Sayfadaki görseller
PDF
ePub

par l'accumulation de millions d'individus, sur le fond boueux des flaques d'eau ou à la surface spumeuse des purins. Leur corps protoplasmique uninucléé est tout infiltré de pigment vert, la chlorophylle; il est de forme régulière et porte un long flagelle dont les battements continus assurent la locomotion du petit organisme. L'Euglène s'alimente en assimilant des produits organiques dissous, et elle est de plus capable de fixer l'acide carbonique, grâce au concours de la chlorophylle dont elle est chargée.

Les Paramécies abondent dans les eaux chargées de détritus organiques; ce sont de grands protistes, qui mesurent deux ou trois dixièmes de millimètre. Leur corps en amande est formé d'une masse de protoplasme et d'un appareil nucléaire complexe à deux masses chromatiques distinctes. Toute la surface du corps est marquée de nombreuses crêtes régulières longitudinales chargées de milliers de petits cils courts et l'organisme se meut avec agilité grâce aux mouvements qui se propagent en onde dans ce revêtement cilié. Les Paramécies présentent une vaste dépression de la surface du corps, s'enfonçant dans la profondeur du protoplasme en un entonnoir à paroi ciliée ; c'est un pseudo-pharynx qui sert à l'alimentation. Des particules alimentaires charriées au fond du pseudopharynx s'y accumulent puis sont ingérées dans le protoplasme par une espèce de déglutition, parcourent dans le corps un trajet compliqué mais constant au cours duquel elles sont digérées; leurs résidus sont enfin expulsés en un point constant de la surface du corps.

Les Plasmodium sont des protistes parasites. Ils se rencontrent dans les globules rouges du sang de l'homme, chez lequel ils provoquent la fièvre paludéenne. Extrêmement petits, les stades les plus ténus mesurent environ deux millièmes de millimètre, ils sont formés eux aussi d'une petite masse de protoplasme et d'un noyau, ou, à certains stades, de plusieurs et jusqu'à vingt noyaux

dans un protoplasme unique non cloisonné. Ces parasites qui végètent dans le sang humain évoluent sexuellement dans le corps d'un moustique: absorbés lors de la succion du sang, ils se modifient dans l'estomac du moustique où ont lieu des processus de fécondation, puis ils se multiplient énormément dans la cavité générale du corps suivant un mode compliqué et se logent dans les glandes salivaires de l'hôte d'où ils seront expulsés et réinjectés à un homme lors d'une nouvelle piqûre. Le Plasmodium présente l'exemple d'une évolution extrêmement fréquente chez les protistes, l'évolution par cycle; il serait trop long d'insister sur ses détails.

Faut-il citer comme dernier exemple les Bactéries que certains auteurs prétendent ranger parmi les protistes ? Leur dimension tend vers des limites inaccessibles, on en connaît d'un millième de millimètre, on en devine de plus petites et l'on en soupçonne d'invisibles. Elles sont formées d'un peu de protoplasme et, si pas d'un noyau, au moins de substance nucléaire éparpillée.

Des protistes furent observés dès l'invention des microscopes les plus rudimentaires, c'est-à-dire depuis deux ou trois siècles; cependant ils n'éveillèrent vraiment la curiosité des chercheurs que lorsque les perfectionnements croissants des appareils optiques permirent d'analyser un peu mieux leur structure. On en découvrit alors des milliers d'espèces et, en 1866, Haeckel a groupé cette multitude éparse et l'a baptisée en forgeant le nom de Protistes. Nom très mal construit d'ailleurs, à consonance baroque qui n'est d'aucun dialecte, à étymologie obscure et n'évoquant qu'une seule idée, celle de premier ou de primitif, et cette seule idée est elle-même fort discutable.

Mais l'influence d'un nom, quel qu'il soit, est considérable l'indifférence distraite qui plane sur des isolés devient attention et parfois hantise quand une étiquette commune et facile les groupe. Tel fut le cas pour les pro

tistes, le nom a fait fortune et la protistologie a recruté et passionné des milliers d'adeptes.

Les morphologistes, qui étudient la structure des organismes, ont regardé les infiniment petits, un peu rapidement parfois, car ces matériaux neufs que le microscope leur permettait d'analyser livraient à leur activité un champ trop vaste à défricher : ils y ont aperçu, à côté de processus aberrants et souvent déroutants, des phénomènes apparemment d'une simplicité parfaite. Tantôt ce sont des noyaux ne comportant qu'un simple granule chromatique et se divisant par un élémentaire étranglement; tantôt c'est un noyau qui s'éparpille en centaines de petits grains (chromidies) qui régénèrent chacun un noyau ; tantôt ce sont des réductions chromatiques qui consistent en la simple expulsion d'un petit granule de substance nucléaire.

