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c'est sur mer que l'Espagne reçoit le coup mortel des États-Unis d'Amérique; sur mer aussi le Japon frappe deux fois la Russie, au commencement et à la fin de la grande guerre qui les mit aux prises en ExtrêmeOrient.

Des raisons économiques, politiques et scientifiques s'accordent pour expliquer la renaissance de la guerre

maritime.

La mer porte la fortune du monde. Les trois quarts du commerce extérieur lui sont confiés tous les ans ; la valeur en est énorme, au moins 70 milliards de francs, peut-être 90 milliards. Les flots de l'Océan qui ont fécondé toutes les grandes civilisations, appellent nos volontés et nos énergies. Les peuples ne peuvent s'enfermer dans leurs frontières naturelles, il faut qu'ils essaiment dans des contrées lointaines et que la mer leur serve de moyen d'expansion et de prospérité.

La poursuite de la richesse engendre des rivalités économiques qui se doublent bientôt des rivalités politiques. Sur la grande route de l'Océan chacun cherche à se garder contre les coups de force qui mettraient entrave à son commerce, ruineraient ses ports, affameraient sa population. On ne souffre plus qu'une puissance seule soit la dominatrice de la mer et l'on s'arme pour se défendre sur les flots. L'Angleterre est obligée de renoncer à son absolutisme maritime; loin de la métropole, elle diminue la densité de ses escadres, l'augmente dans les eaux européennes et, dans ces caux, déplace la masse principale de la Méditerranée dans la Manche et dans la mer du Nord. Ainsi, prète à l'attaque comme à la défense, elle concentre sa puissance navale.

Depuis Santiago, les États-Unis d'Amérique ne réservent plus uniquement leur flotte au rôle de forteresse mobile; l'Armada américaine a accompli récemment une course extraordinaire qui montre bien qu'on entend

éventuellement, s'en servir comme d'une arme offen

sive.

L'Allemagne avec une ténacité qui a provoqué l'étonnement universel, s'est construit une marine de guerre qui sera demain formidable.

Le Japon entend ne pas perdre la supériorité maritime que lui a donnée la bataille de Tsoushima.

La France, la Russie, l'Italie ont consacré et consacrent encore à l'amélioration, à la réfection, à l'augmentation de leurs flottes des sommes considéra

bles.

Coincidence remarquable! la technique, la stratégie et la tactique navales ont pu progresser en même temps que grandissait le rôle de la guerre maritime. L'industrialisation a donné à la marine plus de puissance et plus d'aptitude à remplir sa mission. La vapeur, victorieuse de la distance et des intempéries, a permis l'accroissement des flottes, l'augmentation des équipages, en favorisant la rapidité et la précision des opérations. Les cuirassements, les bouches à feu de gros calibre, les canons à tir rapide, les torpilles ont fait des flottes de guerre de terribles instruments de destruction. La télégraphie sans fil met en relations instantanées tous les éléments des forces navales et facilite les combinaisons stratégiques. Cuirassés, croiseurs, torpilleurs de haute mer, destroyers, forment un tout harmonique qui permet à la guerre maritime de se développer au large des Océans, tandis que près des côtes, pour la protection des ports et des rades, la science lui fournit tous les éléments matériels, actifs et passifs, d'une vigoureuse résistance.

Que les moyens mis à la disposition de l'art militaire se multiplient et se perfectionnent encore, que des flottes aériennes sillonnent les nues et en fassent tom

ber la dévastation et la mort, je ne pense pas que la guerre finira par suite de la puissance, du nombre et

de la complexité des armes et des engins. La science ne sera pas en cela la grande régénératrice; elle ne réussira pas à vaincre la guerre, pas plus qu'elle ne réussira à vaincre complètement la nature.

Au fond, il s'agit d'une question morale. L'humanité ne cessera pas de vivre sous l'empire de quelques idées générales, d'être soumise à quelques nécessités essentielles, idées et nécessités toujours les mêmes et qui ne semblent se modifier, s'abolir, renaître à travers les âges, qu'en raison du cadre changeant que leur font les différentes civilisations. Dernière les mots et les formules, l'on trouve toujours l'homme s'acharnant ici bas après le mirage du bonheur et se heurtant constamment au dur horizon de la réalité. Il faut gagner son pain à la sueur de son front, il faut souffrir, il faut lutter. La lutte est en nous, elle est en dehors de nous, elle est dans tout l'Univers, et qui done a dit que les astres dans les cieux se livraient un incessant combat? Il n'y a point de luttes pacifiques quelle singulière antithèse! Ne plus lutter c'est l'immobilité, la corruption ou la mort.

Ayons horreur de la guerre; humanisons-la, cherchons à l'éviter, mais ne l'avilissons pas trop ! Qu'elle ne nous surprenne pas dans une quiétude amollissante! Sachons envisager les épreuves qu'elle comporte, les sacrifices que son éventualité nous impose comme une part de nos inévitables misères, comme la rançon de nos jours de prospérité, comme une dette et un devoir envers la Patrie.

