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toute végétation forestière, affirme que si l'on ajoute à ces étendues dénudées « les superficies rocheuses, sableuses et pierreuses, on voit que les deux tiers au moins des terrains dépourvus de végétation échappent à notre empire.

Or il se trouve que non pas sur la totalité de nos sept départements alpestres, mais sur celle de deux d'entre eux seulement (qui n'en représentent pas le tiers), nous trouvons déjà plus de 600 000 hectares de terrains non recouverts de végétation arborescente. La proportion de rochers vifs est relativement peu importante, et quant aux sols de sable et de pierraille, notre honorable contradicteur ne doit pas ignorer qu'on peut leur faire supporter une végétation inférieure préparatoire, à l'abri de laquelle on fera naître quelques années plus tard de jeunes peuplements forestiers.

En admettant, ce qui est très probable, que nos deux départements des Hautes et Basses Alpes soient les plus mal traités, au point de vue des sols découverts et peu ou insuffisamment productifs, de tout le groupe alpestre, nous ne sommes pas sans doute en droit de tripler la superficie découverte et non cultivée, reconnue dans ces deux départements. Mais nous pouvons la doubler sans crainte d'être sensiblement au-dessus de la vérité. Nous aurions donc, dans nos seules Alpes françaises, plus de 1 200 000 hectares sinon dépourvus de toute végétation, du moins à l'état de pâturages plus ou moins en bon état, de landes et autres terrains vagues.

Nous voilà loin des pauvres 300 000 hectares dont les deux tiers au moins échappent à notre empire» (1).

(1) D'un travail publié par M. le Conservateur des forêts du Guiny, alors qu'il était attaché comme sous-inspecteur à la conservation forestière de Grenoble, et publié dans la REVUE DES EAUX ET FORÊTS de 1865, sous le titre d'Exploitation des pâturages dans les Alpes, il résulte ceci : L'espace occupé par une sorte de quasi parallélogramme, compris entre le cours du Rhône, la Méditerranée, et une ligne idéale joignant Nice à l'extrémité orientale du Léman, et comprenant les Savoies, le Dauphiné, l'Avignonnais, la Provence et

Il est de toute vraisemblance que les conditions se présenteraient identiques dans la chaîne des Pyrénées, plus ou moins analogues dans les Cévennes et le Massif central. Sans doute une partie de ces vastes surfaces occupe des altitudes où la végétation vraiment forestière est empêchée par la rigueur du climat. Cependant l'épicéa affronte aisément 2000 mètres; le mélèze, le cembro, le pin de montagne, le genévrier commun, quelques autres végétaux ligneux encore végètent sans trop de peine entre 2000 et 2500 mètres.

L'argumentation de notre savant contradicteur, fondée sur la trop faible étendue des terrains qui échapperaient à notre empire, pèche donc par la base.

III

QUESTIONS D'ORDRE ÉCONOMIQUE

Contre les opérations de reboisement en montagne, M. Briot fournit plusieurs objections, dont l'une d'abord est d'ordre économique. Il évalue à 720 millions le produit du bétail de toute catégorie dans les Alpes, les Cévennes, le Massif central et les Pyrénées; et supposant que la moitié de ce bétail se nourrit durant un

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l'ancien comté de Nice, couvrirait approximativement, en nombre rond, 56 000 kilomètres carrés dont 17 600 appartenant à la plaine; en sorte qu'il resterait, pour la partie montagneuse : 38 400 kilomètres carrés ou 3 840 000 hectares. Sur cette étendue 1 460 000 hectares sont affectés aux terres, prairies artificielles et prairies naturelles ; il reste 2 380 000 hectares se répartissant ainsi bois et forêts: 950 000 hectares; roches, glaciers et altitudes supérieures à la limite de végétation forestière : 280 000 hectares, et enfin 1 150 000 hectares de pâturages. Ce dernier chiffre correspond, à 50 000 hectares près, à celui que nous obtenons par induction en nous fondant sur les chiffres relevés par M. Broilliard dans les deux départements des Hautes et Basses Alpes, estimés à bon droit les plus maltraités de la région. Il est vrai que, depuis 1865, il a été opéré des reboisements dont la surface doit être enlevée à celle des pâturages; mais quelle qu'en soit l'étendue elle laisse une marge bien supérieure aux restrictions invoquées par notre honorable contradicteur.

minimum (inférieur à la réalité) de trois mois en montagne, il en déduit un produit annuel de 90 millions au bas mot. Produit infiniment supérieur, suivant lui, aux dommages annuels moyens des inondations attribuées à l'état des montagnes, dommages qu'il n'estime pas devoir s'élever à plus de 2 millions.

Il n'y aurait done aucun intérêt à supprimer le pâturage au profit, fût-elle possible, de l'extinction des inondations.

