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succès; Porphyre en fit plus tard une analyse, dont Eusèbe a conservé quelques fragments (1). Denys d'Alexandrie, élève de Chérémon, hérita de ses charges; de Néron à Trajan, il fut directeur des bibliothèques, préposé à la correspondance, aux ambassades et aux rescrits (2). Il faut citer encore ce Crispinus, cet ancien marchand de papier, qui devint un des favoris de Domitien. Juvénal (3) le traite de « vil enfant du peuple égyptien, esclave de Canope. » Il se moque de sa toilette recherchée, de ses parfums « qui suffiraient pour deux pompes funèbres,» de son goût pour la bonne chère; il flétrit ses passions coupables (4). Mais ce parvenu avait de vastes domaines et une belle demeure près du Forum, et il disposait si bien de l'oreille du maître, que Martial se courbe jusqu'à terre devant lui, lorsqu'il le prie de patroner ses vers (5). Sous Hadrien résidait à Rome un personnage considérable, qui exerçait à la fois les plus hautes fonctions sacerdotales de l'Egypte et la première charge que l'on put confier à un membre du corps savant de ce pays. C'était un certain L. Julius Vestinus, auquel une inscription donne les titres de souverain pontife d'Alexandrie et de l'Egypte tout entière, directeur du Musée, préfet des bibliothèques grecques et latines de la ville de Rome, précepteur et secrétaire de l'empereur (6). Ce haut dignitaire, comme l'indique son nom, était un Romain, qui n'avait que la présidence nominale des prêtres des bords du Nil, où peut-être il n'avait jamais paru. Mais personne ne pouvait mieux que lui protéger les ministres d'Isis et de Sérapis établis au milieu de ses concitoyens, et patroner les Alexandrins auprès de son puissant élève. Les marins et les officiers de la flotte qui apportait à date fixe les blés de l'Egypte formaient un élément important de la population mixte qui allait et venait entre Rome et Alexandrie. On retrouve leurs traces dans la capitale (7) et à Porto (8); leur chef est, sous Septime Sévère, un

(1) Bullet. de corr. hellen., 1877, p. 123 à 127.

(2) Egger, Mémoires d'hist. anc., p. 237.

(3) I, 26.

(4) IV, 1 à 33, 108, 109, et Schol., ad h. l. (5) VII, xcix. V. encore VIII, XLVIII.

(6) C. I. G., 5900. Inscript. de la Via Ostiense. V. Letronne, Inscr. gr. de l'Egypte, t. I, p. 278, 279 et 359. Une incription grecque de la collection de M. Péretié, à Beyrouth, mentionne encore un personnage dont le nom est inconnu et qui a exercé des fonctions semblables à celles de Vestinus. V. Bull. de corr. hellén., 1879, p. 257 à 239.

(7) C. 1. G., 5889 (Commode). (8) Ibid., 5973 (202 ap. J.-C.).

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Romain nommé C. Valerius Serenus, qui s'intitule « néocore de Sérapis. » Alexandrie fut aussi, sous l'Empire, le point de départ d'associations d'athlètes, instituées sur le modèle de celles de la Grèce, qui se transportaient de ville en ville. L'une d'elles a laissé un souvenir de son passage à Naples dans une inscription (1) où elle déclare être « toute dévouée à l'empereur et aux Romains. Elle était dirigée par T. Flavius Archibius, athlète que des victoires extraordinaires avaient illustré, Alexandrin comme ses compagnons, et grand prêtre à vie du xyste tout entier. Sous les Antonins, un collège du même genre s'établit à Rome, auprès des Thermes de Titus (2). C'étaient encore deux Alexandrins, M. Aurélius Démétrius et son fils Asclepiadès, qui en avaient la présidence; tous deux furent, l'un après l'autre, grands prêtres à vie du gymnase; le fils portait, en outre, le titre de « néocore du grand Sérapis (3). » Ainsi une communication incessante s'établissait entre les deux cités, grâce au mouyement qui poussait hors de leur patrie tous ces gens avides d'argent, d'honneurs et de réputation. Lorsqu'ils débarquaient sur la terre du Latium, ils apportaient avec eux le culte de ces dieux puissants dont les images les avaient suivis jusque sur le vaisseau qui les amenait (4).

Ce ne furent pas tout d'abord les plus hautes classes de la société romaine qui adoptèrent les divinités nouvelles ; les inscriptions et les textes classiques (5) nous montrent que les prêtres alexandrins trouvèrent leurs premiers adeptes parmi les affranchis et dans ce monde élégant, mais léger, où les Délie, les Cynthie, les Némésis et les Corinne donnaient le ton. Tandis que les citoyens, par amour-propre national, et les matrones par obéissance pour leurs maris, fermaient leurs maisons aux importations étrangères, le peuple et les femmes indépendantes ouvraient les leurs sans scrupule. Les affranchis étaient souvent en contact avec leurs anciens compagnons d'esclavage, dont beaucoup venaient de pays éloignés; de plus, ils représentaient le petit commerce, et, comme tels, ils avaient des rapports fréquents avec les marchands d'outre-mer. Si les belles maîtresses des poè

(1) C. I. G., 5804 (103-116 ap. J.-C.). V. encore 5807.

