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cœur de tout un peuple guerrier qu'elles se sont spontanément élancées.

A quelle époque ce peuple a-t-il commencé à mêler des chants à ses cris de guerre? Il serait difficile de la fixer nettement; quoique les plus anciennes romances écrites ne remontent pas au XIIe siècle, on peut, sans trop craindre de se tromper, présumer que plus d'un siècle auparavant, que du temps du Cid, par exemple, la mémoire des actions glorieuses était déjà conservée dans ces mètres faciles qu'on nomme redondillas. Les redondillas, formes poétiques particulières aux Portugais et aux Castillans, sont des espèces de chansons en vers composées toutes également de quatre pieds trochaïques. A la fois harmonieuses et simples, ces chansons avaient encore le mérite d'être d'une facture si aisée que chacun, au besoin, pouvait en improviser; d'autant plus que dans ces premiers temps on ne regardait encore de près ni à la distinction des syllabes en longues et brèves, ni à l'exactitude des rimes. Il est vrai qu'on ne tarda pas à ajouter quelques règles à ces règles si simples. Ainsi, lorsqu'au lieu de raconter des faits on voulait exprimer des pensées, il devint d'usage de couper les redondilles en strophes régulières, appelées stances ou couplets (estancias ou coplas). Quelquefois aussi, pour varier le rhythmne, on s'avisa d'entremêler aux vers des redondilles des vers qui n'avaient que la moitié de leur mesure; enfin à l'imitation des Arabes, les poètes espagnols composèrent de longues romances dont tous les seconds vers finissaient. par la même rime. Puis vint encore une autre recherche : ce fut de substituer à la rime exacte ou pleine une rime imparfaite qui était l'écho de la voyelle et non de la consonne finale du vers auquel elle répondait. De là vint cette distinction des rimes en assonnantes et consonnantes, qui n'est guère connue que de la nation espagnole (voy. ASSONNANCE). On nous pardonnera d'avoir si longuement parlé des redondilles, si l'on considère qu'elles ont été la forme primitive de la poésie espagnole, et comme le moule nécessaire dans lequel devaient être jetées ces belles chan

sons guerrières et populaires dont les recueils sont encore aujourd'hui une des plus grandes gloires de la langue dont nous nous occupons. Ce mètre d'ailleurs n'a point perdu de son importance à mesure que la langue et la littérature ont marché. La poésie dramatique l'a adopté, et c'est lui que Lope de Véga et Caldéron ont employé de préférence dans leurs nombreuses et brillantes productions.

Un peu plus tard que les redondilles, naquirent les stances dactyliques appelées versos de arte mayor. Ce mètre lourd, traînant, imparfait, prospéra peu. Les alexandrins, employés dans de longs poèmes par des moines qui les imitaient des hexamètres latins, ne devinrent point populaires. Le sonnet, importé sans doute de Provence en Espagne et essayé par quelques poètes, fit cependant à cette époque une fortune assez peu brillante.

Ainsi, dans ces premiers temps, le castillan se borne à peu près à une seule forme poétique, toute originale et parfaitement propre aux sujets qu'elle doit revêtir. Dans cette forme se glisse par les rimes quelque imitation de la manière des Arabes. La poésie, d'après une loi reconnue pour être d'application universelle, a grandi et s'est développée longtemps avant la prose; elle a servi à tout, et l'on nous cite des chroniques, entre autres celle d'Alphonse XI, écrites tout entières en redondillas. Ce n'est guère que vers le milieu du xiv® siècle que la prose commence à devenir en usage à son tour; au xv, sous le règne célèbre de Jean II (voy.), elles prennent l'une et l'autre un essor rapide et rivalisent à qui fera les plus grands progrès; la langue s'y montre encore dans son énergie naturelle et sans aucun secours étranger. Mais au xv1° siècle, l'admiration passionnée pour l'antiquité passe d'Italie en Espagne; le castillan subit alors l'effet d'une double imitation : l'imitation des classiques anciens de la Grèce et de Rome, l'imitation des classiques nouveaux produits par la moderne Italie. Il s'assouplit, devient plus élégant et plus varié dans ses formes; une foule de tours nouveaux sont introduits; les formes poétiques italiennes, et surtout celle

du sonnet,sont adoptées et cultivées avec enthousiasme. Dans cette révolution, la langue perd à la vérité quelque chose de son énergie et de son originalité; cependant ces qualités subsistent encore et résistent, et finissent par s'allier de la manière la plus heureuse avec la grâce et la douceur des modèles italiens. L'imitation française, adoptée à son tour vers la fin du XVII siècle, est loin de produire d'aussi heureux effets sous son influence, qui se fait encore sentir, la langue ainsi que la littérature se décolorent sensiblement.

