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cheveux, les ongles, la peau même leur tombaient tandis qu'un feu interne les dévorait. La plupart moururent sous les yeux du roi, qui se fit porter jusqu'à Plaisance, où il perdit la connaissance avec la parole, et mourut le lendemain, 8 août 869. On observa que les gens de sa suite, qui n'avaient point osé communier, furent les seuls que la mort épargna, et que tous ceux qui, comme Lothaire, avaient profané avec lui le corps du Seigneur moururent de la même manière : en sorte que personne ne put méconnaître la vengeance du Ciel dans ce terrible chati

ment.

Pour ne pas interrompre le récit si tragique du dénoûment de l'affaire de Lothaire, qui avait si longtemps occupé la papauté, nous avons dû renvoyer ici l'analyse des trois lettres suivantes, du Pape Adrien, qui précédèrent cette époque. Après les ambassadeurs du roi Lothaire, Actard, évêque de Nantes, fut aussi renvoyé de Rome avec plusieurs lettres en sa faveur. La première est adressée aux évêques qui avaient assisté aux conciles de Soissons et de Troyes, et le Pape y parle ainsi d'Actard: Mais parce que, suivant votre rapport, ce vénérable prélat est depuis longtemps chassé de son Eglise par la persécution des païens, et réduit à mener une vie errante, quoique sa science et sa vertu le puissent rendre très-utile à l'Eglise; nous ordonnons, suivant les maximes de nos prédécesseurs, et principalement de saint Grégoire, qu'il soit pourvu de quelque Eglise qui se trouvera vacante, et qui ne soit pas moindre qu'était la sienne, si toutefois son Eglise est tellement ruinée qu'il n'y ait plus d'espérance de la rétablir. Nous lui avons même accordé le pallium en considération de ce qu'il a souffert pour la religion; mais cet honneur sera altaché à sa personne, et non à l'Eglise dont il doit être pourvu.

La seconde lettre est au roi Charles, en réponse à la lettre que celui-ci avait écrite au Pape Nicolas, après le concile de Troyes, touchant l'affaire d'Ebbon. Le Pape Adrien déclare que cette affaire doit être désormais ensevelie dans le silence, puisqu'Ebbon n'a jamais été accusé d'aucune hérésie; et puisqu'il est mort aussi bien que les évêques qui avaient connaissance de son affaire, il est impossible d'en connaître exactement la vérité. Ensuite il recommande Actard au roi, comme il avait fait aux évêques. La lettre est du 23 février 868. Il y en a une à Hérard, archevêque de Tours: il le prie de rendre à Actard le monastère qu'il a en autrefois dans le diocèse de Tours, afin qu'il ait de quoi subsister; et marque qu'il a écrit à Salomon et aux Bretons ses sujets, pour conserver les droits de l'Eglise de Tours.

Le Pape écrivit aussi à l'archevêque Hincmar en ces termes : Quoique je vous connaisse depuis longtemps par votre réputation, toutefois je suis bien mieux instruit de votre mérite par le rapport de nos vénérables frères Arsène, apocrisiaire du Saint-Siége, l'évêque Actard et mon cher fils Anastase bibliothécaire. Ce qui m'a donné autant d'af

fection pour vous, que si je vous avais entretenu mille fois. Vous savez combien les Papes Benoit et Nicolas ont travaillé dans l'affaire du roi Lothaire; nous avons le même esprit et nous suivons ce qu'ils ont décidé. C'est pourquoi, nous vous exhortons à ne point vous ralentir, mais à parler hardiment de notre part aux rois et aux seigneurs, pour empêcher que l'on ne relève par de mauvais artifices, ce qui a été détruit par l'autorité divine. Et comme notre cher frère Charles entre les rois, et vous entre les évêques, avez principalement concouru avec le Saint-Siége à cette bonne œuvre, nous vous prions de soutenir ce prince, et l'exhorter continuellement à achever le bien qu'il a commencé. Il· lui recommande ensuite les intérêts d'Actard, pour lui faire obtenir une Eglise même métropolitaine.

