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père Passaglia, jésuite, qui en est l'inventeur, les éloges

qu'il mérite à vos yeux.

Pourquoi, Monseigneur, n'avait-on pas raisonné de cette manière avant notre époque? Etait-ce parce qu'on ne connaissait pas assez bien la tradition, ou parce qu'on avait trop de bonne foi pour lui faire, dire ce qu'elle n'a pas dit? Nous saurons bientôt à quoi nous en tenir sur cette question.

Pour vous, Monseigneur, vous n'hésitez pas à affirmer qu'avant les travaux ordonnés par Pie IX sur l'ImmaculéeConception, on ne connaissait pas la tradition comme aujourd'hui; et que les défenseurs de l'Immaculée-Conception eux-mêmes étaient si peu intelligents, qu'en citant des textes où Marie était appelée sainte, très sainte, la plus sainte des créatures, immaculée, innocente, pure, sans tache et sans souillure, ils n'en tiraient que des conséquences peu concluantes (p. 342). Pourquoi? C'est qu'ils savaient, comme vous le reconnaissez, « que les anciens docteurs qui ont nié le privilége de l'Immaculée-Conception ont appliqué toutes ces épithètes à Marie; qu'ils ont quelquefois enchéri sur elles. Ils n'y voyaient donc point une preuve convaincante du privilége de la mère de Dieu. » Vous ajoutez en note (p. 343): « C'est la remarque fort juste de Pétau et de plusieurs autres théologiens distingués. »

Si cette remarque est fort juste, et si, des expressions que vous signalez, on ne peut conclure que l'Immaculatisme ait été enseigné par la tradition, pourquoi, Monseigneur, êtesvous revenu si souvent, dans votre livre, sur ce raisonnement? Pourquoi avez-vous fait un chapitre spécial pour prouver l'Immaculée-Conception, au moyen de textes dans lesquels les anciens théologiens défenseurs de cette opinion ont eu raison de ne l'y pas voir?

C'est que, dites-vous, ces textes ne sont pas isolés comme on l'avait cru. Pétau et ceux que vous louez n'ont point regardé ces textes comme isolés; c'est même précisément parce qu'ils savaient qu'ils étaient contrebalancés par des

témoignages nombreux et formels qui en limitaient le sens, qu'ils n'y ont point vu de démonstration en faveur de l'Immaculatisme. Ces textes, dites-vous, appartiennent à un vaste système d'éloges, d'admiration, d'extase vis-à-vis de la mère de Dieu; et de ce système, il ressort qu'on ne peut refuser à la sainte Vierge aucun privilége, même celui de l'Immaculée-Conception.

Votre raisonnement serait juste si en effet la tradition enseignait d'une manière absolue, que la sainte Vierge a été parfaite en sainteté; mais lorsqu'à côté d'éloges qui semblent au premier abord absolus, on rencontre des textes qui en restreignent le sens; lorsque ceux mêmes qui ont, suivant vos expressions, enchéri sur ces éloges absolus, se sont prononcés contre l'Immaculatisme, vous ne pourrez convaincre aucun homme raisonnable de la légitimité de votre raisonnement; tout le monde conviendra que votre vaste système d'éloges, d'admiration et d'extase n'a pas la portée que vous lui attribuez. Et l'on ne pourra que s'étonner, Monseigneur, de la hardiesse avec laquelle vous affirmez que ceux mêmes qui ont nié l'Immaculatisme lui ont, par ces éloges, rendu témoignage sans s'en douter (p. 353).

Il faut, selon Votre Grandeur, être frappé de cécité (p. 344) pour ne pas voir que la sainteté originelle ressort de ces éloges. Nous pouvons dire avec beaucoup plus de raison à Votre Grandeur qu'il faut avoir des yeux très complaisants pour l'y distinguer; il faut avoir des yeux qui n'aperçoivent que les textes favorables et qui ne voient point les autres; il faut, ajoute Votre Grandeur, fermer les yeux à la lumière pour ne pas voir que la tradition se mentirait à ellemême, si elle ne proclamait pas l'Immaculatisme; et nous, Monseigneur, nous vous dirons qu'il faut fermer les yeux la lumière pour voir les choses autrement qu'elles ne sont, pour ne pas apercevoir que des textes, en apparence absolus, ne le sont pas en réalité; pour affecter de laisser de côté une partie des témoignages de la tradition, pour se procurer l'avantage de mettre la tradition où elle n'est pas; pour exal

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ter comme magnifique une preuve qui n'établit qu'une chose : c'est que ceux qui s'en servent ont recours, en faveur de leur opinion, à des moyens que n'autorisent ni la science, ni la logique, ni la boune foi, ni l'amour de la vérité.

Vous nous permettrez, Monseigneur, de ne faire aucune attention aux réflexions générales que vous faites sur l'origine de votre dogme de la sainteté indéfinie de la mère de Jésus-Christ. Quand il s'agit de faits, il faut des témoignages et non des phrases. Vous ne faites que des phrases sur les trois premiers siècles de l'Église. Nous abandonnons ces phrases pour ce qu'elles valent, et nous arrivons aux témoignages.

