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neuf mois; rien de plus faux suivant les écrivains protestants. Les escaliers intérieurs sont modernes, au-dessus de cette prison est la petite église de San-Giuseppe.

Ce soir, chez madame de T***, l'aimable don F. C. s'est moqué de deux ou trois mauvais poëtes ultra-libéraux. Ces messieurs copient en tout Alfieri, jusqu'à sa sotte colère contre les Français. Alfieri, tête étroite, ne pardonna jamais à cette révolution qui devait donner les deux chambres à l'Europe et à l'Amérique de lui avoir confisqué à la barrière de Pantin quinze cents volumes reliés en veau. Il me semble que tous ces mauvais poëtes libéraux d'Italie ont la tête encore plus étroite que les Country squires Anglais. Ces rimeurs ne comprennent absolument rien que ce qu'ils ont lu dans Alfieri et le Dante. Ils haïssent tout le monde, mais je crois encore plus les Français que les Autrichiens.

Nous avons fait venir de Milan les partitions des ballets de Vigano. Ce grand homme avait choisi et arrangé les airs convenables pour redoubler l'effet des passions que ses ballets représentent. Madame Lampugnani joue ces partitions d'une manière admirable, et elles me semblent réussir beaucoup auprès du petit nombre d'amateurs véritables admis à nos soirées. Pour y avoir accès, il faut admirer Cimarosa d'une façon ridicule. Ce soir monseigneur N. me disait d'un air de triomphe, une Gazette de France à la main : « Votre gouvernement représentatif parle sans cesse d'économies; vous en agissez comme les fils de famille mauvais sujets, vous emprunterez tout l'empruntable et ne cesserez de vous livrer à de folles dépenses que lorsqu'on ne voudra plus vous prêter.»- Rien de plus vrai.

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1er janvier 1829. Depuis notre retour de ples, nous avons vu plusieurs tableaux précieux que l'on a des raisons pour ne montrer à aucun voyageur. Nous devons cette faveur

une réputation de discrétion, et surtout aux charmantes gravures de M. Tony Johannot. On nous envoie de Paris tout ce que publie cet aimable artiste, et nous avons offert ces estampes si pittoresques et si spirituelles à ceux de nos amis romains qui aiment les miracles du clair-obscur. Une surface grande comme un écu de cinq francs donne une idée nette et noble.

Lorsque j'étais à Naples, en 1824, j'allai voir la bataille d'Aboukir de M. Gros. Ce chef-d'œuvre n'était pas à la mode à cause de la figure du roi Murat. Mais, dans l'espoir d'obtenir quelques carlins de la curiosité des étrangers, le custode avait déroulé cette toile immense. Elle gisait étendue sur le plancher d'une vaste salle, et l'on marchait dessus pour aller reconnaître la figure du fameux ingrat fusillé à Pizzo. Ce bel ouvrage, où il y a tant à louer et à blâmer, n'a point réveillé les peintres de Naples. Par la chaleur de l'exécution, par l'exagération même du groupe principal, par l'action aisée à comprendre et frappante pour le lazzaroni comme pour le philosophe, on eût pu croire que ce tableau les tirerait de leur peur. Rien n'y a fait. Ils auraient vu la Peste de Jaffa qu'ils seraient restés maniérés et plats comme devant.

Excepté M. Hayez de Milan, et peut-être M. Palaggi, les peintres vivants d'Italie ne peuvent le disputer aux nôtres. Nous n'avons rien vu de comparable à la Mort d'Elisabeth et au Cardinal de Richelieu menant Cinq-Mars au supplice, de M. Delaroche. Les Romains eux-mêmes reconnaissent la supériorité de M. Schnetz. Il est singulier que tant de vérité et de succès ne les tire pas de la froide imitation de MM. Benvenuti et Cammucini, eux-mêmes froids imitateurs de David.

Ils ont vu M. Court faire à Rome les Obsèques de César, et n'ont pas eu l'idée de revenir à la vérité et d'abandonner le genre théâtral.

L'état actuel de la société à Paris n'admet pas les travatix qui exigent de la lenteur et de la patience. Je ne sais si c'est la raison pour laquelle les gravures de MM. Anderloni, Garavaglia, Longhi, Jesi, l'emportent sur les nôtres.

Rien n'est peut-être plus agréable dans un voyage que l'étonnement du retour. Voici les idées que Rome nous a données à Paris.

Nos compagnes de voyage ne peuvent concevoir que l'on ne fasse pas un portique de huit colonnes dans le genre de celui du Panthéon de Rome, pour cacher la vilaine porte du Louvre et ses œils de bœuf du côté des Tuileries.

