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ordinaire de l'histoire, les distinctions de haute et basse antiquité, de moyen et de bas-âge sont presque entièrement inusitées; et l'on n'admet, dans toute la série des tems historiques, que trois grandes divisions: l'antiquité, le moyen-âge et les tems modernes. Alors le moyen-âge embrasse toute la durée de l'empire d'Orient, depuis l'invasion des Barbares en 475, jusqu'à la conquête de Constantinople par Mahomet II en 1453. M. Moeller, en y ajoutant soixante-quatre années, prolonge le moyen-âge jusqu'à la naissance des hérésies du 16e siècle. C'est donc une période de dix siècles et demi dont il se propose de tracer l'histoire complète dégagée de toute réflexion inutile, mais »> n'omettant aucun des faits qu'il est important de connaître. »

Le premier soin d'un historien doit être de rechercher quelle a été, à l'époque dont il s'occupe, l'idée inspiratrice, le fait générateur qui a dirigé le mouvement des siècles et réglé le cours des événemens. C'est l'action puissante de l'Eglise qui domine au moyen-âge; c'est par l'Eglise que tout s'enchaîne et s'explique pendant cette longue période historique.

C'est ce que M. Moeller avait présent à l'esprit lorsqu'il a travaillé à son histoire, et l'on peut sans flatterie aucune lui donner le mérite d'avoir fait un ouvrage entièrement neuf quant à la forme, et dont le fond même est sensiblement rajeuni par la manière, toute exceptionnelle de nos jours, dont il considère les événemens.

L'ouvrage se divise en quatre parties correspondant à quatre grandes périodes du moyen-âge. La première de ces périodes, de 476 à 800, embrasse les événemens qui se sont passés depuis la destruction de la civilisation ancienne par les peuples germaniques, jusqu'à la fondation de l'empire germano-chrétien par Charlemagne. La seconde s'étend depuis la fondation de l'empire de Charlemagne en 800, jusqu'à la réorganisation de la société catholique, en 1073, par le pape Hildebrand. La troisième, de 1074 à 1303, comprend le développement et les diverses phases de la société catholique sous le gouvernement des souverains pontifes jusqu'à Boniface VIII. La quatrième commence en 1303 avec un nouveau systême social, et s'étend jusqu'à la division définitive du monde catholique par la naissance des hérésies du 16o siècle.

La première de ces périodes remplit seule le premier volume dont nous avons à rendre compte, et les trois autres seront traitées dans un second volume; nous l'attendons avec une impatience proportionnée au vif intérêt que nous a fait éprouver la lecture du premier.

Celui-ci renferme lui-même deux parties bien distinctes, l'une où l'auteur traite la première des quatre divisions du sujet principal (pages 105-467); l'autre qui remplit les 105 premières pages, et qui se compose d'une introduction suivie d'un exposé préalable que nous pourrions désigner sous le nom de prolégomènes. Cette introduction et ces prolégomènes ne forment pas la portion la moins intéressante de l'ouvrage; on y trouve à chaque ligne des vues profondes et tout-à-fait neuves, dont nous allons essayer de faire ressortir l'importance.

L'histoire, dit M. Moeller, considérée dans sa plus grande généralité, est la biographie de l'humanité. L'incrédulité elle» même ne conteste plus l'unité de notre espèce, et elle recon> naît que le genre humain se développé à la façon des indi» vidus. Or, pour bien comprendre et bien juger les actes d'un » individu à une époque quelconque de sa vie, il faut connaître » les actes qui ont précédé ceux-là. Il en est de même de chaque »époque de l'histoire du genre humain; elle n'est intelligible >> qu'autant qu'on l'étudie à l'aide d'une connaissance appro>> fondie des époques antérieures. Alors la grande question des » origines se présente », question long-tems et souvent débattue, mais toujours insoluble pour l'homme abandonné aux seules ressources de la raison. D'un côté la création de l'homme à l'image de Dieu, sa déchéance causée par la première faute; de l'autre, le libre arbitre donné à l'homme, et l'influence que la grâce divine exerce sur ce libre arbitre : voilà les seuls faits à l'aide desquels on puisse expliquer et les contrastes du cœur humain et ceux qui se rencontrent à chaque page dans l'histoire de l'humanité. Cette histoire toute entière, M. Moeller la divise en deux grandes périodes dont l'une n'a été qu'une longue préparation de l'autre. Dans la première, Dieu a posé les bases de son église; dans la seconde, c'est l'édifice même de l'Eglise qu'il a construit, édifice tellement merveilleux qu'il résistera à l'effort des siècles à venir. Partant de ce principe, l'historien