Le premier que vous citez est du iv siècle; il appartient à saint Ephrem. Ce docteur et d'autres écrivains des Églises grecque et latine déclarent que tout a été miraculeux, dans la sainte Vierge; qu'elle a été prédestinée pour être la mère de Dieu; qu'elle a été choisie de toute éternité pour être la mère du Sauveur; ils enseignent que la naissance de Marie a été un miracle parce qu'elle a été conçue dans un sein stérile. « Ce fut donc Dieu, dites-vous, et non point la force productrice de la nature qui créa Marie dans le sein de sa mère. » Que signifie, dans la bouche d'un évêque chrétien, ces expressions de force productrice DE LA NATURE, séparée de l'action de Dieu? Qu'est-ce que la nature et ses forces, sinon l'ensemble des êtres qui sont, avec leurs lois, ce que Dieu les a faits? Il faut, Monseigneur, laisser ce verbiage sophistique de nature et de forces productrices en dehors de l'action de Dieu, à ceux qui croient au Dieu-nature, aux matérialistes ou aux panthéistes. Pour un chrétien, ces expressions sont des non-sens. Dites que la conception de Marie a été miraculeuse, nous n'y voyons aucun inconvénient, quoiqu'il soit fort difficile de le prouver, puisqu'on n'a que les notions les plus vagues sur ses parents; mais n'ayez pas recours, en faveur de votre thèse, à des expressions que répudient tous ceux qui ont le sens chrétien. Quelques écrivains du moyen âge ont enseigné que Marie avait été conçue, sans

que ses parents y aient contribué de la manière ordinaire; nous voulons bien l'admettre; mais de ce qu'un petit nombre d'écrivains qui n'ont jamais joui d'une grande autorité dans l'Église ont admis cette opinion, vous ne pouvez en conclure, comme vous le faites d'une manière générale, que : <«<les anciens docteurs éloignent de la Conception de Marie toutes les causes réelles ou présumées de la transmission du péché originel (p. 359). » Vous concluez ainsi, du particulier au général, ce qui est un sophisme; vous mettez la tradition dans l'opinion émise par quelques écrivains qui n'ont même jamais été comptés parmi les Pères de l'Église. Quand il serait vrai que saint Ildefonse, Fulbert de Chartres, Georges de Nicomédie, et Nicétas de Paphlagonie, auraient soutenu l'opinion que leur attribue le père Passaglia, et que vous leur attribuez d'après lui, qu'est-ce que cela prouverait au point de vue catholique? Ces témoignages ont en euxmêmes trop peu d'importance pour que l'on en tienne le moindre compte, même historiquement, à plus forte raison pour établir un dogme.

Vous citez saint Augustin, qui a dit que Jésus-Christ s'est fait à lui-même sa mère; saint Léon, qui affirme que la sagesse éternelle s'est construit une demeure dans le sein de la Vierge qu'il avait choisie. Vous passez de ces deux docteurs à Agobard de Lyon, que Votre Grandeur vieillit de deux siècles, en le faisant vivre au vir, et qui dit que la sainte Vierge avait été préparée et gardée pour l'Incarnation; l'auteur inconnu de la Couronne de Marie et Eckbert de Beloeil ont affirmé la même chose. Toute la tradition est d'accord sur ce point, selon Votre Grandeur. Nous le croyons comme elle; nous sommes persuadés que Dieu qui a tout créé par son Verbe, a créé par lui la sainte Vierge aussi bien que les autres créatures; nous croyons que Dieu, qui voit tout, dans sa prescience infinie, avait choisi Marie pour la mère du Verbe incarné. Mais il faudrait avoir vraiment trop de bonne volonté pour voir là une preuve en faveur de l'Immaculée - Conception. Que Dieu ait prédestiné la

sainte Vierge à la mission qu'elle devait accomplir; qu'il ait décidé qu'elle serait ornée de toutes les grâces intérieures, nous n'avons pas besoin, pour le croire, du témoignage de saint Ephrem; encore moins de ceux d'Isidore de Thessalonique, de Pierre-le-Mangeur, de Théodote d'Encyre, d'Anastase-le-Sinaïte, ni de tout autre.

Mais nous ne voyons pas que l'Immaculée-Conception soit la conséquence nécessaire de cette opinion. Il faut, pour établir un dogme, des témoignages clairs, formels, nombreux, qui attestent perpétuellement que Dieu l'a révélé. Vous nous les promettez pour votre chapitre de la Tradition explicite. Nous verrons bien. Mais en attendant, tous les efforts de Votre Grandeur pour établir sa tradition implicite n'ont absolument aucun résultat, aux yeux de tout homme sensé. Vos raisonnements portent à faux, et vos conséquences ne découlent pas des prémisses.

De plus, Monseigneur, nous pourrions contester la valeur et l'authencité de plusieurs de vos textes, et démontrer que non-seulement ils ne prouvent rien, mais que Votre Grandeur les a cités à faux. Vous attribuez (p. 363) à saint Anselme, un passage du Traité de la Conception virginale; cependant vous savez bien que cet ouvrage n'est pas de lui, et que ce saint docteur s'est prononcé très catégoriquement, dans ses ouvrages authentiques, contre l'opinion de l'Immaculée-Conception.

Est-ce là, Monseigneur, de la bonne foi?

De plus, comment n'avez-vous pas compris que tous les éloges généraux adressés à la sainte Vierge, authentiques ou apocryphes, dus à des écrivains schismatiques ou à des écrivains orthodoxes (car vous les confondez les uns avec les autres), que ces éloges, disons-nous, conviennent aussi bien à la sainte Vierge, purifiée dès le sein de sa mère, qu'à la sainte Vierge préservée de la tache originelle? Dès qu'il en est ainsi, il faut être frappé de cécité, il faut fermer les yeux à la lumière, pour ne pas voir qu'ils ne prouvent rien en faveur de l'Immaculatisme. Votre Grandeur se flatte donc

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