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trancher des occupations ordinaires auxquels il se livrait (1). II revint à Amiens le jeudi avant la Pentecôte, déjà indisposé; ce qui ne l'empêcha pas d'officier pontificalement à la cathédrale le jour de cette fête. Le mal s'aggrava aussitôt, et il mourut plein de mérites le 14 juin, âgé de cinquante-trois ans, universellement regretté.

M. de Langle, évêque de Boulogne, son ami, qui était venu le visiter dans sa maladie, célébra ses obsèques. M. l'abbé de l'Estocq, chanoine théologal, prononça son oraison funèbre. »>

Jamais évêque n'a été plus aimé de ses diocésains; aucun n'a plus mérité de l'être. M. Feydeau de Brou était d'une taille médiocre, mais bien proportionnée. Il avait les manières nobles, les yeux vifs, le front serein, tous les traits du visage délicats. Son abord était des plus gracieux.

Il avait la parole ferme, le son de la voix vif et perçant, le geste simple, sans être languissant, l'expression naturelle quoique fine, la conception vive et juste.

Il charmait dans la conversation; il narrait avec beaucoup d'agrément. Ses reparties étaient promptes et toujours pleines d'esprit, sans recherche ni prétention

Il faisait toutes les cérémonies de ses fonctions sacrées avec beaucoup de facilité, et en même temps avec beaucoup de dignité et de décence.

Il était théologien instruit et très-versé dans la science de l'Écriture, dont l'étude avait toujours fait sa principale occupation. Il connaissait l'histoire et était bon littérateur. Il possédait toutes les connaissances qui conviennent à un évêque, et son génie supérieur en faisait un excellent usage.

Jamais on ne vit ami plus sincère, aussi ardent à faire le bien de ceux qu'il honorait de son amitié, que désintéressé en tout ce qui le concernait. Toujours disposé à obliger ceux qui avaient recours à lui, il ne refusait son secours et sa protection à aucun de ceux qu'il savait en avoir besoin. On pouvait dire de lui ce qu'on a dit

(1) Plusieurs circonstances augmentèrent ses fatigues dans cette dernière visite. Le chemin qu'il fallut faire dans certaines journées fut fort long, et il se trouva beaucoup de malades dans la contrée qu'il parcourut; or il avait pour habitude de visiter tous les malades, et ordinairement à pied. » (Relation de la vie et la mort de M. Feydeau de Brou. Manuscrit.)

d'un ancien Romain, que personne ne connut jamais mieux son pouvoir, qu'en se trouvant par son secours délivré de quelque danger, ou en obtenant quelque faveur; cujus potentiam nemo sensit, nisi aut levatione periculi, aut accessione dignitatis (1).

Son chapitre a été plus particulièrement l'objet de sa bienveillance. Il en était le père, le protecteur, et on peut ajouter le solliciteur de ses affaires. Souvent le chapitre apprenait les bienfaits que le prélat lui avait obtenus à la cour ou au conseil, avant qu'il eût le temps de lui demander sa protection pour les obtenir.

On l'a vu plusieurs fois conduire les députés du chapitre chez les juges saisis d'une affaire à laquelle ils étaient intéressés. Ces magistrats ne pouvaient s'empêcher de témoigner combien ils étaient surpris, et en même temps édifiés, de cette extrême bonté.

Lorsqu'il faisait du bien à quelqu'un, c'était d'une manière si obligeante et si gracieuse, qu'elle faisait oublier en quelque sorte le don qu'il faisait, en même temps qu'elle augmentait la reconnaissance de celui qui le recevait.

Il avait une attention particulière à porter les ecclésiastiques à la perfection de leur état. Il ne donnait des bénéfices, particulièrement dans son église cathédrale, qu'à ceux qui étaient nés dans le diocèse, pour que l'espoir de la récompense les y retînt, et fût un motif qui les excitât à travailler sous ses yeux. On pouvait dire du temps de son épiscopat ce qu'on disait du temps d'Honorius:

sub teste benigno

vivitur; egregios invitant præmia mores (2).

