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Tout autre est le sort du paléontologiste. Celui-ci ne connaît même pas toujours les conditions du milieu où vivaient les formes qu'il étudie; il doit assez souvent les déduire des données fournies par la nature des roches sédimentaires, la composition de la faune ou de la flore qui accompagne l'espèce considérée. Parfois il est impossible de discerner si telle espèce vivait réellement dans le milieu dont témoigne la couche où elle s'est fossilisée, ou si les fossiles que nous en possédons proviennent de cadavres charriés loin de leur habitat naturel. Dans ce cas, il faut trouver des analogies dans l'habitat connu des formes vivantes pour parvenir à reconstituer par la pensée celui de ces espèces éteintes.

Le cas inverse se trouve aussi, et fréquemment. Le mode de formation de beaucoup de roches sédimentaires ne peut être connu que par les renseignements fournis par les fossiles qu'elles contiennent. Il y a donc échange de bons procédés entre ces deux sciences et tout profit pour chacune d'elles.

Une des déficiences de la Paléontologie est l'absence presque constante, dans le matériel d'étude dont elle dispose, des formes embryonnaires ou larvaires, car elles manquent habituellement du squelette rigide qui assure la conservation des formes adultes; c'est pour cette raison qu'il est parfois si difficile de délimiter les espèces fossiles ou de rapprocher des espèces réellement apparentées.

Pour suppléer à ces déficiences, la Paléobiologie doit remplir un programme que nous empruntons à Dacqué et qui nous semble bien résumer les considérations que nous avons faites dans cet article :

1) Étudier les animaux actuels, les plus rapprochés des espèces fossiles considérées, soit au point de vue systématique, soit au point de vue fonctionnel.

2) Comparer à ces données celles que fournit l'étude directe des fossiles, leur anatomie, leur morphologie,

en admettant la constance des modes d'adaptation et de réaction biologique.

3) Interpréter ces données d'après les conclusions auxquelles aura mené la reconstitution de l'habitat vrai de l'organisme considéré, en tenant compte de leur situation au sein des couches sédimentaires, des caractères pétrographiques de ces sédiments, et de leur mode de formation et de tous les fossiles que l'on y trouve. Illustrons ces préceptes par quelques exemples.

Les Brachiopodes possèdent un orifice circulaire au sommet apical de leur coquille (valve ventrale); un appendice plus ou moins allongé sort par cet orifice et attache solidement l'animal à un substratum rocheux. C'est ce que nous apprend l'observation des rares espèces vivantes, restes misérables d'un groupe si ancien et jadis si développé. Sans les espèces actuelles, on aurait rattaché les Brachiopodes aux mollusques, on aurait cru qu'ils vivaient sur un fond vaseux, l'orifice apical eût été homologué au siphon, ou encore on leur eût prêté un mode d'attache, par « byssus » comme les Pectinides actuels.

Les Trilobites du Paléozoïque sont des Crustacés qui ne se laissent apparenter à aucune forme actuellement vivante. Tout au plus pourrait-on les comparer, morphologiquement, aux Cloportes. Comme les Trilobites, les Cloportes ont le corps formé de segments; ils peuvent, à l'aide de mouvements de charnières, s'enrouler au moment du danger. Certaines espèces vivent en société dans la zone littorale, riche en lumière, d'autres habitent les régions d'une plus grande profondeur. Certaines nagent en pleine liberté, beaucoup se cachent et rampent audessous des pierres. C'est, justement, dans cet état de formes qui se cachaient, que nous trouvons certains Trilobites fossiles. Puis, nous continuons à comparer en détail la structure du corps, des extrémités, des yeux des Trilobites et des Crustacés récents, dont nous connais

sons bien la vie. Ce n'est qu'à l'aide de ces comparaisons que nous pouvons trouver une base sûre pour discuter les questions biologiques concernant les Trilobites et que nous pouvons dire les Trilobites nageaient à l'aide de leurs pattes rappelant celles des Cloportes et d'autres Crustacés; ils pouvaient nager loin du fond ou à son voisinage immédiat, pouvaient aussi se coucher sur le fond, ou y ramper.

Nous connaissons des Cloportes aveugles, dont les yeux ne se développent plus, parce qu'ils vivent dans l'obscurité, ce qui arrive aussi dans le cas d'autres crustacés qui habitent la mer. Le même caractère des organes de vue de plusieurs Trilobites nous fait conclure à une vie dans les ténèbres. Nous pouvons nous poser une question ultérieure : cette vie sans lumière se passait-elle dans la profondeur des mers où ne pénètre aucun rayon, ou les animaux en question s'enfouissaient-ils dans un sol vaseux, s'y cachant complètement ?

