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étaient en dehors de cette loi exceptionnelle (ibid. 29-33), et il y en avait une raison spéciale qui se présentera plus tard.

"Tu ne prêteras point à intérêt à ton
frère, porte le Deutéronome (xxIII, 20),
« ni argent, ni vivres, ni quoi que ce soit,
<< mais seulement à l'étranger forain
(nocri)(1). Car, ajoute le Lévitique (xxv, |
« 35-37), si ton frère s'est appauvri, tu le
soutiendras ainsi que l'étranger habi-
<< tant (guer) (2), afin qu'il vive; ne reçois
« point de lui plus que tu n'auras donné,
<< ni intérêt pour son argent, ni surcroît
<< pour ses denrées. » L'intérêt pouvait
être exigé de l'étranger forain, parce
qu'il l'exigeait lui-même; car Israël prê-
tait ou empruntait au dehors, selon qu'il
était ou non dans l'abondance (Deut.
XXVIII, 12-13, 43-44). La loi comprimait
au dedans l'esprit mercantile pour con-
centrer toute l'activité des esprits sur
l'agriculture, nourrice et éducatrice des
citoyens; à l'extérieur, elle laissait au
commerce toute liberté. Le prêt au reste
étant un acte de charité (Deut. xv, 7-8),
le créancier ne devait point être un exac-
teur sans pitié (Ex. xx11, 25). Aussi l'an-
née sabbatique était pour le débiteur
hébreu une année de rémission, et soit
qu'on voie là une extinction de la dette,
soit un simple répit, comme le veut M.
de Pastoret, d'accord avec quelques in-
terprètes, on ne peut méconnaître l'em-
pire de cette loi bienfaisante (Deut. xv,
1-2), qui épargna aux Hébreux tous les
troubles de la Grèce et de Rome pour
l'abolition des dettes. Enfin, le gage était
permis; mais il ne pouvait porter sur
l'instrument de travail du débiteur, parce
que c'est sa vie (Deut. XXIV, 6).

Bien que l'usage d'écrire les conventions doive remonter à Moïse, par imitation de l'Egypte où l'on écrivait tout, et qu'on trouve presque le fait double de nos actes sous seing privé dans un chapi

Le plus usuel des contrats, le prêt, avait éveillé toute la sollicitude du législateur.tre de Jérémie, les conventions ne dépouillèrent point pour cela le symbolisme des formes patriarchales. La tradition demeura le sceau de toute aliénation, de la donation comme de la vente. La balance et les témoins, exigés pour la mancipation romaine, étaient nécessaires à Jérusalem jusque sous ses derniers rois. « La dixième année de Sédécias, dit Jérémie, Hanaméel, fils de Sellum, mon oncle paternel, vint à moi dans le vestibule de la prison où j'étais détenu, et il me dit : possède mon champ qui est à Anathoth, dans la terre de Benjamin, parce que tu es le plus proche et que le droit d'hériter de ce champ t'appartient. Et je compris que c'était la volonté de Jéhovah. Et j'achetai ce champ, "et je lui en donnai le prix au poids, sept sicles et dix pièces d'argent. Et j'écrivis dans le livre, et je le scellai, et je pris des témoins, et je pesai l'argent dans la balance. Et je pris le livre de la prise de possession (le contrat d'acquisition) scellé de mon sceau, avec les stipulations qu'il contenait, et les ratifications des témoins, et leurs sceaux qui pendaient au dehors, et je donnai le livre de la prise de possession à Baruch, fils de Néri, fils de Maasia (le prophète Baruch), sous les yeux d'Hanaméel, mon cousin paternel, des témoins dont les noms étaient inscrits dans le livre de la vente, et de tous les juifs qui étaient assis dans le vestibule de la prison, et je dis à Baruch : voici ce qu'ordonne le Seigneur des armées, le Dieu d'Israël (Dieu est toujours présent comme on voit dans l'histoire du droit hébraïque): Prends ces deux actes, cet acte d'acquisition qui est scellé, et cet autre qui est ouvert, et enterre-les dans un vase d'argile, afin qu'ils puissent durer beaucoup de temps (Jérém. xxxii, 1, 8-14). »

(1) Cette nuance a été saisie par Sante Pagnino (version interlinéaire, revue par Arias Montanus), par les Septante, par les traducteurs latins du texte syriaque, et des textes arabe et samaritain. Tous traduisent quer par peregrinus, proselytus, incola, advena, inquilinus, hospes; et nocri par extraneus, alienus, alienigena.