Si quelque ecclésiastique de son clergé s'écartait de son devoir, il l'engageait à y rentrer avec tant de prudence et de ménagement, que le coupable ne se plaignait pas de la rigueur de la peine, convaincu de la justice de celui qui la décernait.

Solidement vertueux, et fortement pénétré des vérités de la religion, il en pratiquait tous les devoirs avec exactitude, mais sans ostentation. Il faisait de fréquentes retraites au séminaire; on a pu

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conserver quelques résolutions qu'il y avait prises, elles témoignent du zèle avec lequel il travaillait à sa sanctification (1).

Il était si occupé de ses devoirs que l'on conçoit difficilement comment, malgré la faiblesse de sa santé et la délicatesse de son tempérament, il a pu soutenir les fatigues auxquelles il s'est exposé sans interruption pour les remplir. Il écartait tout ce qu'il croyait pouvoir l'en détourner.

C'est dans cette vue qu'il a évité avec le plus grand soin les procès. Il comptait pour rien les avantages temporels qu'il pouvait en relirer, par cela seul qu'ils devaient lui faire perdre un temps précieux qu'il se croyait obligé d'employer plus utilement au soin de ses ouailles.

Sa résidence était presque continuelle. Lorsqu'il allait à Paris, tout le temps de son séjour était employé à rendre service à ses diocésains.

Naturellement modeste, il souffrait avec peine les louanges qu'on lui adressait, lors même qu'il les avait méritées. Il avait absolument défendu que les prédicateurs lui fissent les compliments d'usage. Il ne les permettait pas davantage dans ses visites pastorales; il n'en voulait pas même quand son chapitre venait le saluer, au retour d'un voyage qu'il avait fait hors du diocèse. La joie qu'il voyait peinte sur le vi

1. En m'éveillant, pen

(1) Résolutions de la retraite du 15 avril 1704. ser à Dieu, et ne point permettre à mon imagination de se remplir d'idées profanes. 2. Faire un quart d'heure d'oraison tous les matins.

3 Faire un court examen après le diner.

4. Faire tous les jours une lecture de piété.

3. Lire tous les jours au moins deux chapitres de l'Écriture.

6. Aller tous les mois ou à l'hôpital, ou à l'hôtel-Dieu, ou aux prisons, lorsque je ne serai point en visites.

7. Être très-circonspect dans mes regards et dans mes manières.

8.. Avoir un confesseur exact, auquel je me confesse au moins tous les mois, à moins que je ne me confesse à d'autres dans le cours du mois, lorsque je ne suis pas à Amiens, ou lorsque l'occasion ne me permet pas de l'envoyer chercher.

9. Être très-réservé à parler des autres, et tâcher de ne parler que de ce qu'ils ont de bon.

10. Disposer les occupations de ma journée, de manière que je perde peu de temps à recevoir des visites inutiles.

11. Entendre la messe avec grande application, et la dire avec le prêtre.

sage de ceux qui le saluaient lui suffisait; il la considérait comme un témoignage plus sincère de l'affection de ses ouailles, que les discours les plus éloquents qu'on aurait pu lui adresser.

Les dépenses de sa maison étaient réglées avec ordre et économie. Selon la pensée de saint Jérôme, il n'était prodigue que dans ses aumônes, sola liberalitate excedebut modum (1).

Il n'y avait pas de misères qui pussent échapper à la vigilante charité de ce saint évêque. Il savait les découvrir en quelque endroit de son diocèse qu'elles se tinssent cachées. Il soulageait les pauvres, et ménageait leur plus extrême susceptibilité, par la manière délicate avec laquelle il leur faisait parvenir ses dons.

« Tous les ans, au commencement de l'hiver, il faisait faire des habits et du linge pour trois ou quatre cents pauvres de la ville et des faubourgs, et pour tous ceux des terres de l'évêché, surtout de Pernois et de Montières. Ces deux dernières paroisses étaient pourvues, par ses soins, de maîtresses d'école qui instruisaient gratuitement les jeunes filles, soignaient les malades et leur fournissaient les remèdes et les aliments nécessaires.

