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MBRE

ROYAL

(Samedi 20 juin 1818.)

(No. 403).

Discours prononcé aux obsèques de M". le prince
Condé; par M. l'abbé Frayssinous (1).

SEINE

Nous aurions à nous reprocher d'arriver un peu tard pour rendre compte de ce Discours, si déjà nous ne l'avions fait connoître en partie, et si nous n'en avions cité d'assez longs extraits. Nous ne nous regardons pas néanmoins comme quittes de notre tâche; et cet Eloge ayant été publié depuis, nous ne pouvons nous dispenser de le considérer encore. Le genre de l'oraison funèbre, un de ceux que comprend l'éloquence de la chaire, est peut-être celui qui a été le moins cultivé dans ces derniers temps. Les autres genres, qui appartiennent à la chaire, tels que le sermon, l'homélie, le prône, le panégyrique même, offrent encore de nos jours de bons modèles, tandis qu'on ne trouve guère à citer, de notre époque, que l'Oraison funèbre de Louis XVI (2), par M. l'évêque de Troyes. Il appartenoit à M. l'abbé Frayssinous, qui a enrichi l'éloquence de la chaire d'un genre inconnu parmi nous, de s'essayer encore dans celui-ci ; et un Prince, juste appréciateur des talens dans les diverses branches de littérature, a pensé, avec raison, que l'orateur qui s'étoit fait admirer dans ses cónfé

(1) Brochure in-8°.; prix, 75 cent. et 1 fr. franc de port. A Paris, chez Le Normant ; et chez Adrien Le Clère, au bureau du Journal.

port.

(2) Brochure in-8°. prix, 2 fr. et 2 fr. 50 c. franc de A Paris, chez Adrien Le Clere, au bureau du Journal. Tome XVI. L'Ami de la Religion et du Ror. M

rences par

la solidité du raisonnement et la pureté du goût, pouvoit se distinguer encore dans une autre sorte de composition. On peut regretter seulement que M. Frayssinous ait eu si peu de temps pour se préparer. Ces discours d'apparat sont peut-être ceux qui demandent un style plus travaillé, et plus d'art, de soin et de perfection. C'est-là que Bossuet semble avoir mis tout son génie, et Fléchier tout son talent. Il est vrai qu'ils avoient tout le loisir nécessaire pour donner le fini à leurs compositions. L'usage étoit qu'ils prononçâssent l'oraison funèbre, non pas immédiatement après la mort, mais à un service solennel qui se célébroit quelque temps après. Ainsi nous voyons que Fléchier ne prononça que le 10 janvier 1676, l'Oraison funèbre du maréchal de Turenue, tué le 27 juillet 1675. Bossuet ne fit l'Oraison funèbre du grand Condé, que le 10 mars 1687, et ce prince étoit mort le 11 décembre précédent. La reine d'An gleterre étoit morte le ro septembre 1669; son Eloge ne fut prononcé que le 16 novembre. Mme. Henriette, sa fille, mourut le 30 juin de l'année suivante; l'Oraison funèbre est du 21 août. On peut remarquer la même chose sur toutes ces sortes de discours, dans les volumes qui contiennent les Oraisons funèbres de Bossuet, de Fléchier, de Mascaron, de Massillon, etc. On croyoit alors ces hommages plus dignes des princes auxquels on les rendoit, en laissant aux orateurs tout le temps de soigner leur ouvrage. Nous n'osons cependant blâmer l'empressement qu'on a mis dans cette dernière circonstance à honorer la mémoire d'un prince vénérable. Cet empressement a aussi quelque chose de flatteur; et s'il a pu embarrasser l'orateur, il a pu aussi consoler sa noble famille et ses serviteurs fidèles.

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M. le prince de Condé mourut le 13 mai; le soir même, S. M. nomma M. l'abbé Frayssinous pour prononcer le Discours, au service qui devoit avoir lieu dix jours après. L'orateur craignit d'abord de rester au-dessous d'un tel sujet, et pria S. M. de le dispenser d'une tâche dont sa modestie lui exagéroit encore la difficulté. Mais le Monarque lui ayant fait exprimer, le lendemain, de la manière la plus flatteuse, le désir qu'il se chargeât de cette fonction honorable, M. l'abbé Frayssinous fit céder ses répugnances à l'envie de montrer son obéissance et sou zèle. Il ne laissa pas de donner sa conférence à Saint-Sulpice, le dimanche 17; de sorte qu'il n'eut guère qu'une semaine pour rassembler ses matériaux, dresser son plan, composer son Discours, l'écrire, en lier les parties entr'elles, retoucher le style, et enfin pour l'apprendre. Le service eut lieu le mardi 26. Nous avons fait connoître le texte de l'orateur. Dans la première partie, il célèbre les qualités naturelles du prince de Condé. C'est-là que se trouve cette peinture rapide de l'état de la France, quelques années avant la révolution :

