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conduite à l'égard du célebre Alphonse, duc de Ferrare. Gambara, protonotaire apostolique, qui plus tard fut cardinal, eut l'ordre de séduire Rodolphe Hello, Allemand, capitaine de la garde de l'aimable Alphonse. Rodolphe reçut en effet deux mille ducats, et promit d'assassiner Alphonse et de livrer aux troupes de l'Église la porte de Castel Téaldo, citadelle de Ferrare. Le jour était pris pour l'exécution, et déja Guichardin l'historien, qui commandait à Modène, avait fait avancer les troupes pontificales vers Ferrare; mais il se trouva que Rodolphe Hello avait tout dit à son maître, qui voulut éviter un éclat, et se contenta de faire déposer les lettres originales de Gambara dans les archives de la maison d'Este.

Là, Muratori, l'homme qui a le mieux connu l'histoire d'Italie et qui était prêtre, en a pris connaissance. Guichardin se garde bien d'avouer dans son histoire le projet d'assassinat; cette réticence a suffi pour le nier à un pauvre panégyriste anglais (M. Roscoë, Vie de Léon X); vous voyez que, lorsqu'on veut savoir quelque chose, il faut lire les originaux.

Ce fut en 1520, à l'époque de cette vilaine tentative sur Ferrare, que Raphaël mourut. Le pape donna des larmes sincères à la mort de ce grand homme. Léon dit publiquement que sa cour venait de perdre son plus bel ornement. Dans une cour militaire, ces signes d'affection de la part du souverain sont réservés au mérite du sabre, si supérieur à tous les autres tant qu'il est vivant.

Le 24 novembre 1521, Léon X venait d'apprendre la prise de Milan par les Espagnols; il était au comble de la joie; il espérait voir l'Italie délivrée du joug des barbares. Le canon du château Saint-Ange, qu'on tirait pour cette victoire, retentit pendant toute la journée. Le pape, qui se trouvait à son jardin de Maliana, témoigna l'intention d'assembler un consistoire, pour annoncer officiellement cette grande nouvelle aux

cardinaux et ordonner des actions de grâces dans toutes les églises. Il rentra dans sa chambre, et, quelques heures après, se plaignit d'une légère incommodité; il se fit transporter à Rome; le mal semblait peu de chose, lorsque tout à coup il redoubla de violence, et cet homme aimable mourut le 1er décembre. Il n'avait que quarante-sept ans; son règne avait duré huit ans, huit mois et dix-neuf jours.

Pendant sa maladie, Léon X reçut la nouvelle de la prise de Plaisance par les Espagnols, et, le jour même de sa mort, il put encore comprendre la nouvelle de la prise de Parme, qu'on lui annonçait. C'était l'événement qu'il avait le plus désiré. Il avait dit à son cousin le cardinal de Médicis qu'il achèterait volontiers la prise de Parme au prix de sa vie.

Le jour qui précéda sa maladie, son échanson Malaspina lui avait présenté une coupe de vin; le pape, après l'avoir bu, se retourna vers lui d'un air irrité, et lui demanda où il avait donc pris un vin si amer. Léon X étant mort dans la nuit du 1er décembre, Malaspina essaya de sortir de Rome le lendemain au point du jour. Il conduisait des chiens en laisse, comme pour aller à la chasse; les gardes de la porte de SaintPierre, étonnés qu'un domestique du pape voulût prendre le divertissement de la chasse le matin même de la mort de son maître, arrêtèrent l'échanson Malaspina. Mais le cardinal Jules de Médicis le fit relâcher, de peur, dit Jove, que, si l'on parlait d'empoisonnement, le nom de quelque grand prince ne vînt à être prononcé, et qu'on ne le rendît ainsi l'ennemi implacable de la famille de Médicis.

Les beaux-arts ont éprouvé trois malheurs qui paraîtraient bien plus décisifs si j'avais le temps d'en détailler les conséquences. C'est la mort de Raphaël à trente-quatre ans, celle de Laurent le Magnifique à quarante-quatre, et enfin la mort de Léon X à quarante-sept ans, tandis que la plupart des papes

arrivent à l'âge de soixante-dix ans. Sans parler de la division politique de l'Italie, qui eût été tout autre, à quel point de prospérité les beaux-arts ne fussent-ils pas parvenus si Léon X eût régné vingt ans de plus? Alphonse, duc de Ferrare, réduit à ses dernières ressources, était menacé d'un siége dans sa capitale et se préparait à vendre chèrement sa vie quand il reçut la nouvelle de la mort de Léon X. Y avait-il contribué? Dans sa joie, il fit frapper des monnaies d'argent, où l'on voit un berger arrachant un agneau des griffes d'un lion avec cette exergue, tirée du livre des Rois: De manu leonis.

Le lecteur voudra-t-il me permettre de parler en peu de mots du faible Clément VII, sous le règne duquel vécurent encore Michel-Ange, le Titien, le Corrége et presque tous les grands hommes après lesquels il eût mieux valu que la peinture eût été défendue par arrêt?