L'Hôpital-général et l'Hôtel-Dieu d'Amiens avaient aussi part à ses libéralités annuelles, ainsi que la Miséricorde d'Abbeville, l'hôpital de Montdidier, l'hospice des Orphelins de Montreuil, et l'assemblée des Dames de la Charité, établie par ses prédécesseurs dans la ville épiscopale, pour visiter et soulager les pauvres et les malades (2).

Sa charité s'étendait à toutes les misères. Les incendiés, victimes d'un fléau si fréquent en Picardie, trouvaient toujours un secours auprès de lui.

Pendant ses visites pastorales, il laissait pour les pauvres de chaque paroisse, une aumône de dix à quarante livres, indépendamment de ce qu'il donnait aux malades qu'il visitait tous, selon sa coutume invariable.

Ce n'était que par la plus stricte économie, et par l'éloignement de toute dépense superflue, qu'il pouvait suffire à tant d'aumônes ordi

(1) Hier. Epit. 27.

2) « C'est en partie par ses soins, et de ses propres deniers, que l'Hôpital« général d'Amiens a reçu en peu d'années plus de vingt mille livres, qui ont servi à y faire l'un des principaux bâtiments où les pauvres sont aujourd'hui « logés.» (Extrait du Mémoire des charités de M. l'Evêque d'Amiens. )

naires, et aux dons particuliers qu'il fit souvent, soit à la maison des filles repenties, soit à plusieurs communautés pauvres, soit à diverses familles tombées dans la misère (1). »

On pourrait dire de lui ce que saint Jérôme disait de sainte Paule: il avait un saint empressement à connaître les pauvres qu'il pouvait secourir, et il considérait comme un bien perdu pour lui, le secours qui aurait été donné par un autre à un indigent abandonné: damnum putabat, si quisquam debilis et esuriens cibo sustentabatur alieno (2).

Aussi les pauvres l'ont pleuré longtemps; et leurs larmes, pour nous servir des paroles de saint Ambroise, lui ont procuré l'entrée de la gloire, en même temps qu'elles ont adouci dans le diocèse les regrets universels que sa mort y a excités: istæ sunt lacrymæ redemptrices, illi gemitus qui dolorem mortis abscondunt (3).

PIERRE DE SABATIER,

Soixante-dix-neuvième Évêque.

Pierre de Sabatier naquit à Valreas, petite ville du comté Venaissin, au diocèse de Vaison, le 14 novembre 1654. Il était fils de Pierre de Sabatier et de dame Jeanne de Guyon, tous deux recommandables par la noblesse de leur famille, mais beaucoup plus par leur grande piété. Ils s'appliquaient à l'inspirer à leurs enfants, en leur procurant une bonne éducation. Pierre de Sabatier fit ses premières études au collége des jésuites, à Avignon. On l'y vit prendre dès lors le goût des belles lettres qu'il a conservé toute sa vie.

Il entra en 1673 au séminaire de Saint-Sulpice, à Paris. Son directeur fut M. Tronson, si révéré comme maître de la vie spirituelle et ecclésiastique. Cet habile directeur remarqua bientôt les heureuses dispositions que Dieu avait données à M. de Sabatier il le prit en affection et ne négligea rien pour en faire un digne ministre

(1) Mémoires des charités de M. l'Evêque d'Amiens.

(2)« Au milieu de la foule qui venait visiter le Prélat défunt, exposé dans la « chapelle ardente, on remarqua une pauvre femme qui excitait son enfant à bien «< considérer le saint Évêque. Elle était derrière les autres, et tenait son enfant « élevé au-dessus de la tête: regarde-le bien, lui disait-elle, il ne fera plus « l'aumône! » (Relation de la mort de M. l'Evêque d'Amiens.)

(3) Ambrosius, de excessu fratris sui.

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