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blèmes d'un caractère plus universel. S'il a donné à son livre le titre qu'il porte, c'est qu'il a eu pour but de faire voir comment, dans le passé, l'homme est arrivé à se spécifier en divers types et comment, dans le présent, cette variété ou continue à persister, ou s'altère, ou tend à une plus parfaite unité.

Avant d'analyser le livre de M. Keane, nous tenons à en signaler la réelle valeur. Ce nouvel ouvrage du savant ethnologiste est de tout point digne de celui qui l'a précédé. L'auteur a suivi la méthode qui lui a valu, pour son essai précédent, tous les suffrages. S'efforçant de fournir sur chaque question l'opinion la plus sûre et la mieux acceptée, il prend soin, quand le problème n'est point définitivement tranché, de signaler cette situation de la controverse et de ne présenter une solution qu'avec preuves à l'appui. On constate aisément que M. Keane a puisé ses données aux meilleures sources; il est au courant de la plupart des bons travaux qui ont paru sur l'ethnographie en ces dernières années, et il en interprète les résultats avec un sens critique aussi ferme qu'éclairé.

I

Dans les deux premiers chapitres de son livre, M. Keane donne d'abord ce qu'il appelle quelques considérations géné. rales; puis il étudie l'homme aux débuts de son apparition. Parmi les aperçus généraux nous relevons les suivants : l'homme date de l'époque pliocène; le monde a été peuplé par des migrations qui sont parties d'un centre unique à l'époque pleistocene; les premiers groupes se sont développés chacun dans un habitat spécial; toutefois les œuvres de l'homme pleistocène accusent un caractère d'absolue uniformité. Aux âges de la pierre, l'industrie humaine se perfectionne de plus en plus; mais la diversité des types qui commence à différencier les hommes est due à l'influence du milieu; il y a coïncidence frappante entre les zones géographiques et les centres de formation de races et de civilisation.

Ces premières pages de M. Keane ne sont pas les meilleures de l'ouvrage, et l'on y rencontre assez bien d'assertions contestables. Ainsi, à notre grande surprise, nous y avons vu M. Keane adhérer sans réserve aux conclusions plus que fantaisistes du Dr Dubois, relativement à l'Anthropopithecus erectus. L'homme de Java prouverait, à n'en pas douter, l'existence d'un primate

et tendrait à placer le berceau de l'humanité dans les régions intertropicales de l'Indo-Malaisie. Nous avons dit, en une autre circonstance, en analysant un savant mémoire de M. Houzé (1), avec quelle prudence il convenait d'accueillir les travaux du Dr Dubois, et dès lors M. Keane nous paraît avoir été mal inspiré en suivant de confiance un guide si aventureux.

Au contraire, l'auteur retrouve toute la fermeté de sa critique dans le second chapitre, qui s'occupe des âges du métal. La chronologie respective de ces différentes époques, leurs caractères saillants et les traits propres des industries successives sont nettement établis. Très judicieuses aussi les hypothèses émises sur les aires d'extension et les voies de propagation des instruments métalliques. A signaler encore dans ce chapitre une dissertation très substantielle sur l'origine et l'évolution de l'écriture.

Après ces préliminaires, qui occupent, comme nous l'avons dit, les deux premiers chapitres, l'auteur entame le sujet qu'il s'est proposé de traiter. Il étudie d'abord, dans les troisième et quatrième chapitres, les races africaines.

On distingue sur le continent noir deux sortes de populations, l'une très différente de l'autre. Il y a, dans un groupe, les Nègres du Soudan, et dans l'autre les Bantous, les Negritos, les Bushmen et les Hottentots. M. Keane établit fort clairement la réalité de ces deux subdivisions ethniques, les compare l'une à l'autre dans leur degré de culture morale, physique, intellectuelle. Les Soudanais l'emportent sur leurs voisins, les Bantous, excepté peut-être au point de vue linguistique, où ceux-ci accusent une supériorité intellectuelle incontestable (2).