Observons d'abord qu'il n'est nullement question de supprimer le pâturage, mais bien de l'améliorer et de le réglementer comme on l'a dit plus haut, et que par conséquent les 90 millions auxquels est évalué le produit de l'industrie pastorale ne seront pas tous perdus ; ils peuvent même être conservés intégralement tout en réduisant le nombre des moutons. M. Briot, dans ses évaluations, comprend ensemble les espèces bovines, ovines et caprines. Mais, si l'on néglige les chèvres, heureusement en nombre relativement faible, les moutons sont proportionnellement beaucoup plus nombreux que les boeufs, veaux et vaches, même en admettant la proportion de 10 ovidés pour un bovidé. Or, ce sont les premiers et non les seconds qui ruinent le sol qu'ils parcourent.

Ensuite, le grand dommage causé aux montagnes pastorales provient moins des moutons indigènes que des moutons transhumants, venus chaque été des plaines de la Crau ou du Piémont dans les Pyrénées et les Alpes, en bandes innombrables sans aucun rapport avec la production du sol. Et le revenu donné par les moutons transhumants est de 1,25 fr. par tête, tandis que le produit du mouton indigène en laine, lait, engrais, viande, est de 4 francs (1).

Il y aurait done intérêt à supprimer non par le pâtu

(1) Cf. Exploitation du pâturage dans les Alpes, par M. du Guiny.

rage en montagne, ce à quoi personne ne pense, mais bien la transhumance, ou tout au moins à la réglementer rigoureusement.

D'autre part, le pacage des bêtes bovines est plus productif que celui des moutons. Mille moutons à 4 francs représentent un revenu de 4000 fr. Or 143 têtes bovines consomment la même quantité de nourriture que 1000 moutons, et rapportent en lait, beurre, fromage et viande, 5800 fr. Dans le cas où le village possède une fruitière, c'est-à-dire une fabrique de fromage de Gruyère, ce revenu peut s'élever à 8000 francs (1).

Il y aurait donc tout intérêt à substituer, partout où les circonstances locales le permettent, le gros bétail aux moutons. L'espèce bovine a, en outre, sur l'espèce ovine ce grand avantage qu'elle n'épuise pas le sol comme le mouton. Mettez quinze vaches sur une superficie n'en pouvant nourrir que dix, le sol n'en pâtira pas, mais ce sont les vaches qui seront insuffisamment nourries. En sorte que nul n'aura intérêt à mettre sur un terrain donné plus de vaches qu'il n'en peut entretenir. Avec les moutons c'est tout le contraire: ils trouvent toujours à se nourrir, mais aux dépens du fonds.

De tout cela il est permis de conclure que la réduction du nombre de têtes par la suppression de la transhumance étant compensée par l'amélioration des pâturages et la substitution dans une juste mesure des bêtes bovines aux moutons, cette réduction se pourrait réaliser sans aucune diminution du produit de ces bestiaux.

L'objection d'ordre économique ne semble donc pas fondée qui est opposée à l'aménagement des montagnes par l'amélioration des pâturages et le reboisement des parties où ceux-ci seraient nuls ou insuffisamment productifs.

(1) du Guiny, loc. cit.

Mais on va plus loin et l'on soutient que les dégâts causés par les crues d'eau et les inondations sont sinon insignifiants, du moins relativement minimes et hors de toute proportion, quoi qu'il en soit, avec les descriptions pessimistes qui en ont été données. Pour le démontrer, notre auteur part d'une citation... anonyme.

Nous lisons ceci », écrit-il sans dire où, chez quel auteur il lit

« La Loire et la Garonne ont causé ensemble, de 1750 à 1900, 30 inondations ayant coûté 100 millions chacune. La Garonne, en 1875, a détruit 6000 à 8000 maisons. Les versants de la Maurienne glissent avec une vitesse de 3 à 18 mètres par an sur des milliers d'hectares, etc. » Il y a comme cela près d'une demipage d'exposés de ravages produits par les infiltrations et les inondations dans les vallées de l'Isère, du Drac, de la Durance, et se terminant par cette affirmation que dans nos seules Alpes de France 200 000 hectares seraient exposés aux ravages des crues d'eau violentes.

Comme la source de ces renseignements n'est pas indiquée, aucun contrôle n'est possible. Il se peut que l'auteur inconnu, où sont puisées ces indications, ait enflé les chiffres et noirci le tableau, mais on n'a aucun moyen de le vérifier. Toujours est-il que l'ennemi des reboisements procède, pour réfuter la thèse, par simple insinuation. Il fait ressortir ce qui est, à ses yeux, l'invraisemblance de telles assertions, n'admettant pas que les habitants des bassins de la Loire et de la Garonne aient pu supporter, en cent cinquante ans, une perte de 3 milliards. Le développement de ces fleuves et de leurs principaux affluents étant, toujours d'après l'auteur, de 6000 kilomètres, les habitants de ces régions auraient donc subi une perte annuelle moyenne de 3333 fr. 33 c. par kilomètre et par an, ce qui lui paraît être d'une invraisemblance équivalente à la fausseté. Présenté sous cette forme, l'argument ne laisse pas

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