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BOTANIQUE INDUSTRIELLE

EXPLOITATION DES LIANES CAOUTCHOUTIFÈRES
EN AFRIQUE CENTRALE

En 1911, lors de la première réunion internationale caoutchoutière tenue à Londres, nous avons insisté sur l'intérêt qu'il y avait, en Afrique, à continuer la culture et l'exploitation des essences caoutchoutifères indigènes. Dans l'Official Guide book, nous terminions notre notice Native or exotic rubber trees par la considération qu'il fallait à chaque pays ses produits propres et ses producteurs bien adaptés à la région.

Dans l'une des séances tenues au local de l'Exposition, nous sommes entré davantage dans le détail du sujet en nous étendant sur notre manière de comprendre l'exploitation et la culture des lianes congolaises basées sur des procédés d'extraction mécanique du caoutchoue contenu dans les tissus, et nous faisions voir que cette méthode était tout indiquée pour le développement économique du centre et de l'ouest du continent noir.

Ce n'était pas la première fois que nous préconisions ces idées, nous les avons défendues depuis de nombreuses années, mais cette méthode a trouvé parmi les agronomes officiels de diverses colonies plusieurs contradicteurs et l'on n'a pas jusqu'à ce jour appliqué en Afrique le procédé sur lequel nous sommes revenu si souvent.

Au contraire la crise récente a provoqué de nouvelles critiques de la part des opposants irréductibles de la culture, et même de l'exploitation des lianes, et on a vu conseiller leur abandon total. On a été jusqu'à dire que cette exploitation pouvait être considérée comme de nulle valeur pour les indigènes et qu'il était très aisé de supprimer le droit qu'ils ont acquis de récolter du caoutchouc dans les forêts si on leur offrait en échange un travail rémunéré, plus facile, dans les entreprises agricoles de tous genres qui pourraient être créées par le blanc. Ce sont là naturellement pures conjectures, car rien ne prouve que l'indigène abandonne si facilement ses droits de culture.

Mais en supposant même qu'elles soient fondées, serait-il utile pour la colonie elle-mème et pour le commerce de la métropole, de s'engager dans une voie qui aboutirait à la suppression d'un des postes importants du tableau de son commerce, et à un changement radical et relativement brusque dans les habitudes du noir?

Heureusement, à côté des contradicteurs, un certain nombre de coloniaux partagent tout à fait notre manière de voir, et récemment nous avons vu un de nos confrères français, M. Baudon, écrire, à propos de la production du caoutchouc au Congo français, une étude sur le caoutchouc pilonné des rhizomes du Landolphia owariensis, dans laquelle il arrive, comme nous, à conseiller la multiplication de la liane pour sa mise en exploitation réglée en enlevant du sol, à leur maturité, les racines qui devront être traitées mécaniquement (1).

M. le Gouverneur Merlin, de l'Afrique française, a récemment, lui aussi, insisté sur cette méthode d'exploitation; ses idées ont fait le tour de la presse spéciale et ont été reproduites, sans grands commentaires il est vrai, mème dans les revues allemandes consacrées au caoutchouc (2).

La lecture du travail de M. Baudon et du rapport du Gouverneur Merlin, nous a amené à reprendre la question et tout d'abord à rappeler quelques dates ayant, ce nous semble, un certain intérêt pour l'histoire du caoutchouc.

C'est en 1907, dans une communication faite à la Société scientifique de Bruxelles, publiée dans ses ANNALES et reproduite par la Société de Géographie de l'Est, que nous avons publié, peut-être pour la première fois, l'idée de mettre des lianes à caoutchouc, croissant dans les forêts, en véritable coupe réglée. L'exploitation caoutchoutifère, disions-nous, du moins celle des lianes les plus communément cultivées au Congo (Landolphia owariensis, Klainei et espèces voisines) doit se borner aux opérations coupe et battage. Après la coupe on laissera repousser. En un mot, on devra mettre la réserve caoutchoutifère en coupe réglée. »

Nous ne nous faisions pas l'illusion, à cette époque, de voir ce principe admis d'emblée; la plupart des gouvernements coloniaux avaient, par décrets, défendu la coupe de lianes et, dans

(1) A. Baudon, Le caoutchouc pilonné des rhizomes du Landolphia owariensis. Pal. Beauv., sa production, son avenir. ANNALES DE L'INSTITUT COLONIAL DE BORDEAUX 1913.