A la sollicitation de l'empereur Louis, le Pape employa son intervention pour conserver à ce prince l'héritage de son frère Lothaire. Il envoya des legats en France avec des lettres où il représentait avec force les droits de l'empereur Lothaire, et l'indignité qu'il y aurait à dépouiller un prince chrétien au moment où il protégeait seul l'Eglise contre les infidèles en combattant les Arabes qui envahissaient l'Italie. La première de ces lettres, adressée aux seigneurs du royaume de Lothaire, les exhorte à être fidèles à l'empereur Louis, à le reconnaître comme légitime héritier de son frère et à ne céder aux promesses, ni aux menaces de qui que ce soit, pour se soustraire à son obéissance, sous peine d'excommunication et d'anathème. La seconde lettre adressée aux seigneurs du royaume de Charles, relève les services que l'empereur Louis rend à l'Eglise en combattant les Arabes, et rappelle la sainteté des serments que les rois frères avaient faits, de conserver leur partage entre eux et leur neveu. Le Pape ajoute Si quelqu'un s'oppose aux justes prétentions de l'empereur, qu'il sache que le Saint-Siége est pour ce prince; et que les armes que Dieu nous met en main sont préparées pour sa défense. Cette lettre, datée du 5 septembre 869, fut portée par deux évêques, Paul et Léon, légats envoyés exprès. Ils étaient chargés de deux autres lettres datées du même jour; l'une adressée à tous les évêques du royaume de Charles, l'autre à Hincmar de Reims en particulier. Le Pape exhorte les évêques à détourner le roi Charles de son injuste usurpation et donne pouvoir à Hincmar d'agir en cette circonstance comme délégué du Saint-Siége, répétant la même menace d'anathème. En effet, il appartenait au Père commun des Chrétiens de se porter publiquement le défenseur du droit international de cette époque, et, sans s'ériger en juge absolu des affaires temporelles, de chercher à faire respecter la sainteté des contrats et des serments royaux. Mais l'affaire était déjà consommée quand les lettres du Pape arrivèrent en France. Charles le Chauve n'avait pas plutôt appris la mort de Lo

thaire qu'il s'était rendu à Metz, le 5 septembre 869 et y avait été solennellement couronné roi le 9 du même mois.

Hincmar, qui avait sacré ce prince, se trouva dans la plus embarrassante alternative. Il répondit aux légats de vive voix qu'il exécuterait autant qu'il serait en lui les ordres du Souverain Pontife; mais il ne voulait pas plus se brouiller avec Charles le Chauve qu'avec le Pape. Il fit done lire aux rois, aux évêques et aux seigneurs, une note par laquelle il déclarait que le Pape lui avait intimé de leur faire connaître que si quelqu'un usurpait le royaume de Lothaire qui appartenait par droit de succession à l'empereur Louis, il serait excommunié et que les évêques qui auraient consenti à l'usurpation seraient déposés; que néanmoins il avait appris que déjà les rois Charles et Louis de Bavière avaient conclu, pour se partager ce royaume, un traité qui, s'il était rompu, donnerait sans doute lieu à des guerres civiles; en conséquence, dans un tel état de choses, voyant du péril soit à ne pas exécuter les ordres du Pape, soit à rompre un traité confirmé par serment, il n'osait prendre sur lui-même aucune résolution et laissait au Pape à décider une affaire aussi grave.