Les caractères de la langue espagnole, telle que nous la voyons à son moment le plus brillant, à l'époque des Lope de Véga, des Cervantes, des Mendoce, des Caldéron, des Mariana, sont faciles à saisir prononciation harmonieuse et surtout sonore, éclat, pompe, majesté, mêlés d'une gravité et d'une lenteur qui n'excluent pas la grâce ni même les tours naïfs, mais qui nuisent aux tours brusques et impétueux de la passion. La construction grammaticale est claire et admet assez sobrement les inversions; elle ne paraît comparable pour la richesse, la variété, la souplesse, ni à l'allemand, ni à l'anglais, ni à l'italien; elle dispose d'un moins grand nombre de mots que ces trois langues, mais ces mots sont en eux-mêmes, par leur sonorité, par l'expression individuelle, si nous l'osons dire, dont chacun est doué, les plus beaux peut-être qui existent dans aucune langue. De cette beauté des mots, de cette couleur éclatante dont ils sont revêtus, est venu naturellement l'éclat dans l'image. Ainsi, le castillan a dû être et a été en effet la langue des métaphores. Sa grande richesse et sa grande hardiesse se trouvent là, et souvent, il faut le dire, à beaucoup trop forte dose. Toute dévouée au culte de

l'image que lui faisait aimer encore plus le reflet des teintes magiques de l'Orient dont seule elle jouissait entre toutes les langues de l'Europe, cette langue a donné peu de chose au sentiment. Elle est restée, par la bizarrerie et l'exagération de certaines expressions et de certaines images, la langue la moins propre à devenir universelle, la moins capable de rivaliser avec sa voisine, la langue

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française. Si, à l'époque de CharlesQuint, elle se répandit dans la plupart des cours de l'Europe, ce ne fut que pour un moment, et sa domination n'eut rien de durable. Mais peut-être par cela même convient-elle à un peuple plus dé→ sireux de conserver sa propre indépendance que de détruire celle des autres, et qui, se laissant toujours difficilement pénétrer par les mœurs et les habitudes étrangères se sent peu jaloux aussi d'imposer les siennes *.

2o Littérature. Nous avons déjà indiqué à quelle époque on doit faire remonter ces anciennes romances qui furent la première expression de la poésie castillane: on n'en connaît point qui portent une date plus reculée que le xn siècle. Depuis cette époque jusqu'à la fin duxive siècle, elles conservent une grande simpli cité de forme, tout en s'adaptant à une foule de sujets divers. Outre les romances historiques où sont dépeints les combats continuels des chrétiens et des Maures, il y en a de chevaleresques, de mythologiques, de bibliques. Amadis, les Douze Pairs,Hector, Saül et David, sont célébrés tour à tour dans ces faciles poésies dont la naïveté et une sorte de sentiment profond et touchant font le principal mérite, mérite beaucoup plus sensible, il est vrai, dans celles qui sont tirées de l'histoire

(*) Relativement à l'histoire de la langue espagnole, on peut consulter les ouvrages suivants: Alderete, Del origen de la lengua castellana, Rome, 1606, in-4°; G. de Mayan, Delas origenes de la lengua española, Madrid, 1737, 2 vol., etc. La plus ancienne grammaire est celle d'Antoine de Nebrija (Arte de grammatica castellana); on doit au même érudit le premier dictionnaire de cette langue, espagnol et latin, puis latin et espagnol, 1492, in-fol. L'Académie royale de Madrid publia sa grammaire en 1771; de 1726 à 1739 elle avait fait paraître son dictionnaire en 6 vol. in -4°. Vayrac, Séjournant, et plus récemment Chalumeau de Verneuil (1821), Sobrino et

Cormon, en publièrent à l'usage des Français. Les grammaires d'Andres et de Vincent Salva, Paris, 1830, sont en espagnol; celles de MM. Franceson (1822) et Fromm (1826), en allemand. Le dictionnaire de Larramendi, en castillan,

basque et latin, parut en 1745; celui de Séjournant, en espagnol et français, est de l'année 1759, Paris, 2 vol.; M. Nuñez de Taboada en a fait paraître un autre plus complet, également en 2 volumes in-8°, dont la dernière édit est de 1830. Seckendorf et Franceson ont donné de

fort bons dictionnaires en espagnol et en allemand, etc., etc. PIZE SJEN) ¿VJ. H. S.

