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Cet appareil a suffi à Taylor. On peut cependant le perfectionner encore. Il n'est pas très commode en effet, lorsqu'il s'agit de chronométrer une série de gestes qui se suivent sans interruption; c'est que, pour arrêter l'aiguille, la ramener au zéro et la remettre en mouvement, il ne faut pas moins de 2 centièmes de minute. On a donc construit un appareil à 3 chronomètres ; ces 3 chronomètres sont identiques et placés les uns à la suite des autres sur une planchette; un même levier appuie simultanément sur leurs 3 boutons; mais ils sont décalés d'une phase, c'est-à-dire que le premier est au zéro pendant que le deuxième est arrêté et que le troisième est en marche ; si donc on appuie sur le levier, le premier part, le second revient au zéro et le troisième est arrêté ; un nouveau coup de levier arrête le premier, fait partir le deuxième, remet le troisième au zéro, et ainsi de suite. On peut donc, par ce moyen, chronométrer une série de gestes qui se suivent sans intervalle. Généralement, on profite de cette planchette, un peu plus grande qu'un in-quarto et dont les chronomètres n'occupent que la partie supérieure, pour y fixer une feuille de papier sur laquelle on inscrit les résultats des chronométrages. tels qu'ils sont lus sur les aiguilles arrêtées. La planchette elle-même peut, par une courroie, être suspendue au cou du chronométreur qui a la main gauche sur le levier et tient son crayon de la main droite; il se déplace dans tous les endroits de l'atelier ou du bureau où il a quelque temps à mesurer.

Avec cet appareil, on peut sans peine lire et écrire des temps supérieurs à 2 ou 3 centièmes de minute; pour des temps plus petits, la mesure devient plus difficile, malgré une méthode que Taylor a indiquée dans sa « Direction des ateliers » (nos 374 et suivants, pages 113 et suivantes de la traduction française); nous n'entrerons pas dans ces détails, qui relèvent de la technique du chronométrage.

Contentons-nous de signaler un appareil plus sensible :

c'est le cylindre enregistreur de Desprez. Supposons par exemple qu'il s'agisse de chronométrer le travail d'une dactylographe, de manière à connaître à la fois l'intervalle entre 2 touches et le temps d'appui sur une touche; on installe au-dessous de chaque touche une aiguille de métal qui, lorsqu'on presse sur cette touche, vient tremper dans un godet de mercure et fermer un courant électrique; le stylet du cylindre est en relations avec le circuit et, quand le cylindre tourne, on voit s'y inscrire une ligne brisée faite de traits parallèles raccordés par de petits traits perpendiculaires; les traits parallèles supérieurs représentent les temps pendant lesquels les touches sont soulevées, les traits parallèles inférieurs les temps pendant lesquels elles sont abaissées. Ce procédé peut s'appliquer à bien d'autres appareils que les machines à écrire ; son approximation est de l'ordre d'une fraction de seconde.

Enfin on peut, dans certains cas, employer le cinéma. On fixerait aux doigts d'une opératrice dont on voudrait étudier les gestes un point brillant, une boule de métal par exemple. Le cinématographe, avec un ralentisseur, donne une approximation presque indéfinie. Par contre, il est d'un emploi coûteux.

Après l'appareil, l'opérateur. S'il y a un chronomètre, il y a aussi un chronométreur. C'est un métier qui, sans exiger un long apprentissage, ne s'improvise pourtant pas. Outre l'exercice, il exige des qualités techniques et des qualités morales. C'est ainsi que le chronométreur doit bien connaître le travail de l'ouvrier qu'il doit chronométrer; il peut être, par exemple, un ancien contremaître de sa spécialité. Il doit, de plus, posséder ce que j'appellerai la technique spéciale du chronométrage : par exemple, il doit avoir une attention dispersée sur deux points, la main de l'ouvrier d'une part, sa planchette de l'autre, et il doit pouvoir suivre ce qui se passe en ces deux points sans se laisser distraire par d'autres objets extérieurs ou par sa propre pensée. Enfin, il doit avoir assez de franchise et

de tact pour mettre au courant de son travail des ouvriers généralement prévenus contre lui et pour le faire avec une discrétion et une bonhomie qui ne les détournent pas de leur besogne d'ouvriers. Ces qualités psychologiques une fois réunies chez un homme, il lui suffit de quelques semaines d'exercice pour devenir un chronométreur excellent.

Ces préliminaires posés, il nous reste à décrire la méthode de chronométrage proprement dite. Cette méthode comprend 3 parties que nous appellerons chronométrage d'évaluation, standardisation, et chronométrage rigoureux.