Or, nous devons considérer la plupart des Trilobites comme ayant ce dernier mode de vie, se cachant et restant en repos ou en mouvement dans un sol vaseux. Ce point vient d'être établi encore d'une tout autre manière, savoir, par un développement parfois exagéré des yeux des Crustacés habitant les régions de l'eau privées de lumière et par la régression des yeux chez les espèces qui s'enfouissent, les grands yeux chez les fouisseurs seraient trop facilement détériorés et ne pourraient être d'aucune utilité.

On trouve d'ailleurs des Trilobites aux yeux très développés. Ceux-là nageaient en pleine liberté dans des eaux manquant de lumière ou rampaient à la surface du fond.

D'autres traits caractéristiques des Trilobites, comme l'élargissement ou l'allongement du bouclier céphalique, l'allongement ou le raccourcissement caudal, le prolongement des parties du corps ou de la queue en forme d'aiguilles et d'épines, trouvent leur explication à l'aide

d'une comparaison des formes fossiles et des récentes similaires.

Mais les recherches deviennent plus embarrassées, lorsqu'on ne possède pour restaurer la forme complète et se faire une idée de la biologie des organismes disparus que des parties plus ou moins bien conservées ou des traces plus ou moins nettes. C'est ainsi que le groupe des Infusoires flagellés n'est représenté à l'état fossile que par de petits disques microscopiques, par des corpuscules en forme de boucliers ou de bocaux minuscules; il ne reste rien des Amibes, des Grégarines, presque rien des Bacilles. Pendant longtemps on ne connaissait presque rien sur l'origine d'un des groupes importants d'Échinodermes, les Holothuries. On n'en avait que des fragments microscopiques en forme de roues, d'ancres, d'étoiles, jusqu'à ce que Walcott, au commencement de la deuxième décade du vingtième siècle, eût la bonne fortune de trouver au Cambrien du Canada de magnifiques empreintes d'Holothuries sur duschis te siliceux. On tressaillit alors d'admiration, en retrouvant les structures les plus fines de ces animaux au corps presque transparent, et cela après des milliers de siècles. C'est le maximum de ce qu'on eût pu attendre d'un document paléontologique. Dans ces mêmes dépôts Walcott parvint aussi à découvrir de belles traces-empreintes des corps d'Annélides pélagiques, hérissés d'aiguilles, ce groupe n'ayant fourni auparavant que de petites mâchoires crénelées.

Nous devons nous rappeler que la loi de la «corrélation des organes », formulée par G. Cuvier, peut nous donner des résultats très satisfaisants, par son application à des restes insuffisants des formes fossiles; il n'y aurait qu'à éviter d'en pousser à l'extrême les déductions. Voici une application à des Echinoïdes, où l'on peut voir l'impor-tance de traits morphologiques parfois minuscules pour la biologie des fossiles, une fois qu'on peut les comparer

à des formes vivantes bien connues. Un des Echinoïdes réguliers, récents, le genre Arbacia, possède à sa partie orale de petites ventouses se terminant par des disques. Ceux-ci font que l'animal peut être attaché au fond, au substratum, sans avoir à craindre le ressac, les coups des lames et des vagues, qui ne parviennent point à les détacher. Du côté anal supérieur, c'est tout le contraire : les ampoules y sont réduites, ce ne sont plus des moyens de s'attacher au substratum, mais les organes respectifs sont modifiés et doivent faciliter la respiration. De ce côté manquent aussi les appendices en forme d'aiguilles ou d'épines, qui seraient même nuisibles, empêchant les petits morceaux d'excréments d'être balayés bien vite par l'eau de la mer car, dans le cas contraire, ces petits morceaux pourraient empoisonner l'animal.

Le genre Colopleurus, de l'éocène de Bordeaux, nous présente un Échinoïde aux traits caractéristiques du genre récent, Arbacia, ayant de même perdu ses épines du côté anal; nous pouvons en conclure qu'il habitait, lui aussi, la région du ressac et qu'il était en état de s'attacher au substratum à peu près comme l'Arbacia.

La méthode de Cuvier, dont nous venons de donner des exemples, d'après l'opinion de Dacqué, est jusqu'à présent la plus sûre, mais n'est pas impeccable.

L'effet mécanique et physiologique d'un organe ne sera identique que dans les cas, où cet organe est répété chez des représentants de genres très hétérogènes, se développant de la même manière; son adaptation se fait alors ressentir toujours comme identique. Mais on ne doit pas attribuer à deux espèces les mêmes attitudes biologiques, parce que ces espèces ont de nombreux caractères morphologiques communs. Car beaucoup d'espèces, même parentes, peuvent mener une vie toute différente et se tiennent souvent dans des milieux bien peu semblables, sans qu'on puisse le reconnaître à leur aspect morphologique. Ainsi, p. ex., le Brachiopode

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