du pays que dans les autres. Leurs auteurs trace d'enflure, mais beaucoup de préci sont ignorés, et de tant de poètes qui sion et de justesse. Ce livre n'est d'ail chantèrent alors, pas un nom n'a été leurs qu'une espèce de recueil d'apoloconservé; on cite bien un certain Nicolas gues racontés au comte Lucanor par un et un abbé Antonio qui se distinguèrent habile ministre qui lui sert de guide dans dans ce genre dès le règne d'Alphonse X; toutes ses actions: on en compte quamais on ne désigne point particulièrement rante-neuf dont la plupart se lisent avec les poésies qui leur doivent être attri intérêt. La morale, ordinairement expribuées. Éminemment populaires, douées mée en vers à la fin de chaque apologue, dès leur naissance de l'heureux don d'a- n'offre en général rien de neuf, pour gir fortement sur la multitude, de la nous qui vivons au sein d'une civilisation remplir d'enthousiasme et de se graver avancée; mais il faut se souvenir que don dans son souvenir, les romances parais- Manuel écrivait au x1va siècle, époque à sent au contraire avoir été un peu dédai- | laquelle bien des choses pouvaient pagnées par ceux qui se piquaient d'étudier raître frappantes et utiles qui sont rebatsérieusement les lettres et qui se déco- tues aujourd'hui. Juan Manuel a écrit enraient du nom d'écrivains et de savants. core une chronique d'Espagne ( (Chroni Il ne paraît pas par exemple que le roi ca de Espana), un livre des sages (LiAlphonse X (voy.), si célèbre de son bro de los sabios), un livre sur la che temps par son amour des lettres et sa valerie (Libro del caballero): tous ces grande érudition, ait jamais daigné écrire ouvrages sont perdus, ainsi qu'un recueil une romance : il aima mieux s'exercer de poésies. Si ces poésies étaient des rodans les vers de arte mayor, dont la mances, comme on a tout lieu de le croire, forme lourde et traînante allait à la tour- il est vraisemblable que la plupart se renure pédantesque de son esprit. Deux trouvent dans le Cancionero général, où grands poèmes espagnols intitulés, l'un l'on en voit un grand nombre qui portent Poema del Cid el Campador (voy. CID), le nom de Juan Manuel. Le célèbre rol'autre Poema de Alexandro magno, man de l'Amadis de Gaule est aussi du tous deux écrits en vers alexandrins, sont XIVe siècle; mais malgré la vogue étonregardés comme ayant précédé les ou- nante qu'il acquit rapidement, son orivrages d'Alphonse X,et même,selon quel-gine est restée indécise; on ne sait si l'on ques-uns, les plus anciennes romances. Leurs auteurs sont inconnus ; il est d'ailleurs impossible de rien lire de plus froid, de plus informe, de plus privé de mouvement et d'images, en un mot de plus dénué de toute poésie, que ces deux poè

mes.

Le premier nom vraiment remarquable qui nous frappe dans la liste des lit térateurs et des poètes espagnols est celui du prince de Castille, don Juan Manuel, descendant, par une branche latérale de la maison de Castille, du roi saint Ferdinand, et longtemps adelantado mayor des frontières de la Castille du côté de Grenade,sous le roi Alphonse XI. Cet homme, également illustre par sa conduite à la cour et dans les camps, l'est aussi comme auteur de l'ouvrage intitulé Le comte Lucanor, espèce de roman moral où la prose espagnole se montre pour la première fois claire, facile, élégante, où l'on ne trouve, chose remarquable, aucune

doit le faire naître en France, en Espagne ou en Portugal. L'opinion qui paraît la plus vraisemblable l'attribue à Vasco de Lobeira, Portugais qui aurait vécu vers 1300 (voy. AMADIS ); mais il paraît aussi qu'il fut presque aussitôt traduit, remanié et embelli par plusieurs écrivains français et espagnols, de sorte qu'il serait très difficile aujourd'hui de dire ce qui appartient dans cette œuvre à chacun de ceux qui y ont mis la main. Ce qui est beaucoup plus facile à constater, e'est l'influence énorme qu'elle a eue sur le génie espagnol; elle répondait parfaitement aux idées chevaleresques déjà puissantes sur la nation, au goût du merveilleux déjà inspiré par les Maures. Un peu guindée dans la forme, quoiqu'au fond sensuelle et voluptueuse, pleine de sentiments de piété et de maximes morales qui n'empêchaient pas l'amour de se manifester dans son délire, elle flattait tous les traits du caractère espagnol, qui jus

