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sées de deux termes seulement, le père et le fils. Ces séries seront plus nombreuses lorsque nous fèterons vos noces de diamant avec l'Université. Car votre œuvre n'est pas terminée, mon cher maitre! Pas plus pour Louis Henry que pour Pierre Van Beneden, il ne peut être question d'éméritat.

Je termine. Vous me reprocherez, certes déjà, d'avoir été trop long. Concédez cependant qu'il est difficile d'éviter ce reproche quand un disciple a l'honneur de parler d'un maître tel que vous.

Pour me rendre supportable, j'ai fait à vos écrits de larges emprunts; laissez-moi terminer de la mème façon. Permettezmoi de cueillir dans un de vos discours ces quelques lignes que vous adressiez à un ami de la première heure et qui semblent avoir été tracées pour vous.

«Il y a cinquante ans que, loin du bruit et des agitations extérieures, patiemment, courageusement, vous accomplissez cette grande et difficile chose qui se résume dans ce mot si court, le devoir; que vous accomplissez tous vos devoirs dévoué de cœur et d'âme à cette jeunesse qui vous est confiée, dévoué à votre enseignement, dévoué à la science que vous cultivez avec autant de désintéressement que de succès pour l'honneur de votre nom et la gloire de l'Université.

Il était juste, il est bon que vous sachiez que vos services et vos mérites sont appréciés à leur haute valeur. »

III SÉRIE. T. XVI.

24.

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LE VER LUISANT

En nos climats, peu d'insectes rivalisent de renommée populaire avec le ver luisant, la curieuse bestiole qui pour célébrer ses petites joies de la vie, s'allume un phare au bout du ventre. Qui ne le connaît au moins de nom; dans les chaudes soirées de l'été, qui ne l'a vu errer parmi les herbages, pareil à une étincelle tombée de la pleine lune ? L'antiquité grecque le nommait Lampyre, signifiant porteur de lanterne sur le croupion. La science officielle fait usage du même vocable; elle appelle le porteur de lanterne Lampyris noctiluca Lin. Ici l'expression vulgaire ne vaut pas le terme savant, si expressif et si correct, une fois traduit.

On pourrait en effet chercher chicane à l'appellation de ver. Le lampyre n'est pas du tout un ver, ne seraitce que sous le rapport, de l'aspect général. Il a six courtes pattes dont il sait très bien faire usage; c'est un trotte-menu. A l'état adulte, le mâle est correctement vêtu d'élytres, en vrai coléoptère qu'il est. La femelle est une disgraciée à qui sont inconnues les joies de l'essor; elle garde, sa vie durant, la conformation larvaire, pareille, du reste, à celle du mâle, incomplet lui aussi, tant que n'est pas venue la maturité de la pariade. Même en cet état initial, le terme de ver est mal appliqué. Une locution vulgaire dit : nu comme un ver, pour désigner le dénûment de toute enveloppe défensive. Or le lampyre est habillé, c'est-à-dire vêtu d'un épiderme de quelque consistance; en outre, il est

assez richement coloré d'un brun marron sur l'ensemble du corps et agrémenté d'un rose tendre sur la poitrine, surtout à la face inférieure. Enfin chaque segment est décoré au bord postérieur de deux petites cocardes d'un roux assez vif. Pareil costume exclut l'idée de ver.

Laissons tranquille cette dénomination mal réussie et demandons-nous de quoi se nourrit le lampyre. Un maître en gastronomie, Brillat Savarin, disait: Montremoi ce que tu manges et je dirai qui tu es. Pareille question devrait s'adresser au préalable à tout insecte dont on étudie les mœurs, car, du plus gros au moindre dans la série animale, le ventre est le souverain du monde; les données fournies par le manger dominent les autres documents de la vie. Eh bien ! malgré ses innocentes apparences, le lampyre est un carnassier, un giboyeur exerçant son métier avec une rare scélératesse. Sa proie réglementaire est l'escargot.

Ce détail est connu depuis longtemps par les entomologistes. Ce que l'on sait moins, ce que l'on ne sait pas même du tout encore, me semble-t-il d'après mes lectures, c'est la singulière méthode de l'attaque, dont je ne connais pas d'autre exemple ailleurs.

