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considérés jusqu'alors comme seuls indispensables, devaient s'en trouver d'autres dont la nécessité, pour être moins apparente, était tout aussi absolue. Il se contenta d'émettre l'hypothèse sans en chercher la confirmation expérimentale, les recherches sur le métabolisme nutritif étant alors enrayées par les difficultés insurmontables de l'étude des substances albuminoïdes.

A ce même laboratoire, un autre élève de Bunge, Socin, dix ans plus tard, en 1891, au cours d'un travail sur l'assimilation du fer, arrivait à des conclusions identiques, et constatait qu'un mélange d'aliments purifiés, presque semblable à celui de Lunin, n'était pas suffisant pour entretenir la vie des souris, mais le devenait par addition de jaune d'œuf.

Enfin en 1905, Falta et Noeggerath, devant les résultats de certaines expériences d'Abderhalden,de Henriques et Hansen, en contradiction apparente avec celles de Lunin et de Socin, ont cherché, eux aussi, à nourrir avec des aliments purifiés, non plus des souris mais des chiens et des rats, aboutissant, d'ailleurs, aux mêmes conclusions, au même insuccès. On le voit, dès cette époque, la question des facteurs complémentaires de l'alimentation est nettement posée en physiologie; si la biochimie d'alors a été impuissante à la résoudre, c'est parce que, n'étant que la chimie des êtres organisés, ses progrès ont toujours été forcément conditionnés par ceux de la chimie générale. Or, cette époque du début du siècle est également celle où commencent à apparaître les grands travaux de l'école de Fischer et d'Abderhalden, qui vont révolutionner la chimie des matières albuminoïdes, en substituant dans toutes les interprétations des phénomènes digestifs la notion de l'acide aminé à celle de l'albumine elle-même. En montrant la valeur très inégale qu'ont les différentes albumines au point de vue nutritif, ces travaux modifient radicalement l'orientation des recherches sur la nutrition. A la conception quantitative, jusque là, des

aliments va succéder la notion trop méconnue de leur qualité. La nécessité de l'albumine devient celle des acides aminés qu'elle renferme, nécessité du tryptophane et de la tyrosine pour l'équilibre, de la cystine et de la lysine pour la croissance.

Mais il faut, pour mener à bien beaucoup de ces travaux, soumettre les animaux en expérience à des régimes de composition minutieusement déterminée. La physiologie, mieux armée, est ainsi amenée à reprendre l'hypothèse de Lunin et de Socin, et à la faire entrer dans la troisième phase de son évolution scientifique, celle de l'expérimentation. Hopkins en 1906 pose nettement la question : « Il y a vraisemblablement, dit-il, dans les aliments naturels, à côté des corps essentiels, d'autres substances encore qui concourent à la nutrition de l'organisme; peut-être sont-ce ces mêmes éléments qui interviennent dans la pathogénie de certaines dyscrasies comme le rachitisme et le scorbut ». Les physiologistes en conviennent; tout le problème qualitatif de l'alimentation exige une revision sévère. De différents côtés, dès cette année 1906, on s'y attelle avec acharnement; on y travaille principalement chez Hopkins en Angleterre, en Amérique chez Osborne et Mendel, et en 1907 à la «Wisconsin Experiment Station » d'abord avec Hart et Humphrey, ensuite avec Mc Collum, Davis et d'autres. Ces travaux, dont les résultats ne paraîtront que cinq ou six années plus tard, en 1911 et 1912, vont mettre en évidence, de façon définitive, l'existence des facteurs complémentaires de la croissance et de la nutrition.

Mais avant d'y arriver, nous devons signaler, à cause de leur influence sur la suite de ces recherches, les observations et les expériences intéressantes faites, quelques années plus tôt, par des médecins des Indes hollandaises; issues d'un autre point de départ et suivant une orientation toute différente, elles devaient amener la pathologie à des conclusions presque identiques à celles de la physiologie.

Depuis longtemps, on poursuivait là-bas l'étude du béribéri, bien connu dans tout l'Extrême-Orient où se fait une consommation abondante de riz; la pathogénie de cette maladie était fort discutée. Eijkmann, en 1897, lui reconnut définitivement pour cause la décortication du riz par l'opération du glaçage qui lui enlève sa cuticule et son germe. Bien mieux, il réussit à reproduire chez des poules et des pigeons nourris avec du riz décortiqué, une sorte de béribéri expérimental, caractérisé par de la polynévrite des membres, souvent accompagnée d'incoordination des mouvements, et toujours suivie de mort rapide. La cuticule de riz avait sur cette polynévrite, traitée à temps, une action curative, surprenante et infaillible. Plusieurs théories furent mises en avant pour expliquer ces phénomènes. Eijkmann, au début, resta partisan de l'intoxication endospermique, guérie par un contre-poison cuticulaire.

