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de lui, comme les feuilles au mois d'au- | tomne, toutes les croyances religieuses, toutes les convictions politiques, et qui reste comme un arbre dépouillé à attendre un printemps qui ne reviendra peut-être plus.... Figurez-vous donc ce que c'est que de voir des images saintes auxquelles, enfant, votre mère vous a conduit pour faire votre prière, abattues, foulées aux pieds des chevaux, traînées dans la boue.... Oh! si je n'avais pas eu la poésie pour me plaindre, et la religion pour me consoler, que seraisje devenu, ô mon Dieu ! »

C'est ce même sentiment d'amertume et de confiance qui lui a inspiré ces beaux vers au Christ:

I

O Christ! délivre-nous de l'intime blasphème Où notre âme s'abjure et s'oublie elle-même; Où, tel qu'un vil brigand, notre esprit se tient coi Dans les sombres détours des cavernes du moi; Et guette, protégé par les ombres du doute, Que la Foi vienne seule à passer sur la route, Pour s'élancer sur elle, un poignard à la main, Et l'étendre mourante au milieu du chemin! Ce qui ne peut mourir travaille à sa ruine, Et rejette vers toi son essence divine, Ainsi qu'un vil présent qui manque son effet, Et qu'on fait renvoyer à celui qui l'a fait.

Je ne sais quelle stupide humeur. S'obstine à mesurer tes jours à ce qui meurt! Comme au temps douloureux de ton ignominie Où tu te trouvas seul avec ton agonie,

Où du haut de la Croix tes bras semblaient, ouverts, Vouloir dans ton amour étreindre l'univers O Christ! ta passion aujourd'hui recommence Par un accablement plus profond, plus immense; Plus d'un apôtre dort au moment de ton deuil; Et pour trente deniers que lui solde l'orgueil, Plus d'un Judas pactise avec qui te bafoue, Et te livre à l'impie en te baisant la joue; Et loin qu'un désespoir rompe son cœur d'airain, Il se présente au peuple avec un front serein! Le mensonge envers toi redouble de vertige, Le sophiste au pilier du savoir te fustige; Et la dérision, riante devant toi,

A plié les genoux et t'a salué roi.....

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On a frappé du pied la tombe des dieux morts,
Afin que, réveillée, leur fétide poussière
Vint usurper ta place, ô vivante lumière!

Mais de ces dieux tombés les réduits ténébreux,
Ne nous ont renvoyé qu'un son funèbre et creux,
Bien plus désespérant que l'absolu silence;
Et le trône des cieux est encore en vacance.
Toi seul pour l'occuper apparais assez grand.....
Tu montes au milieu d'un peuple indifférent,
Au haut du Golgotha!!! Pleurante sur ta trace,
Nulle femme ne vient pour t'essuyer la face.
Nul Simon, te voyant accablé sous ta croix,
Ne s'est offert afin d'en partager le poids.
Pour étancher ta soif, le fiel qu'on te présente
Est cent fois plus amer å ta lèvre brûlante.
Rien, pas même un larron qui, t’aidant à mourir,
Et demandant sa grâce à ton dernier soupir,
Vienne, par cet appel à ta divine essence,
Rappeler à la mort ta suprême puissance.
Le Fils du Dieu vivant, de néant couronné,
A jamais de son Père est-il abandonné ?....

V

Oh! si ce n'est que par un autre sacrifice
Que tu peux de la foi relever l'édifice,
Hâte-toi de mourir pour sortir du tombeau,
Et recréer encor un univers nouveau.
Meurs, afin que le monde épouvanté connaisse
Combien sans ta clarté la nuit devient épaisse ;
Afin que, fatigué de chercher un appui,
Tout esprit se replie et s'accable sous lui;
Afin qu'esclave encor, l'humanité ressente
Combien des anciens jours la chaîne était pesante.
Meurs, pour que, sous le fer le bon droit abattu,
La faiblesse soit crime et la force vertu ;
Pour que de tes croyans s'achève le martyre;
Pour que du temple en deuil le voile se déchire;
Pour que l'impiété touche au dernier moment,
Et n'ait plus de prétexte à son égarement;
Pour que les cœurs d'airain et les rochers se fendent;
Pour que du Centenier les paroles s'entendent,
Pour que chacun se frappe et s'écrie avec feu :
LE SIÈCLE SOIT maudit, le CHRIST ÉTAIT UN DIEU!

