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une charge de signe contraire, du côté opposé, une charge de même signe. Vient-on à toucher du bout du doigt n'importe quel point du conducteur influencé, l'électricité de même signe, chassée le plus loin possible, s'écoule dans le sol, tandis que la charge de signe contraire se distribue sur la surface du conducteur, suivant une loi qui dépend de sa forme. La répulsion exercée par les éléments de la charge sur eux-mêmes les met dans un état de tension, qui les porterait à abandonner la surface du conducteur, si la résistance de l'air extérieur isolant n'entravait leur mouvement. Mais ils s'échappent quand même à la longue, et l'on observe une déperdition plus ou moins rapide, dont on peut analyser les causes. Le rôle et le pouvoir des pointes, les phénomènes observés dans le cylindre de Faraday, la fonction d'écran exercée par une enveloppe conductrice mise à la Terre, le fonctionnement des électroscopes, le jeu de l'électrophore et ses machines, etc., et d'autres exemples, que les souvenirs classiques du lecteur joindront à ceux que nous leur rappelons, montrent que la théorie des deux électricités permettait de grouper aisément les premières apparences observées, d'une manière très satisfaisante pour des esprits qui n'en demandaient pas davantage pour croire à la réalité de l'image adoptée, disons plus, d'une manière tellement suggestive, que nos esprits prévenus en subissent encore aujourd'hui le charme et l'obsession.

L'hypothèse faisait indiscutablement des deux électricités quelque chose de matériel: on y voyait des substances de même espèce, mais de qualités opposées, que l'on dotait de la faculté essentielle à leur nature, d'agir les unes sur les autres sans se toucher, comme si elles agissaient à distance (1); on s'y prenait avec les

(1) En métaphysique, la substance est le support des qualités par lesquelles les êtres arrivent à notre connaissance; on oppose la substance à l'accident, qui est sa manière d'être. L'esprit forme l'idée de substance par l'abstraction,

électricités comme avec les autres agents connus de la physique si l'on avait depuis longtemps renoncé aux atomes du son d'Epicure, on adhérait encore au concept des particules calorifiques et lumineuses. C'était dans la tradition, et l'on croyait fermement que cela correspondait à la réalité.

Restait à savoir quelle était cette substance, ne marquant pas sa présence à la balance, inépuisable, indestructible, à laquelle on imposait de pouvoir se glisser entre les intervalles moléculaires des métaux. les plus denses et les plus compacts. Il était indiqué de lui imposer une extrême ténuité. Descartes, qui ne connaissait sans doute de l'électricité que ce qu'en avait écrit Gilbert (1), faisait de l'électricité une materia fluidissima, dont les éléments versus omnes partes transire possunt. Soixante ans plus tard, Newton spécifiait la subtilité de la substance par les mots d'exhalatio tam rara tamque subtilis (2). A en croire Cournot, qui ne cite pas son auteur, « quelques» uns considéraient que les impondérables occupaient » dans la série des existences un rang intermédiaire » entre les corps et les esprits, pour parler, dit-il, le » langage de l'ontologie, entre les substances corpo> relles et les substances spirituelles » (3). Pour la plupart, l'électricité devint un gaz, ou une huile très volatile. Il semble que ce soit au Genevois Jallabert que nous devons le mot, moins précis et plus général, de fluide, qui est resté. L'abbé Nollet employait couramment le

en distinguant ce qui est permanent de ce qui est soumis à des changements. Leibniz avait défini la subs'ance: ens agendi vi præditum; la formule satisfaisait mieux les hommes de science que les philosophes; elle convient bien à l'électricité, qui est une forme de l'énergie.

(1) La De Magnete, magneticisque corporibus physiologia a été publiée à Londres, en 1600; dans son Histoire de l'Électricité, Priestley faisait de Gilbert le père de l'électricité.

(2) J'extrais ces renseignements du Dictionnaire de physique, du P. Aimé Paulian (Avignon, 1761).

(3) Cournot, Traité de l'enchaînement des idées.

mot vers 1740; Franklin en soulignait le sens en rappelant qu'il s'agissait d'une matière. Coulomb disait «<les fluides » en 1785, mais en se défendant « d'indiquer les véritables causes de l'électricité », et non sans laisser percer quelque incrédulité. Volta fait usage du mot, dès lors consacré, dans sa célèbre lettre au président de la Société Royale de Londres, du 20 mars 1800, dans laquelle il décrivait ses piles à colonne et à couronne de tasses. Ampère, de la Rive, Becquerel, Gaugain, Pouillet, etc., traitaient les fluides comme des réalités, mais en se gardant de trop insister. C'était sagesse de leur part. Il était en effet préférable de ne pas préciser ce qui pourrait rester celé derrière cette expression qu'on laissait flotter dans le vague, de délibéré. Un point se trouvait admis par tous, parce qu'il paraissait établi par l'expérience c'est que l'électricité, qu'elle fût positive ou négative, était une chose, constituant une grandeur sui generis, ayant son existence propre, réelle, individuelle, résidant en des points déterminés, présentant une continuité dans sa forme et une homogénéité dans sa substance, possédant d'ailleurs des propriétés spéciales et impliquant un concept précis de quantité, fondé sur ses actions extérieures.

propos

Nous allons montrer que, sur cette base hypothétique, s'était construite une théorie scientifique, qui donnait satisfaction aux esprits les plus exigeants et qui n'a rien perdu de sa haute valeur, sous réserve de l'interprétation qu'il faut lui donner.

