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Remarquons que Pecquet est si peu hostile à Pascal, qu'il le comble d'éloges. S'il ne cite pas le Récit, c'est qu'il l'ignore. S'il affirme que rien, à sa connaissance, n'a été publié sur l'expérience du Puy-de-Dôme, c'est qu'il a cherché et n'a rien trouvé. Or, si le Récit avait été publié à la fin de l'année 1648, le nom de l'auteur et l'intérêt des documents qu'il contient eussent fait de sa publication un évènement scientifique; Pascal lui-même nous dira qu'il en fut ainsi ! Comment Pecquet qui est à Paris très répandu dans le monde savant, qui écrit, quatorze mois plus tard, sur le vide et la pression atmosphérique et qui a cherché à se documenter, comment n'en a-t-il rien pu apprendre (1)? »

Nous avouons que l'idée ne nous est pas venue de mesurer les lacunes de l'érudition de Pecquet en balançant les noms de Savreux et de Cramoisy, et en comptant les pages des deux brochures; et c'est maintenant seulement que l'idée nous vient de comparer leurs titres :

Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs, projetée par le sieur B. P. pour l'accomplissement du Traité qu'il a promis dans son ABRÉGÉ touchant le vide, et faite par le sieur F. P., en une des plus hautes montagnes d'Auvergne. Ni ce

titre, ni la « divulgation éclatante » du Récit, ni « l'éclat de cette publication » n'auraient suffi à avertir Pecquet, l'ami de Pascal, de Roberval, de Mersenne, d'Auzoult, du P. Noël ; il aurait passé devant cet événement comme il a passé devant la Gravitas comparata seu comparatio gravitatis aeris cum Hydrargyri gravitate du P. Noël, et l'inadvertance, dans les deux cas, aurait le même poids.

« 18' Le texte même de Pecquet (2) ne permet pas de conclure que l'expérience attribuée à Auzoult soit la forme originale. de l'expérience du vide dans le vide, B 782 et D 203. Elle est distincte des deux formes qui ont été inventées par Pascal et par

(1) R 1908, p. 205.

(2) R 1908, pp. 207 et suiv.

Roberval, et qui ont été publiées en 1648. Tant qu'on n'aura pas d'autre point de repère que la date de publication, il faudra considérer l'expérience d'Auzoult comme une troisième variante de l'expérience.

» 19° Les lettres d'Auzoult (1) et de Monflaines (2) à Mersenne, comme la lettre de Carcavi à Huygens, du 7 février 1659 (3) et la copie d'une note transmise de la part de Pascal (4), ne permettent pas de présumer qu'il y ait eu la moindre revendication d'Auzoult relativement à l'expérience du vide dans le vide, ou la moindre trace de refroidissement entre les deux amis, C 198 et F 871.

» 20° Les textes de la dissertation de Pierius et de la publication de Dominicy (5) ne permettent pas d'accuser Pascal d'avoir menti volontairement en écrivant à M. de Ribeyre (6) en juillet 1651, C 203 et F 836. L'indication des dates est inexacte; la référence à la lettre de Roberval est inexacte. Mais sur le fond des choses la mémoire de Pascal ne l'a pas trahi; les expériences de Rouen ont été publiées plusieurs mois avant l'expérience de Varsovie (7), et dès l'arrivée de la Demonstratio ocularis à Paris, le P. Magni a été accusé, dans un écrit imprimé (8), d'avoir fait son expérience sur un rapport venu de France.

» 24° La réimpression de la Demonstratio ocularis dans l'écrit. de Dominicy ne permet pas de prétendre que Pascal en impose à M. de Ribeyre ou aux Jésuites de Montferrand, lorsqu'il les

(1) « Mon Père, obligez moi de... me mander quelles nouvelles M. Roberval a eu du voleur de Pologne » (Val. Magni). (Lettre du 21 août 1648).

(2) « Je vous rends gràces de vos nouvelles. M. Auzoult ne m'ayant quasi faist part de pas une de vos expériences, je vous supplie de me mander celle que vous dites du vuide dans le vuide pour prouver la colonne d'air » (Lettre du 17 juillet 1648).

(3) OEuvres de Christ. Huygens, t. II, 1889, p. 347.

(4) Ibid., p. 349.

(5) Pierius date les expériences publiques de Rouen du mois d'octobre 1646. Pascal, en parlant de la lettre de Roberval à des Noyers, aurait eu dans la pensée la publication, par Dominicy, de la lettre de Petit.

(6) R 1908, pp. 212 et suiv.

