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LE FRÈRE ALEXIS-MARIE G.

L'excellent et savant collègue que la Société scientifique vient de perdre, est mort à Grand-Bigard, près de Bruxelles, le 10 novembre dernier. Il était né à Tamines, dans la Province de Namur, le 1er janvier 1835. C'est dans sa terre natale qu'il repose, au sein d'une population laborieuse dont sa famille, profondément chrétienne et éminemment bienfaisante, a conquis dès longtemps le respect, l'affection et la reconnaissance.

Jean-Baptiste Gochet fit de sérieuses études chez les Frères des Écoles chrétiennes, à Malonne, et les fit bien. Rentré dans sa famille sans la moindre velléité de s'en séparer, il s'occupa, avec ses frères, d'agriculture et de la direction de la brasserie établie à Tamines, vers 1700, par un de ses ancêtres et devenue, entre les mains de ses aïeux et de son père, une des plus importantes du pays (1).

L'avenir s'ouvrait devant lui plein de promesses : sa fortune patrimoniale ne le garantissait pas seulement contre les risques de la vie, elle lui assurait une aisance plus qu'abondante; le monde lui souriait, et il ne dédaignait pas de répondre à ses avances, mais il fut tôt désabusé.

A vingt-trois ans, l'attrait du sacrifice l'emportait,

(1) Le R. Frère Aleris-Marie G., Souvenirs intimes dédiés à ses anciens élèves et à ses amis, Paliseul 1909; extrait de la REVUE DE CARLSBOURG, 1909. Nous empruntons à cette notice la plupart des renseignements biographiques qui vont suivre.

en son cœur généreux, sur celui du plaisir. Il se souvint de Malonne et des exemples qu'il y avait eus sous les yeux : l'éducation chrétienne et l'instruction de la jeunesse, des humbles surtout, lui apparurent comme le but idéal à donner à son activité : il alla s'offrir à ses anciens maîtres.

Le 8 octobre 1858, Jean-Baptiste Gochet entrait au noviciat de la Rue Oudinot, à Paris. Un mois plus tard, il revêtait l'habit de Saint Jean-Baptiste de la Salle et prenait le nom de Frère Alexis-Marie, qui allait devenir si populaire dans nos écoles et si estimé dans le monde de l'enseignement.

Ce premier séjour en France fut de très courte durée. La santé du novice, un instant ébranlée, parut réclamer l'air natal c'est à Namur qu'il vint achever cette première année de vie religieuse.

Au mois de septembre 1859, nous le trouvons à l'Ecole normale de Carlsbourg où, à l'ouverture de l'année scolaire, il est chargé d'enseigner la Géographie et, bientôt après, les sciences naturelles et l'agriculture.

L'enseignement de la Géographie dans nos écoles, au moment où le F. Alexis recevait la mission de le donner à nos futurs instituteurs, avait détestable réputation les maîtres le jugeaient sans importance et les élèves le déclaraient insupportable. L'explication est aisée cet enseignement était mal donné, ce qui le rendait à la fois inutile et ennuyeux.

La Géographie régionale descriptive n'avait pas seulement perdu tout contact avec la Géographie générale, elle se limitait, le plus souvent, à ce qu'il y a en elle de moins vivant et de plus abstrait. Les cartes appendues aux murs, se bornaient à figurer les divisions. politiques, l'hydrographie et, par des pâtés de hachures, ce que l'on prétendait être le relief, l'orographie des

pays représentés. Les manuels à courte vue étaient au niveau des cartes : ils juxtaposaient d'invariables et insipides clichés, ou se perdaient dans des descriptions d'une aridité rebutante et d'interminables nomenclatures flanquées de chiffres, qui imposaient aux élèves, la veille des concours, la plus ingrate et la moins utile des leçons de mémoire.

Des germes féconds de régénération et de progrès avaient cependant été déposés dans les ouvrages de Humboldt (1766-1859) et dans l'oeuvre pédagogique de Ritter (1779-1859); mais ils attendaient pour éclore des circonstances favorables. Elles se présentèrent pendant le dernier tiers du XIXe siècle, au début et au cours même de la carrière géographique du F. Alexis.