(2) La version samaritaine porte: Cùm attenuatus fuerit frater tuus.... Confirmatis eum, peregrinum et inquilinum;.... ne accipias ab es duplum fænus et incrementum. Les Septante assimilent aussi le guer et l'hébreu.

Nous trouvons une scène analogue dans le livre de Ruth. « Booz monta donc à la

porte de la ville (Bethléem), et il s'y assit. Et ayant vu passer le parent le plus proche de l'époux de Ruth, il le fit asseoir à côté de lui. Et prenant dix des anciens

de la ville, il leur dit : asseyez-vous ici. Į tous les biens d'Elimelech, de Mahalon

Lorsqu'ils furent assis, il dit à son parent: Noémi, qui est revenue du pays de Moab, veut vendre une portion du champ d'Elimelech, notre parent. J'ai voulu t'en informer devant les anciens de mon peuple assis auprès de nous. Si tu veux posséder ce champ, comme c'est ton droit de parenté, achète-le et prendsen possession. Sinon, déclare ta pensée, pour que je sache ce que je dois faire, car je suis le plus proche après toi. Il répondit : j'achèterai le champ. Booz reprit: quand tu l'auras acheté, tu dois épouser la veuve du défunt, Ruth la moabite, afin de faire revivre le nom de notre parent dans son héritage même. L'autre répliqua je te cède mon droit de parenté, car je ne dois pas éteindre la postérité de ma famille. Or c'était un antique usage en Israël que, si un parent cédait son droit à un autre, pour confirmer cette cession, le cédant ôtait sa chaussure et la donnait à son parent; tel était le témoignage (la preuve) de la cession en Israël. Booz dit donc à son parent: ôte ta chaussure, ce qui fut fait aussitôt (1). Booz s'adressant aux anciens (2) et à tout le peuple (les assemblées générales se tenaient à une porte de la ville, comme on l'a vu pour l'achat du sépulcre de Sara): Vous êtes témoins aujour d'hui, dit-il, que je prends possession de

(1) Le Deuteronome est plus explicite. « La femme ira à la porte de la ville (à l'assemblée du peuple), elle interpellera les anciens, en disant : Le frère de mon mari ne veut point faire revivre le nom de son frère en Israël, ni me prendre pour son épouse. Et aussitôt ils le feront venir et l'interrogeront. S'il répond: Je ne veux pas de cette femme pour épouse, la veuve s'avancera vers lui en présence des anciens, elle lui ôtera sa chaussure, lui crachera au visage, et dira: ainsi adviendrá-t-il à l'homme qui ne rétablit point la maison de son frère. Et sa maison se nommera en Israël la maison du déchaussé (xxv, 7-10 ), » Dans le livre de Ruth, rien ne fait présumer que la veuve fût présente, non plus que Noémi.

(2) Je soupçonne qu'il s'agit en cet endroit d'une déclaration faite postérieurement par Booz, après que Noémi lui eût fait abandon de l'héritage d'Elimélech. Le texte n'indique aucun intervalle entre le premier acte et le second. Mais les récits bibliques sont pleins de lacunes semblables. Ainsi il n'est fait ici nulle mention de la présence de Noémi, et pourtant on ne peut nier que cette présence ne fût indispensable,

et de Chélion, suivant la tradition que m'en fait Noémi, et que j'accepte pour épouse Ruth la moabite, veuve de Mahalon. Vous en êtes témoins. Les anciens et tout le peuple qui était assemblé à la porte de Bethléem répondirent: Nous en sommes témoins (Ruth, iv, 1-11). »

Ces exemples suffisent. On pressent assez que le génie symbolique des peuples primitifs est plus vivement empreint encore dans les lois purement cérémonielles du Pentateuque, entre lesquelles nous rappellerons seulement celle qui prescrit l'expiation solennelle de l'homicide dont le coupable est inconnu (Deut. xxí, 1-8).

