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L'OBSERVATEUR

CATHOLIQUE

REVUE

DES SCIENCES ECCLESIASTIQUES ET DES FAITS RELIGIEUX

Omnia instaurare in Christo. Eph., I, 10.

DE LA PAPAUTÉ TEMPORELLE ET DE SES
DÉFENSEURS ULTRAMONTAINS.

Par une Encyclique datée du 18 juin, le pape a recommandé son pouvoir temporel à tous les patriarches, primats, archevêques, évêques et autres Ordinaires. Il trouve mauvais que plusieurs villes des États Romains se soient soustraites à son régime paternel, qu'elles aient demandé à être soumises à celui des gouvernements italiens qui, dans ces dernières années, s'est porté l'adversaire de l'Église, de ses droits légitimes et de ses ministres sacrés.

Dans une allocution prononcée au Consistoire secret du 20 juin, le pape a entrepris de prouver que le pouvoir temporel était nécessaire à l'indépendance du Saint-Siége et au libre exercice de l'autorité spirituelle; que ceux qui l'attaquent sont les ennemis de l'Église, et qu'ils sont excommuniés. Les considérations pontificales sont peu péremptoires. D'abord, il n'y a pas que les ennemis de l'Église qui soient contraires au pouvoir temporel de la papauté. Sans faire aucune allusion au gouvernement actuel de Rome, et

en respectant les bornes assignées par les lois à une humble Revue comme la nôtre, nous pouvons bien dire que d'excellents catholiques désirent, pour le bien de l'Église, que la papauté soit débarrassée de son autorité temporelle. En étudiant l'histoire des papes, il est facile de se convaincre que leur autorité temporelle a toujours été un obstacle au bon gouvernement de l'Église, et qu'ils ont ordinairement subordonné la question religieuse aux questions politiques; ils ont certainement été trop préoccupés de cette petite motte de terre qu'ils appellent le domaine de saint Pierre, et bien souvent ces préoccupations leur ont ôté la liberté qui leur eût été nécessaire dans leur gouvernement ecclésiastique. On se sent profondément blessé dans sa conscience de catholique, lorsqu'on voit des papes mêler le sacré et le profane, dans leurs relations avec les princes. Si Léon X, par exemple, eût été simplement le premier évêque de l'Église, croit-on qu'il eût sacrifié si facilement à François Ier les élections, cette institution si vénérable et si belle des premiers siècles chrétiens? Aurait-il traité cette question comme une simple affaire diplomatique? Eût-il eu l'idée de mettre, à ses concessions, des conditions comme celle de faire vendre à tel prix le sel de ses États? Un pape qui sacrifie une institution ecclésiastique, à condition que l'on favorisera l'exploitation de ses salines! Que de faits analogues on rencontre dans l'histoire des papes! Ils n'ont rien négligé pour développer et affermir leur puissance temporelle; on les trouve mêlés à toutes les intrigues de la diplomatie, et trop souvent aux guerres qui en étaient la suite. Tandis qu'ils se disaient pères de tous les catholiques, à titre de papes, ils se déclaraient, comme princes, ennemis de telle ou telle nation catholique, et ils étaient loin de conserver, à l'égard de cette nation ennemie, l'impartialité et la justice qui étaient leur premier devoir.

Nous pourrions nous étendre davantage sur ce sujet et faire remarquer aussi que, dans tous les temps, les peuples soumis au pouvoir temporel des papes, n'ont supporté

qu'avec peine et par force, cette domination; qu'au lieu de considérer ce pouvoir comme paternel, ils en ont eu une idée toute contraire. On pourrait encore mettre, en regard des grands principes évangéliques, ceux qui ont dirigé les papes et leur cour dans l'exercice de leur souveraineté temporelle. De ces considérations on serait en droit de conclure que ce fut pour de graves raisons que Jésus-Christ ne donna de domaine temporel ni à saint Pierre, ni à ses autres apôtres; qu'il déclara que son royaume n'était pas de ce monde; qu'il avertit les chefs de son Église que leur autorité ne ressemblait en rien à celle des rois; qu'il défendit à Pierre de tirer l'épée, en l'avertissant que ceux qui, dans son Église, se serviront de l'épée, périront par l'épée.

Guidés par cette doctrine de Jésus-Christ, et par les considérations historiques que nous avons indiquées, on peut fort bien penser que l'intérêt de l'Église demanderait l'abolition de la souveraineté temporelle des papes. On comprend que nous nous renfermions dans ces considérations générales; nous n'avons pas le droit de traiter la question au point de vue actuel. Nous avons voulu seulement faire observer que Pie IX a été trop loin dans son allocution, en affirmant que ceux qui ne sont pas partisans du pouvoir, temporel de la papauté sont les ennemis de l'Église.

