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« Vers cette époque il arriva qu'Odon, ami de cœur de saint Hugon, avait l'habitude, après la réunion du matin, de rester à l'église, ainsi que le permet saint Benoît, pour faire une oraison particulière. Comme il remplissait ce devoir avec ferveur, et priait le Créateur de toutes choses, tant pour ses fautes que pour celles des autres, avec des torrents de larmes et des soupirs de componction, on vit un miracle extraordinaire. Un jour, selon sa coutume, il s'était approché du crucifix placé au milieu de l'église. Tandis que, les mains étendues, il levait les yeux au ciel dans l'exaltation de sa ferveur, plusieurs moines, qui l'avaient suivi pour faire leur méditation, le virent s'élever de terre à peu près à la hauteur de trois aunes et y rester immobile l'espace d'une heure. Au même moment l'image du Christ s'inclina profondément vers l'homme de Dieu. L'abbé et les autres frères présents à cette scène, singulièrement effrayés et frappés d'admiration, ne pouvaient proférer une parole. Avant cet événement, plusieurs moines injuriaient Odon et le tournaient en dérision, disant qu'il ne restait seul à l'église, après les exercices de la communauté, que dans un but de vaine gloire et d'orgueil. Depuis ce jour les interprétations malignes et les propos jaloux cessèrent ; tout le monastère s'inclina devant le saint. Dieu se servit de lui pour opérer plusieurs guérisons, et, jusqu'à la fin de sa vie, ses vertus obtinrent un si grand nombre de miracles, qu'ils rempliraient un livre. »

Ce crucifix attira pendant bien des siècles un grand concours à Saint-Martin'. Jusqu'à la destruction de l'ab

1 Au XVIIe siècle, plusieurs papes accordèrent consécutivement

baye on vint faire devant lui des prières pour obtenir la guérison des maladies. Un assez grand nombre de procèsverbaux du milieu du XVIIe siècle attestent son efficacité.

Mutilé par les protestants pendant les guerres de religion, restauré, en 1640 à la suite d'un de ces miracles qui l'avaient rendu célèbre1, ce crucifix disparut dans la démolition de l'abbaye. Une grande peinture le représente encore aujourd'hui au-dessus de l'autel d'une chapelle de la Cathédrale. Une autre semblable existe à l'église Notre-Dame de Beaune, et une ancienne gravure, accompagnée de la légende de saint Odon, l'a rendu populaire dans nos pays.

Cette image du Christ, en pierre très dure, était attachée à une croix de bois posée contre le collatéral de l'évangile. Du temps de saint Odon, elle était élevée au milieu de l'église sur une traverse, à l'extrémité de la nef, faisant face aux fidèles. Cette disposition, conforme à un usage tout-à-fait ancien, et l'étude iconographique de ce monument reportent la date de sa construction avant le Xe siècle. Ce fut au VIIIe seulement que l'image du Christ en croix apparut dans les églises d'Italie. Les artistes latins le représentèrent sans barbe, coiffé d'un bandeau royal ou d'une thiare, sous les apparences d'un homme jeune et beau.

Le crucifix de Saint-Martin représentait le Sauveur

des indulgences plénières pendant sept années à tous les prètres de Saint-Martin qui diraient la messe à l'autel du Crucifix, la veille et la semaine des Morts.

1 Pièces justificatives, no 154 et 155.

2 Eméric David, Histoire de la peinture.

vivant, et la grossièreté de l'exécution semblait se ressentir de l'opinion accréditée par saint Justin, Tertullien, saint Basile et autres, que le Christ, par humilité, avait été laid et était venu au monde sous les formes ignobles d'un esclave'. Au-dessus de sa tête, une couronne de pierreries soutenue par une main sortant d'un nuage, faisait allusion à ce passage du psalmiste « Posuisti in capite ejus coronam de lapide precioso2; » elle remplaçait les attributs de la royauté qui accompagnent les plus anciennes images du Dieu crucifié. La main sortant d'une nuée était un symbole bysantin d'une haute antiquité; avant le milieu du IXe siècle, les artistes représentaient Dieu le père par cet emblème ou par un rayon descendant du ciel.

1 Tertullien.

2 Ps. XX.

CHAPITRE VIII

Fondation d'Anzy par Lethbald.

en Palestine

[ 876]

Un de ses descendants

Le récit de ces merveilleux événements, recueilli avec avidité, devait naturellement attirer à l'abbaye les faveurs des fidèles. Ils lui valaient de fréquentes donations de terre ou d'argent, à une époque où elles étaient considérées comme un moyen de pénitence et de salut. Les usurpations de biens d'église avaient été d'ailleurs si nombreuses, que presque toutes les familles puissantes en avaient quelqu'une à se reprocher. Ces reproches leur devenaient plus sensibles à mesure que l'abbaye recouvrait son premier éclat. L'exemple des vertus et de la charité qui y brillaient déterminaient souvent les cons

ciences inquiètes à restituer des biens dont l'origine était violente ou incertaine. D'autres fois la crainte d'être recherchés dans ces possessions ou d'attirer sur eux la réprobation publique, décidait à cette mesure des détenteurs inaccessibles à des scrupules plus respectables. On en peut citer plus d'un exemple.

Le comte Heccard se trouvait dans une position semblable. Il descendait de cette famille des Childebrand et des Nibelung qui avait donné des comtes à Autun, à Nevers, à Auxerre, à Orléans. Il était fils de Childebrand,

Heccard semble avoir été un des représentants de cette fraction lettrée des leudes karlovingiens qui avaient puisé au palais impérial l'amour des sciences, la préoccupation des arts et des habitudes de luxe contrastant avec les scènes de barbarie et de violence qui précèdent et suivent le règne de Charlemagne. Le palais d'Heccard était un musée où étaient réunis, dans un riche pêle-mêle, des manuscrits précieux, de riches armes, des objets d'art. C'étaient les Chroniques de Grégoire de Tours, les Gestes des Lombards, des évangéliaires, des missels, des écrits des Pères, toute sorte de livres d'église, des vies de saints, à côté d'un traité d'astrologie, d'art militaire, de médecine; des boucliers, des lances, des épées indiennes et autres ; de l'or en lingots, des hanaps de corne, de verre, de marbre, d'argent; des camées, des cachets sculptés, des pierres antiques, des saphirs, des améthystes, des reliques enchâssées dans l'or et l'argent, des tables sarrasines; une chapelle complète où brillaient les ornements les plus variés, des vases sacrés des plus précieux métaux, enrichis de ciselures et de pierres précieuses, des calices, des encensoirs, des croix d'or, etc.; des chevaux avec des selles et des tapis, une meute de chiens segusii, des faucons. C'est par erreur que Pérard, p. 22 et suiv., a daté ce testament de 840. Il a confondu la première année du règne de Charles le Chauve, comme roi, avec la première de son règne comme empereur, ce qui reporte la date de ce monument à 876.

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