On pressent aussi que le caractère complexe du droit mosaïque se reproduit dans les lois criminelles. Nous signalerons, comme autant de réminiscences du droit patriarchal, l'égalité devant la loi (Lév. xxiv, 22; Deut. xxv, 1), la personnalité des fautes (Deut. XXIV, 16; iv Ruth, XIV, 6; II Par. xxv, 4; Ezech. xviii, 20), le principe du talion (Gen. Ix, 6; Ex. xxi, 24, 25; Lév. xxiv, 20; Deut. xIx, 21; Deut. XIII, 61-62), la réparation de la séduction par le mariage (Gen. xxxiv, 8-12; Ex. xxII, 16-17; Deut. xx11, 28-29), celle du vol par la restitution du quadruple ou du double, selon les circonstances (Ex. XXII, 1-4), distinction qui se présentera de nouveau à Rome et ailleurs, mais avec des nuances moins rationnelles que chez les Hébreux, où la peine était graduée suivant la perversité de l'acte. Montesquieu reconnaît qu'il est plus naturel que les crimes contre les propriétés soient punis par la perte des biens (Espr. des Lois, XII, 4); mais il se demande comment le coupable indigent serait atteint. Moïse avait y pourvu; en ce cas, le voleur était vendu (Ex. xxii, 3) et le prix tenait lieu de restitution, ce qui n'avait rien d'inique, puisque l'esclavage n'était chez les Hébreux qu'une domesticité non volontaire durant six années. Les douze Tables condamnaient l'auteur d'un vol non flagrant à une servitude perpétuelle, au lieu l'auteur du vol flagrant n'éque tait tenu qu'à rendre le double.

Cette vente légale du voleur indigent atteste déjà que la législation criminelle de Moïse était plus qu'une restauration

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Une partie peu connue de la loi de Moïse, et qui fait honte à notre civilisation avancée, ce sont les prescriptions en faveur des animaux. La naïveté antique ne croyait point déroger en descendant à des prévisions qui pourraient sembler minutieuses, si elles étaient moins morales (1) et moins touchantes. << Si dans ta promenade tu trouves un « nid à terre ou sur un arbre, et la mère << couvant ses œufs ou ses petits, tu la << laisseras aller (Deut. xxII, 6)... Tu n'at<< telleras point l'âne et le bœuf à la mê« me charrue (à cause de l'inégalité de «< leur marche). Ibid. xxII 10... — Tu ne << lieras point la bouche du bœuf qui foule << tes grains dans l'aire (ibid. xxv, 4), car << il est juste qu'il ait sa part du bénéfice << du travail... Tu ne mangeras point le « chevreau qui tette encore, » ou, selon la gracieuse traduction de la Vulgate, « tu << ne feras point cuire le chevreau dans <«<le lait de sa mère (Ex. XXIII, 19 et « xxxiv, 26; Deut. xiv, 21). » Ce dernier verset effleure les lois sanitaires, qui ont arraché des éloges aux bouches les moins suspectes.

du droit criminel des patriarches. Ils | sait que tel était l'effet de l'interdiction avaient puni l'homicide volontaire; Moïse de l'eau et du feu, véritable excommuniatteignit l'homicide involontaire, qui fut cation païenne. confiné dans ces villes de refuge dont l'institution a été dignement appréciée par Montesquieu (Espr. des Lois, xxv, 3). Il n'y avait point d'asile pour l'assassin, il devait être arraché des marches même de l'autel (Ex. XXI, 14). Mais il existait des cas d'excuse pour certains homicides (Ex. xx11, 2; Nombr. xxxv, 19, 21, 27). Les coups suivis de maladie furent soumis à une réparation proportionnée (Ex. XXI, 18 et 19). Celui qui frappait son père était puni de mort (Ex. xxi, 15); Moïse, comme Zoroastre et Solon n'avait pas voulu prévoir le parricide, pour lequel pourtant les lois d'Egypte avaient un supplice à part. La poursuite des crimes, dans le droit mosaïque, est simple et rapide, mais non inhumaine. Point d'écritures. L'information est orale ; la règle qui a régné parmi nous jusqu'à l'établissement du jury, testis unus testis nullus, est consacrée par le livre des Nombres (xxxv, 30) et par le Deutéronome (xvII, 6 et xix, 15). Le faux témoin subit la peine dont sa déposition menaçait l'accusé (Dan. xш, 61, 62). La détention préventive est admise (Lév. xxiv, 12; Nombr. xv, 32-34). Le juge qui a prononcé une sentence de mort doit s'abstenir de nourriture ce jour-là : non comedetis super sanguinem (1), porte le Lévitique (xIx,26). La condamnation est rétractable au moment même du supplice; l'acquittement de Suzanne, comme on la menait à la mort, en est un mémorable exemple (Dan. x). Les supplices étaient peu nombreux. Le feu qui punit la simple fornication ou l'adultère, si l'on veut, sous les patriarches (Gen. XXXVIII, 24), fut réservé par Moïse pour l'incestueux et pour la fille du pontife qui déshonorerait le nom de son père par ses désordres (Lév. xx, 14 et xx1, 9). Les autres étaient la lapidation, suivie de l'exposition au gibet jusqu'au soir (Deut. XXI, 2123), et la flagellation, limitée à quarante coups (ibid. xxv, 3). Il y avait d'autres peines: l'excommunication, par exemple, qui tenait de notre mort civile. On