M. l'abbé Guéranger, qui a cru devoir mettre son talent au service de la souveraineté temporelle, veut bien admettre que des catholiques ne pensent pas comme lui; mais ces catholiques, selon le révérend Père, sont timides ou égarés (Univers du 3 juillet); il est obligé en même temps de reconnaître que la souveraineté n'est pas un dogme; c'est vraiment bien heureux que le docte néo-bénédictin fasse cette concession. Il affirme, il est vrai, que c'est par une volonté providentielle de Dieu que les papes sont investis de leur royauté; mais c'est là précisément la question. Sans doute, Dieu a permis que les papes devinssent rois, puisqu'ils le sont; mais qui a révélé à Dom Guéranger que cette permission ait été une volonté providentielle? M. l'abbé de Solesmes

n'est pas tellement initié aux secrets de Dieu qu'il ait le droit de décider entre ce qui a été voulu et ce qui a été simplement permis par la providence.

Le très révérend abbé a été très imprudent, dans sa défense de la puissance temporelle. Il faut, dit-il, que le pape soit non-seulement roi d'un pays assez étendu, il faut aussi qu'il ait le droit de gouverner son royaume selon le droit chrétien et sans contrôle étranger. On sait ce qu'entend M. Guéranger par son droit chrétien; on se tromperait en pensant qu'il veut désigner par là les grands principes de l'Évangile et de la civilisation; le droit chrétien de M. Guéranger, c'est le despotisme, c'est l'infaillibilité du pape et des congrégations romaines, c'est l'inquisition, enfin c'est l'ultramontanisme avec ses institutions anti-chrétiennes.

Comme les peuples sont fort peu disposés aujourd'hui à se soumettre à un régime aussi paternel, il est probable que, si le droit chrétien de M. Guéranger était appliqué sans obstacle et dans toute sa vérité, M. Guéranger, les rédacteurs de l'Univers et leurs adeptes, seraient obligés de se réunir des divers pays pour former le peuple du pape, et aller jouir des bienfaits du droit chrétien. On ne peut forcer les peuples à être plus heureux qu'ils ne le veulent. Si les habitants des États pontificaux n'apprécient pas le droit chrétien de M. Guéranger, le révérend Père veut-il qu'on les excommunie pour cela, et qu'on les fasse tous passer par les rigueurs de la sainte Inquisition? Le révérend Père ferait bien de nous édifier sur cette question délicate; il connaît les théories ultramontaines sur les droits et les devoirs des princes. et des peuples. Les peuples, soumis au pape comme roi, n'auraient-ils pas les mêmes droits que les autres peuples? L'Univers qui possède des publicistes si profonds: deux Veuillo! un Coquille! un Dulac ! un Guéranger! l'Univers devrait bien nous instruire sur ce sujet.

Un travail sérieux vaudrait beaucoup mieux que des injures et des personnalités. Nous nous permettrons de le dire à M. L. Veuillot, qui a jugé convenable de servir à ses

lecteurs, à propos de la cour de Rome et d'Antonelli, un article où il s'est surpassé lui-même en fait d'insolence : ce qui n'est pas peu dire.

Depuis un certain temps, le rédacteur en chef de l'Univers avait délégué son droit d'insolence aux manouvriers qui, sous son inspiration, remplissent les colonnes de l'Univers. La Patrie peut revendiquer l'insigne honneur d'avoir fait sortir Achille de la tente où il s'était enfermé, boudant les événements et les hommes, qui n'ont pas voulu suivre sa direction. La Patrie a osé dire que l'Univers était plus autrichien que catholique. A ce mot, M. L. Veuillot s'est précipité sur elle, la tête haute, l'œil fier, le poing levé : « Et toi, lui a-t-il dit, tu es un journal plus macaronique que français. Je suis enchanté d'avoir un moment ton rédacteur en chef, M. Delamarre, sous la main. Qu'est-ce que c'est donc que M. Delamarre? C'est un homme occupé : il fait du journalisme et de la haute épicerie; sa capacité suffit à cette double tâche. Cependant il peut quelquefois se tromper lorsqu'il s'occupe simultanément de déguster une partie de fromages, de prononcer sur les sirops, les primeurs, la pâtisserie sèche, et de donner un avis sur les intérêts de la papauté. Il ne sait pas toujours s'il a dans sa puissante main le fromage de Hollande ou le globe du monde, ronds tous deux. »

:

Analysons ces épices de M. L. Veuillot, qui ressemblent beaucoup aux produits des droguistes : le rédacteur en chef de la Patrie est un épicier; or, un épicier n'a ni le temps ni la capacité de s'occuper des questions religieuses; moi, rédacteur en chef de l'Univers, je suis homme de lettres et théologien j'ai donc le droit, le temps et la capacité de les traiter comme il convient. En se moquant agréablement des épiciers de la Patrie, M. L. Veuillot s'administre indirectement à lui-même un brevet de capacité. M. le rédacteur en chef de l'Univers devrait être un plus modeste; car enfin les épiciers de la Patrie pourraient lui demander si, par hasard, il aurait puisé sa science théologique au comptoir de monsieur son père. Nous ne comprenons pas bien les raisons

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