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lui disputer une seule fois, l'Église véritable, divinement instituée pour enseigner le genre humain, a seule constitué une autorité universelle, malgré l'effroyable difficulté de la chose. Tout l'empire romain s'est ligué contre cette immense autorité qui naissait partout, et malgré la persécution, dès les premiers temps, l'Église catholique dépassait les limites de l'empire romain: elle pénétrait en Perse, en Éthiopie, dans les Indes, en Scythie. Après qu'elle eut subjugué l'empire romain et passé au delà, les barbares vinrent anéantir l'unité temporelle fondée par Rome païenne, et l'Église catholique, pendant que toutes les nations changeaient et se fractionnaient, étendit son unité et son universalité partout où la force rompait les membres de l'ancienne société, et de plus elle alla chercher les barbares jusque dans leurs forêts pour les amener au pied du même autel et de la même chaire. De nouveaux mondes se découvrirent: l'Église y fut aussi vite que les conquérants. Les Indiens de l'Occident et de l'Orient connurent Jésus-Christ, et le soleil ne se coucha plus dans le royaume de la vérité. Le protestantisme, en essayant de briser l'unité et l'universalité catholiques, n'a fait, par le spectacle de ses divisions, que prouver de nouveau l'impossibilité où sont les hommes de fonder avec leur propre vertu une Église universelle.

Il faut vaincre, en effet, pour cela la jalousie de l'autorité temporelle, la diversité des langues, des mœurs, des préjugés, les inimitiés de nation à nation, et enfin, par-dessus tout, l'indépendance des esprits, cette indépendance qui n'est que la soumission à de fausses autorités, mais à des autorités qui flattent l'orgueil et semblent s'appuyer sur la raison de

chacun. Jamais l'erreur ne vaincra ces divers obstacles, parce que l'erreur, étant tout à la fois orgueil de l'entendement et contradiction logique, ne peut unir ni les esprits ni les volontés. L'unité seule de l'Église, cette unité unique dans le monde, est une preuve irrécusable de sa divinité : l'Église est catholique, donc elle est vraie.

Mais ce qu'il faut bien remarquer, c'est que la catholicité de l'Église n'embrasse pas seulement les diverses nations du globe: elle embrasse aussi dans les mêmes liens spirituels l'enfance, le peuple, les gens éclairés, les forts et les faibles. Tous, sans distinction, ont les mêmes symboles et la même foi; au lieu que la philosophie n'embrassait que les hommes instruits, et que les religions païennes n'embrassaient que le peuple. Le protestantisme lui-même n'a pu éviter ce vice radical; car il est autre pour le peuple, et autre pour les hommes éclairés. Il commande au peuple d'autorité, il laisse libres les gens instruits. Le peuple croit son ministre, l'homme habile croit la Bible et lui-même. Sous ce rapport, l'Église catholique est encore toute divine; non-seulement elle donne protection au faible, elle le rend égal au fort.

Vous direz peut-être : Mais si une Église enseignante est nécessaire au genre humain, pourquoi s'est-elle établie si tard? pourquoi il y a dix-huit siècles, et non pas il y a six mille ans? Messieurs, tout devait porter l'empreinte de la chute originelle, la nature, le corps, l'âme, la société, la vérité elle-même, afin que l'homme sentit profondément le besoin de la réparation. Cependant Dieu n'abandonna pas les hommes dans les temps antérieurs à la constitution de l'Église; il leur communiqua la vérité par Adam, par Hénoch,

par Noé, par Abraham, par Moïse, par une suite continuelle de prophètes et de révélations. L'Église même, ou la société des hommes avec Dieu, existait depuis le commencement; mais elle n'existait pas avec l'organisation et la force qu'elle a reçues de Jésus-Christ. Aussi Jésus-Christ ne dit-il pas qu'il va établir l'Église, mais qu'il va l'établir sur la pierre, sur une pierre deslinée à briser ceux qui tomberont dessus et ceux sur qui elle tombera '. Jésus-Christ a achevé l'Église, comme il a tout achevé; mais avant la consommation, l'homme n'était pas abandonné, il était préparé et soutenu. Sa condition ne valait pas notre condition présente; mais elle était suffisante et juste, s'il eût voulu la mettre à profit. Il a péri par sa faute, non par la faute de Dieu.

