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L'ouvrage commence par une notice bibliographique sur les différentes éditions de ces Lettres. Cette notice, rédigée par M. de Monmerqué, suppose des recherches fort étendues. L'auteur a comparé toutes les éditions, a confronté les textes, et a fait un examen attentif des versions, des dates, et de toutes les circonstances qui peuvent jeter du jour sur ces Lettres. Il a eu communication des manuscrits de Bussy-Rabutin, et y a trouvé, et de nouvelles lettres, et de nombreux éclaircissemens pour les anciennes. Des amateurs lui ont fourni des lettres inédites, dispersées dans différens cabinets. Des recueils du temps, et des manuscrits peu connus lui ont été aussi fort utiles. Enfin tous ces secours l'ont mis en état de donner une édition où il y a beaucoup moins de lacunes, où l'ordre chronologique est bien suivi, où presque toutes les obscurités sont dissipées, où l'on trouve réunis les avantages qui manquoient aux éditions anciennes.

A cette notice en succède une autre sur Mme. de Sévigné, sa famille et ses amis. Elle est de M. de Saint-Sarin, qui paroît y avoir mis infiniment de soin ét d'exactitude. Etranger à tout esprit de parti, il juge Mme. de Sévigné par elle-même. Cette femme celèbre naquit, le 5 février 1627, et à ce que l'on croit, au château de Bourbilly, en Bourgogne. Elle étoit fille de Celse-Bénigne Rabutin de Chantal, et petitefille de Jeanne-Françoise Frémiot, baronne de Chantal, et fondatrice de l'ordre de la Visitation, morte en 1641, et canonisée par Clément XIII en 1767. Son père fut tué, au service, la même année 1627, et sa mère mourut en 1632. La jeune Marie de Rabutin-Chantal fut élevée dans la famille de Coulanges, qui étoit le nom de sa mère. Elle épousa, en

1644, le marquis de Sévigné, qui périt, en duel, en 1651, lui laissant un fils et une fille. La marquise, jeune encore, renonça à tout projet d'établissement, et se livra toute entière aux soins de ses enfans. Sa tendresse pour sa fille éclate dans ses lettres et anime toutes ses expressions. Elle mourut, à Grignan, le 18 avril 1696, après avoir été liée avec les personnages les plus célèbres de ce temps-là. Son esprit, son goût, sa grâce, ses saillies, faisoient le charme de sa conversation, comme ils font encore celui de sa correspondance.

La notice de M. de Saint-Surin suit Mme. de Sévigné dans les principales circonstances de sa vie; il n'omet rien de ce qui la concerne, et il me semble même avoir poussé jusqu'au luxe l'usage des notes et des citations. Ce morceau est écrit un peu à la manière du Dictionnaire historique de Bayle, où, comme on sait, le texte est souvent étouffé sous des notes fort longues. Quelques détails ont l'air un peu hors d'œuvre; mais au total il y a beaucoup de recherches et de critique, M. de Saint-Surin examine, par exemple, s'il est vrai, comme l'a rapporté Voltaire, qu'il soit échappé à Mme. de Sévigné de dire que Racine passeroit comme le café, et il remarque que ce propos, répété depuis long-temps, ne se trouve, ni dans ses Lettres, ni dans les contemporains. Il la justifie surtout contre les imputations de Grouvelle : nous avons traité ce point l'année dernière, et nous pourrions fortifier les preuves que nous donnâmes alors, par d'autres passages qui annoncent une femme croyant sincèrement à la religion. Elle est plus généralement soupçonnée d'avoir été attachée à un certain parti. Elle étoit liée avec la famille Arnauld;

elle aimoit les écrits de Port-Royal; elle avoit un oncle, Renaud de Sévigné, qui demeuroit dans cette maison, et qui y mourut. Cependant M. de SaintSurin croit qu'il seroit facile de détruire cette supposition par plusieurs passages, et il cite celui-ci : Je suis persuadée que nous avons notre liberté toute entière; que par conséquent nous sommes très-coupables, et méritons fort bien le feu et l'eau dont Dieu se sert quand il lui platt. Les Jésuites n'en disent pas encore assez, et les autres donnent sujet de murmurer contre la justice de Dieu, quand ils affoiblissent tant notre liberté. (Lettre du 28 août 1676).

