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pontificalement le jour de cette fète. Il reçut les visites du jour de l'an, et répondit à tous avec la bonté et l'affabilité qu'on admirait en lui. On cite cette gracieuse réponse qu'il fit au doyen qui lui présentait les vœux de son chapitre: non sum adeò senex ut senescat animus pro vobis.

Le 9 janvier 1733, après avoir célébré la sainte messe, au moment où il descendait de l'autel, il se sentit si abattu et la langue si embarrassée, qu'il dit à l'ecclésiastique qui l'assistait que c'était sà dernière messe.

Il éprouva une première attaque vers midi. Elle disparut promptement et ne laissa aucune trace; mais elle n'était que le prélude d'une autre plus forte qui devait survenir le lendemain. Le médecin la prévoyait et il en avertit le prélat: on lui fit une double saignée pour la prévenir. Il voulut néanmoins réciter encore le saint office. Le tendemain il se leva à quatre heures du matin, selon l'usage de toute sa vie. Prévoyant que les médecins ne lui en laisseraient pas la liberté, il récita de nouveau la partie du Bréviaire qu'il avait à dire. Il voulait ensuite aller à la cathédrale, pour y révérer les reliques de S. Firmin le Confesseur, et y gagner l'indulgence plénière, accordée par Clément XI à ceux qui s'acquittaient alors de cet acte de piété, le 10 janvier, selon ce qui a été dit plus haut: mais les personnes qui l'entouraient l'empêchèrent de s'y rendre. Il obéit, et se contenta de prier beaucoup à sa chambre. Pour prévenir l'attaque dont il était menacé, on lui fit prendre un remède qui produisit d'abord quelque soulagement. Mais le mal, comprimé quelques instants, éclata bientôt avec plus de force. A neuf heures du matin, la langue et les yeux se trouvèrent frappés d'une paralysie complète. Il perdit dès lors l'usage de la parole et de la vue, qu'il ne recouvra plus. On crut qu'il allait expirer, et on lui administra le sacrement de l'Extrême-Onction, en présence de tout le chapitre, dont la douleur était profonde.

Cependant on s'aperçut bientôt que, quoique privé de la parole et de la vue, il conservait une parfaite connaissance. Il en donnait des signes si manifestes qu'il était impossible d'en douter. Quelques jours s'écoulèrent encore pendant lesquels on lui prodigua tous les remèdes que réclamait sa position. Son confesseur qui l'assistait, et qui observait avec soin ses moindres mouvements, déclara que le prélat jouissait du plein usage de ses facultés, et qu'on ne devait pas hésiter à lui administrer le saint Viatique. On s'empressa d'en faire la proposi«

tion au pieux évêque; on le vit aussitôt donner les marques les plus touchantes de son acquiescement. Il ne cessait de faire des signes de croix sur la bouche, et s'épuisait en efforts de tous genres pour faire comprendre que tel était son plus cher désir. Par respect pour un si auguste sacrement, on tenta une dernière épreuve : on lui fit prendre une parcelle d'une hostie non consacrée, et on le pria de faire connaître par quelque signe qu'il pouvait la prendre sans accident; il le fit d'une manière très-distincte. Dès lors l'hésitation n'était plus possible le doyen, accompagné des chanoines, apporta le saint Viatique qu'il alla prendre à la cathédrale. Le prélat répondit par les marques de piété les moins équivoques aux sentiments qu'on lui suggérait. Il indiqua de nouveau qu'il avait communié, ainsi qu'il l'avait fait dans l'essai précédent. Depuis ce moment il ne cessa de donner sa bénédiction à tous ceux qui la lui demandaient.

L'un de ses prêtres lui ayant proposé de lui apporter la relique de S. Jean-Baptiste, il témoigna aussitôt toute la joie qu'il en éprouvait. Lorsqu'elle lui fut présentée, il la baisa avec un respectueux empressement. Le moment de sa mort approchait : on lui suggérait des actes de foi, d'espérance, de charité, de contrition, de résignation à la volonté de Dieu; affectueux et sensible jusqu'au dernier moment, il serrait fortement la main de celui qui les lui suggérait, sans doute comme témoignage de sa reconnaissance et de son entier acquiescement. Il avait souvent exprimé le désir, pendant le cours de sa vie, de recevoir une dernière absolution au moment de la mort. Pour faire connaître ce désir à ceux qui l'entouraient, il se frappa la poitrine à plusieurs reprises; on le comprit et on le satisfit.