« Alors, la France présentoit tous les dehors de la prospérité. Riche de sa population et de son industrie, brillante de tout l'éclat des sciences et des arts, forte de sa paix intérieure, tout sembloit annoncer pour elle un riant avenir. Toutefois les esprits sages et clairvoyans qui pénétroient le fond des choses n'étoient pas sans alarmes, et croyoient découvrir dans le présent de sinistres présages. Les connoissances et les richesses devenues plus communes amenoient dans les conditions diverses des rapprochemens, et une sorte d'égalité qui pouvoit aboutir à la confusion. Le goût des arts, des théâtres, des lectures frivoles et licencieuses, en deve

nant plus populaire, éveilloit dans les classes inférieures toutes les prétentions de la vauité, et sembluit te les polir que pour les corrompre. En même temps des doctrines hardies, en relâchant les liens de la religion et de la morale, relâchoient par cela même ceux de la subordination et des lois. Un bruit sourd d'impiété séditieuse se faisoit entendre, qui pouvoit tôt on tard ébranler le fondement même de la société. Ainsi, dans les contrées qui avoisinent les volcans, un sourd mugissement prélude quelquefois à une effrayante explosion. Tout est changé, les idées et le langage. La religion s'appelle fanatisme, la piété superstition, les traditions préjugés, l'autorité tyrannie, l'obéissance servitude; jamais, à aucune époque, on n'avoit enseigné plus hautement qu'il n'est pas de Dien, que la Providence n'est qu'un mot, la vie future une chimère, le vice et la vertu une invention humaine, la religion un amas de puérilités; ainsi, une génération a semé du vent, et la génération suivante a moissonné des tempêtes, pour parler avec le prophète Osée : Ventum seminaverunt, et turbinem metent. Il faut le dire pour notre commune instruction: Si nous avons tous été frappés, c'est que tops nous étions coupables. Oui, la cour, les puissans, les riches, les savans, les lettrés, le militaire, la magistrature, le sanctuaire même, tous les rangs de la société étoient, plus ou moins, tourmentés du désir des innovatious; et la révolution étoit faite, du moins en grande partie dans les esprits, avant que des circonstauces funestes la fissent éclater dans les choses ».

On aura pu remarquer, dans le premier extrait que nous donnâmes, avec quel art l'orateur a su louer le prince de Condé devant des guerriers qui avoient suivi d'autres drapeaux, et comment il a célébré les diverses espèces de courage et de gloire qui brillèrent à une époque désastreuse. Dans la seconde partie, M. l'abbé

Frayssinous montre son héros se jetant dans les bras de la religion:

«La religion, avec ses promesses immortelles, a de quoi plaire aux ames élevées qui repoussent comme une bassesse l'idée du néant, et sa grandeur même les dispose à croire à sa vérité. Déjà elle exerce tout son empire sur le prince de Condé, et c'est ici qu'il vient s'offrir à nos regards sous un aspect tout nouveau. Retiré de la dissipation et du tumulte des camps, il descend au fond de son cœur; if médite en silence les jours anciens et les années éternelles, comme parlent nos livres saints; son ame s'ouvre aisément aux impressions de cette religion sainte, dont le besoin se fait sentir après les grandes agitations à ceux-là même qui la repoussoient davantage, et qui seule, par l'immensité de ses espérances, peut remplir le vide immense de nos cœurs. On aime à voir ces guerriers terribles comme des lions dans les combats, se montrer doux et simples comme des agneaux au pied des autels; oui, la piété des héros a quelque chose de plus auguste et de plus touchant, -qui pénètre et ravit ceux qui en sont les témoins: celle de notre prince sera sincère; mais elle sera sans faste comme son courage. O Prince! vous vivez en paix, oćcupé de cette religion qui vous attire par l'élévation même de sa doctrine; vous goûtez, après tant de fațigues et de traverses, un repos honorable, au milieu des témoignages de cette tendre vénération qu'inspire toujours le héros malheureux; mais que vous êtes loin de pressentir le coup qui vous menace, et qui doit porter dans votre ame une désolation sans bornes! Que bientôt vous aurez besoin, plus que jamais, de toutes les consolations que la religion seule peut donner »>!

Plus loin, l'orateur retrace l'élévation et la chute du nouvel Attila, auquel il avoit été donné de châ

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