colère? Le péché s'accordera-t-il avec tant de grâces, la vengeance avec l'amour, l'inimitié avec l'alliance? Et Marie ne peut-elle pas dire avec le Psalmiste: In Deo meo transgrediar, murum (2) : « Je passerai par-dessus la muraille au nom >> de mon Dieu »? Il y a une muraille de séparation que le péché a faite entre Dieu et l'homme, il y a une inimitié comme naturelle. Mais, dit-elle, je passerai par-dessus, je n'y entrerai pas, je passerai « (1) Lib. 11. adv. Marcion. n. 27. —(2) Ps. xvii. 32.

par-dessus; Transgrediar (1). Et comment? Au nom de mon Dieu, de ce Dieu qui étant mon fils est à moi par un droit tout particulier, de ce Dieu qui m'a aimée comme mère dès le premier moment de ma vie, de ce Dieu dont l'amour tout-puissant a prévenu en ma faveur la colère qui menace tous les enfans d'Eve. C'est ce qui a été fait en la sainte Vierge. Finissons en vous faisant une image de cette grâce dans tous les fidèles, et reconnoissons aussi, chrétiens, que l'amour de Dieu nous a prévenus contre la colère qui nous poursuivoit, et qu'il nous prévient tous les jours. Que ce soit là le fruit de tout ce discours, comme c'est la vérité la plus importante de la religion chrétienne.

Oui, certainement, chrétiens, c'est le fondement du christianisme de comprendre que nous n'avons pas aimé Dieu, mais que c'est Dieu qui nous a aimés le premier, non-seulement avant que nous l'aimassions, mais lorsque nous étions ses ennemis. Ce sang du nouveau Testament, versé pour la rémission de nos crimes, rend témoignage à la vérité que je prêche. Car si nous n'eussions pas été ennemis del Dieu, nous n'eussions pas eu besoin de médiateur pour nous réconcilier avec lui, ni de victime pour appaiser sa colère, ni de sang pour contenter sa justice. C'est donc lui qui nous a le premier aimés, en donnant son Fils unique pour l'amour de nous. Mais peut-être que cette grâce est trop générale, et que notre dureté n'en est pas émue: venons aux bienfaits particuliers par lesquels son amour nous prévient.

(1) Transiliam, Hieronymus.

Que dirons-nous, chrétiens, de notre vocation au baptême? Avions-nous imploré son secours, l'avions-nous prévenu par quelques prières, afin que sa miséricorde nous amenât aux eaux salutaires où nous avons été régénérés ? N'est-ce pas lui au contraire qui s'est avancé et qui nous a aimés le premier? Mais peut-être que ce bienfait est trop ancien, et que notre ingratitude ne s'en souvient plus: disons ce que nous éprouvons tous les jours. Te souvienstu, pécheur, avec quelle ardeur tu courois au crime? la vengeance ou le plaisir t'emportoit: combien de fois Dieu a-t-il parlé à ton cœur, pour te retenir sur ce penchant? Je ne sais si tu as écouté sa voix; mais je sais qu'il s'est présenté souvent. L'invitois-tu, quand tu le fuyois? l'appelois-tu, quand tu t'armois contre lui? Cependant il est venu à toi par sa grâce; il a frappé, il a appelé, et ainsi ne t'a-t-il pas prévenu, et ne t'a-t-il pas aimé le premier?

Mais, fidèles, j'en vois un autre qui ne court pas au péché; il est déjà engagé dans sa servitude. II s'abandonne aux blasphêmes, aux médisances et à l'impudicité. Il n'épargne ni le bien ni l'honneur des autres, pour satisfaire son ambition; il ne respire que l'amour du monde. Jésus-Christ descendra-t-il dans cet abîme? descendra-t-il dans cet enfer? Autrefois il est allé aux enfers; mais il y étoit appelé par les cris et par les désirs des prophètes, qui soupiroient après sa venue. Ici on rejette ses inspirations, on le fuit, on lui fait la guerre. Il vient toutefois, il s'approche; dans une fête, dans un jubilé, dans quelque sainte cérémonie il fait sentir ses terreurs à une conscience criminelle, il l'excite intérieurement

presse;

il

à la pénitence. Le pécheur fuit, et Dieu le ne sent pas, et Dieu redouble ses coups pour réveiller cette ame endormie. N'est-ce pas là prévenir les hommes par un grand excès de miséricorde?

Mais vous, ô justes, ô enfans de Dieu, je sais que vous aimez votre Père: est-ce vous qui l'avez aimé les premiers? Ne confessez-vous pas avec l'apôtre (1), que « la charité a été répandue en vos cœurs par le >> Saint-Esprit qui vous est donné » ? Et Dieu vous feroit-il un si beau présent, si avant que de le faire il ne vous aimoit? C'est donc lui qui nous prévient, n'en doutons pas; c'est lui qui fait toutes les avances. Mais apprenez qu'il ne nous prévient qu'afin que nous le prévenions. Que dites-vous? cela se peut-il? Oui, fidèles, nous le pouvons. Ecoutez le Psalmiste qui nous y exhorte: « Prévenons sa face », dit-il: Præoccupemus faciem ejus (2). Que faut-il faire pour le prévenir? Il y a deux attributs en Dieu qui regardent particulièrement les hommes, la miséricorde et la justice. On ne peut prévenir la miséricorde, au contraire c'est elle qui prévient toujours; mais elle ne nous prévient qu'afin que nous prévénions la justice. Tu ne dois pas ignorer, pécheur, que tes crimes t'amassent des trésors de colère. S'ils sont scandaleux, Dieu en fera justice devant tout le monde; et quand même ils seroient cachés, Dieu les découvrira devant tout le monde. Préviens cette juste fureur; venge-les, et il ne les vengera pas; découvre-les, et il ne les découvrira pas: Præveniamus faciem ejus in confessione.

Je sais que confession en ce lieu veut dire louange, (1) Rom. v.5.- (2) Ps. XCIV. 2.

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SUR LA CONCEPTION DE LA SAINTE VIERGE.

c'est-à-dire, confesser la grandeur de Dieu. Mais je ne croirai pas m'éloigner du sens naturel, si je le fais servir à la pénitence. Car peut-on mieux confesser la grandeur de Dieu, que d'humilier le pécheur et le confondre devant sa face? Donc, fidèles, confondons-nous devant Dieu, de peur qu'il ne nous confonde en ce jour terrible. Prévenons sa juste fureur par la confession de nos crimes, Descendons au fond de nos consciences où nos ennemis sont cachés. Descendons-y le flambeau à une main, et le glaive à l'autre; le flambeau, pour rechercher nos péchés par un sérieux examen; le glaive, pour les arracher jusqu'à la racine par une vive douleur. C'est ainsi que nous préviendrons la colère de ce grand Dieu dont la miséricorde nous a prévenus. O Marie, miraculeusement dispensée, singulièrement séparée, miséricordieusement prévenue, secourez nos foiblesses par vos prières; et obtenez-nous cette grâce, que nous prévenions tellement par la pénitence la vengeance qui nous poursuit, que nous soyons à la fin reçus dans ce royaume de paix éternelle aveo le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

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