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se prononcerait pas aussi prématurément sur le caractère de telle ou telle œuvre qui peut être ou sembler merveilleuse; on ne se hâterait pas de lancer dans la publicité, à titre de manifestations de la volonté divine, des faits qui peuvent être contestés ou niés, ou envisagés d'une manière toute autre que celle que l'on a en vue; si l'on avait plus de respect pour l'Église, on lui déférerait ces faits avant de les proclamer; et l'on attendrait respectueusement sa décision; enfin, si l'on avait plus de respect pour cette liberté d'opinions que l'Église s'est toujours fait honneur de reconnaître, on admettrait que chacun peut adopter l'opinion qui lui convient le mieux, sur des faits qu'aucune autorité ne peut donner infailliblement comme certains ou comme divins.

Enfin, si la théologie catholique était plus respectée de ceux qui croient en avoir le monopole, comme certains écrivains du parti ultramontain, on examinerait au moins attentivement les caractères d'un fait, avant de le déclarer divin.

On ne peut nier que les œuvres divines ne doivent avoir certains caractères qui les distinguent évidemment d'autres faits extraordinaires qui n'auraient pas Dieu pour auteur. Quels sont ces caractères?

Les théologiens s'accordent généralement à dire que, pour discerner les vrais miracles des prestiges diaboliques, il faut examiner soigneusement: 1o les personnes qui servent d'instruments ou de ministres pour l'œuvre extraordinaire que l'on veut discuter; 2° les circonstances qui ont accompagné cette œuvre; 3° les moyens par lesquels on a obtenu tel ou tel résultat qui constitue le prodige; 4o les effets qui résultent du prodige; 5o le but que l'auteur du prodige s'est proposé.

Ces divers points demandent en effet la plus sérieuse attention.

On doit de plus admettre, comme règle première et fondamentale, dans l'examen des miracles, qu'il faut s'attacher, comme à une base inébranlable, à la règle de la foi catholique, c'est-à-dire à l'Écriture sainte interprétée selon le sens

unanime des siècles chrétiens. Dans son Traité du discernement des esprits, le pieux et docte cardinal Bona trace cette règle générale : « Pour discerner les esprits, dit-il, il faut examiner avec soin les règles que le Saint-Esprit nous a prescrites dans les Écritures, et que les saints Pères, qui étaient des hommes éclairés par le Saint-Esprit d'une manière particulière, nous ont laissés, ainsi que les autres Docteurs expérimentés. »

Mais il ne suffit pas de s'attacher inviolablement à la règle de la foi, pour éviter toute illusion; il faut, lorsqu'il s'agit d'un fait particulier, l'examiner sous toutes ses faces, selon les cinq règles énoncées plus haut, et que nous exposerons dans un prochain article.

(La suite au prochain numéro.)

L'abbé GUETTÉE.

AFFAIRE MORTARA.

Tous les journaux se sont préoccupés, à bon droit, de cette triste affaire. L'Univers est seul contre tous, et soutient que la cour de Rome a agi conformément aux principes catholiques en enlevant à sa famille, juive, un jeune enfant baptisé clandestinement par une servante, et en le faisant élever dans une maison de catéchumènes.

La cour de Rome eût mieux fait, ce semble, de considérer comme non avenu un baptême qui n'a peut-être pas été administré validement, et qu'elle ne peut connaître que par le témoignage de la servante, qui a agi d'une manière clandestine. Cette cour a pensé qu'elle devait agir autrement, et l'Univers prétend qu'il n'y a que les libres penseurs ou les protestants qui peuvent refuser leur approbation à sa conduite. Un chanoine de Paris, M. l'abbé Delacouture, n'est pas de cet avis; il a écrit au Journal des Débats une lettre dont l'Univers lui-même constate le succès en ces termes :

« La lettre d'un ecclésiastique au Journal des Débats fait

fortune. M. de la Bédollière l'analyse dans le Siècle avec satisfaction, et le Constitutionnel la reproduit en entier, en la faisant précéder des lignes suivantes :

« Le Journal des Débats publie ce matin une lettre qui » est de nature à jeter une vive lumière sur la valeur de » certains arguments auxquels on a eu recours au sujet de » la déplorable affaire Mortara. Cette lettre est signée par » M. l'abbé Delacouture.

» En la publiant, le Journal des Débats dit qu'il le fait » avec d'autant plus d'empressement, que très probablemeut » l'opinion de M. l'abbé Delacouture n'est pas une opinion » isolée dans le clergé français, et qu'un très grand nombre » d'ecclésiastiques ont, il n'en doute pas, partagé la surprise >> et la douleur du public. »

Voici la lettre de M. l'abbé Delacouture :

« Monsieur,

Au rédacteur.