(7) M. Brunschvicg écrit, en note (t. II, 490): « La chronologie de Pascal (dans la lettre à de Ribeyre) est tout à fait inexacte. L'expérience du P. Magni est de 1647, et de trois mois antérieure à l'imprimé de Pascal (Expériences nouvelles). La seule publication sur les expériences de Pascal que le P. Magni aurait pu, sans invraisemblance, être soupçonné d'avoir connue, est la dissertation latine de Jacob Pierius: An detur vacuum in Natura. »

(8) Celui de Dominicy.

invite à confronter l'Abrégé de ses expériences avec la brochure du P. Magni, C 205. »

Voici le texte de Pascal auquel il est fait allusion: « Si ce bon Père Jésuite a cognoissance de mon escript et de celuy du P. Capucin (ce que je ne crois pas), qu'il prenne la peine de les confronter, il verra la vérité de ce que je dis. » La confrontation eût montré le contraire.

Dans une note, au sujet des erreurs de la lettre à de Ribeyre, M. Brunschvicg ajoute cette réflexion: << on serait bien empêché de déterminer l'intention de

ces erreurs ».

Nous croyons avoir fidèlement présenté les rectifications principales groupées par M. Brunschvicg dans l'introduction des Œuvres de Blaise Pascal. Toutes ne sont pas également importantes ni, peut-être, également justifiées. Une difficulté, entre autres, subsiste entière et elle est la plus importante.

Pour pouvoir inventer, réaliser et interpréter, comme il le fait, la seconde partie de l'expérience du vide dans le vide montrée à Perier, Pascal a dù connaître, dès le mois d'octobre 1647, « ce que nous appelons la loi de Mariotte, non pas, sans doute, en son énoncé quantitatif, mais sous cette forme qualitative: la pression d'une masse de gaz donnée, à température constante, croît ou décroît quand son volume diminue ou augmente (1). » En d'autres termes, il n'a pas suffi à Pascal de connaitre la pesanteur de l'air ni d'embrasser, d'un même coup d'oeil, l'équilibre des liqueurs, c'est-à-dire l'équilibre des fluides, gaz ou liquides, pesants; il a dù connaître cette propriété spéciale et caractéristique des gaz leur expansion spontanée; il a dû connaître la pression d'expansion qu'exerce

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une masse d'air confinée en un vase clos; il a dû savoir que cette pression variait avec le volume de ce

vase.

Or les documents connus jusqu'ici nous montrent l'origine de ces notions et leur application aux phénomènes barométriques observés en un case clos de volume variable, renfermant une petite quantité d'air de poids négligeable, dans des expériences postérieures au mois d'octobre 1647, celles que Roberval expose dans sa seconde Narration et qu'il s'attribue. Comment cette doctrine et ces expériences ont-elles passé dans la lettre à Perier? Voilà l'objet essentiel de la contro

verse.

Peut-on l'écarter par une simple fin de non-recevoir, en se bornant à dire que « Roberval retrouve ainsi les résultats que Pascal avait montrés à Perier vers la fin d'octobre ou le commencement de novembre 1647 » (t. II, p. 291) ? Roberval n'a-t-il pas trouvé le premier, et après cette date, la seconde partie au moins de cette expérience et les notions nécessaires qu'elle suppose? Sur quoi se base-t-on pour affirmer qu'il « retrouve » tout cela? Tant que cette difficulté subsiste, la thèse de M. Mathieu est-elle définitivement et complètement écartée ? Ne peut-elle surgir à nouveau transformée et appuyée sur ce document de très grande valeur, la seconde Narration de Roberval? Au moins, ne reste-t-il rien de « l'esprit » de cette thèse et peut-on affirmer, dès maintenant, qu'elle a perdu « non seulement toute consistance intrinsèque, mais toute base objective » ?

Il nous resterait à réunir d'autres renseignements intéressants, disséminés dans les trois premiers volumes des Euvres de Pascal. Nous espérons pouvoir le faire dans un prochain article; nos lecteurs auront alors sous les yeux les textes mêmes ou l'analyse des documents essentiels. Si c'est un devoir pour nous de

les leur présenter, c'est leur droit de les étudier, de contrôler l'interprétation qu'on en donne, de peser les preuves qu'on en tire. Ce n'est pas une invitation à ne pas user de ce droit que M. L. Brunschvieg a formulée dans cette conclusion: La lettre de Pascal à Perier « doit être publiée, à sa date et dans son texte, sans que l'éditeur le plus scrupuleux puisse conserver le moindre soupçon; ce serait un signe bien fàcheux si, pour quelque raison que ce soit, on n'allait pas accueillir avec bonne grâce un pareil dénoùment. »

Ces paroles sincères traduisent la conviction absolue du savant éditeur de Pascal, d'avoir projeté la pleine lumière sur cette question débattue, et cela, au prix d'un immense labeur dont tous ceux qui s'intéressent à l'histoire des sciences lui sont infiniment reconnaissants.

10 décembre 1908.

J. THIRION, S. J.

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