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Les plus zélés partisans de la réformation de Luther, ne peuvent eux-mêmes s'empêcher d'avouer que depuis le débordement des peuples du nord sur l'empire romain, aucun événement n'avait provoqué en Europe des ravages aussi longs et aussi universels que la guerre allumée au foyer de la réforme, et ils conviennent que sous ce rapport elle a momentanément fait rétrograder le règne de la lumière et la culture des sciences. « Mais, ajoutent ils, après l'incendie on a retrouvé les bienfaits solides dont on lui était redevable, dans la meilleure direction, dans la nouvelle activité, dans

possesseurs d'un sol défriché de leurs propres mains, dépouillés du fruit de leurs travaux, violemment chassés de leurs demeures, et obligés de solliciter de la commisération publique le pain qu'ils distribuaient généreusement jadis à l'indigence et au malheur. Rien ne parut désormais sacré et inviolable, lorsque les dernières volontés des fondateurs d'établissemens charitables et religieux, venaient d'être si indignement foulées aux pieds. L'exemple donné à cet égard par la royauté fut suivi d'une multitude d'autres usurpations et de désordres de toute espèce, car toutes les iniquités semblent se tenir par la main. Or, l'im-la liberté qu'elle avait données à l'esprit moralité qu'excitaient naturellement de tels spectacles, ne pouvait être réprimée par la nouvelle doctrine religieuse. Dégagés du frein salutaire que le culte catholique opposait à la fougue des sens et à l'égarement de la raison, le plus grand nombre des déserteurs du catholicisme se consacrèrent à la recherche des jouissances et des richesses matérielles, et se rapprochèrent des doctrines philosophiques qui favorisaient davantage leurs penchans sensuels; d'autres donnèrent une libre carrière à leur goût pour les nouveautés religieuses. Nul d'entre eux ne pouvait reposer sa foi dans une croyance quelconque; car, s'ils avaient cessé de trouver la vérité dans le catholicisme, comment l'apercevoir dans cette multitude de sectes rapidement sorties de la réforme, qui différaient si essentiellement les unes des autres, et que le temps devait multiplier à ce point que chaque individu deviendrait l'arbitre de sa foi comme de sa conduite privée ?

humain, dans les obstacles immenses dont elle avait déblayé ses voies et qui entravaient si invinciblement sa marche (1); » aussi n'hésitent-ils pas à attribuer à la réformation le perfectionnement, si ce n'est la création, de presque toutes les sciences. On lui doit les progrès de la navigation, de la géographie, de l'agriculture, du commerce et de l'industrie manufacturière : elle a fait renaître la philosophie; elle a fondé l'économie politique, la philosophie de l'histoire, la statistique; enfin, c'est à elle que nous sommes redevables en quelque sorte du degré de civilisation où nous sommes parvenus.

si

Il est assez naturel que les protestans et les apologistes de la réforme aient cherché et cherchent encore à la justifier des calamités sans nombre dont elle fut suivie, par l'image et l'énumération pompeuse des améliorations de tout genre dont l'Europe jouit aujourd'hui. Mais il faut ne pas oublier que trois siècles se sont écoulés depuis l'apparition de Luther, et qu'à cette époque, voisine de la renaissance, la civilisation était déjà fort avancée, grâces au catholicisme. On peut donc regarder les progrès obtenus dans ce long intervalle comme le produit nécessaire de l'action du temps et des lumières, comme le développement naturel des principes sur lesquels le génie civilisateur du catholicisme avait désormais fondé l'état social Si quelque chose même doit nous sur

Aussi, lorsqu'on réfléchit mûrement et sans préjugés aux causes et aux résultats de la réforme, et que l'on se demande quel bien moral ou matériel cette révolution a réellement produit pour la société humaine, il est difficile de se contenter des apologies plus ou moins éloquentes dont elle a été l'objet. Il n'est, en effet, aucun des bienfaits qu'on lui attribue directement ou indirectement, que l'on n'eût obtenu plus complet et plus efficace de la marche parallèle et progressive du catholicisme et des lumières; et quant aux maux qu'on lui impute, il lui est impossible de les nier.ther, par Charles Villers.

