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Le crédit extérieur de la Roumanie

INTRODUCTION

Il y a quelques années, un revirement important s'est produit dans l'opinion publique européenne concernant la Roumanie économique. L'espoir qu'on avait fondé de voir promptement rétabli ce pays, s'est écroulé, laissant place à une méfiance grandissante.

Les faits qui avaient provoqué ce changement fâcheux, étaient de nature à nous impressionner aussi. C'était pour nous une grande désillusion d'apprendre que l'État roumain refusait de payer ses dettes et que les commerçants de ce pays répudiaient l'accomplissement de leurs obligations. Entendre dire que les fonctionnaires roumains reçoivent leur traitement avec un retard parfois désespérant, que les légations et les attachés militaires ont dû contracter des emprunts dans les banques à l'étranger pour subvenir à leurs besoins journaliers, et que ceux-là précisément qui étaient appelés à parler au nom de l'État roumain, en étaient réduits à voir leurs traites protestées parce que leurs appointements n'étaient pas envoyés à temps (1) tout cela était de nature à nous émouvoir profondément, d'autant plus que les éléments que nous possédions sur la Roumanie en général, nous permettaient d'entrevoir une autre situation, tout à fait différente.

En effet, occupant une situation géographique très

(1) Discours de M. V. Bratiana, à la Chambre des Députés, le 1er février 1923. (Bucarest.)

favorable à son développement économique, possédant des richesses naturelles très variées et très importantes, ayant à sa disposition cet instrument puissant de lutte économique qu'est actuellement le pétrole, la Roumanie sortie victorieuse de la grande guerre et agrandie deux fois, ne pouvait que nous inspirer une confiance en rapport avec sa situation générale.

D'ailleurs, toutes les publications officielles, il est vrai, nous présentaient cette situation comme plus que satisfaisante; elles criaient l'injustice du change déprécié et le mal-fondé de la méfiance en l'avenir de la Roumanie. La presse roumaine s'était soulevée avec véhémence contre l'appellation de « colonie africaine »> donnée à la Roumanie par quelques journaux étrangers. Nous-mêmes, nous étions opposés à l'idée d'une Roumanie en faillite; cette idée ne s'accommodait guère avec ce que nos connaissances et les renseignements officiels nous donnaient sur le Royaume Danubien.

Et c'est alors que nous avons décidé de faire sur place une étude minutieuse de la question. Notre récent séjour en Roumanie nous a permis d'établir un jugement précis et, nous semble-t-il, fondé sur la situation économique de la Roumanie actuelle, situation qui détermine le crédit extérieur du pays.

Avant la guerre, la Roumanie à l'étranger intéressait beaucoup le monde des affaires. On suivait avec sympathie son émancipation économique, qui avait été précédée de son émancipation politique.

Le développement de ses forces productrices, l'accroissement de son organisme étaient l'objet d'une admiration générale. D'ailleurs, les conditions dans lesquelles cette transformation s'opérait, étaient extrêmement favorables: la situation politique stable, la main-d'œuvre abondante et bon marché, les richesses naturelles variées et importantes lui permettaient de suivre tranquillement et sûrement la voie des grands progrès. L'unique obstacle, le

manque de capitaux, était conjuré : attirés par la présence de ressources naturelles considérables, les étrangers étaient venus apporter leurs connaissances, leurs capitaux et leur expérience. En peu de temps on avait vu se fonder des sociétés puissantes pour l'exploitation des terrains. pétrolifères. Les Anglais, les Français et les Américains. avaient afflué dans le pays, non pas pour l'asservir, mais pour lui donner la possibilité de prendre cet élan qui caractérisait l'activité économique roumaine des années d'avant-guerre.

Qui n'a entendu parler de la Roumanie grenier de l'Europe? Qui n'a connu la vogue des pétroles roumains. à l'étranger? Car l'agriculture était sa principale richesse et le pétrole une puissante ressource. Ces deux éléments producteurs lui ont permis d'exporter à l'étranger des quantités appréciables de céréales et de dérivés du pétrole. En 1913, leur total a été d'environ 3,3 millions de tonnes pour les produits du sol et de près de 1 million pour le pétrole, tandis que tout le commerce roumain d'exportation a dépassé, à cette époque-là, les chiffres de 4,5 millions de tonnes pour une valeur approximative de 700 millions de francs-or.