(2) Ibid., 5906 à 5913 (134-143 ap. J.-C.). Cf. 1427.

(3) Ibid., 5914.

(4) V. Annali dell' Instit. di corr. arch. di R., 1865, p. 323. Cf. C. I. L., III, 3 (104-114 ap. J.-C.).

(5) V. chapitre III.

tes à la mode accouraient vers les temples d'Isis, ce n'était pas parce qu'elles étaient plus superstitieuses et plus ignorantes que les graves épouses des Romains de vieille souche. Au contraire, c'était précisément parce qu'elles appartenaient à un monde de lettrés et de délicats, qui cherchaient en tout le nouveau et le raffiné. Elles poursuivaient l'originalité en matière de religion comme leurs amants en matière de poésie. Lorsqu'elles allaient s'enfermer pendant dix jours et dix nuits auprès des autels d'Isis, elles cédaient au même entraînement qui poussait Tibulle et Properce à imiter Callimaque et Philétas. Au plaisir intime de se sentir remuées par un culte qui frappait plus fortement les sens, se joignait pour elles la satisfaction d'entrer les premières dans une nouvelle voie de salut et de montrer le chemin aux âmes picuses. Délie et Tibulle étaient deux disciples d'Alexandrie dont chacun innovait à sa manière.

Bientôt les grandes dames elles-mêmes se laissèrent gagner et suivirent l'exemple qu'on leur donnait avec cet empressement que d'honnêtes femmes mettent quelquefois à imiter celles dont la vertu est d'un aloi plus douteux. Les poètes galants nous assurent qu'elles couraient de grands risques en obéissant à cette impulsion, et qu'elles pouvaient par là prêter à des comparaisons fâcheuses. Mais ce sont propos de débauchés, auxquels les pratiques religieuses paraissaient toujours une affectation, une arme de plus offerte à la coquetterie. Ces plaisanteries traditionnelles sur les belles initiées qui fréquentaient les temples des divinités mystérieuses remontaient au temps d'Aristophane; aucune n'échappait au soupçon; car les anciens éprouvaient toujours quelque inquiétude lorsqu'ils voyaient les femmes dérober au soin du ménage de longues heures, qu'elles passaient loin de toute surveillance, à contempler des scènes mythologiques, qui, ainsi que le remarque Ovide, n'avaient rien d'édifiant. De là un sentiment de défiance contre les prêtres qui les attiraient. Il était si général que les adeptes des différents cultes l'inspiraient tous également et l'éprouvaient à l'égard les uns des autres. Le christianisme même subissait la loi commune; c'est ce que prouve de reste l'insistance avec laquelle Tertullien recommande aux premières filles de l'Eglise d'observer dans leur toilette et dans leur tenue une modestie qui enlève tout prétexte à la calomnie. Il ne faut donc pas prendre au pied de la lettre les accusations des écrivains classiques. Elles n'étaient souvent que des représailles d'amoureux, que les exigences de la loi isiaque avaient privés pendant quelques jours de leurs compagnes. Cette rancune ne les

empêchait pas d'ailleurs de ressentir eux-mêmes une certaine crainte superstitieuse pour ces divinités qui tenaient une si grande place dans le cœur des femmes. Tibulle ne croit pas beaucoup à l'efficacité des pratiques auxquelles se livre Délie. Un jour qu'il se trouve arrêté à Corcyre par la maladie (1), il dit dédaigneusement, en s'adressant à elle : ton Isis. Mais ensuite, quand il réfléchit qu'il est seul et près de s'éteindre loin des siens, il se prend à invoquer Isis à son tour, et il lui promet que, si elle le tire de ce danger, Délie ira s'asseoir deux fois par jour dans son temple. Le sceptique s'est ravisé en présence de la mort, et c'est lui cette fois qui se porte garant de la ferveur de sa maîtresse, quoique, en homme qui se connaît, il ne s'engage pas à l'imi

ter.