(1) Essai sur l'influence de la Réformation de Lu

naissaient guère que l'extrême liberté ou l'extrême servitude, étaient dès longtemps dans le droit public de quelques états catholiques. Le catholicisme avait appris aux hommes à user de la puissance et de la liberté, l'esprit de douceur et de modération du christianisme avait aussi passé dans le droit civil; sous Constantin déjà cette maxime : L'Église a horreur du sang, était devenue la règle du sacerdoce, et contribua puissamment à adoucir la rigueur barbare des lois pénales; le rachat du fils de l'homme par le Fils de Dieu avait donné aux chrétiens et particulièrement au clergé un singulier respect pour la vie des hommes; la sublime théorie du repentir, si admirablement développée dans l'Evangile, devait d'ailleurs leur faire regarder les supplices et surtout les supplices irrépa

prendre, c'est la lenteur avec laquelle | les progrès scientifiques et sociaux se sont manifestés à partir de l'époque célèbre où des découvertes admirables, les lumières exilées de l'empire d'Orient (que le catholicisme avait su accueillir et féconder), et enfin les plus magnifiques produits du génie des arts semblèrent se réunir à la fois pour imprimer un mouvement immense et rapide au char de la civilisation européenne. La renaissance, illustration éternelle des règnes de Léon X et de François Ier, était la préface naturelle d'une grande rénovation intellectuelle et sociale. Epoque de loisir, de paix, de science et de philosophie, la renaissance ne pouvait manquer d'exciter toutes les intelligences vers la recherche du vrai, du beau et de l'utile ; et sans doute elles eussent amené, par la toute-puissance de la rai-rables comme une espèce d'atteinte aux son et des lumières guidées par la religion, la suppression des abus qui pouvaient ternir l'éclat et l'utilité des institutions catholiques.

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droits de celui qui avait dit : Mihi vindicta. Aussi la peine de mort était-elle envisagée avec un deuil douloureux et profond par l'Eglise catholique. Le concile de Sardique avait même fait une loi aux évêques d'interposer leur médiation dans les sentences d'exil et de bannisse

ment.

Robertson, écrivain protestant si distingué, et dont le témoignage ne saurait être suspect, reconnaît que c'est au clergé catholique que l'on doit d'avoir adouci une législation barbare, et nationalisé peu à peu, chez les peuples et les législateurs, les idées d'ordre, de droits et de devoirs, régularisé les pro

Grâces au catholicisme l'économie sociale se trouvait enfin renouvelée dans sa base la plus importante ; ce n'était plus le vieil univers et la science antique avec l'esclavage, mais la société nouvelle et la science moderne fondées sur la liberté et la charité. Tous les principes étaient posés, toutes les vérités scientifiques, morales et sociales, manifestées ou entrevues; il ne s'agissait plus que de laisser croître et développer ces germes précieux. Bien avant l'époque où le nom de Lu-cédures et l'action de la justice (1); seuther commença à percer l'obscurité d'un lement il accorde trop de part, dans cloître, le catholicisme avait établi une cette bienfaisante réformation, aux traespèce de fraternité entre toutes les lé-ditions de la jurisprudence romaine qui, gislations et fait participer en quelque sorte la justice humaine à son universalité. Au dessus des nations civilisées siégeait déjà une espèce de tribunal invisible et suprême où le droit des gens rendait des oracles entendus de toute la terre; non seulement le catholicisme avait créé un nouveau droit des gens, mais il avait perfectionné aussi le droit public; le pouvoir avait plié sous le joug de l'Évangile. Les gouvernemens modérés, mé-grands principes de l'équité. Guidés par des règles lange heureux d'élémens divers, fruits d'une civilisation avancée et à peine soupçonnée par les anciens, qui ne con

(1) « « Le peu de lumières qui servirent à guider les hommes dans le moyen âge était en dépôt chez les ecclésiastiques. Eux seuls étaient accoutumés à lire, à raisonner, à réfléchir, à faire des recherches. Ils possédaient seuls les restes de la jurisprudence ancienne qui s'étaient conservés, soit par la tradition, soit dans les livres échappés aux ravages des barbares. Ce fut par les maximes de cet ancien système qu'ils formèrent un code de lois conforme aux

constantes et connues, ils fixèrent les formes de leurs tribunaux et mirent dans leurs jugemens de l'accord et de l'unité. >> Introduction à l'histoire de Charles-Quint.

