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teurs de Rome. Dans ce petit espace, près du Tibre, derrière le mont Capitolin, il y avait un étang alimenté par les eaux du fleuve; ce fut dans la forêt, sur les bords de cet étang, que Rémus et Romulus furent allaités par la louve. Plus tard on passait cet étang en barque, et il fut dit: Velabrum, à vehendis ratibus.

Tarquin l'Ancien dessécha ce marais, et sur ce sol s'éleva l'un des plus beaux quartiers de Rome, telle qu'elle exista sous les rois. Il faut, quand on regarde des ruines, avoir toujours présents à la pensée les cinq âges de la ville éternelle. Elle a été la Rome des rois, celle de la république; elle fut magnifique sous les empereurs, misérable et en proie aux factions dans le moyen âge et jusqu'au règne d'Alexandre VI, ensuite somptueuse et toute royale sous Jules II et Léon X. Jusqu'au temps des Gracques, l'architecture fut sévère, et ne chercha que l'utile; les Romains pouvaient dire:

Nous n'avons, au lieu d'or, que du fer, des soldats.

L'imagination de nos compagnes de voyage était tout à fait transportée dans les premiers temps de Rome; je n'ai eu garde de détruire leur plaisir, en disant que, grâce à la longévité des temps primitifs, les rois de Rome avaient régné deux cent quarante-quatre ans à eux sept, ce qui donne à chacun trente-quatre ans de règne. Rien n'éteint l'imagination comme l'appel à la mémoire ou au raisonnement. Voilà pourquoi les predicateurs actuels sont si ennuyeux; ils raisonnent contre Voltaire, Fréret, etc.

Nous sommes allés voir, sur les bords du Tibre, ce joli temple de Vesta, si bien mis en évidence par l'administration de Napoléon (1810), et dont le nom présent est Hercule vainqueur (tempio di Ercole vincitore). Le portique circulaire, formé de

dix-neuf colonnes cannelées de marbre blanc et d'ordre corinthien, est charmant. La hauteur des colonnes, y compris la base et le chapiteau, est de trente-deux pieds, leur diamètre de près de trois. Ces colonnes s'élèvent sur plusieurs marches, et la circonférence du portique circulaire est de cent cinquante-six pieds. Le diamètre de la cella ou sanctuaire est de vingt-six pieds. Quelque personnage riche devrait bien remplacer le vilain toit de tuiles, en forme de champignon, qui abrite ces colonnes, par un entablement dans le genre de celui du temple de Tivoli. Ce qui reste du temple de Vesta ou d'Hercule indique que tel fut autrefois son aspect; il ne manque qu'une colonne, l'entablement et la couverture. Le mur de la cella circulaire est en marbre blanc, et les blocs sont très-bien joints.

Le style des chapiteaux et la proportion peut-être un peu trop svelte des colonnes indiquent que le temple de Vesta a été refait vers le temps de Septime Sévère. On l'appelle aussi Saint-Étienne aux carrosses (San-Stefano alle carrozze). Une réparation de trois cents louis en ferait une aussi jolie chose que le temple de Diane à Nîmes.

La pauvreté des matériaux employés pour le temple de la Fortune Virile, situé à quelques pas du temple de Vesta, est précisément ce qui l'a rendu si intéressant à nos yeux. Trèsprobablement nous sommes ici en présence d'un monument bâti du temps de la république. Voici la fable convenue. Ce temple fut élevé par Servius Tullius, sixième roi de Rome; il voulut remercier la fortune qui d'esclave l'avait fait roi. La forme de cet édifice est un carré long; il est entouré de dixhuit colonnes, dont six sont isolées, et les autres à demi engagées dans le mur. Ces colonnes, d'ordre ionique et cannelées, ont vingt-six pieds de hauteur, elles sont de tuf et de travertin.

On les voit misérablement recouvertes de stuc, ainsi que

l'entablement sur lequel on distingue des enfants, des candélabres et des têtes de bœuf; les frontons sont d'une bonne proportion. Ce temple, élevé sur un grand soubassement, fait un très-bel effet depuis qu'il a été déterré par ordre de Napoléon. Ce prince n'osa pas le rendre à sa beauté primitive en supprimant l'église et faisant démolir tout ce qui a été fait pour chan ger le temple en église. Elle fut dédiée à la Vierge en 872, e appartient aujourd'hui aux Arméniens catholiques.

Nous avons passé devant la maison attribuée à Cola di Rienzo; une inscription annonce qu'elle fut élevée par Nicolo, fils de ce Crescentius qui, ainsi que Cola di Rienzo, rêva la liberté au milieu d'un siècle indigne d'elle.

Nous sommes arrivés aux ruines du Ponte Emilio; ce fut le premier que Rome vit construire en pierres. La voûte fut la grande invention de l'architecture primitive; pendant longtemps, en Grèce, une colonne fut jointe à la voisine par une poutre ou des pierres plates. Les Étrusques, peuple savant, avaient l'usage de la voûte.