Il y a là toute la vigueur, toute la fierté du vers cornélien. Cela rappelle Polyeucte. Ce poème est d'une beauté d'ordre suprême; c'est une inspiration profondément intelligente, qui transfigure et spiritualise ainsi les faits, qui stigmatise les époques d'orgueil incrédule ou révolté, les jours de blasphème et d'indu Sauveur, comme renouvelant ses andifférence, comme continuant la passion goisses ineffables; et la désertion des élus, et la sueur de sang, et les insultes du Prétoire, et le délaissement sur la croix ! C'est une vérité sublime, magnifiquement énoncée.

Nous retrouvons dans les Arènes de Nîmes comme un poétique écho des profondes tristesses et des fortes consolations qu'inspire à Pascal la balance de nos misères et de nos grandeurs. Il est remarquable que le poète est, de toutes les intelligences supérieures, celle que tourmente le plus l'idée de sa vanité. Dans un de ces momens de mépris de soimême, de dépression intérieure et pleine d'angoisses, Reboul se demande si les magnifiques promesses que le poète se fait d'ordinaire à lui-même ne témoignent pas d'une déplorable infirmité; mais à voir cette ambition de vivre attestée sur les gradins ruineux des arènes :

Par des milliers de noms, affacés, confondus,
Comme ces feux du ciel dans le lointain perdus.

Il se rassure et s'écrie:

Et cela toutefois console le poète,
Qui, souvent affligé d'une honte secrète,
S'était cru, se sondant et se trouvant si vain,
Quelquè vase fêlé de l'atelier divin,
Un avorton formé d'orgueil et de misères,
Dont l'esprit n'avait rien de l'esprit de ses pères,
Et dont l'ardente soif de l'immortalité
N'était qu'une fatale et triste infirmité.

Mais si tout craint de choir dans cet abîme sombre
Où tout se précipite et tout se change en ombre,
Le poète ici-bas est un homme plus fort,
Plus puissamment armé pour combattre la mort,
Un des aînés choisis d'une race divine
Qui se souvient le mieux de sa noble origine,
Et qui dit d'une voix plus tonnante au trépas :
« Je suis né pour la vie et n'obéirai pas :

<< Dans le fond du sépulcre où tu me fais descendre
« Mes hymnes donneront la parole à ma cendre;
« Je laisse en m'en allant de quoi t'anéantir,
« Je t'ai tuée, ô mort, avant que de mourir;

« Et j'ai fait avancer pour moi le jour suprême

« Où tu ne pourras plus dévorer que toi-même.

"..

« Et radieux d'avoir reconquis son estime,

<< Il rend grâce au Très-Haut de cet instinct sublime, « Qui sur ces grands débris où triomphe le sort, « A trouvé des pensers qui terrassent la mort. »

Le poète n'habite pas toujours ces hautes régions de la métaphysique religieuse, il se plaît à descendre, à raser la terre, mais pour y respirer le parfum des fleurs. Souvenirs d'enfance, Elle est malade, Promenade sur mer, etc., nous semblent de doux et mélodieux délassemens au retour des lointains pélerinages.

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Veuve des eaux du ciel, sera bientôt flétrie
Du superbe viol dont parle Alighieri;
Son orgueil s'est repu, mais son âme a péri:
Émule de Satan, son cantique sublime,
Commencé dans le ciel, se finit dans l'abîme;
Et fils de la lumière, adopté par la nuit,
Il enrichit l'enfer de son sublime ennui.

II

Mais aussi le poète a ses momens de doute,
Où tout ce qu'il produit l'ennuie et le dégoûte;
Où son désir de gloire est pareil à l'affront
Qui fait que l'âme est triste et qu'on baisse le front;
Où le mépris de soi nous rend l'humeur si sombre,
Que l'on voudrait pouvoir s'arracher de son ombre;
Où l'on porte la lyre en dessous du manteau,
Comme un brigand ferait d'un ignoble couteau;
Où l'ardeur qui nous brùle est amère folie;
Où tout ce qu'on entend et voit nous humilie;
Où dans chaque sourire et dans chaque coup d'œil
On croit voir un brocard tomber sur notre orgueil,
Tout le ricanement du démon de la prose;
Où tout ce que le monde a de sons nous impose;
Où l'œuvre la plus belle est un enfant de mal
Qu'il faut jeter de nuit autour d'un hôpital.
Oh! qu'il est bon alors que quelque ami sublime

Au talent qui rougit rende sa propre estime,
Ramène dans le ciel son esprit qui s'abat,
Et faisant à ses yeux luire son propre éclat,
Lui fasse incontinent, de sa main qui défaille,
Palper son diadème, ou mesurer sa taille.
O mes amis ! ô vous dont les vers bienfaisans
M'ont donné cette aumône en des jours languissans,
Que le ciel vous bénisse et la Muse vous aime!
Si la Muse est un bien et non un anathème.
Qu'elle ôte de sa main les pierres sous vos pas;
Que son feu vous éclaire et ne vous brûle pas;
Qu'elle éloigne surtout de vous ce mal de l'âme
A qui votre parole a servi de dictame!
Amis, soyez bénis! de vos chants assisté,
J'ai repris le chemin de l'immortalité.
Soyez bénis! Par vous raffermissant mon âme,
L'espoir a retiré mes écrits de la flamme,
Et m'a montré du doigt, en mots mystérieux,
Ma sainte mission écrite dans les cieux.