En politique, nous venous de le dire, le gouvernement représentatif était parfaitement connu; on le voit apparaître en France dès les premiers temps de la monarchie, et il était établi en Angleterre depuis le règne du grand Alfred. Des institutions fondées sur la liberté et sur la démocratie, florissaient au milieu des états catholiques; toutes les formes de gouvernement étaient admises et pouvaient s'offrir à l'observation scientifique.

sans le clergé catholique cependant, | Léon X, ne purent reprendre leur dén'aurait plus été en harmonie avec les veloppement progressif qu'au moment besoins d'une société chrétienne. où l'Europe vit s'apaiser le long et ter rible ébranlement occasioné par la réforme protestante. Alors le mouvement intellectuel imprimé par les grands événemens de la fin du quatorzième siècle reprit un cours animé et plus régulier. L'esprit d'examen, fruit des études philosophiques, et développé par la crise même de la réforme, s'appliqua successivement à tous les objets du domaine des sens et de la pensée; mais cet avantage ne saurait être exclusivement attribué à l'esprit du protestantisme. Qui oserait mesurer ce que trois siècles de paix et de science auraient pu produire d'excellent et de beau sous l'empire unique du catholicisme?

De nombreuses universités, des colléges, des écoles, des bibliothèques, préparaient d'immenses moyens d'enseignement, et aidaient partout à la propagation des lumières.

La Hollande, l'Angleterre, les villes anséatiques, les républiques et les villes libres de l'Italie, avaient vu dès longtemps prospérer la navigation, le commerce, l'industrie et toutes les sciences qui en dérivent; l'agriculture était partout spécialement protégée par l'esprit catholique. Long-temps avant l'apparition de Luther, on s'était occupé en Allemagne des sciences d'état, et l'on peut faire remonter la caméralistique, ou l'art d'administrer les revenus nationaux, à ces chambres administratives dont la première fut fondée par Maximilien Ier, en 1498. La statistique est clairement indiquée dès l'an 1420, dans l'exposé administratif présenté au sénat de Venise par le doge Mocenigo. La philosophie de l'histoire est née dans l'Italie catholique, et ce sont aussi deux états catholiques, l'Italie et la France, qui ont produit les premiers écrivains d'économie politique.

La réforme, il faut donc le reconnaître, est étrangère à la création de ces diverses sciences, et l'on peut même à bon droit imputer les obstacles opposés à leur libre essor, comme à celui des lettres et des beaux-arts, aux guerres fatales dont elle fut la cause ou le prétexte, et à cette fureur de disputes théologiques qui gagna tous les esprits, et détourna pendant plus d'un siècle l'attention du monde savant. Les sciences, écloses déjà aux rayons du siècle de

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A la vérité, la science de l'industrie, le commerce et la navigation, ont été cultivées avec plus de soins et plus de succès dans quelques états protestans que dans le reste de l'Europe; mais il faut remarquer que déjà ces mêmes contrées se trouvaient plus avancées, sous ce rapport, dans le moyen âge, et par conséquent antérieurement à la réforme. La cause de leur supériorité, indiquée déjà par une position maritime avantageuse, se trouve encore dans la nécessité qui stimule plus puissamment le travail et l'industrie, sous des climats rigoureux, sur des sols peu fertiles, et dans l'isolement résultant d'une situation insulaire, que dans les pays plus favorisés du ciel, où les besoins sont à la fois plus faciles à satisfaire et moins nombreux.

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Ce n'est donc pas sans quelque raison que nous nous sommes déjà demandé quel bien moral ou matériel la réforme avait produit en faveur de l'univers social. Nous opposerait-on les grands hommes, les hommes de génie qui sont nés dans la religion protestante? mais ces belles et nobles intelligences n'eussentelles donc pu naître et grandir qu'à la lumière du protestantisme, et le catholicisme ne pourrait-il, à son tour, citer des noms non moins illustres et vénérés? Nous n'élèverons pas, à cet égard, une rivalité puérile et vaine; à nos yeux, tous les éclairs échappés au génie, tous les efforts entrepris pour le bonheur et

l'amélioration morale de l'humanité, | séparant de croyances et d'intérêts les

appartiennent plus ou moins directement à l'esprit du christianisme universel, c'est à-dire du catholicisme, et c'est en son nom que nous aimons à les revendiquer. Disons seulement que si, dans les beaux-arts, le catholicisme a toujours su inspirer plus heureusement le génie, il a également indiqué aux sciences morales une voie plus directe et plus sûre, et un but plus conforme à la dignité de l'homme et à sa destinée religieuse.