C'était beaucoup pour un pays nouvellement affranchi. Mais ce n'était pas la limite de ses possibilités économiques. Possédant les vignobles, les mines de sel et de charbon, et d'énormes richesses en bois, la Roumanie pouvait espérer trouver dans certains domaines du commerce international un mouvement et une activité des plus intenses. On s'attendait à l'amélioration des procédés employés dans l'agriculture, procédés tout à fait primitifs mais donnant cependant des résultats grâce à l'extraordinaire richesse du sol; on prévoyait la mise en valeur des domaines de l'État, restés jusque là inexploités.

Mais la guerre survint et changea tout. Nous connaissons déjà ses effets politiques : écroulement de quelques

empires et création d'une dizaine d'États nouveaux. Dans le proche Orient le contre-coup n'a pas été moins grave qu'en Europe centrale. La Roumanie, elle, loin d'en être affaiblie, en a retiré les effets les plus heureux : son territoire a passé de 130.000 klm. carrés à presque 300.000 klm. carrés, et sa population a monté de 8 millions à plus de 16 millions d'habitants. Quant aux richesses naturelles, elles ont vu leur nombre s'accroître et leur importance doubler. La superficie couverte de forêts a triplé; aux richesses minérales existantes sont venus s'ajouter l'or, l'argent, le fer et la bauxite, et aux combustibles s'est adjoint le gaz méthane.

Pourrait-on concevoir un pays mieux doté par la nature? La Tchéco-Slovaquie, la Yougoslavie, pour ne pas parler de la Pologne, de l'Autriche, oseraientelles prétendre à une aussi brillante situation?

Et pourtant, malgré la présence de toutes ces richesses, nous voyons la monnaie roumaine tomber. Nous nous apercevons que le crédit de la Roumanie diminue et que la méfiance a pris déjà racine à l'étranger. N'est-il pas surprenant de voir, à côté d'elle, la Bulgarie, vaincue dans la dernière guerre et ne possédant que des richesses naturelles moindres, jouir d'un change supérieur ?

Il y a donc d'autres facteurs économiques qui déterminent la valeur d'une monnaie ; d'autres éléments sans lesquels tout pays, même riche naturellement, est voué à une existence misérable et peu stable.

Ces éléments sont nombreux et d'inégale importance. Pourtant ils dépendent l'un de l'autre et présentent, en définitive, un ensemble de faits connexes et harmonieux. En effet, le moindre événement survenant dans la vie économique d'un peuple donne naissance aux autres et forme avec eux une chaîne continue.

Le crédit extérieur d'un pays, ce n'est que cette même chaîne d'événements vue de l'étranger. Le change à lui seul ne suffit pas pour caractériser le crédit, autrement

la Russie aurait joui d'une confiance générale. En effet, ne voit-elle pas sa nouvelle monnaie, le « tchervonetz », cotée par les boursiers de New-York au-dessus du pair ? Et pourtant, on est loin d'accorder à son crédit une signification favorable. Les événements russes, c'est-à-dire cette même chaîne dont nous venons de parler, produisent une trop mauvaise impression dans les milieux financiers et commerciaux pour qu'ils accordent leur confiance au Gouvernement de Moscou.

Pour en revenir au cas de la Roumanie, nous devons porter notre attention sur tout ce qui a un rapport quelconque avec son activité économique, c'est-à-dire sur sa monnaie, sa dette publique, son commerce, son agriculture, son industrie, ses moyens de transport, son budget et sa politique financière. Ces éléments nous permettront de fixer l'opinion qui guide la finance internationale quand elle veut accorder du crédit.

Nous commencerons par examiner la monnaie roumaine et son change. N'est-ce pas elle qui nous intrigue et qui nous impressionne quand nous recevons de l'agent de change pour un simple billet de cent francs belges un grand et gros billet, un peu pâlot, portant l'inscription :

UNA MIE LEI

La monnaie roumaine et le change.

C'était le système de l'étalon-or qui régnait en Roumanie avant la guerre. La monnaie nationale, le leu, avait la valeur d'un franc-or et était divisée en 100 bani qui correspondaient ainsi aux centimes français ou belges.

Une institution privée avait le monopole de l'émission des billets de banque, c'était la Banque Nationale de Roumanie. Comme partout ailleurs, cette émission était réglementée par la loi, et un stock métallique important constituait une couverture solide; les billets étaient échangeables à vue contre leur valeur-or.

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