Une étude détaillée de la polynévrite aviaire fut publiée en 1901 par Grijns, qui défendit l'hypothèse d'une déficience alimentaire. La cuticule du grain de riz devait, selon lui, contenir une substance nécessaire à l'alimentation, autre que celles considérées jusqu'alors comme essentielles. Il retrouva dans les haricots, dans les extraits de viande, de levure, dans d'autres produits naturels l'action curative antibéribérique du son de riz. L'hypothèse de la déficience était séduisante,mais il eût fallu, pour l'imposer, lui donner une confirmation expérimentale, basée sur des échanges nutritifs soigneusement contrôlés, car le riz est un aliment de qualité inférieure, pauvre en matières minérales et azotées. On pouvait encore corroborer l'hypothèse de la déficience, en cherchant chimiquement à isoler la substance active de la cuticule pour en déterminer ensuite la constitution moléculaire. Cette seconde voie parut la plus simple, et la liste est longue de ceux qui la suivirent.

Une curieuse coïncidence conduisait ainsi, presque

simultanément, la pathologie expérimentale et la physiologie à une hypothèse identique. Leurs chemins différents devaient forcément converger et se rejoindre.

En 1911, Casimir Funck parvint à retirer de la cuticule du riz une substance cristalline, soluble dans l'eau et dans l'alcool, fondant à 233o, capable de diminuer fortement la polynévrite aviaire, sans toutefois la guérir. Cette substance ne pouvait être, selon lui, que le principe actif, objet de ses recherches et de celles de tant d'autres ; il la nomma « vitamine », pour rappeler tout à la fois son importance dans les phénomènes vitaux et ses caractères constitutionnels au point de vue chimique. Il lui assigna une formule brute CH NO et crut pouvoir la rattacher au groupe des bases pyrimidiques. Les cristaux de Funck, il faut bien en convenir, ont perdu beaucoup aujourd'hui de leur importance du début ; on est bien près de les considérer comme totalement étrangers à l'élément déficient du régime béribérique et redevables de leur activité uniquement aux impuretés qu'entraîne leur formation. La découverte néanmoins eut un grand retentissement et le mot fit fortune. Aussi, prématurément peut-être, la pathogénie du béribéri passa du domaine des hypothèses dans celui des réalités. Heureusement les travaux physiologiques n'allaient pas tarder à donner à la notion des vitamines une solidité dont les recherches de Funck ne procuraient que l'apparence.

Revenons maintenant au problème que la physiologie avait à résoudre ; ce problème d'une portée, nous l'avons dit, plus théorique que pratique, était enserré entre des limites étroites, mais il fallait pour mener à bien la solution s'entourer de précautions multiples et soumettre les expériences à un contrôle rigoureux. Il comportait la réponse à la question suivante un animal peut-il se développer et maintenir son équilibre nutritif avec une alimentation exclusivement composée par ce que l'on considère comme les seuls aliments essentiels, c'est-à-dire,

par un mélange, en proportions judicieusement choisies, d'albumines, de graisses, d'hydrates de carbone, de sels et d'eau ?

L'essai, à première vue, semble facile; en réalité, il présente de très sérieuses difficultés. La première consiste à obtenir les substances alimentaires à un degré suffisant de pureté pour exclure toute influence étrangère; or, cette purification n'est pas un vain mot, si l'on songe à l'intensité d'action des facteurs accessoires. L'histoire des vitamines est remplie des déboires causés par des purifications incomplètes. Une deuxième difficulté, beaucoup plus sérieuse, tient au choix des aliments essentiels et à la part qu'il faut faire à chacun d'eux dans la ration quotidienne. Toutes les albumines n'ont pas une égale valeur et les proportions où interviennent les sels inorganiques, ne sont pas indifférentes. Le mélange que reçoit l'animal doit non seulement couvrir ses dépenses d'énergie, mais faire face à toutes les exigences qualitatives de son organisme. Or, ces exigences, très imparfaitement connues, ne peuvent être déterminées qu'empiriquement, en soumettant l'animal à des épreuves préalables de longue durée, en employant ce qu'avec d'autres on peut appeler « la méthode biologique d'analyse alimentaire ». La négligence, malheureusement très fréquente, de ce point fondamental enlève à beaucoup d'expériences leur valeur vraiment scientifique. Il faut enfin dans les résultats observés savoir faire le départ de ce qui revient à la déficience et de ce qui est dû aux troubles occasionnés par la monotonie du régime et surtout par la répugnance des animaux à s'y soumettre ; cette répugnance amène facilement par l'inappétence un état d'hyponutrition dont les symptômes, assez mal étudiés jusqu'à présent, peuvent se confondre avec ceux de la déficience elle-même. Il y a peu d'années encore, la théorie rattachant le béribéri à une hyponutrition était la plus accréditée. Le choix de l'animal est ici fort important. Le rat qui a servi aux expériences

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