Le Pape Adrien ayant appris que, malgré ses défenses, le roi Charles s'était mis en possession du royaume de Lothaire, renvoya de nouveaux légats chargés de six lettres en date du 26 juin 870. La première est à Charles même, à qui il 'reproche d'avoir méprisé ses légats, sans les recevoir comme les rois avaient coutume de le faire. Il lui reproche encore d'avoir violé les serments par lesquels il avait promis de ne point usurper les royaumes de ses frères; et par conséquent tous les Etats de l'empereur Lothaire, dont ceux du jeune Lothaire faisaient partie; enfin de l'avoir fait au préjudice de l'empereur Louis, héritier légitime de son frère ; tandis qu'il était à combattre les Sarrasins ennemis du nom chrétien. Il conclut en disant: Nous vous enjoignons paternellement, qu'après ce troisième avertissement, vous cessiez d'envahir le royaume de ce prince; autrement nous irons nous-mêmes sur les lieux, et ferons ce qui est de notre ministère. Enfin, il lui recommande ses légats Jean et Pierre, évêques, et Pierre, cardinal, chargés de lui dire de bouche ce qu'il ne voulait pas écrire. Le Pape écrivit les mêmes choses aux évêques du royaume de Charles, et en particulier à Hincmar. Il se plaint que ce prélat n'a point répondu à ses lettres, envoyées par les légats précédents, ce qui, ajoute-t-il, est sans exemple. Il dit que Hincmar n'ayant pas détourné le roi de celte usurpation, s'en est non-seulement rendu complice, mais auteur; et il lui ordonne à lui et aux autres évêques, qu'en cas que le roi Charles persiste dans sa désobéissance, ils se séparent de sa communion, et n'aient aucun commerce avec lui, s'ils veulent demeurer dans la communion du Pape. Il adressa aussi aux seigneurs DICTIONN. DES PAPES.

du royaume de Charles une lettre, qui n'était qu'une copie de celle aux évêques.

Enfin le Pape Adrien écrivit à Louis de Germanie et aux évêques de son royaume. Il loue le roi de ce qu'il a toujours conservé la paix et l'union avec l'empereur Louis, sans prétendre au royaume de Lothaire; ce qui montre qu'il était mal instruit des intentions du roi Louis, comme nous allons le voir; mais il se plaint que ce roi eût permis d'ordonner un évêque de Cologne, sans la participation du Saint-Siége. Car, dit-il, Gontier ayant été déposé par notre jugement, on n'a pas dû lui donner un successeur sans nous consulter; c'est pourquoi nous ne confirmons point cette ordination, jusqu'à ce que celui qui a été ordonné se présente devant nous, pour être jugé dans un concile.

Hinemar, ayant reçu la seconde lettre du Pape, lui fit connaître la démarche qu'il avait faite, et se plaignit vivement de l'ordre qu'il avait reçu de se séparer de la communion du roi Charles, s'il ne voulait luimême être séparé de celle du Saint-Siége.

Deux autres affaires attirèrent en même temps à Charles le Chauve des reproches de la part du Pape Adrien. Ce roi avait fait entrer dans le clergé dès l'enfance, son fils Carloman, qu'il fit ensuite ordonner diacre malgré lui. Mais le jeuue prince, renonçant bientôt à un état qu'il n'avait embrassé que par force, rassembla des troupes, pilla les églises et commit toutes sortes d'excès. Son père le fit condamner dans le concile d'Attigny, en 870, et les évêques publièrent, l'année suivante, une sentence d'excommunication contre ses complices. Carloman ci à comparaître devant un concile à cié Sens, et menacé lui-même d'excommunication, envoya des députés avec des lettres contenant un appel au Saint-Siége. Le Pape écrivit au roi pour lui reprocher son odieuse conduite envers son fils. Il écrivit en même temps aux seigneurs pour leur défendre de prendre les armes contre Carloman, sous peine d'excommunication, et défendit aux évêques d'excommunier Corloman avant qu'il n'eût pris connaissance de cette affaire. Ces trois lettres sont du 13 juillet 871.