(1) La Vulgate traduit: Non comedetis cum sanguine, ce qui est peu clair,

Quels soins en effet ne devait pas prendre de la vie des hommes un législateur préoccupé à ce point du bien-être des animaux! On ne citera ici qu'un trait de sa prévoyante sollicitude. Quand tu << bâtiras une maison (ce sont les termes

du Deuteronome, xxII, 8), tu éleveras << un mur tout autour du toit, de peur << que le sang ne coule dans ta maison et << qu'un homme venant à tomber de ce << lieu élevé, tu ne sois coupable de sa << mort. »

Que n'aurions-nous point à dire encore sur le droit de la guerre chez les IIébreux, tant calomnié par Voltaire, et, par exemple, sur le respect des arbres fruitiers, au cœur même du territoire ennemi (Deut. xx, 19); sur l'institution du sacerdoce et sur la haute sagesse des mesures qui l'empêchèrent de dégénérer en caste; sur l'unité nationale intime

(1) Quòd in pecudibus et bestiis præmeditata humanitas, dit Tertullien, in hominum refrigeria facilius erudiretur ( Contrà Marcion. II, 22 ),

ment liée à l'unité de culte, à une seule arche d'alliance, à un seul temple! La publicité de la Loi, qui constituait à elle seule une si fondamentale différence entre la Judée et le reste de l'Orient, la dépendance où l'absence d'une dotation territoriale et même de toute propriété terrienne plaçait les Lévites, leur assujétissement à la plupart des charges civiles, à la taxe personnelle, au service militaire, sont au nombre assurément des traits les plus originaux de la constitution mosaïque. Mais n'allions-nous pas ablier qu'une leçon ne doit point devenir un livre?

Et dès maintenant d'ailleurs ne nous est-il point permis de nous écrier avec le Deuteronome: Quelle autre nation eut jamais un ensemble de lois comparables à celles que j'expose aujourd'hui devant vous? Et pourtant où est la législation

qui a précédé celle-ci? Oh! dites-le nous, si vous le savez, vous qui rêvez on ne sait quelle ère primitive d'abrutissement humanitaire dont tout progrès est issu. Ou plutôt dites-nous quelle législation postérieure a éclipsé la législation mosaïque. Sans doute, la civilisation chrétienne a dépassé la civilisation des Hébreux. Mais qu'importe au roman du progrès continu, et d'où vient que le Koran, venu le dernier, est resté inférieur non seulement à l'Evangile, mais au Pentateuque?

Une prochaine leçon fera voir comment la loi de Moïse a ouvert la période politique du droit hébreu, et comment ce droit a parcouru et accompli sa période scientifique, pour tomber à l'état d'empyrisme où il végète depuis longtemps.

TH. FOISSET, Docteur en Droit.

LETTRES ET ARTS.

COURS D'HISTOIRE MONUMENTALE DES PREMIERS CHRÉTIENS (1),'

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tiens! Quel spectacle pour la terre et les cieux! Debout sur le vieux monde en putréfaction, cette jeune humanité, le front ceint de la palme des martyrs et des vierges, un encensoir en main, chantant

de ce cours, insérée dans notre dernière livraison, quelques expressions, qui, à raison de leur généralité, pourraient être mal comprises peutêtre par quelques personnes. La liberté, pour les écoles où la religion s'enseigne, consiste à être complétement soumises à l'autorité spirituelle des pasteurs, affranchie elle-même des entraves par lesquelles quelques gouvernemens de l'Europe gênent l'exercice de cette autorité. Quant à l'enseignement de la littérature et des arts, l'auteur de l'article pense qu'on ne doit le soumettre qu'aux mesures que prescrivent le respect dû à la religion, aux bonnes mœurs et à l'ordre public, et qu'il faut le laisser, dans ces limites, se développer librement. Les conseils qui précèdent la phrase dont nous parlons, relatifs à l'emploi des arts dans l'ornement du culte et la décoration des églises, n'ont d'autre but que d'écarter tout ce qui se rapprocherait du caractère que les arts revêtent dans les fêtes mondaines. Voilà tout ce que l'auteur a voulu dire. Nous pensons que la plupart de nos lecteurs n'avaient pas besoin de cet avertissement.

lisé dès cette terre pour les élus, tel quejamais les hommes ne le rêvèrent aussi beau.