La charge d'un corps, c'est la quantité qu'il possède. Cette quantité exerce des actions autour d'elle; les forces qui en émanent ont fait connaître l'électricité : nous n'avons pas d'autre moyen de savoir qu'elle est présente et combien il y en a. Le moyen suffit.

Coulomb réussit heureusement à mesurer ces actions. Une charge ponctuelle Q agit sur une autre Q', placée à

QQ' une distance r, avec une force qui est égale à k le

paramètre k dépendant du milieu interposé et aussi d'une convention arbitraire dont on dispose pour le choix de l'unité. Faisant k égal à un dans l'air, on fut conduit à prendre pour unité de quantité celle qui agit sur une quantité égale, placée à une distance d'un centimètre, avec une force égale à une dyne, la dyne étant l'unité de force dans le système C.G.S. (1) L'électricité se trouvait ainsi mesurée et jaugée avec une rigueur mathématique; cette mesure, indépendante de l'idée particulière qu'on se fait d'une masse d'électricité, doit être portée à l'actif de la théorie des fluides-substances, sous l'empire de laquelle elle a été adoptée.

Isolons une quantité Q. Elle crée autour d'elle un champ d'action, auquel on a donné le nom de champ électrique; des forces s'exercent dans cette région de l'espace conformément à la loi de Coulomb. La charge d'un corps est formée par le groupement d'un certain nombre de ces quantités Q, que nous symboliserons par le signe Q. Supposons quelque part dans leur champ, en un point P, l'unité de quantité; celle-ci sera soumise à la résultante des actions des quantités Q. La question s'était déjà posée à peu près dans les mêmes conditions à Laplace et à Gauss, en attraction newtonienne; elle les avait conduits à la considération d'une fonction V des coordonnées du point P, dont la valeur se calcule en faisant le quotient de chacune des charges élémentaires qui produisent le champ, par sa distance r au point P. Cette fonction, égale à Σ a reçu le nom

Q

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(1) L'unité de quantité, dont il s'agit ici, est l'unité électrostatique. Le Coulomb, mieux connu de quelques-uns de nos lecteurs, est l'unité de quantité du système électromagnétique pratique, égale au dixième de l'unité absolue du même système. Cette unité équivaut à 30 milliards d'unités électrostatiques. Nous prions de retenir ce nombre : 30.10.o, car nous le retrouverons.

:

de potentiel en P. On aboutit encore à la notion de potentiel en observant que le travail accompli dans le déplacement d'une quantité d'électricité d'un point du champ à un autre, sous l'action des forces centrales auxquelles elle est soumise, est indépendant du chemin suivi le travail de ces forces, pour le transport de l'unité de quantité entre ces deux points, est précisément égal à la variation du potentiel entre ces points. L'identité, ou du moins l'analogie profonde qui existe entre les phénomènes newtoniens et ceux de l'électrostatique (1), et le concept pour ainsi dire moléculaire de la quantité d'électricité ont fait bénéficier la théorie électrique de l'acquis d'une théorie mécanique solidement établie. Lord Kelvin est parti de là pour introduire la notion de l'énergie dans l'étude des phénomènes électriques.

Un instrument admirable de travail est né de ces rapprochements ingénieux qu'on me pardonne d'en tracer une rapide esquisse. Les lignes de force passant par les divers points d'un contour fermé, tracé sur une surface équipotentielle, forment dans l'espace la surface latérale d'un canal, auquel on a donné le nom de tube de force ou de tube d'induction, parce qu'on y canalise le flux de force, égal au produit de la section du tube par la force normale à l'équipotentielle. Un diagramme, dessinant ces surfaces, ces lignes et ces tubes peint aux yeux la constitution du champ. D'origine purement géométrique, cette épure permet d'expliquer et de prévoir ce qui se passe dans le champ; elle correspond du reste à une réalité, dont on peut s'assurer en explorant le champ par une aiguille aimantée. La loi de Coulomb s'appliquant aux masses magnétiques comme aux masses électriques, tous les artifices précédents s'appliquent aux champs magné

(1) La théorie newtonienne ne connaît que des attractions.

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