Hincmar, évêque de Laon et neveu du célèbre archevêque de Reims, avait appelé à Rome de plusieurs jugements rendus contre lui. Le Pape désapprouva la condamnation dont on l'avait frappé lorsqu'il en appelait au Saint-Siége, et ordonna d'envoyer cet évêque à Rome avec ses accusateurs, pour que la cause y fût jugée. Il écrivit dans le même sens à Charles le Chauve, et lui reprocha son peu de respect pour les avis et les légats du Saint-Siége. Il déclara surtout d'une manière positive qu'il ne consentirait jamais à la déposition de l'évêque de Laon, s'il n'était envoyé à Rome pour y êle jugé. Le roi répondit avec hauteur au Pape qui répliqua avec une admirable modération à celte lettre inconvenante. Après quelques éloges et des témoignages d'affection, Adrien déclare qu'il ne veut prendre aucune connaissance de l'appel de l'évêque de Laon,

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que suivant les canons, et promet, après qu'il sera revenu à Rome, d'envoyer le jugement sur les lieux.

Tandis que le Pape s'occupait ainsi activement à pacifier les affaires spirituelles et temporelles de la chrétienté en Occident, celles de l'Eglise d'Orient vinrent fournir un aliment à son zèle. Basile, s'étant emparé de l'empire en 867, chassa Photius et rétablit Ignace. Lorsque cette nouvelle fut parvenue à Rome, Adrien chargea Euthymius de deux lettres en date du 1 août 868, l'une pour l'empereur Basile, l'autre pour le patriarche Ignace. Dans l'une et dans l'autre, il déclare qu'il suivra inviolablement tout ce qu'a fait le Pape Nicolas I touchant l'affaire de Photius. De son côté, Basile avait déjà fait partir un ambassadeur pour Rome afin d'obtenir le consentement du Pape avec des légats. Adrien, ayant reçu les envoyés de l'empereur et du patriarche, convoqua à Rome un concile qui condamna de nouveau Photius, et envoya à Constantinople trois légats, Donat, évêque d'Ostie, Etienne, évêque de Nepi, et Marin, un des sept diacres de l'Eglise romaine, qui fut depuis Pape. Ils étaient chargés de deux lettres, l'une à l'empereur Basile, l'autre au patriarche Iguace. Dans la lettre à l'empereur, le Pape Adrien déclare que, lui et toute l'Eglise d'Occident, ont été très-satisfaits de ce qu'il a fait à l'égard de Photius et d'Ignace : Quant aux schismatiques, dit-il, comme ils ont péché diversement, ils doivent être diversement jugés; et nous en remettons la connaissance à nos légats avec notre frère Ignace. Vous pouvez compter que nous userons de clémence envers eux, excepté Photius dont l'ordination doit absolument être condamnée. Nous voulons que vous fassiez célébrer un concile nombreux, où président nos légats, et où l'on examine les différences des fautes et des personnes; que dans ce concile on brûle publiquement tous les exemplaires du faux concile tenu contre le Saint-Siége, et qu'il soit défendu d'en rien garder, sous peine de déposition et d'anathème. Nous vous demandons aussi que les décrets du concile de Rome, contre Photius, soient souscrits de tous dans le concile qui sera tenu chez vous, et gardés dans les archives de toutes les églises. Nous vous prions de nous renvoyer Basile, Pierre et Zozime, qui, se sentant coupables et animés de passion, ont abandonné leurs monastères, el, sans lettre de recommandation, sont allés à Constantinople. Nous voulons les faire rentrer dans les maisons où ils ont été élevés et ordonnés prêtres; et ceux qui les retiendront ne demeureront pas impunis. Ces moines étaient ceux qui avaient porté des plaintes à Photius contre le Pape Nicolas I".

Dans la lettre au patriarche Ignace, le Pape Adrien déclare qu'il suit en tout la conduite et les décrets de Nicolas, son prédécesseur (Voy. NICOLAS I"), principalement contre Grégoire de Syracuse et contre Photius. Quant aux évêques, ajoute-t-il, et aux clercs, qui ont été ordonnés par Méthodius et par vous, s'ils ont résisté à Photius et souffert

persécution avec vous, je les compte entre les serviteurs de Jésus-Christ, et suis d'avis qu'ils aient une place distinguée dans votre Eglise et reçoivent la consolation qu'ils méritent. Mais ceux d'entre eux qui ont pris le parti de Photius, s'ils reviennent à vous, en faisant la satisfaction dont nous avons donné le modèle à nos légats, nous avons jugé qu'on leur doit pardonner et qu'ils doivent conserver leur rang. Ces lettres sont du 10 juin 869.