Honneur soit rendu à cette reconnaissante humilité du talent qui rougit et doute de lui-même! Honneur à l'Ami sublime qui a su touver le Génie dans l'obscurité.

L. MOREAU.

BULLETINS BIBLIOGRAPHIQUES.

Examen des questions scientifiques de l'âge du monde, de la pluralité des espèces humaines, de l'organologie ou matérialisme, et autres, considérées par rapport aux croyances chrétiennes. Par M. l'abbé FORICHON, prêtre du diocèse de Moulins (1).

Nous ne nous sommes jamais exagéré l'importance de la Géologie par rapport à l'Écriture sainte; elle nous semble secondaire, et nous croyons que la religion n'a pas plus à rechercher les démonstrations de cette science qu'elle ne redoute le danger de ses attaques.

L'usage que l'on doit faire dans l'enseignement religieux de nos connaissances sur l'organisation du globe, demande une réserve d'autant plus légitime, que toute démonstration purement géologique d'un fait, est exposée à subir les modifications d'une science essentiellement mobile et à n'avoir qu'une rigueur temporaire. Ce genre d'argumentation incompatible avec des vérités de tous les temps, de tous les lieux, ne peut fournir, on en conviendra, que des probabilités insuffisantes pour former des convictions raisonnables.

Mais si l'étude de la terre est sans importance sur Les vérités morales ont leur preuve dans un ordre les destinées des choses du ciel, la religion au cond'idées supérieur à tout fait d'observation; ce serait traire, en guidant les pas de la science, lui offre, méconnaître leur nature, que de chercher à les éta- dans une multitude de questions capitales, des lublir sur des sciences expérimentales, particulière-mières sans lesquelles elles ne sauraient recevoir ment sur la géologie, qui, abstraction faite de sa partie purement hypothétique, présente pour bases de théories positives des faits incomplets et dès lors incertains.

(1) Paris, Debécourt, libraire éditeur, rue des Saints-Pères, no 69; Moulins, Desrosiers, imprimeur libraire.

aucune solution satisfaisante.

Les faits bibliques sont autant de théorèmes proposés à l'explication des géologues, et comme des signaux pour les diriger dans le dédale des systèmes.

Que d'erreurs, que de déceptions la foi eut pu faire éviter! D'ailleurs indépendamment de toutes croyances religieuses, ne sommes-nous' pas plus fondés à donner pour boussole aux théories une cos

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mogonie reconnue par tant de peuples et la seule encore trouvée conforme à la nature, qu'à leur fixer pour point de départ les incertitudes de nos propres pensées.

Aussi Bacon, à qui l'école expérimentale décerne le titre de père de la philosophie naturelle, réduisait toute la science humaine à l'explication de l'œuvre des six jours et le donnait comme le fondement de toutes les connaissances. D'autres hommes assez forts pour croire sans être accusés de ne pas comprendre, Descartes, Newton, Leibnitz, Euler révéraient le 'récit biblique et y voyaient le principe de toute vérité. Deluc, Saussure, Dolomieu et plus tard Cuvier s'appliquèrent à l'explication des traditions sacrées. Le succès qui couronna leurs doctes travaux en ce qu'ils ont de conforme à la foi, atteste qu'ils traçaient à la science sa route la plus naturelle.

Au contraire quand Buffon, Hutton, Playfair et autres voulurent interroger la terre pour y voir la preuve d'une chimérique antiquité, leurs indiscrètes questions ne reçurent que de mensongères réponses. Ils prirent pour une étoile fixe, je ne sais quelle pâle lueur qui venant à s'évanouir, jeta sur les monumens que le globe présente de son histoire une obscurité si profonde, que deux géologues, selon Cuvier, ne purent plus se regarder sans rire; la succession rapide de leurs idées en prouva la fragilité et donna aux vérités combattues un éclat rehaussé par l'impuissance des attaques.