tement alors commençaient à se pronon-mier ouvrage fut un chant funèbre sur la cer fortement; elle les flattait en les exal- mort de son ami, L'idée a quelque raptant outre mesure, et elle eut ce mauvais port avec le commencement de l'Enfer effet de pousser les hommes sur lesquels du Dante; mais dans l'exécution l'auteur elle agit dans des voies trop exagérées s'est montré plus souvent érudit qu'inpour que le faux ne s'y rencontrât pas spiré. Son poème intitulé le Manuel des beaucoup plus souvent que le vrai. favoris (el Doctrinal de privados), et qui roule sur la disgrâce et la mort d'Alvar de Luna, favori de Jean II, paraît d'un ordre supérieur. Le reste des ouvrages poétiques de Santillane est de peu d'importance. On a conservé de lui, comme ouvrage critique, une dissertation adressée au prince de Portugal, dans laquelle

Le xve siècle vit monter Jean II sur le trône. Avec lui y prit place cet amour des lettres que l'on avait déjà vu régner sous Alphonse X et sous Alphonse XI. Jean II fut un prince faible qui ne sut pas tenir d'une main assez assurée le gouvernail de l'état, ébranlé alors par des factions violentes; cependant la protection constanteil avance des opinions assez étranges, qu'il accorda aux écrivains de son temps a relevé son nom. Parmi ces écrivains se trouvaient de grands seigneurs qui, suivant l'exemple de don Juan Manuel, partageaient leur vie entre l'étude, la politique et la guerre. Ils récompensèrent Jean II par une fidélité constante, par un dévouement sans bornes, de l'amour qu'il avait montré pour ce qui faisait le bonheur et le charme de leur vie. A la tête de ces seigneurs nous placerons le marquis Enrique de Villena, descendant par son père des rois d'Aragon et par sa mère des rois de Castille. Ses connaissances dans les sciences abstraites étaient si étendues pour son temps qu'elles le firent passer pour magicien. Ses ouvrages sont : une comédie allégorique dans laquelle on voyait agir comme principaux personnages

la Justice, la Vérité, la Clémence, la Paix; les travaux d'Hercule (Trabujos de Hercules), conte mythologique en prose; une traduction de l'Énéide, perdue; enfin une espèce de poétique qui est regardée comme l'ouvrage le plus ancien de ce genre dans la littérature espagnole; elle est intitulée : la gaie Science (Lagaya Ciencia), et adressée au marquis de Santillane, auquel Villena raconte ses efforts pour établir en Castille les jeux floraux déjà adoptés en Aragon, et pour introduire les formes poétiques limousines et aragonaises dans la langue castillane. De là, il remonte à des considérations générales sur la poésie; puis il donne les règles de la prosodie castillane. Ce marquis de Santillane (Inigo Lopez de Mendoza), élève et ami de Villena, marcha avec ardeur sur ses traces. Son pre

comme celle, entre autres, que la poésie est tout entière fondée sur l'allégorie. Juan de Mena, né dans la classe moyenne, n'en fut pas moins admis dans l'intimité de Santillane, et même du roi Jean, qui lui témoigna toujours une grande considération; son Labyrinthe, appelé encore les trois cents stances (las Trecientas), écrit en vers de arte mayor, est un ouvrage très singulier, où l'imitation du Dante est visible, mais où le génie du Dante a manqué au poète. C'est un grand tableau allégorique de la vie humaine, divisé en sept ordres, à cause des sept planètes, et où l'on trouve trois grandes roues qui représentent le passé, le présent et l'avenir; il y a des passages remarquables par un sentiment élevé et éloquent de nationalité. Le Calamicleos que Juan de Mena dédia au marquis de Santillane, et que l'on a désigné depuis sous le nom plus simple de la Coronacion, est une suite de questions ou d'énigmes en vers dactyliques que les deux poètes s'adressent l'un à l'autre. Juan de Mena entreprit dans sa vieillesse un autre poème intitulé Traité des vertus et des vices, où il chantait sur le ton de l'épopée la guerre de la raison contre les passions. Il n'eut pas le temps d'achever cet ouvrage, 1456.

Autour de ces trois poètes principaux de la cour de Jean II se groupe une foule d'auteurs secondaires dont nous croyons inutile de rappeler les mœurs et les ouvrages; il suffira, pour donner une idée de la fécondité du xv siècle, de dire qu'il a produit cent trente-six poètes lyriques dont les guyres sont réunies, avec d'au

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tres plus anciennes et d'autres du même | siques, qui, non contents de mettre dans temps restées anonymes, dans le Cancionero general.