Les légats arrivèrent à Constantinople, le 24 septembre 869 et y furent reçus avec les plus grands honneurs. On fixa l'ouverture du concile général dont la première session fut tenue le 5 octobre suivant. Les trois légats du Pape prirent la première place. On Tut les lettres du Pape à l'empereur et au patriarche Ignace, les lettres de créance des légats d'Orient, ainsi que le formulaire dont le Pape exigeait la signature de tous les évêques, ecclésiastiques et moines, sous peine d'être exclus de la communion du Saint-Siége. C'est le même que le Pape Hormisdas envoya en 519 pour la réunion de l'Eglise de Constantinople, et qui fut souscrit par le patriarche Jean, le même aussi que l'empereur Justinien envoya au Pape Agapet en 535. Les Pères trouvèrent ce décret conforme à la foi et aux saintes maximes, et s'écrièrent d'une voix unanime: « Qu'il était très-sage, et qu'ils l'admettaient.» Le concile approuva les sept conciles œcuméniques auxquels on joint celui-ci comme le huitième, confirma la condamnation prononcée contre Photius, et fit vingt-sept canons de discipline. Les Pères témoignèrent leur approbation par de vives acclamations. Les trois légats du Pape souscrivirent les premiers avec cette clause: Jusqu'à la ratification du Pape.

Avant de se séparer, le concile écrivit une letire synodale au Pape Adrien pour le prier de confirmer ce concile et de le faire recevoir dans toutes les Eglises. On y donnait de grandes louanges aux légals et au Pape Nicolas, dont on s'applaudissait d'avoir suivi le jugement. Un an après, l'empereur Basile et le patriarche Ignace écrivirent au Pape pour demander la permission d'élever aux ordres sacrés les lecteurs ordonnés par Photius, et de rétablir dans leurs fonctions deux évêques interdits. Le Pape répondit qu'il ne pouvait rien changer de ce qui avait été établi par le concile et par le Saint-Siége, à moins que les parties ne vinssent se présenter devant lui, et exposer les motifs légitimes de dispense. Ce fut à cette époque qu'eut lieu la conversion des Russes. En 872, l'empereur Louis vint à Rome à la Pentecôte, et y fut couronné par le Pape Adrien qui parut ainsi se désister de son ancienne opposition contre lui. Ce Pape mourut en novembre 872, après avoir tenu le Saint-Siége près de cing ans, et eut pour successeur Jean VIII. ADRIEN III. Fils de Benoit, et Romain de naissance, Adrien III fut ordonné le dimanche, premier jour de mars 884, sous le règne de Basile, empereur d'Orient et de Charles le Gros, roi de France. Dès son en

trée dans le pontificat il représenta énergiquement au sénat et au peuple romain que l'Eglise ne devait pas attendre l'ordre et la volonté de l'empereur pour la confirmation d'un Pape, et que les suffrages du peuple et du clergé devaient être absolument libres. Il rejela Photius, comme l'avaient fait ses prédécesseurs. Ce fut sous son pontificat que Photius écrivit une lettre violente contre les Latins, au sujet de la procession du Saint-Esprit. Cette lettre, adressée à l'archevêque d'Aquilée, est une réponse à celle que ce prélat lui avait écrite. Photius lui dit avoir appris avec douleur que quelques Occidentaux soutiennent que le Saint-Esprit ne procède pas seulement du Père, mais encore du Fils. Il combat cette doctrine qui fut toujours celle de l'Eglise, prétendant que le Pape saint Léon a enseigné que le SaintEsprit ne procédait que du Père, et que Léon III a déclaré la même chose, en faisant graver le symbole sans addition sur deux boucliers d'argent. Mais il y a bien de la différence, entre dire que le Saint-Esprit procède du Père, sans parler du Fils, et nier expressément qu'il procède du Fils. Adrien III, ne voulant pas communiquer avec l'impie Photius, et l'empereur Basile, voyant qu'il ne pouvait le gagner par des prières, lui écrivit des lettres injurieuses qui le trouvèrent mort lorsqu'elles arrivèrent à Rome.