(2) Cf. GUMMI-ZEITUNG, 1914, no 30, 24 avril, p. 1167.

certaines colonies, cette défense persiste encore. Mais aujourd'hui, comme en 1907, nous sommes persuadé que le jour viendra puisse-t-il ne pas être trop éloigné! - où l'on reconnaîtra que la coupe fait moins de tort et donne plus de bénéfices que la saignée. Le jour, disions-nous en 1907, où la coupe sera permise, où les forêts à caoutchouc auront été mises en coupes réglées comme nos forêts européennes, où l'on aura déterminé le roulement et où l'on connaitra exactement l'étendue de la région qui peut être mise en exploitation, bien des abus criants cesseront d'eux-mêmes, et peut-être arrivera-t-on à éviter dans le commerce ces fluctuations de prix si désagréables pour la bonne marche des affaires. »

Dès avant 1907, nous avions à diverses reprises, dans des cours, des conférences ou des publications, défendu le principe de la coupe réglée et du procédé mécanique, qui n'est pas de notre invention. L'idée première en revient aux recherches de Godefroy-Leboeuf, basées elles-mêmes sur les pratiques des indigènes africains. Mais, répétons-le, c'est dès 1907 surtout que nous avons préconisé cette mise en coupes réglées des réserves caoutchoutifères: lianes et caoutchoutiers des herbes, et depuis lors nous avons souvent repris le développement de ces idées, entre autres dans la revue francaise LE CAOUTCHOUC ET LA GUTTA-PERCHA (1).

Nous avons été très heureux de voir, il n'y a pas fort longtemps, un fonctionnaire du service forestier de Madagascar, s'appuyant sur notre manière de voir, proposer un projet d'aménagement des forêts à essences caoutchoutifères et de leur exploitation rationnelle.

Mais cette question de l'exploitation des lianes est, comme toutes celles qui se rattachent aux caoutchoutiers, beaucoup plus complexe qu'on ne se l'imagine fréquemment; elle soulève, en effet, une série de questions accessoires, malheureusement trop peu étudiées.

Admettant, ce qui nous paraît certain, que l'exploitation est possible, est-elle économique, les frais ne seront-ils pas trop élevés, dans les conditions actuelles surtout, pour laisser au collecteur et au négociant des bénéfices suffisants?

C'est, pensons-nous, pour n'avoir pas assez approfondi ces questions, que beaucoup ont conclu d'emblée à l'impossibilité

(1) LE CAOUTCHOUC ET LA GUTTA-PERCHA. Paris, rue des Vinaigriers, 49. 1904-1914.

de la rentabilité d'une telle exploitation, et c'est ainsi qu'ils sont arrivés à déclarer, sans hésitation, qu'il fallait abandonner non seulement la culture, mais l'exploitation des lianes existant à l'état sauvage dans la forêt, et remplacer cette production par celle de cultures, faites par des sociétés européennes, d'Herea brasiliensis ou de Manihot, qui seuls seraient capables, le premier surtout, de fournir du caoutchouc à un prix suffisamment rémunérateur.

En rapport avec cette idée, nous avons vu M. R. Vauthier, membre du Conseil colonial du Congo Belge, écrire à propos d'un décret approuvant une convention conclue entre des firmes belges et anglaises et le Gouvernement de la Colonie: « La cueillette du caoutchouc sauvage n'a été qu'un mode d'exploitation provisoire en attendant mieux. Elle porte sur des ressources naturelles qui sont destinées à s'épuiser plus ou moins rapidement; avant même cette échéance fatale, il s'est produit, dans la valeur du caoutchouc, une baisse notable des prix. Il en est résulté une crise qui retentit durement sur les finances de la colonie » (1).

