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ROUX.

Je crois que oui. Pensée sublime; le psalmiste avait dit avant Ovide: Tu estis pulvis..... L'AVOCAT (riant).

Tu estis..... Et cet homme qui est si fier de sa noblesse, si entiché de ses titres, simple poussière comme vous l'appelez si éloquemment, n'a-t-il pas toutes les passions honteuses, les misérables concupiscences, les maladies, les ap= pétits des animaux? - Ventri subdita, comme dit Salluste.....

pas

ROUX.

Admirable!..... Subdita. L'Écriture n'aurait mieux dit; mais pensez-vous que si la France se républicanisait nous serions plus heureux; que nous autres prêtres, par exemple, nous aurions des dîmes plus grasses, un casuel plus abondant, une cave mieux fournie ; j'ai toujours entendu dire que les prêtres de Rome vivaient splendidement.

L'AVOCAT.

Un moment, mon cher abbé; point de dîmes dans une république, point de corvées, point de main-morte, ou de droits seigneuriaux.....,

la terre appartient à qui l'ouvre, à qui la ferti= lise et la fait fructifier; le paysan ne doit ses sueurs à personne; il vit de son travail comme le prêtre de l'autel; vous connaissez votre saint Paul?

ROUX.

Saint Paul parlerait autrement aujourd'hui, s'il était comme moi curé de village; si nous n'avions que l'autel pour vivre....., nous ferions une fort maigre chere...... Non splendida.... Splendida...; vous m'entendez!

L'AVOCAT.

L'état probablement se chargera de doter les prêtres, de leur assigner un revenu qui les mettra au-dessus du besoin; il sécularisera pour cela les abbayes, ouvrira les portes des couvents, s'emparera des biens du clergé, et fera mainbasse sur les richesses immenses de quelquesuns de vos prélats.

ROUX.

Oh! pour nos évéques et archevêques à cent mille livres de rentes, je vous les abandonne; car enfin, jamais saint Paul, saint Pierre, saint Lin n'ont roulé carrosse.

L'AVOCAT.

Nous les ferons marcher à pied... Ils seront citoyens d'un état libre... Libertas en tandem, libertas quam optavistis. « La voilà cette liberté, >> cette liberté objet de tous vos vœux. » Vous vous rappelez la belle harangue de Catilina à ses compagnons?

ROUX.

Pas beaucoup. Ce Salluste est trop difficile à entendre. Mais, dites-moi, aurons-nous des ar= chevêques et des évêques dans votre république?

L'AVOCAT.

Je n'en vois pas, à vous dire vrai, l'absolue nécessité, à moins que vous ne me la démontriez : Quod demonstrandum.

ROUX.

Je vous vois venir avec votre demonstrandum: nos pauvres petits curés ne trouveront pas même grâce à vos yeux.

L'AVOCAT.

Quand la serpe est attachée à un arbre, il faut qu'elle en émonde toutes les branches inutiles, Ramos compesce fluentes... Vous savez votre Virgile?...

ROUX.

Ramos inutiles... Un moment, M. l'avocat, songez donc que pour un Belzunce

que fournit l'épiscopat, nous pouvons citer, nous autres, dix Vincent de Paule.

L'AVOCAT.

Laissez-nous faire... Les grasses prébendes, les riches abbayes, les évêques, les archevêques, l'or inutile des églises, tout servira à améliorer le sort du clergé; les ministres du Seigneur jouiront d'une honnête aisance, et ne seront point à charge à leurs paroissiens. Ils mettront la poule au pot chaque jour, et auront de l'Épernay et du Sillery dans leur cave..... Bonum vinum... Vous connaissez le proverbe.

finît

ROUX.

Si je savais que votre réforme ecclésiastique par du Sillery ou de l'Épernay, ma foi je voterais libenter oụ lubenter (l'un et l'autre est latin), pour votre république... Car enfin nous portons le poids du jour, nous autres, comme dit l'Évangile,... et il faut bien que nous soyions récompensés. En nous frappant, c'est comme si on abattait ces arbres qui protégent contre les orages le toit de chaume du

pauvre.

L'AVOCAT.

Laissez-là vos arbres. Je sais bien que s'il ne tenait qu'à moi, je mettrais la main à la coignée, et j'abattrais tout d'un coup nos forêts inutiles, dont le bois servirait à nourrir nos campagnes.

ROUX.

Mais je croyais que les Romains et leurs Dieux aimaient les forêts... Est-ce Ovide ou Virgile qui les invoque dans ces maudites Bucoliques, aussi indéchiffrables pour moi que les hymnes de San= teuil, que je suis obligé chaque jour de réciter? Je n'avais point encore pris part à la con=

versation: mon tour arriva.

L'AVOCAT.

Que pense de mon utopie notre silencieux convive?

ΜΟΙ.

Ma foi, M. Chaudron, vous qui citez si ad= mirablement les anciens, je suis fâché que vous ne vous rappeliez pas ce précepte si sage de l'un de vos auteurs de prédilection: Festina lente.

ROUX.

Mon confrère a raison, lente....

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