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invisibles et pénétrants, émis par le sel d'urane durant son insolation. L'hypothèse de Poincaré semblait donc juste.

Henri Becquerel, heureusement, répéta cette expérience. Ayant un jour préparé plaque et cristaux, le soleil qu'il croyait nécessaire à la réussite de l'expérience ne se montra point. Il resta caché un, deux, trois, quatre jours. Quand il parut enfin, Becquerel jugea bon de développer la plaque qui, durant les jours de brume, avait été laissée dans un tiroir, en contact avec les cristaux. La plaque était impressionnée (1). L'uranium émettait donc spontanément des radiations invisibles, comparables aux rayons X. Cette émission spontanée caractérise ce que l'on a appelé la radio-activité de la matière. Cette découverte mémorable date du 1er mars 1896 (2).

Provoquée par une simple interrogation, apparaissant

(1) Tout amateur de photographie possède dans son laboratoire ou ses collections, le moyen de répéter l'expérience. Il peut même la rendre tout à fait curieuse en utilisant un cliché positif viré dans un bain d'urane. Les ombres du cliché sont alors constituées par un dépôt radioactif de valeur proportionnelle à la densité des noirs. Si ce positif est mis en contact avec une plaque vierge, il impressionne les sels d'argent. Les ombres très radioactives donnent une impression vigoureuse. Les pénombres, peu radioactives parce que moins riches en sel, ont peu d'action sur le bromure d'argent. On obtient au développement une épreuve positive reproduisant par simple contact et sans intervention de la lumière le cliché original dans tous ses détails. Un léger flou adoucit inévitablement les contours. L'interposition d'une feuille de papier noir entre les deux clichés n'empêche pas la réaction mais augmente le flou. Le temps de pose varie de 1 à 2 mois !

(2) Thompson rapporte dans son ouvrage Radiations visibles et invisibles (traduction Dunoyer; Paris, Hermann, 1914, pp. 269-272), que le 16 février 1896, il essaya d'impressionner une plaque photographique bien enveloppée de papier noir avec certaines substances fluorescentes et phosphorescentes. Il constata que seul le nitrate d'urane émettait un rayonnement capable de traverser le papier ou l'aluminium qui recouvrait ses plaques. Il transmit ses résultats à Stokes qui lui signala la toute récente communication de Becquerel. Les C. R. DE L'AC. DES Sc. relatent en février 1896, p. 420, la première note de Becquerel sur les radiations uraniques.

peu de temps après la découverte des rayons X, elle venait à son heure. Cependant le phénomène découvert par Henri Becquerel l'avait été cinquante ans auparavant par Niepce de Saint-Victor! Ce dernier était le parent de Nicéphore Niepce, dont le nom est lié à l'invention de la photographie. Mais la découverte de Niepce de Saint-Victor n'eut pas alors le moindre écho. Dédain et scepticisme tel fut son sort. Comme Jervis Smith, Niepce de Saint-Victor constata un phénomène imprévu, mais, ne sachant en tirer parti, il ne découvrit pas la radioactivité ! Le moment n'était pas encore venu. Becquerel entreprit une étude détaillée des radiations uraniques, démontra leurs propriétés fondamentales et reconnut leur pouvoir de décharger les électroscopes.

Réduit à sa plus simple expression, l'électroscope est une tige métallique sur laquelle on fixe une petite feuille d'or. Cette tige peut être introduite dans un bocal de verre et maintenue en place par un bloc de soufre qu'elle traverse et qui assure son isolement. Si on approche de son extrémité libre une baguette de verre chargée d'électricité, par friction préalable, on voit la feuille d'or s'écarter de son support. L'appareil est chargé d'électricité. Comme l'air sec est un isolant parfait, la tige conserve sa charge, la feuille d'or reste toujours écartée; mais si, par un moyen quelconque, telle la projection d'un faisceau de rayons X, on rend l'air conducteur au voisinage de la tige métallique, la feuille d'or tombe avec une vitesse proportionnelle à l'intensité du faisceau. Quand un gaz est frappé par des radiations invisibles, une molécule quelconque se trouve séparée en deux fragments ou ions chargés d'électricité. Un électron à charge négative se détache de la molécule et le reste forme un ion positif. Ces ions sont attirés (1) par toute surface chargée d'électricité de nom contraire, ils neutralisent sa charge en la

(1) Ce mouvement des ions constitue le courant électrique.

rencontrant. La feuille d'or tombe d'autant plus vite que cette neutralisation est plus rapide ; la vitesse de neutralisation dépend du nombre d'ions, et ceux-ci sont d'autant plus nombreux que les radiations sont plus abondantes. Cette particularité a une importance capitale, car elle permet de comparer l'activité des différents corps dans lesquels on va rechercher les radiations de Becquerel.

Voici le terme de la période préparatoire où le hasard, l'erreur d'interprétation favorisent le savant ; nous allons voir maintenant comment des recherches méthodiques vont peu à peu mener à la découverte du radium.