Charles le Gros, empereur d'Allemagne, ayant invité Adrien à se rendre en France pour déposer quelques évêques indigues, et pour faire reconnaître héritier du royaume Bernard, son fils naturel, le Pape se mit en route, mais il mourut avant d'être sorti de l'Italie, le 8 juillet, et selon quelques auteurs, le 20 juillet 885, après seize mois de pontificat. Il fut enterré à Nonantola, monastère du diocèse de Modène, sans avoir pu, dans un si court espace de temps, réaliser toutes les espérances que ses vertus avaient fait naître. Il fit, avant de mourir, deux décrets importants: l'un, qu'on consacrerait le Pontife romain sans attendre l'empereur, ni aucun envoyé de sa part; l'autre, que si l'empereur Charles venait à mourir sans enfants, le royaume d'Italie, avec le titre d'empereur, passerait à des princes de la nation italienne. Il est honoré comme saint et patron de Siplimbert dans le duché de Modène. Son successeur fut Etienne V.

ADRIEN IV, contemporain de Frédéric I", roi d'Occident, et de Louis VII, roi de France.

Il se trouve peu de fortunes, »> dit le P. Maimbourg, semblables à celle de ce grand Pontife que la Providence divine semble avoir pris soin de tirer de la poussière et d'une extrême pauvreté pour le faire asseoir sur le trône de la suprême grandeur ecclésiastique, et le mettre au rang des princes de son peuple. » Il était Anglais de nation, nommé Nicolas Breks-peire, c'est-à-dire Brise-lance, fils d'un clerc du nom de Robert, qui se fit moine à Saint-Alban, laissant ce fils en bas âge et presque sans ressour

ces. Nicolas étant devenu plus grand, et n'ayant pas de quoi aller aux écoles, subsistait des aumônes du monastère, où il venait tous les jours. L'esprit et le sentiment croissant à la faveur des années et des instructions paternelles, il eut honte de celle dépendance, passa la mer, vint en France, pénétra jusqu'en Provence, et s'arrêta à Saint-Ruf, monastère fameux de chanoines réguliers près d'Avignon. Il s'appliqua à gagner leurs bonnes grâces par tous les services qu'il leur pouvait rendre. Comme il était bien fait de sa personne, sage en ses discours, prompt à exécuter les commissions, il se rendit agréable à toute la com munauté, en sorte qu'ils l'engagèrent à prendre leur habit, et il vécut plusieurs années avec eux dans la plus grande régularité. Il s'appliqua à la lecture; il avait d'ailleurs l'esprit pénétrant, et une grande facilité à parler; avec ces belles qualités, il fit beaucoup de progrès dans les sciences et dans l'éloquence. Enfin il se fit tant estimer, que l'abbé Guillaume étant mort, il fut choisi pour lui succéder.