Les Nègres soudanais se composent, à l'ouest, des Wolofs, des Mandingues, des Felups, des indigènes de Sierra-Leone et de Liberia, des peuplades de la Haute-Guinée et des Mossis. Là se trouvait le fameux empire de Mali que la légende dit avoir été fondé 300 ans avant l'hégire et qui subsista jusqu'au xvIe siècle. M. Keane attire l'attention sur la langue primitive des Wolofs, très importante au point de vue de la philologie comparée des idiomes africains; il signale aussi, pour l'histoire de l'industrie, la poterie wolofe et les bronzes du Benin. Cette région de l'Afrique est la terre classique du fétichisme. M. Keane a donc

(1) REVUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES, 2e série, t. X, 1896, pp. 311-316. (2) Voir Les Bantous, REV. DES QUEST. SCIENTIF., 2e série t. I, 1892, pp. 493-529.

toute raison de traiter cette question; il le fait avec grande sagacité, et, en quelques lignes, il expose très nettement l'état de ce problème d'histoire religieuse. Il montre avec raison que le fétichisme n'est pas une idée religieuse primordiale, mais qu'il suppose un culte antérieur. Toutefois on ne saurait suivre l'auteur dans ce qu'il dit du rôle du christianisme dans la formation du fétichisme, ou du moins sa pensée, peut-être juste, aurait dû être précisée davantage.

Parmi les Nègres soudanais du centre, on distingue les Sonrhays, les Hausas, les tribus du lac Chad et les Kanem-Bornu. Les Sonrhays et les Hausas sont les survivants d'empires puissants qui ont fleuri du viie au XVIe siècle. De leur ancienne grandeur, ces derniers ont gardé un sentiment très accentué de bravoure qu'ils ont eu l'occasion de déployer au service de l'Angleterre.

A l'est, les Nègres soudanais sont représentés par les Mabas du Waday, les Nubiens et les peuplades du bassin du Nil. Les Nubiens posent à l'ethnographie africaine un problème dont la solution n'est point aisée. M. Keane, qui a étudié la question de très près, pense qu'il y a lieu de distinguer entre les Nubiens du Darfour et ceux du Kordofan. Si ces derniers ont gardé toute la pureté de la race, les autres sont de sang mêlé. L'histoire des Nubiens remonte très haut; Strabon les connaît et, quoi qu'on en ait dit, ne les confond pas avec les Éthiopiens.

Une ligne de démarcation très nette sépare les Nègres soudanais des Bantous. M. Keane établit clairement cette division et trace exactement les frontières de ces deux domaines ethniques, tout en signalant d'une part les enclaves et les empiètements des deux races l'une sur l'autre, et de l'autre les incertitudes qui, à certains endroits, empêchent une délimitation précise.

Au type bantou appartiennent les Bonjos, les Bayas, les Wahumas, les tribus qui campent entre le lac Victoria et la côte, les Zanzibarites, les Zoulous, les peuples du sud de l'Afrique, les Khamas, les Damaras, les Congolais, les Fans. On sait que les peuples bantous possèdent une unité linguistique remar quable. M. Keane n'hésite pas à expliquer ce fait par la diffusion à travers l'Afrique d'un peuple primitif parlant le bantou. Quelques-uns des membres de la famille bantoue se sont élevés à un certain degré de civilisation, témoin le puissant empire des Zengs (Zanguebar, Zanzibar). M. Keane constate que les Bantous du sud se sont montrés fort accessibles au prosélytisme exercé chez eux en faveur de la religion chrétienne, et à ce propos il

signale les efforts tentés par des missionnaires protestants de France et de Suisse. La mission catholique du Zambèse, puisque M. Keane a voulu toucher à la question de la propagation du christianisme, méritait bien aussi une mention, d'autant plus que M. Keane eût rencontré ainsi l'occasion d'associer des compatriotes aux éloges qu'il prodigue à des étrangers.

Est-il possible de définir quelque chose au sujet du point initial des migrations des Bantous en Afrique ? M. Keane pense que ce point doit être cherché au nord-est: hypothèse qui s'accorde bien, dit-il, avec la façon dont se sont popularisés chez les Bantous, les deux noms Munkulunkulu et Nzambi dounés à la divinité.