Nous ne pouvons partager cette manière de voir; le Congo ne s'appauvrit pas tellement en caoutchouc qu'il faille envisager la suppression de cet article de commerce. Nous pensons au contraire que la cueillette se continuera, si on le veut, non plus peut-être sur des plantes tout à fait sauvages, mais sur des plantes déjà soignées par le noir; cela naturellement si les gouvernements prennent en main la réglementation de la cueillette, et démontrent à l'indigène, qui de lui-même l'a d'ailleurs souvent très bien compris, l'intérêt qu'il a à protéger les plantes productrices.

Nous avons dit que nous considérions le caoutchouc provenant des essences indigènes africaines comme capable de donner au collecteur et au négociant des bénéfices rémunérateurs, et cela même avec des taux de vente aussi bas que ceux que l'on obtient actuellement. Cela est-il bien exact?

Il faut, en matière coloniale et surtout quand on considère le caoutchouc, se méfier des idées préconçues, il faut au contraire chercher à mùrir le sujet et éviter de donner une solution immédiate, dans un sens ou dans un autre, qui risquerait de devoir être rapportée ultérieurement, alors qu'un courant nouveau, néfaste peut-être, aurait être créé.

(1) LE MOUVEMENT GÉOGRAPHIQUE, Bruxelles, 28 déc. 1913, p. 66.

Dans un discours prononcé en 1913, le général Thys, dont la compétence coloniale est reconnue, a pu dire avec grande justesse à propos du caoutchouc congolais : « Quant à nos sociétés caoutchoutifères, je crois qu'elles devront apporter beaucoup de soins dans leurs exploitations, s'appliquer rigoureusement à tâcher de réduire leurs frais généraux et, dans tous les cas, mettre leurs prix d'achat à la hauteur des prix auxquels elles peuvent réaliser leurs produits en Europe. Enfin et surtout, elles devront apporter le plus grand soin dans le choix de leur personnel européen, car, de tous les dangers signalés, il y en a peu qui effrayent, mais il y en a un auquel on ne pense pas beaucoup et dont on parle peu, et qui, à mon sens, est peutètre le plus grand, c'est de trouver un bon personnel européen en Afrique. Je considère que, de toutes les difficultés de l'heure présente, celle-là est peut-être la plus grave (1). »

Nous n'avons nullement l'intention de développer les divers points soulevés par le général Thys, bien qu'ils mériteraient, vu leur importance, d'ètre discutés. Nous retenons simplement l'impression que la crise caoutchoutifère n'est pas aussi grave que beaucoup l'ont pensé.

Get avis est d'ailleurs partagé par M. G. Lamy-Torrilhon : Il ne faut pas trop s'alarmer, dit-il, de cette situation qui se tassera, qui s'équilibrera à un moment donné sans trop de dommage, espérons-le, pour les récolteurs aussi bien de « plantation » que du « Para sauvage », il faut au contraire tirer un enseignement de ce qui se passe en ce moment. Cette crise, qui semble plutôt affecter le Brésil et le Congo, s'atténuera. On s'était habitué trop vite à des bénéfices exagérés, on dépensait sans compter un argent trop facile à rentrer, il va falloir maintenant réduire les frais généraux et le coût de la main-d'œuvre au strict nécessaire, se restreindre de tous côtés (2). »

Pour lutter contre cette crise, tous les gouvernements intéressés ont cherché à modifier les règlements en vigueur, à diminuer les frais de transport de manière à amener les produits de cueillette, sur les marchés, à un prix capable d'entrer en concurrence avec la plantation ».

La crise qui s'atténue déjà, nous voyons en effet les prix augmenter, ne doit donc pas faire abandonner la culture ni mème

(1) LE MOUVEMENT GÉOGRAPHIQUE, Bruxelles, 21 déc. 1913, p. 646.

(2) G. Lamy-Torrilhon, La situation économique du caoutchouc. JOURNAL D'AGRICULTURE TROPICALE, no 149, 30 novembre 1913.

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