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ment, est de surveiller, sans les troubler, les hommes qui s'y livrent, comme ceux qui se livrent à d'autres professions.

On dit encore, pour prouver que le gouvernement doit avoir la direction générale de l'enseignement, que les doctrines religieuses, philosophiques et politiques qui en sont l'ame, sont dans les intérêts généraux de la société (1). » Cette raison ne vaut pas mieux que la précédente. Les doctrines qui doivent servir de base à l'enseignement sont dans les intérêts généraux de la société, sans doute; mais il ne résulte nullement de là que le gouvernement doive être chargé de diriger l'éducation et l'instruction des citoyens. Il ne suffit pas qu'une chose intéresse généralement le corps social pour qu'elle tombe dans le domaine du pouvoir. Les doctrines religieuses, morales et politiques, qui servent de base à une multitude d'ouvrages qu'on publie tous les jours, sont aussi, et de la même ma nière que les principes de l'enseignement, dans les intérêts généraux de la société ; cependant, on n'en conclut pas que le gouvernement doive avoir la direction suprême de la pensée, et qu'il

(1) Opinion de M. Royer-Colard, déjà citée.

faille mettre au rang de ses attributions la faculté d'empêcher la publication d'un livre, commé l'établissement d'une école

sans son autorisa

tion spéciale. Nous voyons, au contraire, que nos ministres rejettent avec indignation toute idée de censure préalable, et que depuis deux ans, ils se donnent les plus grandes peines pour assurer la libre publication des écrits. De même, les doctrines économiques et politiques qui sont l'ame du commerce, de l'industrie et de l'agriculture, sont bien certainement dans les intérêts généraux de la société; et pourtant, personne ne s'avisera de prétendre que l'industrie agri cole, commerciale ou manufacturière, doive être mise en régie, et qu'il soit nécessaire de donner à l'autorité le droit d'intervenir dans nos spéculations de commerce, ou de décider d'après quels procédés il nous sera permis de labou rer nos champs et de tisser nos étoffes. Les inté rêts auxquels le gouvernement est chargé de pour voir sont des intérêts généraux, cela est incontestable ; mais il n'est pas chargé de pourvoir à tous les intérêts généraux; les seuls qui soient véritablement de sa compétence sont le maintien de la sûreté et de la liberté publiques. Son métier n'est point de réglementer les arts, les sciences, le commerce, l'agriculture; de se faire di

recteur d'imprimerie, chef d'atelier ou régent de college; il doit laisser à la société l'exercice des professions, quelles qu'elles puissent être ; et sa tâche, au milieu du libre et plein mouvement de toutes les industries sociales, est, non de s'y mêler, car il ne pourrait que le ralentir, mais d'empêcher que personne ne le trouble, de réprimer tout homme qui ferait de ses facultés un emploi nuisible au corps social ou à quelques-uns de ses membres,

.. On dit enfin qu'il n'est pas plus étrange de voir le gouvernement faire le monopole de l'éducation qu'il n'est étrange de lui voir faire le monopole de la justice ou de la force armée (1); c'est-à-dire qu'il doit être chargé de diriger l'éducation par la même raison qu'il est chargé d'appliquer les lois, de faire exécuter les jugemens ou de repousser les agressions étrangères. Cela est faux et très-faux. Il n'y a pas la moindre analogie entre maintenir l'ordre public et diriger des écoles; entre.exercer une industrie et réprimer ceux qui en abusent; l'un est une profession et l'autre une magistrature; l'un est dans les attributions

(1) Voyez encore l'opinion déjà citée de M. RoyerColard.

du pouvoir, et l'autre dans le domaine des particuliers. Le gouvernement est, en général, chargé du maintien de l'ordre et de la paix ; c'est là sa tàche; il doit la remplir à l'égard de l'enseignement comme à l'égard de toute autre profession, c'est-à-dire que, s'il se passe des désordres dans une école, il doit les réprimer avec le même soin qu'il réprimerait des délits commis dans toute autre espèce d'établissemens; mais de ce qu'il doit sévir contre le mal qui se ferait dans une maison d'éducation, il ne s'ensuit nullement qu'il doive se constituer le régent universel des écoles. Autant vaudrait dire qu'il doit se faire directeur des marchés publics ou marchand de comestibles, parce qu'il doit empêcher qu'on ne se batte à la halle ou qu'on n'y vende des alimens dangereux.

C'est donc en vain que, par une confusion savante, on voudrait faire entrer la direction de l'enseignement dans les attributions de l'autorité. La faculté d'enseigner ne peut passer sous son empire que pour être surveillée et non pour être envahie. Comme toutes nos facultés naturelles, elle est un droit public, dont le gouvernement doit réprimer l'abus, mais dont il ne peut accaparer l'usage. Il faut admettre qu'il a le droit ou plutôt l'obligation de veiller à ce

qu'il ne s'enseigne dans les écoles rien de contraire aux lois, à ce qu'il ne s'y passe rien que réprouvent les mœurs et la décence publique; mais il faut nier qu'il puisse apporter d'ailleurs la moindre entrave à l'enseignement; il faut dire qu'il doit poursuivre devant les tribunaux la répression des délits qui peuvent se commettre dans tout établissement d'éducation ou d'instruction; mais il faut signaler comme un attentat violent à la propriété et à la liberté, le droit qu'il prétendrait s'arroger d'interdire arbitrairement une école, parce qu'il n'en approuverait pas l'esprit, et, en général, de ne laisser subsister ou se former aucun établissement de ce genre sans son autorisation.

Et ce n'est pas seulement à la propriété et à la liberté de quiconque veut se livrer à l'enseignement qu'une prétention pareille est attentatoire ; elle fait à ceux qui veulent s'instruire la mème violence qu'à ceux qui veulent enseigner; elle leur interdit le choix des maîtres et celui des méthodes et des doctrines; elle ne leur permet de se décider, à cet égard, qu'entre ce que le gouvernement veut bien autoriser. Enfin, et ce qui est plus criant encore, elle enchaîne l'autorité paternelle; elle ravit aux parens le plus précieux et, sans contredit, le plus incontestable de leurs

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