L'Église ne craint plus les efforts anti-chrétiens de la science; mais elle ne reste pas indifférente aux erreurs de ses systèmes. Les ravages que le mensonge peut causer dans les intelligences sont loujours redoutables, mais particulièrement à une épo→ que où le sentiment moral est affaibli, où l'éducation, les passions, l'ignorance livrent trop facilement les croyances humaines la merci du témoignage des sens et donnent à l'autorité scientifique une importance exagérée. Toute découverte qui dissipe dans la région des idées une opinion dangereuse, mérite d'ètre connue. C'est un devoir de la signaler.

A notre époque l'étude des faits et les sages déductions qu'on a pu en tirer, ont ramené la géologie égarée sur bien des points dans le sentier de la vérité. Des erreurs ont été signalées, des systèmes contraires à la religion ont été renversés; il importait dans un ouvrage spécial de constater logiquement et authentiquement la fin de ces conceptions éphémères.

M. l'abbé Forichon, du diocèse de Moulins, s'est imposé cette tâche et nous l'en félicitons, comme d'une œuvre de mérite et d'une bonne action. Doué d'une érudition très vaste et d'un esprit de critique remarquable, cet ecclésiastique, dans la première partie de son ouvrage consacrée à la question scientifique de l'âge du monde, nous semble avoir exposé d'une manière lumineuse les principes de la géologie, en même temps qu'avec l'autorité de la raison et de la science il établit l'accord des livres saints avec les lois de la nature.

Après la définition et le classement précis des diverses couches superposées au terrain primitif, l'au

teur discute les deux systèmes qui ont partagé l'opinion des académies sur l'origine du noyau terrestre, masse énorme de granit, due à l'action de l'eau selon les uns, produit du feu selon les autres. Les développemens auxquels il se livre et où il combat particulièrement les faits allégués par le savant prussien Mitscherlich en faveur des Plutoniens, lui fournissent contre ces deux systèmes des objections insolubles dans l'état actuel de nos connaissances. Les déductions anti-chrétiennes que l'incrédulité voudrait tirer d'hypothèses si peu certaines ne méritent aucune attention. Aussi, M. Forichon ne pense pas que l'interprétation, très orthodoxe du reste et admise par saint Augustin, de regarder les jours de la Genèse comme des périodes de temps indéterminées, soit nécessaire pour expliquer le récit de Moïse. La science est trop peu avancée pour contredire la brièveté des six jours. Les agens que le Créateur avait à sa disposition ne nous sont point assez connus. Attendons pour penser le contraire que les opinions de ces philosophes qui croient que leurs vues renferment la raison de tout, soient devenues des faits.

A cet examen des présomptions humaines sur la création, succède celui de la cosmogonie sacrée qu'il suffirait de leur opposer pour en démontrer la sagesse. Les belles et savantes considérations de l'auteur sur la lumière, la chaleur, l'électricité rendent plausibles des faits long-temps inexplicables. La création de la lumière, l'apparition du jour, le phénomène de la végétation avant l'existence du soleil ne sont plus des mystères pour la science. Elle sait aujourd'hui que, sans avoir encore suspendu cet astre à la voûte du ciel, Dieu a pu dans la richesse de sa puissance éclairer la terre, la parer de fleurs, de fruits, de plantes de toute espèce pour doter, dès l'origine des choses, la créature faite à son image d'une royale possession.

En venant confirmer le langage si étonnant de Moïse, les découvertes modernes nous semblent lui avoir rendu un magnifique témoignage. Qui a pu révéler à l'historien de la Genèse la théorie des ondes en optique, qui lui a donné de si savantes idées en physiologie? où était le télescope capable de dévoiler à ses yeux la constitution intime du soleil ? Cette grande illusion qui se nomme encore la philosophie, ne saurait descendre à cet égard jusqu'à l'absurdité d'une explication, et cependant il faut qu'elle se prononce sur l'une de ces deux opinions. Ou Moïse avait connaissance des calculs d'Huyghens et d'Euler, des expériences de Becquerel, de Dutrochet, des observations d'Herschell ou d'Arago, ou Moïse était inspiré.

L'exposition des systèmes qui ont voulu nous faire assister au premier âge de notre planète, conduit M. Forichon à l'étude de phénomènes d'origine plus accessible, à celle des dépôts géologiques qui forment comme l'écorce de la terre.

La science prend ici une forme mieux déterminée et sort parfois des interprétations imaginées en dehors des faits. Avant Cuvier, aucune théorie n'avait revêtu les caractères de la vérité. Ce fut lui qui muni

de connaissances profondes en zoologie et en anatomie comparée, enrichit le premier la science de méthodes et de découvertes incontestables. Les couches terrestres dont la nature minéralogique était restée muette aux interrogations des savans, révélèrent quelques uns de leurs mystères à l'illustre géologue, alors que son génie reconnut les caractères des animaux fossiles qu'elle renferment. Ce qu'il découvrit surtout de remarquable, ce qui lui fit une si grande réputation, ce fut que les anciens animaux terrestres étaient différens de ceux qui nous sont connus; et il eut le talent de les reconstruire.