Si l'on ajoute aux ouvrages que nous venons de nommer le Mingo Rebulgo, attribué par les uns à Rodrigue de Cota, par d'autres à Juan de Mena, le roman dialogué de Calixte et Mélibée, commencé par le même Rodrigue de Cota, terminé par Fernando de Roxas, quelques biographies bien écrites, entre autres celle du comte Alvar de Luna, on aura un tableau à peu près complet de l'état de la littérature espagnole au xviR siècle, état sur lequel nous avons cru devoir nous étendre d'autant plus qu'il est moins

connu.

leurs ouvrages de la verve et de l'imagination, aient encore voulu y joindre le goût et la délicatesse. Mais un homme bien autrement remarquable fut don Diego de Mendoza (voy.): celui-ci a su mériter le titre du classique et rester cependant tout-à-fait original. Dans ses poésies, il est vrai, il s'est, comme Boscan et Garcilaso, attaché à l'imitation italienne et particulièrement à celle de Pétrarque; encore là même, avec une élégance digne de la leur, se montre-t-il plus énergique, plus hardi, plus plein de pensées fortes et neuves. Mais dans sa prose, loin de se trainer sur les traces d'un modèle, il s'est lui-même placé asAu xvie siècle, l'Espagne qui, jus-sez haut pour être proposé à l'admiraqu'alors, avait eu des destinées à peu près tion et à l'étude de ceux qui viendraient indépendantes de celles du reste de l'Eu- après lui; il a porté la langue espagnole rope, se trouva tout à coup, par l'avéne- au plus haut point de perfection où elle ment de Charles - Quint, engagée dans pût atteindre dans son Histoire de la le mouvement général dont elle devint guerre des Maures de Grenade sous Phimême, pour un siècle, un des rouages lippe II; et dans son roman de Lazaprincipaux; en même temps, l'unité de la rille de Tormes, il l'a fait voir non moins monarchie se trouvait accomplie par la comique et non moins plaisante que Cerréunion de l'Aragon et de la Castille, et vantes ne l'a montrée depuis dans son Don par la soumission de Grenade. Unité, Quichotte. Si l'on songe que Mendoza obéissance au dedans, sous la main puis- était en même temps un des hommes d'ésante d'un seul souverain, rapports fré- tat le plus souvent consultés par Charlesquents au dehors avec des nations jus- Quint et Philippe II, un des hommes de qu'alors peu pratiquées, telles furent les guerre qu'ils se plaisaient le plus à emconditions nouvelles de l'existence des Es- ployer dans leurs armées; qu'il fut ampagnols au XVIe siècle. La littérature s'en bassadeur auprès du concile de Trente, ressentit comme le reste: on y vit se puis auprès du pape Paul III, qu'il goudévelopper un esprit d'imitation qui verna sept ans avec une autorité absolue jusqu'alors, avait été complétement re- une grande partie des possessions espapoussé. Boscan Almogaver (voy.) trans- gnoles en Italie, on sera saisi sans doute porta le premier les formes italiennes d'un vif étonnement et d'une juste addans la poésie castillane. Son ami Gar- miration. A cette époque, où l'Espagne se cilaso de la Vega, qu'il ne faut pas con- montra si glorieusement féconde, elle fondre avec l'historien de ce nom, sur- produisit encore Hernando de Herrera Dommé l'Inca (voy. VEGA), adopta le (voy.), qu'on regarde comme celui de ses même système; tous deux répandirent lyriques qui s'est élevé le plus haut, que dans leurs poésies une élégance, une sou- l'on a surnommé le Pindare espagnol et plesse, une douceur inconnues à tous auquel on donna aussi le titre de divin; ceux qui les avaient précédés; ils tem- il écrivait du temps de la bataille de Lépérèrent, sans le détruire entièrement, ce pante, et il a laissé sur cette bataille une penchant à l'exagération, cet amour de ode célèbre dans laquelle, à la vérité, l'hyperbole et des métaphores outrées qui loin de s'en tenir à la sage sobriété de fut de tout temps un des traits les plus Boscan et de Garcilaso dans le choix des marqués du génie espagnol. On peut les images, il s'est laissé entraîner à des médésigner comme les premiers qui aient taphores de l'exagération la plus outrée. mérité dans leur patrie le titre de clas- Au contraire, Luis Ponce de Léon son

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