parcourt, d'un coup-d'œil rapide et sûr, le vaste tableau de l'histoire universelle. Il prend la société humaine à son origine, la suit à travers les siècles dans ses développemens et dans ses transformations successives. Partout il montre le doigt de Dieu faisant concourir à ses fins et les hommes et les événemens. Cette force divine, cette volonté toute-puissante dont l'action se manifeste évidemment à la raison humaine lorsqu'elle est éclairée des lumières de la foi, peut seule expliquer des faits qui resteront toujours inintelligibles pour la philosophie mondaine. Qui nous dira par quel pouvoir magique une poignée de soldats grecs a repoussé la formidable invasion des armées asiatiques? C'est que la Grèce était le foyer des lumières et de la civilisation, dépôt précieux dont la conservation était indispensable à l'accomplissement des projets divins; c'est que tout était matériel dans la monarchie persanne, et que les progrès de l'intelligence auraient été suspendus, et peut-être complétement arrêtés si la Grèce avait succombé sous les armes de Darius et de Xerxès. Plus tard, il est vrai, cette patrie des arts se courbe sous le joug de la puissance romaine; mais déjà Rome avait subi l'influence de la civilisation grecque. « Alors, dit M. Moeller, > la grande préparation politique du genre humain touche à sa >> fin. Les Romains s'avançant de conquêtes en conquêtes, finis> sent enfin leur tâche; ils réunissent tout le monde civilisé >> sous leur joug, détruisent ce qui restait de national, dans les »lois et les mœurs des vaincus, et frayent, par l'unité de leur »gouvernement, une large voie au Christianisme, pendant que, » de son côté, la philosophie, en abattant toutes les erreurs religieuses, sans leur rien substituer, lui en ouvre une autre » dans l'ordre intellectuel. »

Alors paraît le Sauveur du monde; il se sacrifie pour relever l'homme de la déchéance qu'il avait encourue. Après sa mort, des hommes élevés à son école, inspirés par une émanation divine, prêchent la loi nouvelle qu'il avait apportée. L'acceptation de cette loi, pour être plus méritoire, devait être volontaire aussi voyons-nous, dès le principe, qu'elle est arrêtée dans son développement par mille entraves, comme si sa propagation était une entreprise purement humaine. La croix est d'abord arrosée par le sang des martyrs, mais elle puise dans

ce sang précieux une nouvelle sève; elle pousse des racines de plus en plus profondes, et bientôt ses branches s'élèvent audessus du sceptre impérial. Assise sur le trône, la religion trouva des ennemis nouveaux dans l'orgueil même des puissances qu'elle avait asservies. Des hérésies désolèrent l'Église à son berceau, et cherchèrent un appui jusque sur les marches du trône; mais Dieu ne pouvait pas laisser périr son œuvre; à sa voix, du fond de la Germanie, une nuée de peuples barbares s'élance à diverses reprises sur la capitale du monde civilisé, et leurs guerres avec la vieille Rome, se terminent par la chute de l'empire d'Occident.