Mais le génie a ses limites, c'est déjà pour lui assez de gloire que d'avoir pu soulever en quelques points le voile des vérités inconnues. Cuvier commit des erreurs d'autant plus excusables, qu'on peut douter qu'elles fussent entrées fortement dans ses convictions. Surpris de rencontrer dans diverses couches des animaux qu'il ne trouvait plus dans celles qui leur sont supérieures et qui paraissaient avoir disparu à la surface, il crut, dans l'état de la science, pouvoir expliquer ce phénomène par un système. Il eut l'idée que des irruptions itératives de la mer avaient à plusieurs reprises envahi la terre et fait périr ses habitans, que de nouvelles espèces auraient paru après chaque déluge, qui laissant sur la terre des dépôts terreux, auraient ainsi formé les couches stratifiées.

Cette opinion avec laquelle il voulait concilier la Bible en admettant le déluge mosaïque comme le dernier des cataclysmes, n'était qu'une simple hypothèse contraire aux idées de Humboldt et aux calculs de Laplace, qu'il ne devait pas beaucoup affectionner lui-même, vu son éloignement pour tout ce qui ne présentait pas un caractère déterminé de certitude.

L'on sait aussi que dans un rapport fait à l'Institut sur un ouvrage où M. André de Gy (le père Chrysologue) prétendait expliquer l'organisation de la terre par le seul fait du déluge mosaïque, Cuvier s'empressa de prononcer la possibilité de cette théorie et s'étonna qu'on n'eût pas cherché à y recourir avant de songer à d'autres systèmes.

Cependant, par une de ces inadvertances ordinaires à l'esprit humain, il arriva que cette hypothèse du maître fut regardée bientôt comme un fait positif par les disciples. Ils ne tardèrent pas à se persuader que les diverses époques et les successions d'animaux donnaient une autre histoire du monde que

celle racontée par Moïse, et qu'ainsi Cuvier avait nui à la religion plus qu'il ne l'avait pensé.

M. Forichon consacre une série d'articles à réfuter leur erreur; l'étude des couches stratifiées lui fait connaître qu'il n'existe pas entre elles une ligne de démarcation prononcée, qu'elles ont au contraire une liaison continue, qu'on ne passe pas immédiatement de la couche A à la couche B, qu'on doit auparavant rencontrer le mélange confus A B.

« Or, dit-il, si la mer, après avoir laissé dessé<«< cher une des couches déposées jusqu'à devenir un << sol habitable, n'était venue que plus tard en ap<< porter une autre, celle-ci ne devrait être que «< contiguë à l'antérieure, et dans aucun point les <<< deux couches ne devraient être confuses. C'est << précisément le contraire qui s'observe. Que de<< vient donc cette longue époque écoulée entre les « deux dépôts, pendant laquelle aurait vécu une << génération d'animaux inconnue à la précédente et « à la suivante? >>

M. Forichon fortifie cet argument de beaucoup d'autres non moins concluans, mais sa thèse reçoit un grand degré d'évidence des travaux récens sur des terrains postérieurs aux couches tertiaires, tels que les faluns de la Touraine, le tuf du Cotentin, le crag d'Angleterre, et qui ne laissent aucun doute sur l'erreur des deux prétendues époques zoologiques.

Selon Cuvier, ce seraft à la première création qu'appartiendraient les palæothériums, les lophiodons, les chéropotames qu'on retrouve dans les terrains tertiaires moyens; les gypses, la mollasse moyenne et les bassins lacustres; ce n'eût été qu'à la seconde qu'auraient paru les mastodontes, les éléphans, les rhinocéros, les hippopotames, les ruminans, les carnassiers, confinés exclusivement dans des terrains marins, dans des tufs, dans des graviers fluviatiles et lacustres, dans les cavernes et les brèches osseuses, et surtout dans la plus grande partie du diluvium dont dépendent les derniers. Or, les deux grands systèmes établis distinctement dans la science, ne sont pas en réalité séparés par un intervalle; c'est ce qui résulte des observations de M. Desnoyers et d'autres géologues, tant français qu'étrangers. Les cétacés, les reptiles, les palæothériums, les rhinocéros, les lophiodons, les mastodontes, les chevaux, les ruminans et, se trouvent ensemble dans les sables marins de la Touraine, dans ceux de Montpellier, etc.

(La suite à un prochain numéro.)

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