Les conclaves d'Alexandre VI, de Jules II et de Léon X avaient été fort courts; l'histoire de celui qui nomma le successeur de ce grand homme est plus compliquée. Il commença le 26 décembre. Tout le monde louait le cardinal Jules de Médicis, qui avait été le principal et le plus habile ministre de son cousin. (Dans le fameux portrait de Léon X par Raphaël, que nous avons eu à Paris et qui maintenant est retourné à Florence, Jules est ce cardinal dont les traits sont grands et qui est placé vis-à-vis du pape.)

Le ministre de Léon X trouva un rival dangereux dans le cardinal Pompée Colonna. Les ressources de la plus habile politique furent employées à l'envi par deux courtisans rompus aux affaires et se disputant le souverain pouvoir. Les cardinaux qui n'y pouvaient prétendre commençaient à se lasser de l'incommode prison qu'il leur fallait subir. L'un d'eux proposa un jour, par plaisanterie, le cardinal Adrien Florent, qu'on n'avait jamais vu en Italie. Ce cardinal, fils d'un fabricant de

biere, avait été précepteur de Charles-Quint. Il arriva que, sans préméditation, tous les cardinaux, ennuyés du conclave, donnèrent leur voix à cet inconnu, qui devint pape par hasard et prit le nom d'Adrien VI. Il ne savait pas l'italien, et, quand il vint à Rome, et qu'on lui montra les statues antiques, ras-semblées à si grands frais par Léon X, il s'écria avec une sorte d'horreur: « Sunt idola anticorum! · Ce sont là les idoles des païens. » Ce pape, honnête homme, parut un barbare aux Romains; de son côté, il fut révolté de la corruption de leurs mœurs; il mourut le 14 septembre 1523.

Aucune calamité ne pouvait égaler aux yeux des Romains celle de voir à la place de l'aimable Léon X un barbare qui ne savait pas leur langue et qui avait en horreur la poésie et les beaux-arts. La nouvelle de la mort d'Adrien fut le signal de la joie la plus vive, et le lendemain on trouva la porte de son médecin, Giovanni Antracino, ornée de guirlandes de fleurs avec cette inscription: « Le sénat et le peuple romain, au libérateur de la patrie. » Sous le pontificat d'Adrien, les Juifs et les Maures convertis furent chassés d'Espagne, et arrivèrent en foule à Rome avec d'immenses richesses. Adrien se préparait à les persécuter; la mort l'en empêcha. Léon XII a forcé les descendants de ces riches Juifs à se réfugier à Livourne.

Le 1er octobre 1523, trente-six cardinaux entrèrent au conclave; Jules de Médicis y retrouva son rival Pompée Colonna. Ce cardinal Wolsey, dont Shakspeare a si bien peint la disgrâce et la mort, prétendit à la couronne, comme autrefois George d'Amboise; mais les Romains ne voulaient d'un barbare à aucun prix. Pendant longtemps Jules de Médicis n'eut que vingt et un suffrages; il en fallait vingt-quatre, c'est-àdire les deux tiers de la totalité des cardinaux présents; Pompée Colonna empêchait son élection. Plusieurs cardinaux se mirent sur les rangs; on cherchait à acheter des suffrages,

mais sans s'exposer au reproche de simonie. L'expédient à la mode, dans ce conclave, fut celui des gageures; ainsi, les partisans de Jules de Médicis offraient à tout cardinal du parti contraire de parier douze mille ducats contre cent que Médicis ne serait point élu.

La lutte entre les deux factions se prolongeait avec tant d'aigreur et si peu d'apparence de conciliation, que les Romains craignirent que les deux partis ne saisissent un prétexte pour sortir du conclave et nommer deux papes à la fois. Des distiques latins, affichés partout, accusèrent le nouveau Jules et le nouveau Pompée de vouloir, par leurs discordes, ruiner Rome une seconde fois. Alors à Rome l'esprit se faisait en latin, et, comme on voit, les allusions historiques passaient pour de l'esprit.

Mais le moyen dont le Saint-Esprit se sert d'ordinaire pour faire finir les conclaves trop longs vint affliger celui-ci. Une effroyable puanteur se répandit dans les cellules des cardinaux, et rendit le séjour du conclave intolérable. Plusieurs tombèrent malades; les plus vieux sentaient leur fin approcher. L'un d'eux proposa le cardinal Orsini, et Médicis feignit de vouloir lui donner ses vingt et une voix, qui auraient décidé l'élection. Pompée Colonna eut peur de voir le souverain pontificat passer dans une maison depuis tant d'années ennemie héréditaire de la sienne. Il se rendit chez le cardinal de Médicis, et lui offrit de le faire pape, sous la condition que lui, Pompée, aurait la place de vice-chancelier de l'Église, ainsi que le magnifique palais qu'occupait Jules. Cette même nuit, Médicis fut adoré par la grande majorité des cardinaux, et le lendemain 18 novembre, anniversaire du jour où, deux ans auparavant, il était entré victorieux à Milan, il fut proclamé pape. Il prit le nom de Clément pour confirmer l'engagement qu'il avait pris de pardonner à tous ses ennemis.

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