L'Église a constitué la vérité socialement, et si, revenant sur l'espace que nous avons parcouru, nous nous demandons pourquoi l'homme est un être enseigné, nous répondrons que l'homme est un être social comme tous les êtres, qui, tous à leur manière, vivent par la société, mais que l'homme ayant de plus qu'eux l'intelligence, son intelligence aussi doit vivre par la société, et que la nourriture de l'intelligence étant la vérité, la vérité doit lui être transmise socialement, c'est-à-dire par l'enseignement. Si l'homme n'eût pas péché, Dieu seul eût été son précepteur, son maître l'homme, s'étant séparé de Dieu par le péché, est resté vis-à-vis de l'homme primitivement instruit par Dieu, mais pouvant oublier ce que Dieu lui avait dit et le corrompre. De là les superstitions, vestiges altérés de la vérité; de là la philosophie, effort de l'homme vers la vérité; de là la nécessité d'une

1. Saint Matthieu, chap. xxi, vers. 44.

Église enseignante qui transmette et perpétue la vérité, dans le cas où Dieu voudrait faire grâce à l'homme et le réparer; mais suspension de l'organisation définitive de cette Église, afin que l'homme se sente déchu, impuissant, misérable.

Aujourd'hui, Messieurs, cette Église catholique, qui a fait l'œuvre impossible à l'homme, cette Église lutte contre ceux qui l'ont affaiblie et qui voudraient la détruire. Dépouillée des ornements extérieurs qu'elle tenait de l'homme, liée par eux comme une puissance incommode et dangereuse, insultée dans sa faiblesse apparente, elle est semblable à un géant que des enfants ont entouré de bandelettes et qu'ils s'efforcent de précipiter; elle se défend par sa masse, mole sua stat, et son immobilité toute seule est une victoire. Tranquille parce qu'elle porte dans son sein une promesse immortelle et l'esprit de Dieu, elle n'est inquiète que de l'humanité, qui peut plus ou moins associer ses propres destinées à la grandeur des siennes. Ne vous y trompez pas, Messieurs, il n'y a qu'une question au monde depuis six mille ans, celle de savoir si la vérité chrétienne y sera vaincue ou victorieuse; elle y a été vaincue jusqu'à Jésus-Christ, elle y est victorieuse depuis Jésus-Christ, et victorieuse par l'Église catholique, assise sur la pierre qu'a posée Jésus-Christ. C'est donc à renverser l'Église catholique que conspire l'humanité déchue; mais l'Église n'est autre chose que l'humanité réparée, vivifiée par la foi, conduite par la charité, éclairée par l'esprit de Dieu. La lutte est donc dans les entrailles mêmes de l'humanité, entre l'humanité des sens et l'humanité de l'esprit; l'humanité des sens s'est manifestée dans l'antiquité pendant quatre mille ans; l'humanité de

l'esprit s'est manifestée dans les temps modernes pendant dix-huit siècles : laquelle préférez-vous ? Voilà la question. Espérer que la noble partie de l'humanité triomphera sans l'Église, après avoir détruit l'Église, c'est espérer un effet sans sa cause, c'est abattre les fondements pour soutenir un édifice et l'agrandir. On dit beaucoup que le passé est aux prises avec l'avenir, et cela est vrai; le monde ancien est aux prises avec le nouveau et quel est le monde nouveau, sinon celui qu'a fait l'Église ? quel est le monde ancien, sinon celui qui a été sans l'Église? Comme le chrétien est Thomme nouveau, selon le langage des saintes Écritures, l'Église catholique est l'humanité nouvelle. Quiconque l'attaque invoque le passé; quiconque la défend appelle l'avenir. Je sais que plusieurs attendent une révélation nouvelle plus parfaite que celle du Christ, une humanité nouvelle plus parfaite que celle formée par l'Église. Mais où est le nouveau Christ, où est la nouvelle Église, où est la nouvelle humanité? Et que voyons-nous autour de nous sinon de vieilles passions, sinon l'égoïsme ancien, d'autant plus hideux qu'il lève sa tête dans une société qu'avait fondée la charité? Ah! Messieurs, quand l'Église parut sur la terre, elle ne s'annonça pas ainsi; elle édifia sans rien ruiner, vous ruinez sans rien édifier. Mais c'est déjà beaucoup d'attendre; soyez donc des hommes d'espérance et de désirs. Et vous qui êtes plus avancés, qui appréciez à leur juste valeur les efforts impuissants de ce siècle, et qui savez que le tombeau de l'Église serait le tombeau du monde civilisé, concevez une foi et une charité plus ardentes; donnez-vous tout entiers à cette Église hors de laquelle il n'y a pas de salut dans le temps et dans l'éternité.

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