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« En 1784, dit ce prêtre recommandable, j'étais préfet des études dans le pensionnat du Bon-Pasteur, » dirigé par M. l'abbé Barre. Par conséquent, lorsque le » jeune abbé d'Astros lui fut confié, il devint mon dis>>ciple, et dans toutes les lettres qu'il m'a fait l'honneur » de m'écrire, il m'a appelé son ancien maître. On s'en » rapportera donc, je le pense, aux renseignements » que je vais donner sur celui qui devait être plus tard » une des gloires de l'Episcopat français.

M. l'abbé d'Astros était pourvu, en entrant chez » M. Barre, d'un bénéfice à simple tonsure. Quoique >> bien jeune encore, il honora son habit clérical par la » conduite la plus régulière et la réserve la plus remarquable. Doué d'une conception prompte et d'une capa» cité peu commune, il fit d'excellentes études : il >> traduisait surtout les auteurs latins les plus abstraits » avec une facilité singulière. Je ne me rappelle pas lui » avoir vu faire un seul contre-sens. Mais ce qui valait >> mieux en lui que sa capacité, c'était une douceur de >> caractère et une admirable modestie qui le distinguaient » de ses condisciples et le faisaient aimer de tous. >>

Nous enregistrons ces souvenirs avec une complaisance mêlée d'orgueil. Il est heureux de pouvoir constamment admirer ceux que l'on a aimés: et c'est une des plus douces satisfactions, pour l'homme qui remonte l'histoire de ses ancêtres, de les trouver toujours fidèles à la sainte ressemblance qu'il en a conservée dans le

cœur.

CHAPITRE III.

SA VIE DE FAMILLE Jusqu'a la PERSÉCUTION.

11 rentre dans sa famille. Ses études.

Qualités qu'elles révèlent.

Son naturel.

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Ses amis.

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Dévouement pour ses parents. MM. Carle et Gauthier. M. le comte de Portalis. - Mgr de Tournefort. Solidité de ses affections. Mouvement de 89. - -Comment le jugea l'abbé d'Astros. La révolution finit son bonheur de famille et commence sa vie de persécution.

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L'ABBÉ D'ASTROs commença ses cours de Théologie dans le pensionnat de M. l'abbé Barre. Mais bientôt, soit parce que le désordre semé dans l'Eglise de France par la Constituante en dépeupla les établissements religieux, soit parce que la mort de son père le rendit nécessaire à sa famille, le jeune lévite fut remis entre ses propres mains.

Privé de l'enseignement de ses professeurs, il continua dans la maison paternelle ses études d'Écriture sainte, de Droit canon, d'Histoire ecclésiastique et de Théologie avec une ardeur que l'isolement rendait plus nécessaire en même temps que plus difficile. Ses cahiers de notes, conservés jusqu'à nos jours, annoncent par leur volume et leur complication, une opiniâtreté de travail à laquelle l'énergie naturelle sans la vertu n'aurait pas suffi. Quand on y suit avec attention les premiers mouvements de cette intelligence livrée à elle-même,

on est surpris de l'instinct prématuré qui la porte toujours du côté de la vérité. Ces matériaux, en effet, sont d'un esprit positif qui n'admet aucune notion vague, et qui ne pardonne guère plus aux mots de sonner creux que d'exprimer des erreurs. Ils révèlent un esprit pénétrant qui, en passant sans guide à travers les labyrinthes de la scholastique ne s'y est pas perdu, et en rapporta des idées aussi pratiques que bien arrêtées. Enfin, ils témoignent surtout d'un esprit solide qui déteste la nouveauté à vingt ans, et pour qui les traditions et le bon sens sont une boussole toujours plus sûre que le brillant des aperçus, l'absolu des systèmes et l'originalité des conceptions. Il est facile de le voir, c'était, en germe, cette intelligence mesurée qui devait, plus tard, veiller avec tant d'aptitude à la garde du dépôt sacré ; car un Pontife n'a point pour mission de marcher en éclaireur parmi les intelligences de son siècle, il suffit qu'il y marche en régulateur : et, possédant toute vérité dans son symbole, sa tâche n'est point de lancer l'esprit humain à la découverte d'une nouvelle lumière, mais de l'avertir quand il penche vers le faux.