Comme il touchait de plus en plus à sa fin, on lui présenta le crucifix. Ce fut alors surtout qu'il donna les marques les plus touchantes de sa piété. Il le reçut avec transport, le porta à ses lèvres et le baisa longtemps avec une sainte avidité. Puis il le serra fortement sur son cœur; et quand on lui demandait où reposait son bien-aimé, on le voyait aussitôt, avec une pieuse joie, le soulever de sa poitrine et le baiser affectueusement. Dans un moment où on lui fit éprouver une douleur très-aiguë, par l'application d'un remède violent, pour le tirer de la léthargie où il tombait peu à peu, il saisit son crucifix, et le baisa avec une telle énergie et un tel transport qu'il fit venir des larmes à tous les assistants. Toute sa vie il avait eu une grande confiance dans le mérite des souffrances de Notre-Seigneur. On l'avait toujours vu

professer une dévotion particulière pour ces paroles du Symbolė : qui propter nos homines, et propter nostram salutem descendit de cœlis. Il avait en horreur ces sentiments que l'hérésie faisait naître de son temps, et qui donnent des bornes à la rédemption de Jésus-Christ qui est le Sauveur de tous, et principalement des fidèles (1).

L'une des personnes qui l'entouraient lui ayant dit, qu'en sa qualité de pasteur et d'évêque, il devait se considérer comme étant plus étroitement encore l'enfant de l'Église, et répéter, avec sainte Thérèse je suis l'enfant de l'Église, le pieux prélat s'attendrit, il laissa couler quelques larmes, et témoigna vivement le désir qu'on lui répétât ces paroles, pour soutenir son cœur, en les méditant, par les consolations qu'elles répandaient sur sa dernière heure. Précieuse récompense de sa soumission et de son attachement inébranlable à l'Église.

Une particularité bien touchante de sa maladie, c'est que dans cet état de prostration complète de ses forces, l'amour qu'il avait toujours eu pour une vie régulière le porta à consacrer encore à Dieu, par un règlement qu'il se fit à lui-même, ses dernières heures de souffrances. Toujours uni à Dieu, il avait pourtant des moments fixés où il entrait dans un recueillement plus profond; on le voyait alors agiter les lèvres pour prier. Pendant les onze jours de sa maladie, il ne donna jamais le plus léger signe d'impalience, même au milieu de ses douleurs les plus aiguës. La volonté de Dieu l'avait réduit à un état bien humiliant il se trouvait isolé des personnes qui l'entouraient, par l'impossibilité de les voir et de leur parler. Conservant toute sa connaissance, il se voyait dans la nécessité d'être servi par les autres dans ses moindres besoins; ce qui le faisait souffrir doublement par l'extrême appréhension qu'il avait toujours témoignée d'être incommode à ceux qui le servaient. Une résignation parfaite à l'adorable volonté qui l'éprouvait ainsi, une obéissance sans réserve à tout ce qu'on exigeait de lui, surtout lorsqu'il s'agissait d'accepter et de prendre les remèdes les plus pénibles à la nature, tels furent les principaux actes de vertu par lesquels il acheva de se purifier en ce monde.

Son humilité avait été admirable pendant sa vie, elle le fut plus encore au moment de sa mort. Il fit paraître alors une délicatesse toute particulière dans l'exercice de cette vertu. Un des prètres qui

(1) Est salvator omnium hominum, maximè fidelium. (I. Timoth. IV, 10,)