La découverte du radium. — Ici commence l'œuvre d'une femme : Marie Sklodowska. Née en 1867, fille d'un professeur de physique de Varsovie, elle fit la connaissance de Pierre Curie, dans les laboratoires de l'ancienne Sorbonne. Celui-ci devint son époux. Modeste, mais remarquable physicien, il s'était occupé de cristallographie avec son frère, le minéralogiste Jacques Curie. Il découvrit avec lui le phénomène de la piézo-électricité, c'est-à-dire la propriété qu'ont les cristaux de dégager de l'électricité sous l'influence de la compression. Ces travaux l'amenèrent à réaliser un appareil plus précis que l'électroscope, le quartz piézo-électrique, électromètre des plus sensibles, que Mme Curie fut heureuse d'avoir à sa disposition pour ses études sur la radio-activité. Elle rechercha quels étaient les minéraux susceptibles de rendre l'air conducteur et découvrit que cette propriété était le propre des minerais d'uranium (1) et de tho

(1) L'uranium est un métal, de poids atomique 238, isolé de la pechblende en 1842 par Péligot. Il émet ainsi que ses composés des rayons de Becquerel. Les composés uraneux sont verts et sans fluorescence. Les sels uraniques sont au contraire fluorescents. On les emploie en photographie pour le renforcement ou le virage des clichés. L'azotate d'urane est utilisé pour le dosage des phosphates. On fait usage des sels d'urane en métallurgie, en céramique, en verrerie et dans l'industrie des émaux. Les verres d'urane ont une belle fluorescence jaune vert.

rium (1). Elle fut surprise de constater qu'une pechblende de Joachimsthal, en Bohême, était sept fois plus active que les sels d ́urane. La pechblende est un mélange complexe d'oxyde d'urane et autres métaux: argent, plomb, cuivre, nickel, cobalt et autres terres rares. On trouve ce minerai non seulement en Bohême, mais aussi en Suède, en Norvège, en Cornouailles, en Amérique.

La chalcolite est un autre minerai uranifère, phosphate double d'urane et de cuivre. Mme Curie compara l'activité d'une chalcolite naturelle avec une chalcolite artificielle, préparée avec du nitrate d'urane et du phosphate de cuivre purs. Ce produit était deux fois et demie moins actif que l'uranium métallique. Le minerai, au contraire, malgré toutes les impuretés formant sa gangue, était une fois et demie plus actif que l'uranium !

La conclusion s'imposait (2): Si certains minerais, contenant de l'uranium et de nombreuses substances inertes,

Les minerais uranifères sont très répandus, il y en a en Europe, en Amérique, à Madagascar, au Tonkin. On peut, d'après Muguet, les classer par ordre d'importance industrielle comme suit : Autunite du Portugal (phosphate d'urane et de chaux découvert en 1800 dans l'Autunois).

Carnotite d'Amérique (urovanadate de potasse).
La pechblende de Saint-Joachimsthal.

Les minerais de Madagascar (composition chimique variée). Certains de ces minerais sont riches en uranium, telle la pechblende qui en contient 70 et même 80 %. La plupart sont pauvres; les autunites et les carnotites ne contiennent guère que 2%. Mais les gisements américains couvrent près de 200 000 hectares. Ils sont industriellement rémunérateurs grâce à l'extraction du vanadium. La production annuelle mondiale de l'uranium se chiffre par dizaine de tonnes.

(1) Le thorium est un métal à poids atomique 232. On le retire en même temps que le cérium de la monazite contenant habituellement 4% d'oxyde de thorium. On en traite chaque année plusieurs centaines de tonnes pour alimenter l'industrie de la toile de bec Auer. Celle-ci, radioactive grâce au thorium qu'elle contient, peut être déposée sur le double papier noir enveloppant une plaque photographique. Elle y reproduit son image. Deux jours de pose sont nécessaires.

(2) Elle fut annoncée à l'Académie des Sciences le 12 avril 1898.

sont plus actifs que l'uranium pur, c'est qu'ils contiennent une substance radio-active plus puissante que l'uranium lui-même. Ce corps, il fallait le découvrir et l'isoler. Mme Curie entreprit, en commun avec son mari, la recherche de cet élément nouveau.

Quand Christophe Colomb se lança par l'Océan, il avait la certitude de découvrir une terre nouvelle. M. et Mme Curie furent guidés par une conviction semblable et ils eurent, eux aussi, le grand mérite de ne pas se laisser décourager par le labeur immense qu'ils eurent à accomplir. Ils se mirent au travail dans un modeste laboratoire de l'École de Physique et de Chimie de la Ville de Paris. Il fallait séparer d'une gangue inerte une très minime quantité de substance. Les manipulations furent longues et compliquées, nécessitant la manutention de quantités importantes de minerais, d'eau et de produits chimiques. M. et Mme Curie furent guidés dans leurs recherches en dosant le pouvoir radio-actif des éléments filtrat et précipité, séparés au cours des manipulations. C'était véritablement une chimie de l'invisible, nécessitant une technique adéquate. Ils obtinrent ainsi un dépôt de bismuth et un dépôt de baryum fortement radio-actifs. Or, ni le bismuth, ni le baryum de commerce ne sont radio-actifs. La radio-activité du dépôt était donc due à des produits surajoutés. En souvenir de sa patrie d'origine, Mme Curie appela polonium le bismuth radio-actif et radium le baryum radio-actif. Un traitement ultérieur permit d'obtenir des produits de plus en plus pùrs. La première communication de M. et Mme Curie, faite à l'Académie des Sciences sur le polonium, date de juillet 1898. Celle concernant le radium est du mois de décembre de la même année. Un troisième nom signe la seconde note, celui de M. Bémont (1), le collaborateur de M. et Mme

(1) Bémont était chef des travaux de chimie à la même École que Pierre Curie. A la demande de ce dernier, il traita environ 5 kg

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