Tout le temps que lui laissaient ses études ecclésiastiques, l'abbé d'Astros le consacrait à Dieu et à des devoirs domestiques. Une mort prématurée lui ayant enlevé son père et ses frères aînés, il se trouvait à la tête de la famille. Sans égoïsme dans sa vertu, il permettait aux siens de prendre largement sur des journées qu'il eût partagées si heureusement entre la prière et les livres. Ces sollicitudes de chef de maison dans un âge si tendre, hâtèrent sa maturité. Par la sagesse

de son conseil et les tendres inspirations d'un cœur, sur qui les affections de famille furent toujours puissantes, il rendit moins sensible le vide que laisse dans un foyer l'absence de la paternité. Il fut consolateur assidu auprès de sa mère. Il se constitua l'instituteur de deux sœurs et d'un frère qui lui restaient encore. Enfin, au sortir de l'enfance il devint un bienfaiteur et une bénédiction pour cette maison en deuil; et, de même que dans la famille de saint Basile l'Ancien, trois frères illustres furent les disciples et l'ouvrage d'une de leurs sœurs qui s'appelait sainte Macrine, ainsi, dans cette famille d'Astros, dont tous les membres ont été recommandables, les vertus d'un seul frère engendrèrent celles des autres.

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Pour exercer ce salutaire empire, le jeune Paul avait mieux que l'autorité de son exemple, il avait celle d'un caractère sans défaut et du cœur le plus dévoué. A cette époque de sa vie, il était expansif, de relations aimables et d'une nature sympathique. Un grand fonds de bonté, orné par la vivacité du jeune âge, ne laissait pas encore pressentir ces froides apparences que les habitudes officielles et le sérieux de sa conversation devaient lui donner un jour. Ces qualités si remarquables trouvèrent bientôt leur récompense et leur preuve dans les amis qu'il mérita.

C'est vers ce temps que s'affermit, entre lui et deux de ses condisciples, une affection qui avait déjà com

4 Saint Basile le Grand, saint Grégoire de Nysse et saint Pierre de Sébaste.

mencé et qui ne devait finir qu'avec leur vie. Le premier était d'une vivacité charmante et d'un spirituel enjouement; il se nommait Carles. Le second était d'une tenue plus sévère, mais d'un caractère doux et liant; il se nommait Gauthier. L'un et l'autre se destinaient à l'état ecclésiastique et tenaient à l'abbé d'Astros, non-sculement par la conformité des goûts, mais par celle de leur vocation. Ils avaient pour lui une tendresse respectueuse et dévouée dont on ne peut suivre l'expression, dans leurs écrits, sans la plus douce émotion. Au sortir du Séminaire, ils venaient souvent animer sa solitude et passer plusieurs jours auprès de lui. Pendant ce temps, on étudiait la théologie, on faisait de longues promenades dans les champs, et l'on s'égayait beaucoup sans jamais cesser de s'édifier. Tous les trois portaient dans leurs rapports ce besoin d'épanchement et cet entrainement vers l'amitié qu'éprouvent les cœurs de vingt ans quand ils n'ont pas cessé d'ètre La part de bonheur que purs. Me d'Astros y goûta dut être grande, car, jusqu'à ses derniers jours, ces souvenirs d'enfance étaient son sujet de conversation le plus aimé.

Cependant, dans cette intimité comme dans toutes celles de cette terre, il y avait des jours d'orage. L'abbé d'Astros était quelquefois le plus exigeant, ainsi qu'il arrive ordinairement à ceux qui aiment le plus. M. l'abbé Carles avait trop tardé à lui écrire, il craignit de l'avoir offensé. Ne pouvant tenir à cette pensée, il lui envoya une lettre où les reproches se mêlaient aux plaintes ordinaires de l'amitié négligée. Celui-ci lui répondit de longues excuses, dans lesquelles il folâtrait en prose et

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