C. BEAUJEAN.

VARIÉTÉS

I

A PROPOS

D'UNE

HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES (4)

(Suite)

Lorsque Charlemagne, en la fête de Noël de l'an 800, échangea la couronne royale contre le diadème impérial, il avait, depuis un quart de siècle, donné l'impulsion à ce relèvement intellectuel des nations franques que l'Histoire a appelé la Renaissance carolingienne. Cet heureux mouvement avait été préparé, du reste, par les sages efforts de Pepin le Bref (741-768) : il ne serait pas juste que l'éclat du règne de Pepin, le premier roi des Francs, s'effaçat devant la splendeur du règne de son fils.

Les Mathématiques obtinrent leur part dans les faveurs de ces deux princes. Complètement inconnues en nos pays sous les Mérovingiens, nous les verrons y faire leur apparition sous le fils et le petit-fils de Charles Martel, et désormais, sur le sol belge du moins, elles ne cesseront d'ètre cultivées, à travers la période qui sépare l'ère de Charlemagne de l'ère des Croisades. Préoccupé de l'ordre et du progrès, Pepin aimait à prendre

(1) Histoire des Mathématiques, par W.-W. Rouse Ball. Édition française, par L. Freund. - Tome I, Paris, A. Hermann, 1906. Tome II, avec des Additions de R. de Montessus. Paris, A. Hermann, 1907.

Voir REVUE DES QUEST. SCIENT., 3a série, t. XII, oct. 1907, pp. 594-607; t. XIII, janv. 1908, pp. 252-267, et avril, pp. 558-578; t. XIII, juillet 1908, pp. 228-235, et oct., pp. 564-580.

pour conseiller l'évêque saint Boniface, ce moine anglo-saxon Winfrid, de son nom barbare devenu, de docte scholar de l'abbaye de Nursling, l'apòtre de la Germanie et le réformateur du clergé de la Gaule. Le prince inaugura les grandes œuvres qu'acheva Charlemagne : il réforma dans son royaume le système métrique et le système monétaire; il favorisa les obscurs recommencements des études profanes dans les cloîtres monastiques et dans les chapitres collégiaux ; il chercha à s'entourer d'hommes instruits.

Parmi les hommes qu'il sut distinguer pour leur science, citons le moine irlandais Virgile le Géomètre. Abbé du monastère d'Aghaboé, Virgile, ou Feirgil, avait quitté en 743 le cloitre irlandais et était venu sur le continent, accompagné de son ami Dubda le Grec. Pepin, charmé de sa science comme de sa vertu », le retint deux années à sa cour, et se réjouit de le faire élever dans la suite au siège épiscopal de Salzbourg (1). Ce Virgile est précisément le moine célèbre dans l'histoire des sciences par son affirmation de l'existence, aux antipodes, de terres habitées. Mélangeant en sa personne, sans les fusionner assez, le type ardent du moine celtique, autrefois résumé en saint Colomba d'lona, ou Columb Keillé, et en saint Colomban, et le type plus souple et plus modéré du moine anglo-romain, personnifié alors dans l'archevêque saint Boniface (680-755), le moine irlandais Virgile eut plus d'un démêlé avec le vieil archevêque. En 748, celui-ci le dénonça au pape Zacharie. Il s'agissait — du moins ainsi le comprit le pape de perversà et iniquà doctrinà, quod alius mundus et alii homines sub terrâ sint seu sol et luna» (2). Boniface et Zacharie s'étaient inquiétés, croyant qu'on affirmait l'existence sur notre globe, sous un autre ciel, de races humaines non adamiques. Il est à croire que Virgile justifia aisément et complètement son opinion sur l'existence de peuples qui à la fois soient nos antipodes et comme nous descendent d'Adam; car nous le voyons sacré en 767 évêque de Juvavia, ou Salzbourg. Il illustra ce siège par sa science et par ses vertus,

(1) MONUM. GERM. HIST., Script., t. XI, p. 86.

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(2) Mabillon, Acta SS. O. S. B., sæc. III, 2 (Paris, 1672), p. 72. — Cf. Ph. Gilbert, Le pape Zacharie et les Antipodes, dans la REVUE DES QUEST. SCIENTIF., 1oo série, t. XII, oct. 1882, pp. 478-503. Touchant les opinions des Pères, voy. S. Augustin, De Civit. Dei, XVI, 9; S. Isidore, Etym., III, 32, 43, 59; Bède, De Naturâ rer., 3 et 36, et De Temporum ratione, 32 et 34. S. Augustin rejetait l'existence de peuples antipodes, parce que l'immensité des océans était, à ses yeux, un insurmontable obstacle aux transmigrations des descendants d'Adam.

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