Un changement si complet et si subit de l'espèce humaine n'a rien qu'on puisse expliquer naturellement; pour le concevoir il faut faire intervenir un Dieu. « Le Christianisme, dit Chateaubriand, sépare l'histoire en deux portions distinctes: depuis la naissance du monde jusqu'à Jésus-Christ, c'est la société avec des esclaves, avec l'inégalité des hommes entre eux, l'inégalité sociale de l'homme et de la femme; depuis Jésus-Christ jusqu'à nous c'est la société avec l'égalité des hommes entre eux, l'égalité sociale de la femme, c'est la société sans esclaves, ou du moins sans le principe de l'esclavage (1).»

Le Sauveur, à qui tant de biens sont dus, et dont quelques écrivains récens

et confessant le Christ, répandait du mi- | lieu des bûchers un parfum que venaient respirer les anges. La terre et le ciel s'embrassaient de nouveau; Dieu se rendait visible; les séraphins laissaient voir leurs ailes, presque comme aux jours du paradis terrestre; la science n'était plus secrète ni le partage d'un petit nombre; les mystères étaient dévoilés; la vie voyante s'était ranimée dans ce monde de ténèbres. Tous les chœurs célestes, devenus familiers avec ces hommes nouveaux, les visitaient dans leurs songes, les nourrissaient au désert, et descendaient des astres pour les consoler dans leurs cachots; leur présence se manifestait par de continuels miracles devant tout le peuple, devant des armées entières, par des apparitions radieuses, par des guérisons inouies. A force d'amour tous les vices des institutions politiques du paga-out les premiers, après dix-sept siècles nisme étaient annulés, l'esclave et le maître étaient égaux, la charité rendait tous les biens communs. Les plus puissans, s'ils péchaient, subissaient aux portes des temples, aussi bien que les plus faibles et les plus obscurs fidèles, l'humiliation sublime des pénitences volontaires; car l'orgueil du cœur d'où sort celui de la naissance, des richesses, de la force, était abattu, en même temps que l'orgueil de l'esprit, qui crée le scepticisme de l'âme et le vertige de la science. Savans et ignorans, riches et pauvres, nobles et plébéiens, tous pour la première fois se voyaient frères. La vertu seule avait des droits et des honneurs, l'or n'en donnait aucun; les plus saints étaient les plus grands, et chacun sans envie louait Dieu dans les dons et les vertus des autres.

Il existe un livre, scandaleux pour la sagesse humaine, plein de consolation pour les simples, c'est le Mirabilia Romæ, recomposé à différentes reprises depuis Constantin jusqu'à Léon X, mais dont le manuscrit original du douzième siècle, qu'on trouve à la Vaticane (1), est pur de toutes ces altérations successives: là sont écrits les actes glorieux des martyrs des catacombes, avec les légendes populaires sur leur vie et leurs miracles. C'est un monde enchanté, l'âge d'or réa

(1) Sous le numéro 3973 de cette bibliothèque.

de témoignages, osé nier l'existence, mieux attestée pourtant que celle de Socrate de laquelle personne ne doute (2), était né en Judée vers l'époque où Rome, lassée des triomphes brutaux, fermait enfin le temple de la guerre. Une paix profonde, après deux mille ans d'un continuel carnage des hommes, souriait donc, ainsi qu'une consolante aurore, quand la crèche de Bethléem reçut cet enfant-dieu. Celui qui devait rapprocher le ciel et la terre, redevenus par lui deux frères jumeaux, naquit pendant le consulat des deux Gemini (3), l'an de Rome 753, à l'époque de l'année où le soleil nouveau vient ranimer la nature mourante, et ralonger les jours descendus au plus bas degré. C'était la trentième année du règne d'Auguste, premier empereur du monde romain. Et lorsque le roi du monde spirituel eut atteint dans ses années le même nombre mystique de trente, il commença ses prédications et ses miracles, traversa la terre en faisant le bien, et au bout de trois ans monta au Calvaire, chargé de sa croix.

Cette croix est l'arbre de vie de la civilisation moderne. Partout où il est planté la terre est sauvée, et l'âme qui en goûte

(1) Etudes historiques, t. 1.
(2) Expression de J.-J. Rousseau.

(3) Sub duobus Geminis (Fastes consulaires).
(4) Antiquit., lib. 18.

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