Le pont Emilius, commencé par Marcus Fulvius, censeur, l'an 557 de Rome, fut terminé par Scipion l'Africain l'an 612; restauré par Jules III, il tomba en 1564; rétabli en 1575, une moitié fut emportée par l'inondation de 1598.

Par un sentier rapide voisin de ce pont, nous sommes descendus à une petite barque, à l'aide de laquelle nous avons examiné cette Cloaca maxima tant admirée par Montesquieu, et avec raison. Quelle passion pour l'utile avaient ces premiers Romains!

Notre disposition à être touchés des choses antiques continuant toujours, nous sommes allés visiter les restes charmants du théâtre de Marcellus. C'est ce neveu d'Auguste, immortel à cause de quelques vers de Virgile: Tu Marcellus eris! Ce grand poëte les lut en présence d'Octavie, qui venait de perdre

te fils si aimable. Cette action de Virgile est d'une âme bien avilie par le despotisme, dit le sévère Alfieri; avait-il peur que Rome ne manquât de maîtres? Alfieri était riche, et Virgile était pauvre. Le gentilhomme piémontais n'a que trop raison lorsqu'il parle des gens de lettres à impulso artificiale (à vocation pécuniaire). Je demande pardon de cette foule de petites digressions. C'est en disant tout ce qui nous passe par la tête que nous arrivons à notre grand objet, ne pas ennuyer nos compagnes de voyage en leur faisant voir des ruines laides pour des yeux dévoués à la mode.

Dix ans après la mort de ce Marcellus qui eût régné sur Rome, Auguste fit la dédicace de ce théâtre. Les Romains eurent le plaisir de voir tuer sous leurs yeux six cents bêtes féroces. Aujourd'hui, on chanterait une cantate où les vertus du prince seraient académiquement célébrées. A l'arrivée de l'empereur François d'Autriche à Milan, Monti a chanté le retour d'Astrée. Apparemment la justice avait été exilée du temps des Français, et revenait avec le gouvernement de M. de Metternich! Monti était pauvre comme Virgile

Le seul Jean-Jacques Rousseau a su rester pauvre et gagner aux échecs M. le prince de Conti, tout en étant fou du bonheur de recevoir la visite d'un prince. Après cette digression, continuant le métier de cicerone, j'ai raconté que, le jour de la dédicace du théâtre de Marcellus, la chaise curule d'Auguste s'étant rompue tout à coup, il tomba tout de son long sur le dos, ce qui fit grand plaisir aux vieux jacobins de Rome.

Si vous voulez oublier l'énorme toit si laid du théâtre de la rue Ventadour, sa façade peut donner une idée de ce qui reste du théâtre de Marcellus. Cet édifice formait un demi-cercle dont le diamètre avait trois cent soixante-dix pieds; il pouvait contenir vingt-cinq mille spectateurs. Ce qui nous en reste

aujourd'hui, ce sont deux rangs d'arcades élégantes; elles environnaient la partie occupée par les spectateurs (vers la Piazza Montanara). Les colonnes engagées des arcades inférieures sont d'ordre dorique; les arcades plus élevées sont ioniques.

Cette ruine est si jolie, entre si bien dans l'œil, comme disent les artistes, que la plupart des architectes; lorsqu'ils ont à placer l'ordre ionique sur l'ordre dorique, suivent les proportions du théâtre de Marcellus. Probablement il y avait un troisième ordre plus élevé. Dans vingt ans, nous serons moins barbares pour l'architecture; l'on ajoutera peut-être ce troisième ordre au théâtre Ventadour, et le vilain toit sera caché. Le théâtre de Marcellus est construit de gros blocs de travertin.

Comme tous les monuments un peu solides de la Rome antique, comme le tombeau de Cecilia Metella, comme l'arc de Janus Quadrifrons au Velabro, le théâtre de Marcellus a servi de forteresse dans le moyen âge. Les Pierleoni l'occupèrent, ensuite les Savelli; plus tard, la famille Massimi fit construire sur les ruines de ce théâtre le palais que l'on voit aujourd'hui. Peruzzi fut l'architecte. M. Orsini, propriétaire actuel, vient de le faire restaurer. On arrive dans la cour du palais par une longue rampe; elle suit l'exhaussement formé par les ruines du théâtre antique.

Si vous vous sentez un jour un accès de curiosité bien courageux, vous pouvez l'employer à étudier le théâtre de Marcellus et le palais Massimi. Chaque monument de Rome a donné lieu à deux ou trois volumes in-folio. Dans le genre historique, c'est tout ce qu'offrent de passable les bibliothèques du pays.

De gros nuages noirs annonçaient une tempête; au lieu de courir dans la campagne de Rome, nous sommes revenus à

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