III. Chronométrage d'évaluation.

Lorsque l'on veut perfectionner un geste d'un ouvrier ou d'un employé, la première opération consiste en une analyse de ce geste. Cette analyse est, en théorie, un simple travail d'observation, psychologique ou physique. En fait, on y sera aidé par le chronométrage, lequel d'ailleurs n'aura pas besoin d'être poussé à un haut degré de précision.

Un exemple fera comprendre notre pensée : supposons qu'il faille analyser la très simple besogne qui consiste à compter des cartes identiques et à les ranger par groupes de 20; pour faire cette opération le plus rapidement possible, il nous faut d'abord reconnaître les différents gestes élémentaires qui devront se succéder; nous trouverons ainsi, dans une première analyse, les gestes suivants :

1o Prendre de la main gauche, dans une grande pile posée à gauche, un nombre de cartes largement supérieur à 20, et, sur le bord de la table, faire du paquet un rigoureux parallelipipède rectangle.

2o En se servant à la fois de la main gauche et de la main droite, «< travailler » ce paquet 3 ou 4 fois de manière que le parallelipipède s'incline, chaque carte dépassant la précédente d'un demi-millimètre ou d'un millimètre.

3o Compter 20 cartes d'une des deux manières que nous décrirons au paragraphe suivant.

4o Saisir les 20 cartes ainsi comptées avec la main droite et les poser sur la table, à droite.

Voilà quatre gestes dont il faudra encore fixer nettement le début et la fin. On le fera à l'aide de repères aussi bien définis que possible. Ces repères seront, par exemple : 1o le début de la première opération poser la main gauche sur le gros paquet; 2o le début de la deuxième opération de la main droite toucher le paquet; 3o le début de la troisième opération un des doigts touche une carte pour commencer à compter; 4° le début de la quatrième opération la main droite entière saisit le paquet de 20 cartes comptées.

Dans le précédent exemple, nous avons choisi des repères de débuts et des repères visuels. Mais on pourrait aussi bien mettre le repère à la fin du geste et le rendre auditif. Il y aurait même un double avantage à cette modification, toutes les fois qu'on pourrait la faire. En premier lieu, les fins d'opérations sont généralement mieux définies que les débuts; en effet, une opération commence avec une certaine incertitude, parce qu'elle est précédée d'une délibération, si courte soit-elle, qui n'apparaît pas tout de suite sous forme de geste, et parceque ce geste lui-même commence avec une certaine lenteur, alors que la fin du mouvement se manifeste très souvent par un choc brusque et n'est accompagnée d'aucun concomitant psychologique. Ainsi, pour nous borner à l'exemple précédent, on peut remplacer le repère du début de la première opération par le repère de la fin de la quatrième, le moment où un paquet de 20 cartes est posé sur la table. D'autre part, il est avantageux pour le chronométreur d'employer des repères sonores; si l'on chronométrait par exemple le travail d'une dactylographe, la première frappe d'une ligne ou le déplacement du chariot sont des repères tout indiqués ; dans ce cas,

le chronométreur peut conserver les yeux fixés sur son chronomètre et sur son papier, sans avoir à faire effort pour maintenir les doigts de la dactylographe dans le champ visuel.

Le chronomètre aide ainsi à analyser des mouvements, mais il est clair que les mouvements de l'âme échappent à cette méthode. Comment, par exemple, analyser avec elle les différentes opérations d'un vérificateur qui doit contrôler, à la simple lecture, l'existence d'une douzaine de signatures sur une feuille de présence? Il faut employer alors des procédés purement psychologiques.

Il est évident encore que, dans ces opérations, ce qui importe le plus, c'est la fixation des repères beaucoup plus qu'une mesure exacte des temps compris entre eux. Si nous avons lié cette analyse au chronométrage proprement dit, c'est pour deux raisons. D'abord le vrai chronométrage, dont nous parlerons tout à l'heure, exige qu'on ait fixé les repères d'avance; ensuite un chronométrage préalable, si grossier soit-il, nous montrera jusqu'où il faut pousser l'analyse. Si nous nous apercevions, par exemple, que 3 ou 4 repères consécutifs, qui nous avaient, à première vue, paru excellents, sont trop rapprochés pour contenir des temps accessibles à la mesure, nous serior s forcés de réunir deux ou trois temps élémentaires en un seul en faisant sauter les repères intermédiaires, et inversement, si un geste nous avait d'abord paru, ou nous paraissait, après plusieurs mesures, trop long et surtout trop variable, nous le décomposerions en gestes plus élémentaires, en intercalant des repères nouveaux que nous nous ingénierions à trouver.

Ces préliminaires achevés, nous ne chronométrerons pas davantage et nous nous livrerons à une seconde besogne, la plus importante de toutes. En effet, avant de mesurer la durée d'une opération, il faut en avoir fixé le mécanisme de manière qu'il soit le plus économique possible en temps, en gestes ou en pensée. Il faut, en un mot, l'avoir standardisé.

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