Elles ne comprennent pas que nos architectes soignent si peu dans leurs édifices la ligne du ciel (le contour qui se détache sur le ciel). Pour supprimer la vue hidetise des cheminées, il suffirait, en laissant l'élévation de l'intérieur telle qu'elle est, de multiplier les façades par vingt et un vingtièmes.

Tous nos palais plus bas que les maisons voisines leur semblent plats.

Les magnifiques colonnes de la Bourse, qui conduisent à une salle formée d'arcades et de simples piliers, leur paraissent un contre-sens plaisant.

Pourquoi ne pas planter les quais de distance en distance? pourquoi dans cent ans d'ici ne pas couper en deux ou trois endroits la terrasse du bord de l'eau aux Tuileries? En dehors de jardin royal on aurait trois collines avec des échappées de vue sur la Seine. Le talus planté de ces collines descendrait jusqu'au fleuve.

A Rome, choqués par quelque crime ou délit, nous disions souvent: « Pourquoi ne pas établir notre Code civil, des administrations raisonnables à la française? » etc. De retour à Paris, nous voyons les embellissements qui auront lieu d'ici à cent ans; si toutefois les économies du budget et la tristesse répu→

blicaine ne paralysent pas tout ce qui dans les arts s'élance au delà de la peinture de portrait ou de la statue pour le tombeau d'un éloquent député.

6 janvier 1829. Je viens de montrer Rome à un jeune Anglais de mes amis qui arrive de Calcutta, où il a passé six ans. Son père lui a laissé dix mille francs de rente, et il était déshonoré auprès de ses amis de Londres, parce qu'il annonçait l'intention de vivre en philosophe avec cette petite somme et sans rien faire pour augmenter sa fortune. Il a fallu partir pour les Indes ou s'exposer au mépris de toutes les personnes de sa connaissance.

Il m'a présenté à M. Clinker; c'est un Américain fort riche qui a débarqué il y a huit jours à Livourne avec sa femme et son fils. Il habite Savannah et vient voir l'Europë pendant un an. C'est un homme de quarante-cinq ans, de beaucoup de finesse, et qui ne manque pas d'un certain esprit pour les choses sérieuses.

Depuis trois jours que je le connais, M. Clinker ne m'a pas fait une question étrangère à l'argent. Comment augmentet-on sa fortune ici? Quand on a des capitaux inutiles dans l'industrie qu'on a entreprise, quelle est la manière la plus sûre de les placer? Combien en coûte-t-il pour avoir un bon état de maison? Comment faut-il s'y prendre pour n'être pas imposed upon (attrapé)?

Il m'a parlé de la France. « Ce que j'entends dire, monsieur, est-il vrai? Serait-il possible qu'un père ne fût pas le maître absolu of his own money (de son propre argent), et que votre loi le forçât à en laisser une certaine part à chacun de ses enfants? >>

J'ai montré à M. Clinker les articles du Code relatifs aux testaments. Son étonnement a été sans bornes; il répétait tou

jours: « Quoi! monsieur, vous frustrez un homme du droit de disposer de son propre argent, de l'argent qu'il a gagné ! »

Toute cette conversation avait lieu en présence des plus Jeaux monuments de Rome. L'Américain a tout examiné avec ce genre d'attention qu'il eût donné à une lettre de change qu'on lui aurait offerte en payement; du reste il n'a absolument senti la beauté de rien. A Saint-Pierre, pendant que sa jeune femme, pâle, souffrante et soumise, regardait les anges du tombeau des Stuarts, il m'expliquait la manière rapide dont les canaux se font en Amérique; chaque riverain soumissionne la partie qui traverse sa propriété. « La dépense définitive, ajoutait-il d'un air de triomphe, est souvent inférieure à celle du devis! >>

Enfin, de la conversation de ce riche Américain, il n'est jamais sorti que ces deux paroles de sentiment: « How cheap! how dear! Combien cela est bon marché! combien cela est cher! » M. Clinker a réellement un esprit fort subtil, seulement il parle par sentences comme un homme accoutumé à être écouté. Ce républicain à beaucoup d'esclaves.

Suivant moi, la liberté détruit en moins de cent ans le sentiment des arts. Ce sentiment est immoral, car il dispose aux séductions de l'amour, il plonge dans la paresse et dispose à l'exagération. Mettez à la tête de la construction d'un canal un homme qui a le sentiment des arts: au lieu de pousser l'exécution de son canal raisonnablement et froidement, il en deviendra amoureux et fera des folies.

J'ai accompli un devoir en passant trois jours avec le riche Américain; la société de cet homme m'avait profondément attristé. Pour jouir des contrastes, je l'ai présenté à monsignor N***. Ces deux hommes s'abhorrent.

M. Clinker est venu de New-York à Livourne et de Livourne à Rome avec un jeune Péruvien qui arrivait de Smyrne. Ün

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