Mais, comme il était profondément pieux, ayant voulu entreprendre de réformer les religieux qui menaient une vie peu conforme à leur profession, ils se repentirent de l'avoir mis à leur tête; ils inventèrent contre lui des calomnies et l'accusèrent devant le Pape Eugène. Ce Pape ayan ouï leurs plaintes, et voyant la sagesse et la modestie avec lesquelles Nicolas se défendait, s'appliqua à rétablir la concorde; et, après les avoir réconciliés, il les renvoya. Cetto paix ne fut pas de longue durée; il s'éleva bientôt une tempête plus violente encore, et ces chanoines revinrent porter leurs plaintes au Pape Eugène, qui leur dit : Je sais quelle est la cause de cet orage; choisissez quelqu'un avec qui vous puissiez vivre en paix, celui-ci ne vous sera plus à charge: il les renvoya ainsi, et retint auprès de lui Nicolas pour le service de l'Eglise romaine, et le fit évêque d'Albane. Il fut ensuite envoyé légat en Norwége, où il instruisit avec soin, dans la loi de Dieu, cette nation encore barbare; et, à son retour, il fut élevé sur le SaintSiége, le 3 décembre 1154, le lendemain de la mort d'Anastase, son prédécesseur. Lo nouveau roi d'Angleterre, Henri, ayant appris l'élection de ce Pape, né son sujet, lui fit écrire une lettre où il félicite son pays d'avoir produit un arbre si heureusement transplanté; il l'exhorte à remplir l'Eglise de dignes ministres, et à procurer du secours à la Terre-Sainte. En même temps il lui demande la permission de se rendre maltre de l'Irlande pour y rétablir le christianisme dans sa pureté: ce qui fut accordé par le nouveau Pape qui, en signe d'investi ture, envoya au roi un anneau d'or orné d'émeraude.

Cependant Arnaud de Bresse était à Rome, où il continuait à tenir des discours séditieux, étant soutenu par les sénateurs. Quelques-uns de ceux qu'il avait séduits, attaquèrent Gérard, prêtre-cardinal, comme il

passait dans la rue sacrée pour aller trouver le Pape, et le blessèrent assez dangereusement. Le Pape Adrien mit la ville de Rome en interdit, et on y cessa les Offices divins. Mais les sénateurs, pressés par le clergé et le peuple, vinrent trouver le Pape, et lui jurèrent sur les Evangiles, qu'ils chasseraient de Rome Arnaud et ses sectateurs : ce qui fut exécuté, et alors le Pape leva l'interdit. Le lendemain, qui était le jeudi saint 1155, on accourut de toutes parts, selon la coutume, pour recevoir l'absolution du Pape. Ce Pontife, accompagné d'évêques et de cardinaux, étant sorti de la ville Léonine où il était demeuré depuis son ordination, et passant au travers de Rome, au milieu des applaudissements de tout le peuple, arriva au palais de Latran, où il célébra la fête de Pâques.

Peu de temps après Frédéric Barberousse marcha sur Rome. Ce prince d'une ambition sans limites se prétendait successeur des Césars et voulait s'attribuer un pouvoir absolu et universel tant sur l'Eglise que sur l'Etat. Il désirait surtout subjuguer l'Italie qu'il considérait comme son patrimoine. Le Pape était alors à Viterbe. Quand il apprit que Frédéric marchait sur Rome en diligence, il assembla son conseil, envoya au-devant du prince trois cardinaux et leur prescrivit les articles suivant lesquels ils devaient traiter. Frédéric ayant juré de conserver au Pape et aux cardinaux la vie, la liberté, l'honneur et les biens, on fixa le jour et le lieu de l'entrevue entre le Pape et l'empereur. Alors plusieurs seigneurs allemands conduisirent le Pape à la tente du roi avec les évêques et les cardinaux de sa suite. Mais, comme le roi ne vint point tenir l'étrier au Pape, les cardinaux se retirèrent fort choqués. Le Pape ne laissa pas de descendre de cheval et de s'asseoir dans un fauteuil qui lui était préparé. Alors le roi vint se prosterner devant lui; et, après lui avoir baisé les pieds, il s'approcha pour recevoir le baiser de paix ; mais le Pape lui dit qu'il ne l'y admettrait point, jusqu'à ce qu'il lui eût rendu l'honneur que tous les empereurs orthodoxes avaient rendu à ses prédécesseurs. Le roi soutint qu'il ne devait point s'y soumettre, et tout le jour suivant se passa en conférences sur ce sujet. Enfin le roi ayant interrogé les vieux seigneurs qui avaient accompagné l'empereur Lothaire à l'entrevue avec le Pape Innocent, et s'étant informé de la coutume, tant par leurs rapports que par les anciens monuments, conSentit, malgré sa répugnance, à faire auprès du Pape la fonction d'écuyer, ce qui fut exé cuté le lendemain, à la vue de toute l'armée; il tint l'étrier au Pape la longueur d'un jet de pierre, et le Pape ensuite le reçut au baiser de paix.