>> Je crois devoir, dans l'intérêt de la religion, vous prier d'insérer les observations suivantes :

» Recevant l'Univers un peu tard, je lis aujourd'hui seulement dans un numéro de ce journal la réponse qu'il vous adresse à propos d'un enfant né de parents israélites, et qui aurait été soustrait à ces mêmes parents par suite du baptême qu'on lui aurait conféré. La prudence conseillait de se taire, au moins, sur un pareil fait, quand il n'est pas possible de le contester; mais l'Univers ne veut jamais rester sans réponse.

» Le cas, dit-il, n'est pas nouveau. Belle raison! Comme si tout ce qui n'est pas nouveau était permis, et comme si une infraction aux droits de la puissance paternelle devenait moins odieuse parce qu'elle n'est pas nouvelle!

» Que quelques canonistes et quelques théologiens aient avancé qu'on pouvait ravir aux parents des enfants qui avaient été baptisés à leur insu ou malgré eux, que peut-on conclure de là? Faudra-t-il rendre le clergé responsable de

toutes les opinions plus ou moins excentriques soutenues par des casuistes ou des canonistes du moyen âge? Il est faux qu'une pareille coutume ait été, ainsi qu'on le prétend « de tout temps observée dans les pays catholiques, » et particu— lièrement dans le nôtre, et il est incroyable qu'on ait osé écrire « qu'il faut une singulière ignorance des principes de la religion pour supposer que des chrétiens puissent s'en étonner» (Univers, 10 octobre), c'est-à-dire puissent s'étonner de cette prétendue loi canonique et des enlèvements qui en sont la conséquence. Cette assertion est si étrange, qu'il est difficile de croire à la parfaite bonne foi de celui qui l'a émise; car tout le monde ne dira-t-il pas, au contraire, qu'il suffit de connaître les maximes et l'esprit de la religion chrétienne pour s'étonner, et s'étonner beaucoup, surtout aujourd'hui, d'un événement semblable à celui qui nous est raconté par les feuilles publiques?

» Heureusement, il est encore faux qu'une telle opinion ait été généralement enseignée par les théologiens et les canonistes. Je prends un célèbre théologien de notre France, Tournely, dans lequel on peut croire entendre toute l'ancienne Sorbonne. Il se demande s'il est permis de baptiser les enfants des infidèles malgré leurs parents; il répond négativement: Car, dit-il, ou ces enfants demeureront en la puissance de leurs parents, et alors il y aura danger pour leur foi et la grâce du baptême; ou ils seront enlevés à leurs parents, et alors le droit naturel qu'ont les parents sur leurs enfants sera violé, ce qu'assurément il n'est pas plus permis de faire que de leur ravir par violence les biens qu'ils possèdent légitimement. « Vel subducentur a potestate parentum; et tunc jus naturale quod parentes habent in filios violabitur; quod certe non magis licite fieri potest quam si ab iisdem bona quæ juste possident per vim eriperentur. » (Tournely, de Baptismo. ) Benoît XIV lui-même, dans une bulle sur cette matière, dit que les enfants qui n'ont pas l'usage de leur libre arbitre (c'est-à-dire qui sont encore dans la dépendance) et qui ne peuvent se pourvoir à eux-mêmes, sont,

:

suivant le droit naturel, sous la puissance et la garde de leurs parents. « Quamdiu ipsi sibi providere non possunt secundum jus naturale, sunt sub cura parentum. » On ne peut donc en disposer contre leur gré, les leur ravir pour les mettre dans un collége, même « quand on les élève avec le plus grand soin et que les parents ont la liberté de les visiter, » circonstances atténuantes que nous apprend l'Univers, quoiqu'il paraisse d'abord vouloir jeter quelque doute sur la certitude du fait c'est là ce qu'il aurait fallu pouvoir contester. Mais ce qui n'est susceptible d'aucun doute ni d'aucune contestation, c'est que les droits de la nature sont inviolables et que la religion ne peut jamais les enfreindre. Les colléges des catéchumènes ne doivent exister que pour les enfants des Israélites et des infidèles que leurs parents désirent faire élever dans la foi chrétienne. Il ne faudrait voir dans une institution qui méconnaîtrait ce principe qu'un reste de ces opinions du moyen âge, qui avaient étendu la juridiction ecclésiastique au delà de ses justes bornes, et il est assurément permis de désirer qu'elle modifie ses règlements, et qu'elle renonce à des prétentions que désavouent la nature et le droit public de toutes les nations. » Agréez, monsieur le rédacteur, etc.,

» Paris, le 15 octobre 1858. »

» L'abbé DELacouture.

Nous pourrions citer plusieurs décrets qui prouveraient que, même dans les États Pontificaux, on regardait comme nul le baptême administré clandestinement à un enfant non catholique, et que l'on condamnait à des peines rigoureuses et infamantes ceux qui baptisaient ainsi les enfants non catholiques et ceux qui regardaient leur action comme légitime. Mais quand bien même, à Rome, on aurait toujours suivi des règles contraires, comme le soutient l'Univers, il s'ensuivrait seulement qu'à Rome on aurait eu tort sur ce point comme sur beaucoup d'autres. Quelle que soit la puissance que l'on accorde au pape, il est immoral et absurde

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