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CHAPITRE VI.

SECOND MINISTÈRE DE NECKER. RÉUNION DES ÉTATS GÉNÉRAUX.

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Necker est nommé directeur général des finances. Joie publique. La confiance renaît. — Situation politique des diverses classes de la société française. - Le garde des sceaux Lamoignon est renvoyé et remplacé par M. de Barentin. - Le parlement, dont les séances avaient été suspendues, reçoit l'autorisation de se réunir.- Le peuple témoigne sa satisfaction par des violences mal réprimées. Le parlement enregistre l'édit de convocation des états généraux, mais en y ajoutant que ces états seront convoqués suivant la forme usitée en 1644. Cet arrêt fait perdre au parlement sa popularité. - Necker conçoit le projet d'établir en France une constitution semblable à celle de la Grande-Bretagne. - Multiplicité des pamphlets. - Écrits de Siéyès et du comte d'Entraigues. Seconde assemblée des notables. - Elle se prononce contre le doublement du tiers. Elle admet l'élection des curés à la chambre du clergé. Le parlement revient sur son précédent arrêt et rédige une nomenclature des. principes constitutifs qui devront être soumis à la délibération des états généraux. -Protestation remise au roi par les princes contre le doublement du tiers. Acte du gouvernement qui accorde au tiers état un nombre de députés égal à celui des deux autres ordres réunis. Fermentation dans toute la France. Coalition de la jeunesse de Rennes contre la noblesse réunie dans l'assemblée des états de Bretagne. Les gentilshommes cernés pendant trois jours dans leur chambre sont obligés de s'ouvrir un Insurrection à Besançon. — La passage l'épée à la main. ville de Versailles est désignée comme le lieu de la réunion des

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états généraux. - Ouverture des élections. Le corps électoral de Paris se déclare en permanence pendant toute la session des états généraux. - Agitation générale. -Intrigues des malveillants. Ils créent contre leurs adversaires la qualification d'aristocrates. - Mirabeau est nommé député. - Son discours contre les aristocrates. On conseille au roi de proclamer hautement les concessions qu'il veut faire à l'opinion publique. — Necker s'y oppose. — Insurrection au faubourg Saint-Antoine contre Réveillon. Sa manufacture est pillée. Conversation de Chamfort et de Marmontel sur les plans adoptés par les partisans d'une révolution.

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Loménie en quittant le ministère conseilla au roi de confier de nouveau les finances à M. Necker; le charlatanisme de cet homme avait fasciné la nation, on le signalait comme le seul qui pût relever le crédit et rétablir la fortune publique, mais on craignait de lui un refus; en effet ne voulant rentrer aux affaires que s'il y arrivait tout puissant, il convenait à ses intérêts de paraître peu empressé. Plusieurs personnes le sollicitèrent, la reine lui écrivit, il accepta enfin un pouvoir qui flattait son orgueil. Dans la première audience qu'il eut du roi, ce prince le traita avec une extrême bonté, il voulait lui faire oublier l'exil auquel il l'avait condamné l'année précédente. Cependant Louis XVI s'imposait Necker avec la plus grande répugnance, il acceptait malgré lui le ministre qu'on lui présentait comme indispensable 1.

J'ai su d'une personne présente qu'après avoir accordé le retour de ce ministre, il dit à sa famille réunie : « On m'a fait

La joie fut très-grande à Paris et dans une partie des provinces; on savait gré au roi de s'être débarrassé de Loménie. Malheureusement ce sentiment de gratitude fut refoulé dans les âmes quand on connut l'immensité des faveurs qui consolaient sa disgrâce; il ne resta que la satisfaction causée par le retour de Necker, et dès ce moment le directeur général des finances devint plus populaire que le roi.

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Ce retour ranima immédiatement la confiance des capitalistes, et les embarras dont l'État se trouvait accablé disparurent peu à peu. La tâche était difficile d'une part, un vide complet dans le tré-' sor, de l'autre, les calamités de la grêle et d'une mauvaise récolte qui donneraient lieu à des dépenses inattendues. Le ciel semblait prophétique: on eût dit que ses rigueurs extraordinaires présageaient les bouleversements qui devaient suivre. L'hiver de 88 à 89 fut le plus rude qu'on eût vu en France, et la misère devint extrême. Necker versa deux millions de sa fortune à la caisse de l'État pour en diminuer le vide; il trouva des ressources dans la confiance qu'il inspirait; quelques capitalistes firent des avances; les notaires fournirent six millions. Le directeur général, par les seules forces

rappeler Necker. Je ne le voulais pas; mais on ne sera pas longtemps à s'en repentir. Je ferai tout ce qu'il me dira, et on verra ce qu'il en résultera. » (Annales françaises de Sallier.)

que

lui donnaient ses talents et sa réputation, pourvut à tout, sans grever la nation de nouvelles charges.

Necker se montra à cette époque financier habile; mais chez lui, la science politique était loin de se trouver en rapport avec les talents administratifs. Loménie avait établi l'anarchie dans les idées, son successeur ne sut pas l'empêcher de se développer dans les actes; les circonstances eussent exigé un ministre d'un sens droit, ayant l'esprit aussi ferme qu'étendu. Necker était un homme spécial en finances, et il ne possédait que les qualités qui s'y rapportent.

Personne alors ne jugeait sainement la situation de la France.

Depuis le commencement du règne de Louis XVI, les ministres arrivés successivement au pouvoir avaient nourri la pensée de diminuer l'importance de la noblesse et des corps judiciaires, qui se traduisait souvent en une opposition gênante pour la couronne: ils comptaient y parvenir en augmentant la prépondérance de la bourgeoisie. Le premier résultat de ce système fut l'établissement des assemblées provinciales composées d'un nombre de membres du tiers état égal à celui des membres des deux ordres privilégiés. Nous avons remarqué précédemment que plusieurs parlements, mécontents de cette égalité, s'étaient opposés par ce mo

tif à la réunion des assemblées provinciales. Le roi partageait alors l'opinion de ses ministres; il avait été profondément blessé par la taquinerie des cours de justice et récemment par l'opposition véhémente de la noblesse de Bretagne et de plusieurs autres pays d'états, mais en même temps il était retenu par la crainte d'exciter les rumeurs de la partie la plus élevée de cette classe qui l'entourait. Trop faible pour se placer au-dessus de cette considération secondaire, au lieu d'ordonner lui-même les changements que son cœur souhaitait et que son jugement approuvait, il permit à Loménie de faire un appel à cette puissance formidable qui renverse tout ce qui s'oppose à son passage, à la puissance de l'opinion publique: jamais l'effet d'une mesure ne fut plus simultané. A peine l'édit qui appelle l'investigation des écrivains a-t-il paru, que les clubs se mettent à disserter sur la politique; d'autres réunions du même genre, mais plus animées encore, se forment. Les brochures et les pamphlets abondent, l'autorité royale y est souvent battue en brèche; on voit poindre le dogme de la souveraineté du peuple qui remplacera celui du respect qu'on avait accordé jusqu'à ce moment à l'autorité du roi.

Les nobles se méprenaient sur la nature des sacrifices que la classe moyenne voulait leur imposer; ils se montraient en général disposés à l'aban

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