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roulaient dans tous les yeux, et tous les cœurs semblaient éprouver cette affliction qu'inspire une grande perte publique.

Après trois heures d'une marche lente et silencieuse, nous arrivâmes à l'église SaintEustache, dont tous les murs avaient été tendus de draperies lugubres. Au milieu du chœur s'élevait un magnifique sarcophage. Ce fut sur ce triste monument qu'on déposa le cercueil.

Après les prières d'usage, Cérutti monta en chaire, et prononca l'oraison funèbre de Mirabeau, considéré comme politique et comme législateur. Les larmes qu'il arracha de tous les yeux, la douleur profonde que ressentait l'au= ditoire, montrèrent assez combien la perte du grand orateur était généralement sentie.

Après le discours, le cortége se remit en marche, aux flambeaux, pour se rendre à SainteGeneviève, où nous n'arrivâmes qu'à minuit. Le corps de Mirabeau y fut déposé à côté de celui de Descartes, en attendant qu'il pût être transporté au Panthéon.

Cette pompe funèbre offrit l'un des plus sin= guliers spectacles de la révolution. Elle se distingua moins encore par la clôture spontanée de tous les théâtres et par la magnificence du

TOME I.

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cortége, que par la réunion de tous les partis, qui marchaient pêle-mêle à la suite du corps, exprimant hautement les plus sincères regrets, les uns pour les services rendus à la révolution par celui dont on déplorait la perte, et les autres pour le bien qu'ils en attendaient.

Paris ne fut pas le seul à honorer la mémoire du citoyen illustre qui venait d'expirer dans ses murs; la France entière partagea la douleur et les regrets de la capitale, et dans un grand nombre de villes, des cérémonies funèbres et des deuils publics eurent lieu en son honneur.

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CHAPITRE XIII.

Un diner chez madame Chalabre.— M. et madame Bitaubé.— Fréron. Vadier. - Torné. Ronsin. Louis XII et Lafayette. La ligue des tyrans.-La toilette de Robespierre. - La société des jacobins. Le muscadin.

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Le petit Robespierre.

« FAITES-MOI l'honneur et l'amitié, mon» sieur, d'accepter un petit dîner patriotique » à ma campagne de Grosley. Choisissez le jour qui vous conviendra le mieux, qui vous dé>> rangera le moins de vos travaux, pourvu que

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je sois prévenue deux jours d'avance, afin » que je puisse réunir monsieur et madame » Bitaubé, et quelques autres patriotes qui

>> seront flattés de se rencontrer avec vous...» Tel est le texte d'un billet. que madame Chalabre écrivait à Robespierre, à la fin d'avril 1792, et j'étais du nombre de ces patriotes qui devaient recevoir une invitation ausitôt que le héros au= rait fait signe qu'il acceptait, et aurait indiqué son jour. Je la reçus en effet, et fus exact à m'y

rendre.

La campagne de madame Chalabre, placée dans un site charmant, au-dessous de Montmorency, n'était pas assez éloignée de Paris pour que je pusse me refuser au plaisir d'y aller à pied. La réunion était peu nombreuse. Je trouvai outre monsieur et madame Bitaubé, dont il a déjà été question, Fréron, le camarade de collège de Robespierre, et qui, dans la suite, fut envoyé en qualité de proconsul à Toulon ; Vadier, dont la liaison avec Robespierre commençait alors, et qui, plus tard, devait contri= buer à sa chute, après avoir favorisé ses projets; l'évêque de Bourges, Torné, qui a dû regretter bien amèrement, après cette époque, les liaisons qu'il eut avec le chef de la Montagne, et l'amitié, l'admiration même qu'il lui témoigna; Ronsin, qui fut tour à tour général de l'armée révolu= tionnaire, commissaire du pouvoir exécutif, et

qui, avant de figurer sur la scène politique, avait joué, dans la république des lettres, un rôle tellement obscur, qu'il est entièrement oublié de nos jours. Je vais le rappeler en peu

de mots.

Au commencement de 1786, Ronsin avait donné au public un volume in-12, contenant plusieurs ouvrages dramatiques, et portant en titre qu'il avait été imprimé au profit de sa bellemère, infirme et très pauvre. Grâces aux soins de Rabaut Saint-Étienne et de Bailly, qui prirent le plus vif intérêt à cet ouvrage, et le firent annoncer dans les différents journaux, il se vendit, ne fut pas lu, et ne méritait pas de l'être. L'indication que portait le titre, la recommandation des deux protecteurs en favorisa le placement, qui fut considéré par les acquéreurs comme une bonne action.

En 1790 eut lieu une autre souscription, pour une tragédie intitulée Louis XII, et qui fut donnée aux Français. M. de Lafayette y était représenté sous le nom et par le personnage d'un de ses ancêtres. Mais la pièce en elle-même était si mauvaise, et tellement assaisonnée de louanges fades et nauséabondes pour le héros parisien, qu'elle n'alla pas jusqu'au bout. Ronsin, qui

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