Mais si l'on n'aperçoit réellement pas le bien moral et matériel qu'a pu produire directement et essentiellement la réforme protestante, il ne serait que trop facile d'indiquer et de dévoiler les maux qui en sont résultés pour la grande société chrétienne. Et d'abord il faut constater un dommage immense et peut-être malheureusement, hélas! ir. réparable. C'est la perte de l'unité dans la foi religieuse (1), c'est la division qui,

un

(1) Nous regardons cette division comme mal irréparable, et il faut malheureusement le considérer ainsi, à moins que les protestans de toutes les communions diverses ne revinssent aux dogmes du Catholicisme, ce que l'on n'ose espérer. Nous croyons devoir faire connaître sur cette question si importante, quelques considérations pleines de raison et de vérité, extraites d'un excellent recueil, les Annales de la Philosophie chrétienne.

« Quelques personnes ont pensé que les catholiques et les protestans pourraient s'unir dans la même foi en se faisant des concessions mutuelles, les uns en sacrifiant, les autres en admettant quelques dogmes. Pour concevoir de semblables espérances, il faut également ignorer la nature de la foi et la constitution même du catholicisme et du protestantisme.

« Nous croyons un dogme lorsque nous sommes intérieurement certains qu'il fait partie de la révélation, ou qu'il nous est proposé par une autorité infaillible. Ainsi proposer aux catholiques des sacrifices de dogmes par amour de la paix, c'est leur dire de ne pas croire une chose qu'ils savent avec certitude faire partie de la révélation; et conseiller aux protestans d'adopter des dogmes par amour de la paix, c'est leur proposer de dire qu'ils sont intérieurement certains de ce qui leur a paru toujours incertain ou même faux: en d'autres termes, c'est vouloir opérer l'unité de la foi en proposant le sacrilége aux uns et le mensonge aux autres.

<< Cependant l'unité de la foi est commandée autant par la religion que par la nécessité et l'utilité. Dieu veut que les chrétiens n'aient qu'une foi. Aussi les liturgies protestantes même énumèrent-elles l'unité de la foi parmi les biens pour lesquels on doit

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divers états de l'Europe, a réduit aux étroites proportions de la nationalité les grandes questions de la société européenne, et a détruit en quelque sorte, non seulement la fraternité des nations,

implorer Dieu, et une de ces liturgies lui demande expressément la réunion si long-temps désirée de toutes les églises.

<< Or le rétablissement de l'unité de la foi parmi les chrétiens et leur réunion dans une même Église sont deux choses inséparables.

<< Si tous les protestans se faisaient catholiques, il est évident que dès lors il n'y aurait plus qu'une seule Église et une seule foi, puisque tous les catholiques ayant et ne pouvant avoir que la même foi, ceux qui se feraient catholiques partageraient cette même foi avec ceux qui le sont déjà. Ainsi le but que nous cherchons serait obtenu.

<< Supposons, au contraire, que tous les catholiques se fissent protestans; arriverons-nous également à l'unité de l'Eglise et de la foi? On est forcé de convenir que non ; car on ne peut dire que tous les protestans, comme on le peut dire de tous les catholiques, ne forment entre eux qu'une seule église et n'ont qu'une seule foi. Par exemple, que tous les catholiques en Angleterre se fassent protestans, il n'y aura pas moins une foule de croyances et d'églises ou de sectes différentes, et l'unité de la foi, loin d'y gagner y perdra, au contraire, puisque les catholiques qui avaient tous la même foi avant leur conversion au protestantisme, formeront après plusieurs sectes nouvelles, comme l'ont fait ceux qui étaient protestans avant eux.

« Il en serait de même dans les autres pays protestans. Or, il faut bien observer que si l'unité n'existe pas parmi les protestans, ce n'est pas uniquement parce que dès le commencement de la séparation il s'est formé plusieurs églises protestantes, mais surtout parce que le protestantisme, de sa nature, tend à les augmenter continuellement, de telle sorte que si une église ne peut raisonnablement se composer que d'hommes qui ont la même foi, il devrait y avoir dans le monde protestant autant d'églises qu'il y a d'individus pensans. Cependant la division dans la croyance précède quelquefois de long-temps la séparation extérieure. Ainsi nous voyons aujourd'hui en Allemagne tous les protestans qui pensent divisés en deux partis (sans compter les subdivisions), les Surnaturalistes et les Rationalistes les premiers admettent les seconds rejettent, la Trinité, la divinité de Jésus-Christ, le péché originel, le sacrifice expiatoire, la résurrection de la chair, etc., et cependant les uns et les autres vivent extérieurement dans la même église et suivent le même culte... >>

(L'auteur de l'article dont nous donnons un simple extrait est M. Georges Esslinger, aumônier protestant du premier régiment suisse de la garde royale, devenu catholique en 1831.)

mais celle des habitans d'un même royaume, et celle des membres de la même famille.