Ici, commence le moyen-age; ici, par conséquent, aurait pu finir l'introduction de M. Moeller; mais le savant auteur ne s'arrête pas là: il continue sa rapide analyse, et passe en revue, toujours dans le même esprit, les principaux événemens qui se sont succédés pendant les quatre grandes périodes qu'embrasse 'son ouvrage; nous ne le suivrons pas dans cette espèce de pélerinage historique; l'examen de cette partie de son travail viendra naturellement avec celui des autres parties où il développe les faits qu'il ne fait ici qu'indiquer.

Avant d'entrer dans les détails de son histoire, M. Moeller a donné une liste des ouvrages que doit consulter celui qui veut s'occuper sérieusement de l'histoire du moyen-âge. Cet utile catalogue comprend quatre parties dans la première, l'auteur signale les ouvrages indiquant les sources, tels que Fabricius, le P. Lelong, Fontette, et les ouvrages propres à faciliter l'étude des monumens historiques, comme Ducange, Mabillon, St.-Maur d'Antine. Dans la seconde, l'auteur fait connaître les grandes collections dans lesquelles les savans de chaque pays ont réuni les élémens de leur histoire nationale. Après un premier paragraphe indiquant les collections relatives à l'histoire du moyen-âge en général, M. Moeller signale séparément celles qui sont particulières à la France, à l'Italie, à l'Allemagne, à la Belgique, à l'Angleterre, à l'Espagne, au Danemark et à la Norwège, au Bas-Empire, enfin aux peuples de l'Orient. La troisième partie est consacrée aux ouvrages qui peuvent faciliter l'étude de la géographie au moyen-âge. Nous regrettons avec M. Moeller, que ces ouvrages ne soient pas plus

nombreux, mais leur rareté est une raison de plus pour n'en omettre aucun, et nous nous permettrons d'en signaler deux, omis par M. Moeller, qui méritaient, à notre avis, une mention particulière. Le premier est la Description de l'Afrique par AbouObaid-Békri, traduite par M. Quatremère, et inséré dans le douzième volume de la Notice des Manuscrits; l'autre est le Traité de géographie du célèbre Edrisi. Un abrégé de cet ouvrage, publié en arabe, à Rome, en 1592, et en latin, à Paris, en 1619, a été savamment commenté par J.-M. Hartmann, dont l'ouvrage imprimé à Goëttingue, a eu deux éditions, l'une en 1791, l'autre en 1796. Depuis, des manuscrits complets d'Edrisis ayant été découverts et acquis par la bibliothèque royale, M. Jaubert, membre de l'Institut, en a entrepris la traduction française. Le premier volume in-4°, imprimé à l'imprimerie royale, a paru en 1836. M. Moeller consacre la quatrième partie de son index bibliographique aux auteurs modernes qui ont écrit sur l'histoire du moyen-âge.

Il nous reste maintenant à rendre compte des deux premiers chapitres du Manuel, que nous avons désignés plus haut sous le nom de prolégomènes. On ne peut bien apprécier un fait sans connaître les circonstances qui l'ont préparé, et la nature des actions diverses qui ont concouru à son accomplissement. Le grand événement du moyen-âge, le fait fondamental, si l'on peut ainsi parler, c'est la chute de l'empire d'Occident; cette catastrophe ouvre une nouvelle ère pendant laquelle une société nouvelle s'organise et se développe sous l'influence des doctrines catholiques. Quelles sont donc les causes qui ont amené le bouleversement de l'empire des Césars? telle est la première question à examiner, et la solution doit en être cherchée dans la constitution même de cet empire, et dans la nature de ses relations avec les tribus germaniques dont la puissance, après l'avoir long-tems tenu en échec, devait finir par l'écraser.

Les frais de cette traduction sont faits par la Société de Géographie. La même Société prépare en ce moment une édition complète du géographe arabe Aboulféda. Une partie du texte a déjà paru par les soins de M. Reinaud et de M. de Slane. M. Reinaud est chargé de la traduction française de l'ouvrage dont la plus grande partie est déjà imprimée.

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