M. de Saint-Surin a joint à cette notice des détails sur Bussy-Rabutin, et sur les autres personnes de la famille et de la société de Mme. de Sévigné. Mme, de Grignan, sa fille, mourut, le 13 août 1705, à cinquante-sept ans, dans la terre de Mazargues, près Marseille. Nous n'avons point ses lettres, que l'on croit avoir été anéanties en 1734. Grouvelle, qui saisit toujours l'occasion de ridiculiser la piété, et de nous vanter sa triste philosophie, prétend que Mme. de Grignan étoit philosophe, et que ses lettres furent sacrifiées pour cette raison. L'une et l'autre supposi

tions sont destituées de vraisemblance. Mme, de Griguan avoit, à ce qu'on dit, beaucoup de goût pour la philosophie de Descartes; mais il n'est plus permis aujourd'hui, surtout depuis la publication des Pensées de Descartes (1), par M. Emery, de révoquer en doute l'attachement de ce grand homme au christianisme. Quant au second point, est-il vraisemblable, dit M. de

(1) Un gros vol. in-8°.; prix, 7 fr. et 9 fr. franc de port. A Paris, chez Adrien Le Clere, au bureau du Journal.

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Saint-Surin, que toutes les lettres de Mine, de Grignan à sa mère aient été brûlées pour cette raison? Elles ne rouloient pas toujours, à beaucoup près, sur des points de controverse. N'est-il pas à présumer plutôt que les tracasseries de province, les chagrins domestiques dont Mme. de Grignan étoit réduite à s'entretenir, sont le véritable motif d'une suppression qui cause autant de surprise que de regret?

Le marquis de Sévigné, frère de Mme. de Grignan, avoit eu une jeunesse fort déréglée, comme on le voit par les lettres de sa mère. Il épousa, en 1684, une demoiselle de Bréhan, femme sérieuse, aimant la solitude, et dont le caractère sympathisoit peu avec celui de Mme. de Sévigné la mère. M. de Sévigné renonça, par complaisance pour elle, à vivre dans ses terres; il vint se fixer dans le faubourg Saint-Jacques, où il passoit ses jours dans la plus profonde retraite. Il y mourut dans l'obscurité, le 27 mars 1713, sans laisser d'enfans. M. de Saint-Surin n'a pas jugé à propos de nous dire tout ce qu'il savoit sur les dernières années du marquis. On nous a transmis, dit-il, des renseignemens que leur invraisemblance nous empêche d'insérer ici. Il semble pourtant constant que le marquis de Sévigné donna dans les pratiques d'un jansénisme outré, et que cela devint même assez semblable à de la folie. M. de Saint-Surin, en disant que la jeune marquise voulut étre dirigée par les ecclésiatiques lēs plus éclairés, dissimule aussi que ces directeurs qu'elle recherchoit étoient les jansenistes les plus décidés. J'avoue que je n'aurois vu aucun inconvénient à dire franchement ce qui en étoit.

Mme. de Sévigné, la belle-fille, vivoit encore en 1733, mais n'ayant aueun commerce avec les profanes;

c'est l'expression de Mme. de Coulanges. Corbinelli, dont il est si souvent question dans la correspondance, étoit mort en 1716. Ce fut aussi l'année de la mort de M. de Coulanges, cousin-germain de Mme. de Sévigné dont nous avons vu une Relation manuscrite des conclaves de 1689 et de 169z. Sa femme lui survécut jusqu'en 1725. Mme. de Simiane, fille de Mme. de Grignan, et la dernière dont les lettres figurent dans cette collection, mourut à Paris, le 2 juillet 1737. C'est par elle que l'on a commencé à connoître les lettres de Mme. de Sévigné à sa fille.

Après avoir parcouru la notice de M. de SaintSurin, nous arrivons aux Lettres. Les premières de ce recueil sont inédites. Elles sont adressées à Ménage, savant qui jouissoit d'une grande réputation dans ce temps-là. Les suivantes sont de la marquise et de son cousin Bussy. Une quinzaine de lettres sur Je procès de Fouquet, font honneur à la constance de Mme. de Sévigné en amitié. C'est dans une de ces lettres que l'on trouve une anecdote que nous rapporterons, parce qu'elle indique que Mme, de Sévigné ne partageoit pas toutes les idées de ses amis sur le formulaire. Il étoit beaucoup question alors de la signature de cette promesse. Les religieuses de Port-Royal de Paris l'avoient refusée. On les dispersa, et une fille d'Arnauld d'Andilly fut envoyée au couvent de la Visitation. Elle y signa le formulaire. Mais laissons parler Mme. de Sévigné : « Nos Sœurs de Sainte-Marie m'ont dit : Enfin, Dieu soit loué! Dieu a touché le cœur de cette pauvre enfant; elle s'est mise dans le chemin de l'obéissance et du salut. De là je vais à Port-Royal; j'y trouve un certain grand solitaire (Arnauld d'Andilly), que vous connoissez, qui com

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