Outre les deux types ethniques africains principaux, les Soudanais et les Bantous, il y a les Negritos ou pygmées. M. Keane rappelle d'abord les données fabuleuses des anciens sur ce sujet ; puis il étudie successivement les Dokos du pays des Gallas, les Wandorobbo du Masailand, les Wochua au sud du Welle, les Batouas du Kassai, les Bushmen et les Hottentots. Si l'auteur résume fort exactement l'ensemble de nos connaissances sur ce sujet, il faut bien dire qu'il n'a point apporté d'éléments nouveaux. Le cinquième chapitre du livre de M. Keane s'occupe des Nègres de l'Océanie, où il distingue les Papouas, les Australiens, les Tasmaniens et les Negritos. Au début de ce chapitre, M. Keane place une série de remarques aussi justes que curieuses sur les analogies très frappantes qui peuvent être établies entre l'ethnologie de l'Afrique et celle de l'Océanie. Après avoir constaté que, pour être aujourd'hui séparées par l'Océan Indien, les populations de l'Afrique sont de la même race que les tribus de l'Océanie, M. Keane compare aux sous-sections des Soudanais et des Bantous de l'Afrique, celles des Papouas et des Australiens en Océanie. Si les variétés physiques des peuples africains doivent être attribuées à l'infiltration des races sémitique et chamitique, en Océanie, ces variations ont leur cause dans l'influence des éléments mogols et caucasiens. Les Negritos d'Afrique trouvent leurs congénères chez les Andamans, les Sakais et les Aetas de l'Océanie.

Sous le rapport linguistique, on peut établir des concordances à peu près identiques. De part et d'autre, la confusion des langues est confinée sur une aire déterminée, le Soudan et la Nouvelle-Guinée, et de même, l'unité linguistique domine sur certain domaine, celui des Bantous en Afrique, celui de l'Australie et de la Mélanésie en Océanie. Toutefois, alors que l'unité est

absolue sur le domaine des Bantous et en Mélanésie, elle est, en Australie, limitée à une identité de forme extérieure.

Les Papouas occupent toute la région des îles situées entre Flores et la Nouvelle-Calédonie. Contrairement à certaine théorie récente, M. Keane estime, avec M. Hamy, que les Papouas sont établis sur leur territoire de temps immémorial. On ne possède jusqu'à ce jour qu'un nombre de travaux fort restreint qui se sont occupés de diverses tribus des Papouas.Aussi l'auteur doit-il se contenter de vues un peu générales sur la civilisation, les idées religieuses, les mœurs et les coutumes, le degré de culture intellectuelle. A signaler un bon aperçu sur les différences qui séparent les Papouas des Malais.

M. Keane n'est guère plus explicite sur les Australiens et les Tasmaniens que sur les Papouas, et ici encore nous restons dans les généralités, bien que plusieurs observations soient intéressantes, comme celles sur l'unité des langues australiennes, sur le système de numération basé sur le chiffre deux, sur la langue par gestes dont M. le Dr Roth a évalué à 213 le nombre de signes parfaitement déterminés.

Les Negritos océaniens se trouvent aux fles Andaman, dans la péninsule Malaise, aux Philippines et en certaines régions de la Nouvelle-Guinée. Ici encore, M. Keane résume fort exactement les données des auteurs sur ces populations et fournit un aperçu très complet de l'ethnographie de ces régions.

II

C'est par les Mogols que M. Keane poursuit son travail, et il s'étend longuement sur cette partie de son œuvre, puisqu'il y consacre les chapitres VI, VII, VIII et IX. Il y étudie respectivement les Mogols méridionaux, ou du sud de l'Asie, ceux de l'Océanie et ceux du nord, où il distingue deux branches, l'une orientale, l'autre occidentale.

Originaires du Tibet, les Mogols ont continué à habiter leur pays d'origine, sous le nom de Bodpas, d'Horsoks, de Tanguts. Au sujet des Tibétains, M. Keane fournit des aperçus très sûrs relativement à leurs caractères anthropologiques, leur région, leur langue. La presqu'île de l'Indo-Chine est également peuplée par des Mogols. En Birmanie habitent les Nagas, les KukiLushai, les Chins, les Kakhyens, les Manipuris, les Karens, les Talaings, les Arakaniens et les Birmans proprement dits. Si le

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