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CHAPITRE PREMIER.

MINISTÈRE DE M. DE MAUREPAS ET DE M. TURGOT.

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Louis XVI veut nommer M. de Machault ministre dirigeant. Mesdames tantes du roi font accorder la préférence à M. de Maurepas. Caractère de ce ministre. - Le roi fait remise à son peuple du droit de joyeux avénement.—Disgrâce du chancelier Maupeou, du duc d'Aiguillon, de M. de Boigne et de l'abbé Terray. Le peuple témoigne sa joie en pendant des mannequins représentant le chancelier et le contrôleur général. — Ministère de Turgot. Ses projets de réforme.-LamoignonMalesherbes succède au duc de La Vrillière dans le ministère de la maison du roi. — Rétablissement du parlement. — Malesherbes s'occupe de la liberté individuelle compromise par l'abus des lettres de cachet. Il établit une commission de magistrats chargée exclusivement d'en autoriser la délivrance. - Émeute au sujet du prix des blés. - M. de Saint-Germain ministre de la guerre. - Ses réformes. Il irrite l'armée en introduisant la punition des coups de plat de sabre. — Il est remplacé par le prince de Montbarrey. Maurepas devient jaloux de Turgot, et persuade à Louis XVI que les réformes proposées par ce ministre sont dangereuses pour la sûreté de l'État. Démission de Malesherbes. Renvoi de Turgot. Insurrection des colonies anglaises de l'Amérique contre la Grande-Bretagne. Elles proclament leur indépendance et réclament l'appui de la France. - L'opinion publique prend avec chaleur parti' pour elles.

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Louis XVI, jeune et sans expérience, sentit le besoin de se donner un conseil qui guidât ses pre

miers pas dans la carrière difficile où il débutait. La reine eût désiré que le choix se fixât sur le duc de Choiseul, à qui elle devait sa position. Mais le roi avait hérité de son père les préjugés les plus invincibles contre cet homme d'État. Il protesta que jamais pendant son règne le duc de Choiseul ne rentrerait aux affaires. Trois anciens ministres furent proposés : le cardinal de Bernis, M. de Machault et M. de Maurepas. On imputa au cardinal d'être trop dévoué à l'alliance autrichienne et ce motif lui donna l'exclusion. Les deux autres, renvoyés par Mme de Pompadour lors de l'attentat de Damiens, avaient accumulé sur leur tête un grand nombre d'années. Leur expérience et leur sagesse semblaient une garantie de la bonne direction qu'ils donneraient à l'administration. Le roi accorda d'abord la préférence à M. de Machault. Sa probité était connue; ses lumières, son caractère ferme et loyal promettaient un gouvernement décidé et vigilant. La lettre du roi qui l'appelait près de lui était écrite lorsque Mesdames, tantes de Louis XVI, qu'il avait consultées, objectèrent l'élévation de M. de Machault serait vue avec peine par le clergé, avec lequel il avait été en désaccord pendant son premier ministère. Elles insistèrent pour que M. de Maurepas obtînt la préférence. Le roi se rendit, et la lettre destinée à M. de Machault fut expédiée à son concurrent.

que

C'est ainsi que reparut un vieillard qui avait commencé sa carrière ministérielle en 1715. Il possédait des talents; mais son égoïsme et sa légèreté gâtaient ses bonnes qualités. « Son caractère facile, son esprit aimable et léger lui donnaient beaucoup d'amis; son penchant pour la raillerie lui avait attiré une longue disgrâce, qu'il supporta avec une insouciance qu'on prenait pour de la sagesse. Son âge lui faisait attribuer une expérience rassurante, et la frivolité, sous les cheveux blancs de sa vieillesse, se trouva ainsi, par un caprice du sort, chargée de diriger le vaisseau de l'État au milieu des écueils qui l'entouraient, et à l'approche de l'époque des tempêtes. » (Souvenirs de Ségur.)

Maurepas, habile à débrouiller les difficultés, savait près du roi en ôter les épines et lui rendre le travail facile. Aussi prit-il un prodigieux empire sur l'esprit du monarque. Mais il ne put perdre l'habitude, contractée de longue date, de résoudre les difficultés par un bon mot ou un sarcasme, et l'autorité perdait dans sa bouche l'accent de gravité qu'elle doit toujours conserver. Comme beaucoup de vieillards, il vivait au jour le jour, s'inquiétant seulement de conserver, sans trouble pour sa vieillesse, la puissance qu'il avait obtenue. Aussi les améliorations qui eussent conjuré l'orage dont l'État était menacé lui devenaient insupportables, parce qu'elles excitaient

les plaintes de ceux qu'elles froissaient, et causaient un murmure importun à ses oreilles. D'ailleurs, un ministre qui serait entré avec succès dans la voie des réformes aurait plu au bon sens du roi et satisfait son cœur. Ce ministre obtiendrait peut-être la confiance du maître au détriment de Maurepas. C'est ce qui ne se pouvait souffrir. Nous le verrons donc provoquer la disgrâce des ministres réformateurs, et mettre autant de soin à détruire leur ouvrage qu'ils en avaient employé à l'édifier. Il possédait cependant trop de perspicacité pour que les dangers de la monarchie ne frappassent pas ses yeux; mais la question n'est pas là; que le pouvoir reste l'ornement de ses cheveux blancs jusqu'à la dernière période de sa vie, voilà ce qui importe plus que le bien public, plus que le salut de l'État.

Louis XVI, à son avénement, avait montré son amour pour le peuple en remettant aux curés de Paris une somme de deux cent mille francs destinée au soulagement des pauvres, et en faisant remise du droit de joyeux. avénement. Dans l'édit qui annonce cette remise, le roi s'exprime de la manière suivante :

« Il est des dépenses nécessaires qu'il faut concilier avec la sûreté de nos États; il en est qui dérivent des libéralités peut-être susceptibles de modération, mais qui ont acquis des droits dans

l'ordre de la justice par une longue possession;, il est enfin des dépenses qui tiennent à notre personne et au faste de notre cour. Sur celles-là nous pourrons suivre plus promptement les mouvements de notre cœur, et nous nous occupons déjà de les réduire à des bornes convenables. De tels sacrifices ne nous coûteront rien dès qu'ils pourront tourner au soulagement de nos sujets; leur bonheur fera notre gloire, et le bien que nous pourrons leur faire sera la plus douce récompense de nos travaux. Voulant, etc. »

Le roi, en effet, était économe, simple dans ses goûts, ennemi du faste; il formait un parfait contraste avec son grand-père. Celui-ci aimait à jouer gros jeu; Louis XVI exigeait que l'on ne hasardât au sien qu'un petit écu à la fois.

Maurepas recherchait la popularité quand il la croyait compatible avec son pouvoir. La nation s'était montrée blessée de la destruction des cours de justice, et il forme le projet de les rétablir. Le propre des hommes légers est de s'arrêter à la surface des choses et de ne voir que le côté favorable d'une résolution sans apercevoir ses inconvénients; le vieux ministre, séduit par la pensée de rendre le roi et lui-même populaires, n'hésite pas à relever une opposition redoutable à la couronne quand elle voudrait faire le bien, redoutable au peuple quand on essayerait de combattre les priviléges..

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