Un second reproche auquel nous nous bornerons, parce qu'il rentre dans le cercle de notre examen, et que nous ne devons pas trop dépasser les limites qui nous sont prescrites, est celui d'avoir arrêté la fusion des intérêts respectifs des peuples, et affaibli les considérations morales qui devaient, suivant les principes du catholicisme, présider à la production, à la jouissance et à la répartition des richesses.

foncière, le protestantisme, par une réaction rétrograde, fit naître les entrepreneurs ou spéculateurs d'industrie, lesquels, devenus dispensateurs du tra. vail manufacturier, et faisant reposer leurs bénéfices sur le bas prix des salaires, sur un travail excessif et sur le monopole et la concentration des capitaux, replacèrent graduellement les classes ouvrières sous l'empire de la servitude et du vasselage féodal dont le catholicisme les avait délivrées. Ainsi, dans les états protestans et chez les nations qui adoptèrent plus tard ces doctrines économiques, des populations entières devaient retomber sous un joug en quelque sorte despotique, mais sans avoir, comme jadis, pour remède à leur misère la protection du clergé et l'immense ressource des établissemens charitables et religieux.

Si l'on n'a pas perdu de vue les rapports étroits qui ne cessent d'unir l'ordre matériel à l'ordre moral, on comprendra facilement la sorte de confusion et d'incertitude que l'esprit de la réforme devait répandre sur les notions théoriques de la science de l'utile, telles que le catholicisme les avait enseignées et appliquées jusqu'alors. Ainsi que la re

En effet, en habituant les peuples au spectacle de la violation de la propriété, et en faisant naître le doute philosophique sur les croyances religieuses, la réforme amenait inévitablement aussi le doute sur la nécessité de la morale pratique, c'est-à-dire de la probité, de la charité et du désintéressement. En enlevant à la propriété territoriale la sécurité qui seule peut la faire prospérer, elle affaiblissait l'attachement des peuples pour l'agriculture et pour les diverses branches d'industrie qui en dérivent; elle faisait abandonner les richesses naturelles pour des richesses artificielles, et préparait cet esprit d'industrialisme manufacturier qui devait abou-ligion et la morale elles-mêmes, les antir à l'esclavage des classes ouvrières. La réforme encore, en dépouillant les pauvres et les infirmes de leurs protecteurs naturels et des asiles élevés en leur faveur par de longs siècles catholiques, substituait à la charité chrétienne une fausse et aride philantropie. Enfin, en supprimant le célibat des prêtres et des ordres monastiques, et en proclamant comme le plus grand des biens l'abondance de la population, elle rendait au principe énergique de la population un développement rapide et excessif que, dans une haute prévoyance sociale, le catholicisme s'était attaché à contenir et à modérer. Aussi, tandis que le catholicisme avait marché constamment d'un pas prudent, mais ferme, à la conquête de la civilisation, par l'af franchissement des peuples, par l'émancipation graduelle des esclaves et des serfs, au moyen du développement de la propriété agricole et d'une participation plus ou moins directe à la propriété

ciennes traditions d'économie publique conservées par le christianisme, furent à leur tour l'objet de l'examen philosophique et du doute. Après la réforme, l'esprit humain se trouva lancé tout-àcoup et sans guide dans des régions inconnues; les passions demandèrent å la science des sophismes pour justifier les écarts de la raison et des sens, et les sophistes ne leur manquèrent point. Comme l'antiquité païenne, le monde chrétien devait avoir ses sceptiques et ses athées, et voir renaître à la suite d'une philosophie renouvelée du vieil épicuréisme, la morale de l'intérêt personnel.

Nous excéderions cette fois les bornes qui nous sont imposées si nous voulions retracer plus longuement les faits et les considérations qui appuient une opinion étayée d'autorités bien autrement imposantes que la nôtre; nous nous contenterons d'exprimer ici, après une étude consciencieuse, qu'en dernière analyse

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