Avant de s'en repaître, le ver luisant anesthésie sa victime; il la chloroformise, émule en cela de notre merveilleuse chirurgie qui rend son sujet insensible à la douleur avant de l'opérer. Le gibier habituel est un escargot de médiocre volume atteignant à peine celui d'une cerise. Telle est l'hélice variable (Helix variabilis Drap.) qui, l'été, au bord des chemins, s'assemble en grappes sur les chaumes de fortes graminées et autres longues tiges sèches, et là profondément médite, immobile, tant que durent les torridités estivales. C'est en pareille station que bien des fois il m'a été donné de surprendre le lampyre attablé à la pièce qu'il venait

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d'immobiliser sur le tremblant appui au moyen de sa tactique chirurgicale.

Mais d'autres réserves de vivres lui sont familières. Il fréquente les bords des rigoles d'arrosage, à terrain frais, à végétation variée, lieu de délice pour le mollusque. Alors, il travaille sa pièce à terre. Dans ces conditions il m'est facile de l'élever en domesticité et de suivre dans les moindres détails la manoeuvre de l'opérateur. Essayons de faire assister le lecteur à l'étrange spectacle.

Dans un large bocal, garni d'un peu d'herbage, j'installe quelques lampyres et une provision d'escargots de taille convenable, ni trop gros ni trop petits. L'hélice variable domine. Soyons patients et attendons. Que la surveillance soit surtout assidue, car les événements désirés surviennent à l'improviste et sont de brève durée.

Enfin nous y voici. Le ver luisant explore un peu la pièce, d'habitude rentrée en plein dans la coquille moins le bourrelet du manteau qui déborde un peu. Alors s'ouvre l'outil du vénateur, outil très simple mais exigeant le secours de la loupe pour être bien reconnu. Il consiste en deux mandibules fortement recourbées en croc, très acérées et menues comme un bout de cheveu. Le microscope y constate dans toute la longueur un fin canalicule. C'est tout.

De son instrument, l'insecte tapote à diverses reprises le manteau du mollusque. On dirait innocents baisers plutôt que morsures, tant les choses se passent avec douceur. Entre jeunes camarades, échangeant des agaceries, nous appelions jadis pichenettes de légères pressions du bout des doigts, simple chatouillement plutôt que sérieuse agression. Servons-nous de ce mot. Dans une conversation avec la bête, le langage n'a rien à perdre à rester enfantin. C'est la vraie manière de se comprendre entre naïfs.

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Le lampyre dose ses pichenettes. Il les distribue méthodiquement, sans se presser, avec un bref repos après chacune d'elles, comme si l'insecte voulait chaque fois se rendre compte de l'effet produit. Leur nombre n'est pas considérable; une demi-douzaine tout au plus pour dompter la proie et l'immobiliser en plein. Que d'autres coups de crocs soient donnés après, au moment de la consommation, c'est très probable sans que je puisse rien préciser, car la suite du travail m'échappe. Mais il suffit des quelques premières, toujours en petit nombre, pour amener l'inertie et l'insensibilité du mollusque, tant est prompte, je dirais presque foudroyante la méthode du lampyre, qui instille, à n'en pas douter, certain virus au moyen de ses crocs canaliculės. Les preuves de la soudaine efficacité de ces piqûres, en apparence si bénignes, les voici :

Je retire au lampyre l'escargot qu'il vient d'opérer sur le bourrelet du manteau à quatre ou cinq reprises. Avec une fine aiguille, je le pique en avant, dans les parties que l'animal contracté dans sa coquille laisse encore à découvert. Nul frémissement des chairs. blessées, nulle réaction contre les rudesses de l'aiguille. Un vrai cadavre ne serait pas plus inerte.

Voici qui est encore plus probant. La chance me vaut parfois des escargots assaillis par le lampyre tandis qu'ils cheminent, le pied en douce reptation, les tentacules turgides, dans la plénitude de leur extension. Quelques mouvements déréglés trahissent un court émoi du mollusque; puis tout s'arrête, le pied ne rampe plus, l'avant perd sa gracieuse courbure en col de cygne; les tentacules deviennent flasques, pendillent affaissés sous leur poids et coudés en manière de bâton rompu. Cet état est persistant.

L'escargot est-il mort en réalité? En aucune manière, car il m'est loisible de ressusciter l'apparent trépassé. Après deux ou trois jours de ce singulier état qui n'est

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