Forts de l'affirmation des morphologistes qui voyaient parmi les protistes des organismes simples, les phylogénistes, qui recherchent la filiation des espèces, tout imprégnés des premières conceptions évolutionnistes, n'ont pas hésité à faire des protistes les êtres vivants primitifs, les ancêtres de tous les autres vivants; c'est d'eux que dériveraient d'une part les métaphytes, d'autre part les métazoaires. Comme les protistes sont des ancêtres déjà relativement différenciés puisqu'ils possèdent du protoplasme et un noyau, Haeckel crée le mot «< crée >> n'est pas injustifié les monères, qui seraient les plus primitifs des primitifs protistes, car ils ne présentent pas encore la différenciation en protoplasme et noyau.

Les biologistes, qui scrutent les phénomènes de la vie, ravis qu'on leur livre des organismes simples et primitifs, y ont trouvé matière aux plus exubérantes généralisations. A leurs yeux les protistes sont des «unicellulaires » ; ils représentent en quelque sorte l'un des rouages de cette merveilleuse machine que sont les « pluricellulaires »>, et doivent révéler les mécanismes élémentaires et primitifs

des activités vitales; c'est chez eux qu'il faut rechercher l'explication de ce qu'est le mouvement et la digestion et la reproduction chez les êtres vivants.

Les systématistes, qui cherchent une classification méthodique, interviennent à leur tour dans le groupe des protistes ils englobent en une fausse unité tous les êtres vivants qui n'apparaissent nettement ni métazoaires ni métaphytes; ils y rangent les Schyzophytes (bactéries et algues bleues) et les Saccharomycètes ou levures qui seraient parmi les plus « primitifs » ; ils y rangent les Diatomées; ils y rangent les Cnidosporidies et les Volvocides qui seraient parmi les plus évolués. Dans cet imposant ensemble les systématistes ont barboté à l'aise et ils ont, de tous ces matériaux, construit des classifications harmonieuses dont la logique est malheureusement suspecte, ne fût-ce que par la diversité des systèmes proposés. Ils ont aussi, puisque des protistes dérivent les métazoaires et les métaphytes, cherché à diviser le groupe en deux compartiments, celui des protozoaires animaux et celui des protophytes végétaux; le cloisonnement hélas ! paraît bien arbitraire, ne fût-ce qu'en raison de l'impossibilité où se trouvent botanistes d'une part et zoologistes de l'autre de délimiter leur domaine et de ne pas empiéter sur celui que revendique le voisin !

Pour toute une génération de naturalistes les protistes furent donc un groupe énorme et homogène d'êtres « unicellulaires » à opposer aux multicellulaires; parmi eux se retrouvaient des modalités cytologiques élémentaires et des processus biologiques simples; ils représentaient les êtres vivants primitifs, les plus anciens, et comblaient l'abîme qui sépare de la matière inerte les multicellulaires les moins différenciés. Durant les premières années de ce siècle, bien peu de naturalistes eussent osé contredire ces principes de la protistologie. Aujourd'hui, bien peu sans doute oseraient encore souscrire à l'un ou à l'autre, et cependant les esprits les plus autorisés nous ne parlons

pas des vulgarisateurs

sont encore marqués de l'empreinte de ces fausses généralisations abandonnées, parfois à regret, mais non pas oubliées. Doflein (1) dans la première phrase de son traité déclare que « le groupe des Protozoaires se range entre les organismes les plus inférieurs que nous connaissons, les Bactéries et leurs alliés, d'une part, et les animaux multicellulaires d'autre part ». Calkins (2) écrit que « dans ces simples masses de mucilage animé nous trouvons sous leur forme la plus simple les opérations diverses de l'organisme vivant » et Pavillard (3), qui cependant conçoit fort judicieusement certains aspects du problème, dit : « partant du principe que le problème des origines est un problème cellulaire, la protistologie prétend contribuer directement à la résolution de ce problème en demandant le secret de la vie et de l'évolution cellulaire aux organismes élémentaires, considérés à la clarté de la théorie évolutionniste, non seulement comme les plus simples, mais des primitifs ».

Malgré les traces qui en subsistent, les principes simplistes de la protistologie paraissent actuellement abandonnés. Que s'est-il donc passé ? Une chose bien simple et presque constante dans l'histoire des sciences: des observations incomplètes et imparfaites avaient donné lieu à des schématisations hâtives d'où dérivèrent des hypothèses considérées bien vite comme des dogmes; mais les chercheurs continuèrent leurs investigations lentes et laborieuses, ils perfectionnèrent leurs méthodes et serrèrent de plus près la réalité ; ils ont contredit de nombreux faits allégués, ils ont découvert la complexité de ceux que l'on avait vus trop simples, ils ont défait les généralisations imprudentes, et, le sapant par la base, ils

(1) Doflein, Lehrbuch der Protozoenkunde. Jena, 1916. (2) Calkins, Protozoologie. New-York, 1909.

(3) Pavillard, État actuel de la Protistologie végétale. PROGRESSUS REI BOTANICAE. T. III. 1910.

« ÖncekiDevam »