Le lendemain matin, le Pape alla à SaintPierre, où le roi se rendit. On chanta la Messe, et après le Graduel, le roi s'approcha du Pape, et reçut de sa main l'épée, le sceptre et enfin la couronne impériale. Les Romains, irrités de ce que Frédéric avait été couronné empereur sans leur consentement,

se jetèrent en furie sur quelques-uns des écuyers de ce prince, les tuèrent dans l'Eglise même. L'empereur vint avec ses troupes; on combattit pendant quatre heures, et les Romains furent repoussés : on en tua près de mille, et on en prit deux cents dont le Pape obtint la délivrance.

La rébellion des Romains était fomentée par Guillaume, roi de Sicile, surnommé le Mauvais, qui avait succédé l'année précédente à Roger, son père. Celui-ci, n'ayant pas obtenu du Pape la confirmation de son royaume attaqua les terres de l'Eglise romaine, et le Pape Adrien, après l'avoir excommunié, marcha contre lui avec une armée dans la Campanie, reprit plusieurs places et fut reconnu de tous les seigneurs. Guillaume offrit alors de faire hommage au Saint-Siége, de lui donner trois villes en propriété, de rendre la liberté à toutes les églises et d'employer ses forces pour aider le Pape à soumettre les Romains. Le Pape se montrait disposé à accepter ses conditions; mais les cardinaux, pleins d'une vaine confiance, l'en détournèrent. Cependant l'année suivante [1156], comme il était assiégé dans Bénévent et hors d'état de résister, il fut obligé de souscrire à des conditions moins favorables. Mais le roi promit de faire hommage au Pape, du royaume de Sicile, du duché de Pouille et de la principauté de Capoue, et de payer le tribut annuel comme ses prédécesseurs. Pendant qu'Adrien était dans la Pouille, il fut visité par Jean de Salisbury, son compatriote et son ami, alors chapelain de l'archevêque de Contorbéry. Adrien lui ouvrit son cœur, et lui avoua qu'il avait trouvé bien des misères dans le SaintSiége; qu'il aurait mieux aimé être demeuré toujours caché dans le cloître de SaintRuf, que de s'être jeté dans de tels embarras, mais qu'il n'avait osé résister à la Providence.

Jean de Salisbury était porteur de lettres du roi d'Angleterre demandant au Pape la permission d'entrer en Irlande et de s'en rendre maître pour rétablir le christianisme dans sa pureté; demande fondée sur le droit de suzeraineté de l'Eglise romaine sur toutes ces fles comme nous le verrons en parlant d'Urbain II. Le Pape accorda à la prière de Jean de Salisbury ce que le roi d'Angleterre demandait, comme il paraît par la bulle où il dit: On ne doute pas, et vous le connaissez vous-mêmes, que l'Irlande et toutes les iles qui ont reçu la foi chrétienne appartiennent à l'Eglise romaine: or, vous nous avez fait entendre que vous vouliez entrer dans cette ile, pour en soumettre les peuples aux lois et en extirper les vices: faire payer à saint Pierre un denier par an de chaque maison, et conserver en leur entier les lois de l'Eglise. Ce que nous vous accordons avec plaisir pour l'accroissement de la religion chrétienne. Avec cette bulle, le Pape envoya au roi d'Angleterre un anneau d'or, orné d'une émeraude, en signe d'investiture.

La même année 1156, le Pape confirma la renonciation de la vicomtesse de Narbonne à

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