Cette période est, en effet, caractérisée par une extension considérable de nos connaissances géographiques et le progrès des sciences connexes; par le renouvellement et l'achèvement de l'image grandiose de la surface du globe qui attire enfin et retient l'attention jusque-là indifférente du grand public; par la création d'instruments de travail d'une valeur inestimable; par l'éveil des idées et le concours des multiples efforts qui feront de la Géographie ce que le F. Alexis appelle << une science encyclopédique », relevant de toutes les sciences physiques et naturelles, leur prêtant son concours, et offrant ses services à l'histoire, au commerce, à l'industrie, aux sciences sociales et économiques.

C'est l'époque où les perfectionnements des moyens de transport aident à la poussée coloniale de tous les Etats européens. S'il n'y a plus de nouveaux mondes à découvrir, l'intérieur d'immenses continents attend des explorateurs : ils surgissent de toutes parts. Les uns marchent à la conquête de l'Afrique mystérieuse : le Soudan, le Sahara, les régions du Haut Nil, du Congo, du Zambèse sont envahies. D'autres abordent les grandes chaînes de l'Asie centrale. En Amérique,

les bassins fermés, les gorges fantastiques, les plateaux désolés des Montagnes Rocheuses nous sont révélés par les précurseurs du Geological Survey qui poursuivra et complètera leur œuvre. Les croisières scientifiques se multiplient celles-ci font l'assaut des Pôles, celles-là sillonnent les océans et sondent leurs abîmes; le relevé des reliefs immergés, la distribution des températures au sein des mers, le tracé des grands courants qui entraînent les masses océaniques, leur influence sur le climat sont autant de conquêtes nouvelles.

L'imprévu des résultats, la nouveauté grandiose des faits physiques mis en lumière, les récits des efforts héroïques qu'ont coûtés ces victoires remportées sur la nature, captivent le grand public, et son attention est entretenue par la publication d'ouvrages de haute vulgarisation scientifique et la réunion de Congrès : c'est l'ère de la grande prospérité des Sociétés de géographie.

D'autre part, en Europe, aux États-Unis, aux Indes britanniques, des services d'État s'organisent qui exécutent et publient des cartes topographiques où sont précisées nos connaissances, jusque-là très rudimentaires, sur les formes du relief terrestre, en même temps que l'interprétation de ces données, du plus haut intérêt, est rendue possible par l'exécution et la publication, par d'autres services d'Etat, de cartes géologiques détaillées.

L'étude de l'atmosphère cesse d'être livrée au hasard d'observations isolées, pour être systématiquement abordée et continûment poursuivie dans des observatoires météorologiques qui s'élèvent partout et accumulent les matériaux d'où sortira la science des facteurs climatèriques.

Enfin, dans un autre ordre d'idées, d'autres services officiels sont fondés qui embrassent, dans leur pro

gramme, l'activité industrielle et commerciale, et tout ce qui touche à la géographie humaine.

Déjà l'enseignement supérieur s'est mis à la tête de ce mouvement pour en diriger la marche et en synthétiser les résultats. La géographie scientifique est née ; c'est dans les universités, en Allemagne tout d'abord, qu'elle grandit en contact intime avec les sciences au progrès desquelles elle est intimement associée, et la voici qui s'affirme dans des manuels et des atlas de géographie générale, instruments de travail infiniment précieux.

à

Le grand mérite du F. Alexis est d'avoir suivi pas pas cette marche en avant, d'avoir utilisé ces ressources et consacré ses talents pédagogiques, avec un rare bonheur et une inlassable persévérance, à en faire bénéficier l'école et le collège, dans une mesure et par des moyens appropriés à l'intelligence des enfants et des jeunes gens.

Dès le début de sa carrière, le Professeur de Carlsbourg a eu l'intuition du renouvellement prochain et nécessaire de l'enseignement de la géographie et la volonté d'y contribuer. Son Manuel de géographie, accompagné d'Exercices cartographiques et d'un Atlas d'écoliers (1864-1865) est déjà un progrès. Mais il a conçu dès lors une œuvre plus importante où les idées qui germent dans son esprit s'affirmeront plus nettement. Il travaille à la Carte hypsométrique de la Belgique, publiée en 1866, et que suivra bientôt la Carte hypsométrique de l'Europe. « Les éléments de notre publication, écrit-il, ont été puisés dans les ouvrages de MM. d'Omalius d'Halloy, Dumont, Houzeau, Tarlier, Vander Maclen et dans les cartes allemandes. »

Pour la Belgique, en particulier, rien de semblable n'existait la carte, avec courbes de niveau, de notre

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