Grâce à cette connivence tacite de beaucoup d'amants et d'époux, le culte alexandrin put se procurer non seulement l'appui moral, mais encore les ressources matérielles qui lui étaient nécessaires pour vivre. On vit ses prêtres en habits religieux, et le sistre à la à la main, parcourir les rues de Rome en s'arrêtant de porte en porte pour demander l'aumône; personne, nous dit Ovide, n'osait les repousser (2). Les isiaques les plus dévots déposaient entre leurs mains des dons volontaires, dont la valeur, comme l'attestent les inscriptions, était quelquefois considérable. Puis il y avait des droits d'initiation, qui leur rapportaient des sommes assez rondes; aussi avaient-ils bien soin de presser les néophytes qui auraient été tentés de s'en tenir à une première épreuve, et de les engager à échanger contre un peu d'or un degré supérieur de sainteté. Lorsque Lucius arrive dans l'Isium du Champ de Mars, il apprend avec surprise qu'un des prêtres a reçu d'Osiris, pendant son sommeil, l'ordre de présider à l'initiation du jeune étranger et l'assurance d'être grassement récompensé de ses services. Cette nouvelle ne laisse pas que d'être assez désagréable à Lucius; mais il fait bonne contenance et vend ses hardes. Il arrivait aussi quelquefois que l'initié, comme témoignage de reconnaissance, laissait, en partant, une certaine somme au temple et aux prêtres qui l'avaient consacré (3). C'étaient là des sourcés de revenus assez fécondes pour que le culte alexandrin put subsister au milieu de Rome, tant qu'il ne fut pas reconnu par les empereurs. Enfin, il vint un jour où ceux-ci lui firent con

(1) I, 11, 26.

(2) Ovid., Pont., I, 1, 37. Val. Max., VII, 3, 8. (3) V. Apul., Métam., XI, passim.

struire des édifices magnifiques, et où Isis et Sérapis n'eurent plus rien à envier aux dieux du Latium.

Ce fut sans doute alors, après avoir emporté la capitale, qu'ils continuèrent leur marche vers l'Occident. Ils se glissèrent au milieu des armées et pénétrèrent vers le Septentrion jusqu'aux extrêmes limites du monde ancien. Au commencement du troisième siècle, un officier supérieur, qui commandait à Rome le camp des Pérégrins, adresse un hommage public à Isis Reine (1). Il n'est guère de province de l'Empire, où les légionnaires n'aient suivi l'exemple que leurs chefs leur donnaient. Laissons de côté celles qui étaient, comme la Numidie et l'Espagne (2), plus voisines des pays grecs, et, partant, d'une conquête plus facile. Isis, Sérapis, Harpocrate, Anubis, portés par les vaisseaux marchands et par les troupes romaines, abordent sur les côtes de Provence et franchissent les Alpes. On leur élève des autels à Fréjus (3), à Nîmes (4), à Manduel (Gard) (5), à Boulogne (Haute-Garonne) (6), à Arles (7), à Riez (Basses-Alpes) (8), à La Bâtie Mont-Saléon (Hautes-Alpes) (9), à Parizet (Isère) (10), à Lyon (11), à Besançon (12), à Langres (13), à Soissons (14). Le sistre, insigne de leur culte, figure sur des autels funéraires de la Lorraine (15). Des statuettes d'importation égyptienne, qui appartenaient sans doute à des Gallo-Romains, adorateurs de ces mêmes divinités, ont été trouvées à Clermont-Ferrand (16), à Nuits (Côte-d'Or) (17), et jusqu'en

(1) C. I. L., VI, 354 et 3692.

(2) Pour l'Afrique, v. les index du C. 1. L., VIII, Mém. de la Soc. des ant de Fr., III sér., t. VI (p. 40 du Bullet. de 1860), et: 4° trim. de 1881, Héron de Villefosse, Inscriptions d'Afrique en l'honneur de Sarapis. Pour l'Espagne, v. C. I. L., II. Index.

(3) Orelli, 2312.

(4) Orelli, 2307. Gruter, LXXXIV, 1.

(5) Gruter, XLII, 1. Allmer, Revue épigraph, du midi de la France, 1880, n° 9, inser. no 167.

(6) Orelli, 5856. Mém. de la Soc. des antiq. de Fr., t. II (1820), pag. 76.

(7) Orelli, 5835. Bullet. monumental, 1875, p. 741; 1876, pag. 750.

(8) Inscr. citée en dernier lieu par Desjardins, Table de Peutinger, p. 64, col. 1.

(9) Bullet. épigr. de la Gaule, 1882, p. 148, et pl. xi.

(10) Orelli, 1775. Allmer, Inscript. de Vienne, t. III, p. 466.

(11) Reines., CCLXXXIX.

(12) Orelli, 2313.

(13) Gruter, LXXXIV, 5.

(14) Orelli, 1877. Bullet. de la Soc. des antiq. de Fr., 1870, p. 147 (t. XXXII,

4 sér., t. II). Charles Robert, Epigraphie gallo-romaine de la Moselle, p. 29.

(15) Montfaucon, Ant. Expl. Suppl., t. V, pl. xxxv, 1, et xli, 6.

(16) Mélanges d'arch. égypt. et assyr., t. III, p. 65.

(17) Rev. archéol., 1865, p. 72.

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