l'approchaient lui ayant dit que sa ressemblance avec saint François de Sales dans sa maladie, devait lui inspirer une plus parfaite confiance en ce saint, pour lequel il avait eu toute sa vie une grande dévotion, son humilité s'alarma à ce mot de ressemblance avec saint François de Sales. Il fit un geste de la main, comme pour repousser l'éloge qu'on lui adressait. Il le réitéra plusieurs fois, et on ne put le calmer qu'en lui disant qu'il ne s'agissait que d'une ressemblance dans le genre de la maladie. Ainsi que M. de Sabatier, en effet, saint François de Sales mourut d'une paralysie qui l'avait privé de l'usage de la parole, en lui laissant sa pleine connaissance. Comme un autre prêtre citait au prélat ce passage de saint Paul, où le grand Apôtre exprime si bien ses dernières espérances: « j'ai gardé « la foi, j'ai achevé ma course, il ne me reste qu'à attendre la cou<«<ronne de justice qui m'est réservée, » son humilité s'alarma de nouveau. Un sourire particulier de sa physionomie fit connaître que cette application lui paraissait trop flatteuse. On s'approcha alors de son lit pour lui demander s'il n'espérait pas de tout sòn cœur, comme saint Paul, cette couronne de justice, par les mérites de NotreSeigneur. On l'assura que c'était le seul sentiment qu'on avait voulu lui suggérer, et aussitôt il serra la main de celui qui lui parlait, pour témoigner qu'il adhérait avec force à cet acte d'espérance.

Il entra en agonie vers onze heures, dans la nuit du 19 au 20 janvier; et dès lors il ne donna plus aucune marque de connaissance. On continua néanmoins à entourer son lit on y récitait à voix haute les actes que l'on suggère aux mourants; on y ajoutait quelques psaumes. Il expira doucement, à neuf heures du matin, le mardi 20 janvier, à l'âge de soixante-dix-huit ans. Il avait administré le diocèse vingt-six ans. Pendant sa maladie, malgré la violence des remèdes, son visage avait toujours conservé la même expression de sérénité et de douceur, La mort respecta le calme de ses traits, tout en y causant une légère altération. On admirait la blancheur et la pureté de son teint; on aimait à la considérer comme l'indice du bonheur dont il jouissait dans le ciel, et de la gloire qui était réservée à son corps à la résurrection dernière (1). Ses restes furent exposés dans la chapelle de l'évêché, selon l'usage. La ville entière accourut

(1) Caro ejus lacte candidior ita resplenduit ut quoddam resurrectionis decus extincta referret. (Sulpic. Sever, in vità S. Martini.)

lui rendre les derniers devoirs, avec un nombre considérable de personnes de la campagne.

Dans son testament écrit tout entier de sa main, après quelques legs particuliers de piété, il institue les pauvres de l'hôpital d'Amiens ses légataires universels, et se recommande humblement à leurs prières. Il indique lui-même en ces termes le motif de cette disposition: « Ayant laissé mon patrimoine à ma famille, je confirme ici « l'abandon que je lui en ai fait à Valreas. Je prie mes frères de s'en contenter, ne possédant plus rien qui n'appartienne aux pauvres « et à l'Église. »

Le prélat a laissé ses plus riches ornements au chapitre de la cathédrale, sans désigner le lieu de sa sépulture. Il est inbumé près de la chapelle de Saint-Jean-Baptiste, qu'il avait fait décorer, pour accomplir le vœu fait par la ville lors de la peste qui la ravagea. Longtemps après sa mort, les enfants et les pauvres qu'il avait tant aimés, venaient encore s'agenouiller sur les degrés de cette chapelle, et y réciter quelques prières pour le repos de leur bienfaiteur (1).

L. F. G. D'ORLÉANS DE LA MOTTE,

Quatre-vingtième Évêque (2).

Louis François Gabriel d'Orléans de La Motte naquit à Carpentras, le 13 janvier 1683, d'une famille originaire de Vicence, établie dans le Comtat depuis 1445 (la famille de Aureliano). Il fit ses études au collége des jésuites de Carpentras, et sa théologie au séminaire de Viviers.

(1) Extrait d'une lettre sur la vie de ce Prélat.

(2) Cette notice n'est qu'un court extrait de deux ouvrages qui ont été publiés sur M. de la Motte.

Le premier parut à Malines, en 1785, sous ce titre Mémoires en forme de lettres, pour servir à l'histoire de la vie de fou Messire Louis François Gabriel d'Orléans de La Motte, évêque d'Amiens, 2 vol. in-12, imprimerie de P. J. Hanicq.

Cet ouvrage est de M. l'abbé Dargnies, chanoine d'Amiens, vicaire-général du prélat et son exécuteur testamentaire. Il se compose de vingt-quatre lettres, précédées chacune d'un sommaire. Dans l'avertissement imprimé à la tête du premier volume, l'auteur annonce qu'il s'était seulement proposé de satisfaire les désirs d'un ami, « en lui communiquant les mémoires et les renseignements qu'il avait pu

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